Citations de Manon Fargetton (692)
En comprenant que la plupart de ceux qui t'ont fait du mal sont victimes de la société dans laquelle ils évoluent. Ca n'excuse pas leurs actes. Ce que tu as vécu est horrible et jamais je ne te dirai de leur pardonner, ou je ne sais quelle autre connerie de ce genre qu'assènent les esprits bien-pensants qui n'ont aucune idée des images qui nous hantent. Mais les hommes qui m'ont lapidée étaient dans leur bon droit, selon les lois de ma terre, et des femmes ont participé à mon supplice. De même, tu étais esclave, ta volonté n'entrait pas en ligne de compte dans l'empire de Mélionor. Ce sont ces lois qu'il faut changer, Bleue. La plupart des hommes et des femmes évolueront avec elles. Quant aux autres, nous aurons les armes pour les mettre hors d'état de nuire.
Et si un autre monde était réellement possible ? Que n'aurait-elle pas donné pour pouvoir faire ce qu'elle voulait de sa vie ! Ainsi, il y avait eu une autre société dans le passé, mais elle avait disparu... C'est donc qu'elle devait être mauvaise, non ? Ou en tout cas pas meilleure que la nôtre...
- Je ne pensais pas qu’il était si évident de deviner que je vais mal. Tu ne me connais pas et tu l’as vu direct. Merci de m’en avoir fait prendre conscience.
Je hausse les épaules.
- Qu’est-ce que tu vas faire ? Tu habites loin ?
- Trois stations de métro. Je vais rentrer et… appeler ma mère, j’imagine.
- Vous êtes proches ?
- Non. Mais, c’est ma mère. C’est la seule personne au monde à qui je peux avouer la merde totale qu’est ma vie, qui me jugera, comme d’hab, et qui continuera de m’aimer malgré tout en m’aidant du mieux qu’elle peut.
Son aveu m’arrache un sourire doux-amer. Je donnerais tout ce que je possède pour pouvoir appeler ma mère.
Ce qu'ils allaient à présent accomplir reposait sur des hypothèses mais, après tout, les hypothèses d'un dieu millénaire étaient sûrement plus dignes de confiance que la plus profonde certitude d'un mortel.
Ils ne sont pas si différents de nous, ces cons de robots, remarqua amèrement Kléano. Ils exécutent sans broncher ce qu'on leur ordonne de faire !
Ravenn soutint le regard de son père avec indifférence.
- Nos sujets te croient morte.
- Ils n'ont pas vu mon corps.
- Ils ont vu un corps. Ils n'accepteront jamais ton retour.
- Puisque vous en êtes si sûr, sourit Ravenn, vous n'avez rien à craindre. Mais après le règne des Rois-Passeurs et celui des Rois-Magiciens, le couronnement d'une Reine-Fantôme ne me semble pas si exotique.
Il est des heures de l’Histoire dont tous se souviennent et dont les hommes parlent encore avec la même émotion bien des lunes plus tard, de ces heures que l’on évoque autour des feux de bois, à demi-mot, et qui restent partiellement incompréhensibles à ceux qui ne les ont pas vécues.
Je suis ce que je vais devenir.
Je suis loin d'avoir compris qui je suis et j'espère que je ne le saurai jamais tout à fait.
C’est drôle, l’existence. Quand on est jeune, on croit qu’on ne tombera pas dans ses pièges, qu’on fera mieux que ses parents, mieux que tout le monde. On a tout prévu. On n’imagine pas que des galères peuvent nous tomber dessus — ça n’arrive qu’aux autres — et on attend de l’univers qu’il se plie à nos désirs. Jusqu’au jour où on comprend que les autres, ça peut aussi être nous. Et alors, tout change.
Je n’avais jamais remarqué qu’il y avait tant de clochards. Mais la nuit, comme ça, sans le brouillard que crée autour d’eux le flot des passants, on ne peut plus faire semblant de ne pas les voir.
Elouane était taillé pour la liberté et l’indépendance. Tout ce à quoi une reine ne pouvait prétendre.
Là d’où elle venait, Lïam aurait étudié dans les meilleurs écoles, auprès des meilleurs professeurs, et de brillantes carrières se seraient ouvertes à lui. Mais il vivait au bout du monde et, ici, ses qualités intellectuelles avaient peu d’utilité. Certains hommes ne naissent simplement pas au bon endroit.
Ça doit être ça, l'amour. Quelqu'un qui se glisse dans le vide et prend toute la place.
Les filles m'ont appris à ne pas avoir honte des larmes. Il faut laisser sortir la peine, sinon elle te mange en dedans et la douleur finit par te grignoter.
Charly s'était cru faible - et il l'était, d'une certaine manière, car si on lui avait demandé où se trouvait Énora au cours d'une simple discussion entre gens civilisés, il aurait été du genre à ne pas se méfier et à divulguer trop d'éléments sans s'en rendre compte. Ils auraient pu anesthésier sa méfiance par la politesse et l'humour. Mais ils avaient commis l'erreur d'utiliser la torture, qui ne laissait aucun doute quant aux intentions des prêtres: ils voulaient du mal à Énora. Et menacer les gens que Charly aimait était la meilleure manière de lui faire supporter la plus atroce des douleurs.
Parce qu'on est beaucoup plus que ce qu'on montre aux autres. Bien plus que ce qu'on imagine nous-même. En dedans, on est des milliers de possibilités, Alix en est persuadée. On peut être n'importe qui, accomplir n'importe quoi, réagir de centaines de manières différentes aux situations que l'on vit. Il suffit d'oser. D'essayer.
Qu'est-ce que c'est, être adulte ? Ne plus avoir besoin des autres ? Ne plus avoir besoin de la validation des autres ? Partir de là où on a grandi ? Voter, conduire, faire sa propre lessive ? Une date sur le calendrier, un anniversaire, juste un jour de plus et hop, le grand saut ? Un peu tout ça, ou rien de tout ça peut-être. Être adulte, Alix ne sait pas ce que c'est. Et elle a souvent l'impression que les adultes eux-mêmes l'ignorent.
Les beaux quartiers parisiens ne sont beaux que de l'extérieur.
— C’est l’heure ? murmura Brahim.
Elle acquiesce. De violents sanglots la traversent soudain, secouent ses épaules, inondent ses joues. En silence, Brahim pose une main en haut de son dos. Que pourrait-il dire ? Aucun mot ne peut adoucir la peine de quelqu’un qui sait ses parents en train de mourir de l’autre côté de la planète. Alors, Brahim se contente de cette main, ce contact amical, comme pour lui montrer qu’elle n’est pas seule et que, s’il pouvait porter ce deuil à sa place, l’en décharger ne serait-ce qu’un petit peu, il n’hésiterait pas. Il est comme ça, Brahim. Il aimerait que tout le monde soit heureux. Il aimerait absorber les douleurs, être un aspivenin géant, un aimant à merde, pour ne laisser aux autres que le beau, le tendre, le passionné. Ce n’est pas possible, bien sûr. Ce qui ne l’empêche pas d’essayer.
Au bout d’une heure, les pleurs de Lili-Ann se tarissent, sa respiration saccadée s’apaise peu à peu. [...]
— Merci, chuchote-t-elle.
– Tu vises où ? demande-t-il.
Non mais c’est quoi ce mec ? Il est taré ! Il voit une fille sur le point de se foutre en l’air, et tout ce qu’il trouve à demander, c’est quel endroit elle vise ?