AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de paraty62


Le jour de ma mort commença mal et empira dans la foulée.

Comme j’avais un peu trop appuyé sur le bouton de rappel de mon réveil, je fus en retard au boulot. Après tout, qui ne serait pas tenté par neuf minutes de plus de sommeil ? Personne. C’est la raison pour laquelle je me réveille pratiquement toujours en retard. Stupide bouton de rappel !Pas le temps de prendre mon petit déjeuner. Du coup, j’engloutis deux barres de céréales au chocolat en attendant le bus. Miam-miam… du chocolat ! Ma mère aurait approuvé (de qui pensez-vous que je tienne cette satanée dépendance ?), mais un nutritionniste m’aurait assommée avec sa bible des calories.Le bus était, bien évidemment, en retard. Les transports en commun du Minnesota sont fabuleux ! Six bus pour une zone de deux cent cinquante mille habitants. Lorsqu’ils ne sont pas en retard, ils sont en avance. J’ai cessé de compter le nombre de fois où je suis sortie de chez moi juste à temps pour le voir disparaître au coin de la rue. Des horaires ? Quels horaires ?Lorsqu’il arriva enfin, en retard comme toujours, je montai à l’intérieur pour m’asseoir… sur du chewing-gum ! À la réunion de 9 heures (à laquelle je me pointai à 9 h 20), j’appris que la récession (celle-là même dont les économistes avaient refusé d’admettre l’existence pendant des années) m’avait touchée entre les deux yeux : on m’avait virée. Ce n’était pas inattendu (les derniers profits de ces chers vieux Hamton et Fils remontaient à mes années de lycée), mais ça faisait mal. Perdre son boulot est la pire chose qu’il puisse vous arriver. Parce que ça veut dire qu’on ne veut pas de vous. Peu importe que les raisons soient personnelles, financières ou même pratiques. On ne veut pas de vous, point final. Après s’être rendu compte environ un an trop tard qu’ils devaient réduire leurs dépenses, Hamton et Fils avaient décidé que la solution à leur problème était de licencier le service administratif, et non pas, par exemple, de baisser les salaires à cinq zéros des cadres supérieurs : ainsi, les employés de bureau et les secrétaires n’avaient pas été jugés indispensables. Mais nous aurions notre revanche ! Sans nous, ces imbéciles n’auraient même pas été capables d’envoyer un fax, et encore moins de diriger une entreprise.
Sur cette pensée agréable, je vidai mon bureau en faisant semblant de ne pas remarquer les regards fuyants de mes collègues. Puis, je me dépêchai de rentrer chez moi, non sans m’autoriser un détour par le Dairy Queen pour commander un milk-shake à la myrtille. Rouges-gorges, herbe fraîche, réouverture saisonnière du Dairy Queen… Aucun doute : le printemps était bien là ! Alors que je franchissais le pas de ma porte, paille à la bouche, je m’aperçus que le témoin lumineux de mon répondeur me faisait de l’œil, comme l’aurait fait un petit dragon noir. C’était un message de ma belle-monstre et, à en croire le raffut en bruit de fond, elle appelait du salon de beauté :

— Ton père et moi, nous ne pourrons pas venir à ta fête ce soir… J’ai commencé un nouveau traitement et je… On ne peut pas. C’est tout. Désolée. (Bien sûr, comme si j’allais croire ça ! Sale garce !) Amuse-toi sans nous ! (Aucun problème.) Peut-être que tu rencontreras quelqu’un ce soir…
Traduction : peut-être qu’un bon à rien acceptera de t’épouser.
Depuis notre première rencontre, ma belle-monstre ne m’avait jamais considérée que d’une seule façon : une rivale à l’affection de son nouveau mari. Pire, elle n’hésitait pas à jouer la carte de la dépression pour ne pas participer à ce qui me tenait à cœur. Cela avait cessé de me tracasser une semaine après notre rencontre, je supposai donc que c’était aussi bien ainsi. Comme j’allais à la cuisine pour nourrir ma chatte, je me rendis compte qu’elle s’était encore échappée. Ah ! Ma Giselle (enfin, je suis plutôt sa Betsy à elle) ! Toujours en quête de nouvelles aventures ! Je jetai un coup d’œil à l’horloge. Oh ! là, là ! Même pas encore midi ! Bon, il ne me restait plus qu’à faire la lessive et à pleurer toutes les larmes de mon corps, et la journée serait parfaite !

Joyeux anniversaire moi-même !
Commenter  J’apprécie          60





Ont apprécié cette citation (4)voir plus




{* *}