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Citation de enkidu_


...ainsi, dans l'histoire des religions, trouvait son point final ce vaste processus de « désenchantement » [Entzauberung] du monde qui avait débuté avec les prophéties du judaïsme ancien et qui, de concert avec la pensée scientifique grecque, rejetait tous les moyens magiques d'atteindre au salut comme autant de superstitions et de sacrilèges. Le puritain authentique allait jusqu'à rejeter tout soupçon de cérémonie religieuse au bord de la tombe; il enterrait ses proches sans chant ni musique, afin que ne risquât de transparaître aucune « superstition », aucun crédit en l'efficacité salutaire de pratiques magico-sacramentelles.

Nul moyen magique - voire nul moyen, quel qu'il soit - de procurer la grâce à qui Dieu avait décidé de la refuser. Combiné avec la dure doctrine de la transcendance absolue de Dieu [Gottferne] et de la futilité de tout ce qui est de l'ordre de la chair, cet isolement intime de l'homme constitue, d'une part, le fondement de l'attitude radicalement négative du puritanisme à l'égard de toute espèce d'élément sensuel ou émotionnel dans la culture et la religion Subjective (éléments considérés comme inutiles au salut et suscitant illusions sentimentales et Superstitions idolâtres); et par là il élimina toute possibilité d'une culture des sens [Sinnenhultur].

Mais, d'autre part, il constitue l'une des racines de cet individualisme pessimiste, sans illusion, qui se manifeste de nos jours encore dans le caractère national et les institutions des peuples qui ont un passé puritain; le contraste est frappant avec la façon dont la philosophie des Lumières, plus tard, a vu l'humanité.

A l'époque, nous retrouvons les traces de l'influence de la doctrine de la prédestination sur la conduite individuelle et la conception de la vie là même où, en tant que dogme, elle était sur le déclin : en fait, il ne s'agissait alors que de la forme la plus extrême de cette exclusive confiance en Dieu, ce qui nous intéresse ici. A titre d'exemple elle se manifeste, notamment dans la littérature puritaine anglaise, par une fréquence remarquable des mises en garde contre la foi en l'entraide, en l'amitié humaines. Le doux Baxter lui-même conseille de se méfier de l'ami le plus proche, et Bailey recommande en propres termes de ne se fier à personne, de ne rien confier qui soit compromettant. Un seul confident possible : Dieu. En opposition évidente avec le luthéranisme, cette attitude envers la vie était liée dans toutes les contrées où s'épanouissait le calvinisme à l'élimination discrète de la confession privée; cependant, les scrupules de Calvin lui-même à ce sujet n'avaient trait qu'aux possibilités de mésinterprétation du sacrement. (chapitre II, 1°, A. Le calvinisme)
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