Karen Hawkins

« — Dahlia a été en extase quand elle a vu ma bibliothèque. Elle n’arrivait plus à s’en éloigner. Elle s’est mise à me rendre visite régulièrement, et nous parlions des livres qu’elle venait de lire. Une fois, je l’ai convaincue de se mettre au pianoforte que j’avais fait venir de France en cadeau de mariage pour Elspeth. Dahlia est extrêmement douée.
— Elle m’a l’air parfaite.
— Elle le sera. Elle est agréable à regarder, elle aime les livres, elle déteste parler pour ne rien dire, et elle peut rester des heures à lire en silence… Elle fera une bonne épouse, acheva-t-il avec conviction.
— Une bonne épouse ? répéta Charlotte. C’est tout ce que vous espérez d’elle ?
Kirk soutint son regard, mais rougit légèrement.
— Cela suffit.
Il y avait dans sa voix une note d’obstination qui laissa Margaret perplexe. »

Journal de la duchesse de Roxburghe

Depuis que, sous mon toit, Mlle Rose Balfour, ma filleule, a rencontré et épousé mon petit-neveu, le comte de Sinclair, on murmure que je suis la première des marieuses - la Championne des Idylles, la Spécialiste de la Séduction et (ce que je préfère) la Duchesse des Cœurs. Le ridicule de ces titres ne m'a pas échappé, car je n'ai pas eu grand chose a faire en ce qui concerne l'histoire d'amour entre Sin et Rose ; elle a surgi d'elle-même et s'est déroulée avec très peu d'aide de ma part. Je ne suis intervenue que quand cela s'est révélé nécessaire.
Ceux qui me connaissent savent que je ne me mêle jamais des affaires d'autrui, sauf si l'on m'appelle a l'aide d'une façon qu'il m'est impossible d'ignorer.
par exemple prenez la sœur de Rose, la ravissante Lily Balfour. Si jamais une femme a eu besoin d'un mari, c'est bien elle, et je suis convaincu qu'elle appelle a l'aide en son for intérieur mais qu'elle est trop fière pour le faire a haute voix. Heureusement, je ne suis pas sourde a ses prières silencieuses, et je n'aurai de cesse qu'elle accepte l'une des nombreuses invitations que je me lasse pas de lui envoyer. Jusqu’à présent, cependant, toutes ont été poliment déclinées.
Néanmoins, je ne renoncerai pas, car je suis sur qu'il doit y avoir un moyen d'aider cette pauvre fille.

Les hommes croient qu'ils aiment les défis. La vérité, c'est qu'ils n'aiment que ceux qu'ils remportent.

- Aimer quelqu'un n'exige pas d'être toujours poli. Parfois, cela exige de lui dire la vérité, que cette personne ait envie de l'entendre ou non.

Elle s’interrompit, le temps d’inspirer à fond.
— Lord Kirk a dit qu’il désirait m’épouser malgré mon manque de culture et bien que ma famille ne soit pas du rang auquel sa lignée le destinait.
Kirk dut réprimer un cri de colère. La façon dont elle racontait l’histoire le faisait passer pour un véritable goujat.
— Ce n’est pas ce que j’ai dit.
— Oh ? Qu’avez-vous dit alors ? s’enquit-elle avec virulence.
Trois paires d’yeux accusateurs se posèrent sur lui.
— Je n’ai dit que la vérité. À savoir qu’en dépit du fait que vous ayez mené une vie très protégée – ce qui est le cas – et que vous soyez donc très ignorante dans beaucoup de domaines – ce que vous êtes – et bien que votre famille ne puisse se targuer d’avoir des relations importantes – ce que vous devez admettre –, je souhaitais néanmoins vous épouser.

Aimer quelqu'un n'exige pas d'être toujours poli. Parfois, cela exige de lui dire la vérité, que cette personne ait envie de l'entendre ou non. Je voulais justement te dire quelque chose : je trouve que tu es devenu un peu arrogant.

- Une situation financière, une position sociale élevée, et un mari fou d'elle et prêt à satisfaire tous ses caprices. Que pourrait-elle demander de plus?
- La jeunesse, peut-être. La vigueur. Des dents.

« — Toutes les femmes adorent Byron. Je l’ai constaté à maintes reprises sans jamais comprendre ce qu’elles lui trouvent.
— C’est parce que les hommes n’ont pas d’âme, répliqua Anne avec vivacité.
Il parut blessé.
— J’ai bien une âme, mais elle n’est pas du genre larmoyant.
— Ah, vous, vous êtes frivole. Vous ne vous souciez que de savoir si vos bottes sont bien cirées. Vous me l’avez dit vous-même l’autre jour.
— Je n’ai pas dit que c’était mon seul souci, protesta-t-il. Avoir des bottes bien cirées est certes important pour un gentleman, mais ce n’est pas tout.
— Oh ? Qu’y a-t-il d’autre ?
— Il y a aussi l’amidonnage de la cravate, dit-il en éclatant de rire.
— Ah, frivole ! Je le savais. »

Empruntant une allée plus large, ils arrivèrent à une petite clairière ornée d’un bassin au centre duquel une statue d’Aphrodite versait l’eau d’une amphore. Un Cupidon grassouillet jouait à ses pieds. Des nénuphars flottaient sur la surface de l’eau, dans laquelle les lanternes de papier se reflétaient telles des étoiles colorées.
— C’est splendide, dit Rose.
L’endroit parfait pour mon premier baiser.
Une lanterne rouge jetait une lueur séduisante sur le visage du comte, dont les mains enlacèrent la jeune fille pour l’attirer à lui.
Incroyable ! C’est exactement comme dans mes rêves. Le cœur battant, elle posa les mains sur sa poitrine et leva son visage vers le sien. Oscillant doucement sous l’effet du champagne, elle ferma les yeux et lui offrit ses lèvres.
Sin resserra son étreinte. Et dire qu’il avait failli quitter le bal ! s’étonna-t-il. Ce petit bout de fille l’embrasait de désir. Déterminé à la séduire, il s’inclina et ravit sa bouche, asticotant ses lèvres jusqu’à ce qu’elles s’écartent, puis passant la langue sur ses dents. Elle lâcha un petit râle et se tortilla contre lui.
Y voyant une invite impudique, il grogna de soulagement. Il n’avait pas besoin d’autre encouragement. Plaquant les mains sur les fesses de Rose, il l’attira contre son bas-ventre, histoire de lui montrer quel effet elle lui faisait…
Les yeux de Rose se rouvrirent. Durant une fraction de seconde, ils se regardèrent. Puis, avec un petit cri d’effroi, elle le repoussa de toutes ses forces.
Sin recula en chancelant, ses mollets heurtèrent le rebord du bassin, et il bascula dans l’eau avec un grand bruit d’éclaboussement.

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Mon oncle disait que le regret est une épice amère qu'il vaut mieux servir avec du pain chaud. Je n'ai aucune idée de ce que cela signifie, mais chaque fois que j'ai répété cet aphorisme, mon interlocuteur a paru frappé, comme si j'avais lâché quelque chose de profond et de pragmatique à la fois.