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Citations de Kristín Marja Baldursdóttir (49)


Linge étendu au lever du soleil, 1924 huile sur toile

Le soleil émerge de la mer.
La surface de l'océan est rouge acajou.
Le ciel violet foncé.
Les deux couleurs s'illuminent, si lentement que nous ne le percevons pas, mais nous sentons combien notre esprit devient de plus en plus clair à chaque minute, jusqu'à ce qu'il nous abandonne, aspiré par un rayon qui s'est formé sur la mer étale, se précipite à une vitesse vertigineuse dans cette boule d'or rouge en fusion.
Le bonheur emplit nos coeurs.
(...) Le matin est doux et délicieux.
Puis le soleil se lève, majestueux, comme un prince de conte de fées qui s'éveille d'un enchantement.
Le fjord et les montagnes deviennent des pierres précieuses.
Nous sommes comme hypnotisés, osons à peine respirer tant que se déroule ce somptueux spectacle de création du monde.
Enfin je bouge la tête, regarde la campagne vers l'intérieur du fjord, vois la citadelle des elfes flamboyer, notre maison orange près de l'estuaire et mon linge sur les fils, jaune doré et enjoué.
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La matinée est bien avancée. La lumière ensommeillée se glisse par la fenêtre à l'est, paresseuse au plus sombre de l'obscurité hivernale. Je suis seule dans la petite chambre. Ecoute, n'entends rien d'autre que les cris des oiseaux de mer. J'ai le sentiment d'être abandonnée. Me lève en sursaut, me précipite en chemise de nuit dans la cour herbeuse. L'océan s'ouvre devant moi aussi loin que porte le regard.
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L'art ne demande jamais où en est le temps.
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Les mères n’inventent jamais d’histoires, par contre la vie, elle, est un pur mensonge.
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Nous nous serrons les coudes, dit lentement Steinunn en appuyant sur ses mots lorsque la photographie eut été encadrée et accrochée au mur, et souvenez-vous toujours de vous soutenir les uns les autres dans la bataille de la vie, c'est notre devoir de nous entraider, c'est ainsi qu'ont prospéré les familles en Islande et c'est pourquoi la nature n'a pas pu venir à bout de nous. Nous luttons, nous, les Islandais, nous luttons.
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Elle se délectait de parler islandais, s'appliquait soigneusement à chaque mot avec une expression de satisfaction sur le visage et les bonnes choses coulaient à flots dans la cuisine comme les mots de sa bouche, biscuits de flocons d'avoine, petits pains enroulés à la farine, le tout fait maison, mouton fumé froid, pâté, fromage de tête, poisson séché, fromage de petit-lait sans oublier le café. En fait on peut difficilement appeler ça une ferme, dit-elle tout à son occupation, je n'ai pas une seule bête sinon le chat et quelques poules, mais j'ai un carré de pommes de terre et un potager, pêche la truite dans les lacs ici au-dessus, achète de la viande d'agneau de l'été au fermier de la propriété voisine, fait du boudin de sang et de la saucisse de foie que je mets à conserver dans le petit-lait, la nourriture sure islandaise est la meilleure chose que j'aie ici, puis je sale la viande dans un tonneau, je me fais souvent du mouton salé le dimanche, ça me rappelle l'Eisbein, le jarret de porc allemand à l'os, et puis je me procure quelque fois du poisson frais, du fromage blanc liquide et de la crème fraîche à Borganes, j'y suis allée pour la dernière fois maintenant avant Noël, mais en règle générale je ne bois pas de lait aussi ça n'a pas d'importance de ne pas avoir de vaches. En dehors de ça je descends jusqu'à Reykjavik en voiture au printemps et à l'automne, vais à la banque et achète livres et denrées alimentaires. J'ai lu toutes les sagas islandaises depuis que je suis venue ici et presque tous les romans des écrivains contemporains, de fait j'ai une fort bonne bibliothèque comme vous voyez, ce qui me manque le plus peut-être est de n'avoir personne pour parler de ces histoires. Et puis j'ai un peu étudié les plantes et les oiseaux ici, je tiens de bons rapports sur ces derniers. Le rare phalarope à bec large était là-haut sur un lac l'été dernier, c'est mon favori.
