Marseille est une ville imprévisible placée sous le signe du Bélier. C’est une ville de coups de tête et de coups de cœur. À Marseille, aucun plan, aucun sondage, aucune stratégie ne peuvent tenir la route. C’est une ville d’emballements qui va s’enticher d’untel ou d’untel sans qu’on sache pourquoi. En fait, Marseille est une ville ingouvernable qui a toujours besoin d’être contre ceux qui sont « pour » et d’être pour ceux qui sont « contre ». Elle a besoin de se frapper la tête contre le mur avant de s’assagir d’un seul coup, comme assommée. Quand Marseille s’aligne sur la capitale, elle perd son identité, elle perd son âme, elle se noie. Marseille, c’est un signe de feu, il faut que ça bouge. Finalement, le Marseillais s’en sort mieux dans la fronde et la folie furieuse, sinon il dépérit, il s’étiole.
Il n’y a jamais eu de roi et il n’y aura jamais de roi à Marseille. La seule reine souveraine de Marseille, celle qui défie les hommes, le temps et l’éternité, celle dont la silhouette dorée invite à la clémence et à la charité, celle qui fait l’unanimité de toutes les religions, de tous les partis, de tous les clans, c’est Notre-Dame-de-la-Garde, la maman du ciel dont l’éclat céleste ne finira jamais de briller au firmament de Marseille.
Pour que Marseille soit enfin « libre », pour que le peuple de Marseille se mette de nouveau à rêver d’une autre destinée, il faut que tous les successeurs potentiels de Jean-Claude Gaudin, quels qu’ils soient, quel que soit leur bord, s’affichent comme des candidats « libres », des candidats de rupture avec le « système », des candidats qui tirent définitivement le rideau… Defferre.
Je croyais en la noblesse de la politique, mais cette noblesse cette cour-là n’en a plus rien à faire car il y a bien longtemps qu’elle-même n’y croit plus. Dans ce petit monde qui donne des leçons mais n’en tire jamais aucune, la politique n’est qu’un jeu de société aux dimensions de la France…
Le handicap de Marseille, c’est l’absence de classe moyenne entre ces deux extrêmes. Or, une vraie démocratie s’appuie justement sur cette classe moyenne : des gens indépendants du clientélisme qui sont des cadres moyens autonomes. Le déficit des classes moyennes, c’est le drame de Marseille.
On ne dîne jamais impunément avec les hommes politiques. On en vient à servir d’autres mets que la politique et insidieusement, c’est le glissement progressif vers une certaine intimité. On se présente les dames, on parle des enfants, vous êtes hors-jeu. La partie n’est plus jouable…
On ne triomphe pas d’un rival, on le compromet. On n’affronte pas un adversaire, on l’achète. On ne supprime pas un obstacle, on le contourne. On n’élimine pas un abus, on transige. Tout s’arrange dans les arrière-salles. Ce n’est plus de la politique, mais du copinage.
Il est plus facile de fidéliser un petit groupe d’électeurs en leur disant par exemple que les autres, et singulièrement les étrangers, sont responsables de tout. Électoralement, ça marche.
Les journalistes politiques sont tout aussi coupables que les hommes politiques. Pour berner les Français, il faut être deux. Le leurre ne fonctionne qu’en couple.
Les politiciens croient pouvoir agir en « off », cette règle qui leur permettait naguère de faire des confidences aux journalistes dans la mesure où ceux-ci se garderaient bien de les divulguer. C’est au nom de cette règle qu’on cache souvent aux citoyens le vrai visage de la politique.