Pour les historiens russes (c’est étrange et terrible à dire), Napoléon, cet insignifiant instrument de l’histoire, qui nulle part, jamais, pas même en exil, n’a fait preuve de dignité humaine, Napoléon est un objet d’admiration et d’enthousiasme; il est ‘’grand’’. Mais Koutouzov, cet homme qui du début à la fin de son activité en 1812, depuis Borodino et jusqu’à Vilna, s’est toujours montré fidèle à lui-même dans ses actes et ses paroles, a laissé un exemple exceptionnel dans l’histoire d’abnégation et de prescience du sens des événements que découvrira l’avenir, Koutouzov n’est pour ces historiens qu’un personnage inconsistant, pitoyable, et parlant de Koutouzov et de l’an 12, ils ont toujours, semble-t-il, un peu honte.