Mais ne te sens-tu jamais seule? plaçai-je lorsqu'elle fit une pause.
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Le soleil du matin tout juste réveillé chatouillait les sommets en dessous d'elles, il y avait de la brume sur la plaine côtière. Karitas n'avait jamais vu les montagnes par en dessus auparavant, elle eut le souffle coupé. Alors c'est comme ça qu'elles sont du dessus? dit-elle dans son étonnement et Auour hocha la tête, radieuse: oui, elles ne sont pas merveilleuses, mes montagnes? Karitas était en train de réaliser qu'elle se trouvait sur le plus haut sommet du pays, qu'elle était arrivée là toute seule et sans assistance, si courageuse et ne se tint plus, de joie elle serra Auour dans ses bras: tu te rends compte, je suis là, tout en haut! Elles rirent. Puis la beauté les rendit solennelles. Je crois que nous sommes à peu près vers douze cents mètres d'altitude, dit Auour. C'est bon de laisser courir son regard sur sa vie ici, en haut. La faire défiler dans son esprit, en retirer meilleur et le garder, prendre le pire et le jeter. Ne te la rappelles-tu pas un seul instant? Karitas regarda les sommets montagneux, aussi bien plats que pointus, chacun d'eux symbolisant un chapitre de sa vie, elle se les rappelait tous lui sembla-t-il, sauf peut-être un, il y avait un chapitre dont elle ne se souvenait pas. Je me souviens de tout sauf des jours qui ont précédé mon arrivée ici dans l'Oraefi, dit-elle, je ne me rappelle pas non plus le voyage en bateau jusqu'à Hornarfjorour ni le passage des eaux glaciaires. Ce furent de mauvais jours.
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Tes tableaux que j'ai vus sont assurément un peu bizarres mais il y a en eux comme une magie que l'on ne peut s'expliquer. Peut-être le meilleur art est celui qu'on ne comprend pas.
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Les montagnes à l'ouest s'offrirent à mes yeux lorsque je fus arrivée au sommet de la paroi de rochers et moi qui n'avais jamais été fascinée par les montagnes, je fus émue aux larmes. Elles étaient si paisibles et majestueuses dans le soleil du soir. A l'est je vis le glacier de Langjökull, au sud la barre de haute lande de Skarö, l'immensité me posséda toute entière, je sentais se ramifier en moi ce profond sentiment de liberté qui ne se trouvait nulle part ailleurs que dans ce pays. Et je compris alors la cohérence. Compris pourquoi les Islandaises étaient poussées en avant vers la liberté, je compris pourquoi elles ne laissaient pas la banquise entraver leur route, la terre d'ici les avait dotées de cette liberté à leur naissance. On n'échappe pas à son destin. En montant vers le haut prolongement escarpé de la montagne avec le chat sur mes talons je pensais aux femmes qui devaient cacher leurs cheveux et leur visage pour satisfaire le patriarcat, je me rendis pleinement compte de leur soumission et de leur obéissance. Comment est-il possible de se battre pour la liberté lorsque la liberté n'est pas déjà dans la poitrine?
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Seules les filles connaissent les deux côtés de leur mère. Les mères épargnent à leurs fils leur pire côté.
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Après une rotation de hareng discontinue de vingt-quatre-heures elles rejoignirent le baraquement en chancelant, suppliant Dieu de leur accorder mauvais temps en mer même s'il leur coûtait de l'argent, se laissèrent tomber dans leurs couchettes, s'endormirent pendant qu'elles enlevaient leurs vêtements sales. Le hareng dansait devant les yeux de Karitas, les tonneaux, les bacs en bois, les couvercles, les gens, la foule, et cet homme, encore et sans fin, cet homme, elle modelait tout dans son esprit afin de pouvoir esquisser sur le papier, un jour ou l'autre, en privé, lorsqu'elle retrouverait la souplesse de ses mains. Ses mains si misérables, rouges du plancton des tripes du hareng, elle s'inquiétait pour elles, et l'odeur avait pénétré jusqu'à l'os.
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Le chaos arrive, il est tout au fond de moi, il viendra lorsque j'aurai pu peindre longtemps en étant seule avec moi-même.
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L'enfant se réveille en pleine nuit en sanglotant, elle soutient qu'un méchant bonhomme la suivait et voulait la jeter dans un trou.
Je dois poser mes couleurs, me glisser près d'elle sous la couette, la tenir serrée fort contre moi pendant qu'elle se rendort. Le petit corps est rouge de chaleur, nous ne sommes pas encore habituées à la douceur du printemps, aux jours de mai ainsi calmes et chauds, à la moiteur qui recouvre l'atelier jusque tard dans la nuit. J'embrasse ses mains potelées brûlantes, pense au printemps froid chez nous en Islande. Verse des larmes quand je me souviens des lumineuses nuits d'été, de l'immensité, je revois l'océan et les montagnes, les cairns solitaires sur la lande de bruyère, entends le courlis cendré pousser son long sifflement ondulé dans le calme profond, le pluvier dorré lancer son appel mélancolique, la bécassine des marais chevroter dans l'air, je bride des chevaux dans un pré, chevauche à toute allure en remontant le fjord, suis incapable de travailler à cause du mal du pays.
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En Islande, personne ne meurt qui travaille.
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La pluie enserre la maison dans ses bras, les vitres pleurent.
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Les carreaux de faïence noirs et blancs de l'élégante salle de bain de mon frère Olafur me font penser aux jours dans ma vie. Aux jours clairs, quand je peignais du matin au soir, aux jours sombres quand je ne pouvais pas peindre. Il n'y avait pas d'autres jours dans ma vie. Je ne trouvais jamais de bonheur profond ailleurs que dans mes oeuvres, lorsque tout allait bien, lorsque les formes et les couleurs s'unissaient comme un couple amoureux, lorsque l'imagination gouvernait le pinceau, alors ils ne pouvaient pas entrer, le temps et la mort, ces frère et soeur magnifiques.
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Après le jour de l'an, la famille fut contrainte de rester au fond du lit.
Le froid l'y poussa. Une énorme patte glaciaire venue du Nord avait posé ses griffes sur la ville, s'était ruée sur le pays comme une bête sauvage avec un gel et un blizzard tels que la terre gémit. Lorsque le vent se calma quelque peu, elle se coucha comme un jupon blanc sur les hanches du fjord et ferma les voies maritimes.
La banquise, encore une fois, dit Steinunn avec une profonde lassitude.
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Elle mourait d'envie de parler, les mots se bagarraient en elle les uns avec les autres, mais elle ne flancha pas, il pouvait bien dire quelque chose, l'homme, puisque c'était lui qui l'avait emportée comme un cheval fougueux là-haut sur le coteau.
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Tu partiras vers l'art. Il t'a appelée. Ce sera un long voyage, et sur ta route se trouveront trolls et embûches. Et lorsqu'enfin tu atteindras la montagne bleutée qui s'élève, magnifique, au milieu des autres massifs bleu-noir, tout se refermera derrière toi et tu seras prisonnière à vie. Mais cette captivité t'apportera souvent plus de bonheur que la liberté.
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Comme il y a du mouvement en moi. Une petite braise qui attend qu'on l'enflamme. Ce ne sont pas les grands événements qui changent le monde, mais les petites choses de tous les jours et les mots non dits.
Je peins jusqu'au matin termine le tableau. Je l'avais peint dans ma tête avant de me mettre à l'oeuvre.
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