Dans son dernier film, Laurent Cantet s'inspire de l'affaire de l'auteur et chroniqueur Mehdi Meklat, qui se retrouve au coeur d'une violente polémique pour avoir tweeté, quand il avait la vingtaine, des propos injurieux, racistes ou encore misogynes et homophobes pendant plusieurs années sous le pseudonyme de Marcelin Deschamps.
À travers "Arthur Rambo", le réalisateur, qui a reçu la Palme d'or en 2008 pour "Entre les murs", s'interroge sur son époque et sur les réseaux sociaux. Ce film raconte notre époque à travers une histoire individuelle d'ascension rapide et de chute brutale. Et pose, parmi de nombreuses questions, celle-ci : les réseaux sociaux facilitent-ils les discours marqués par l'esbroufe et la haine, les postures narcissiques et les velléités d'insolence au risque de la confusion ?
Laurent Cantet, réalisateur et scénariste, et Mathieu Marmouget, ancien directeur général de Konbini et directeur du Mouv', étaient les invités des Matins de France Culture le 2 février 2022.
#ArthurRambo #MehdiMeklat #Cinéma
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Je ne sais pas si je suis un enfant perdu. D'ailleurs, je ne sais pas ce que ça veut dire, se perdre. Est-ce que se perdre, c'est se retrouver? Est-ce que se perdre, c'est s'éloigner de soi ou des autres? Est-ce que se perdre, c'est fuir sa vie? J'ai toujours cherché mon chemin. J'ai souvent trouvé de belles routes; j'ai arpenté les forêts, mais j'ai vu la lumière au bout des arbres. Je ne sais pas si je suis un enfant perdu. J'ai sans doute eu de la chance. J'ai souvent su où il fallait tourner, peut-être parce qu'on me l'avait dit. Peut-être parce qu'on a su m'indiquer le sens de la marche. Peut-être parce que j'ai su écouter. J'ai su avancer, malgré les vents contraires, malgré les marées. Malgré les embûches, vous savez comment c'est.
Je ne sais pas si je suis un enfant perdu. Mais je crois savoir ce qu'est un enfant perdu. C'est un gars dont on a bien voulu et qu'on a abandonné soudainement. A qui on n'a pas donné sa chance jusqu'au bout, sous prétexte qu'il n'en avait aucune. La France a su créer ses propres ombres. Des gars qui deviennent fidèles aux forces obscures, parce qu'on n'a pas su les emmener vers la lumière. Vers la beauté. Parce qu'on n'a pas su les emmener vers la vie, alors ils sont allés vers la mort.
Un cirque, c'est un rêve nomade. Autant dire que notre époque n'est pas au cirque, parce que ce n'est pas celle du rêve. Notre époque est aux jours tristes. Aux coeurs en miettes. Aux travailleurs qui se débattent comme ils peuvent. Le cirque ravive la flamme de notre temps. De la magie, dans un monde trop sale.
Ma mission, si je l'acceptais, c'était de suivre et d'accompagner les chômeurs dans leur recherche d'emploi. On m'avait dit, tu verras, le lien est fort entre le client et la conseillère. Je devais les suivre et les accompagner, sans connaitre le chemin. De toute façon, il n'y en avait pas. Je devais les suivre et les accompagner au fond du trou. Prendre leurs mains, les attirer nulle part, les laisser au bord de la falaise et les pousser. Ils étaient déjà morts, mais il fallait les tuer un peu plus.
On a tendance à dire que le travail, c'est la santé. Le travail, c'est la vie, c'est se réveiller au moment où la radio s'enclenche, c'est une forme de dépaysement, c'est une autre vie, qui n'est pas celle de la maison, ni celle de la famille. Le travail, c'est respirer, pour construire à la chaîne ou créer des possibilités. Mon travail, à Pole emploi, c'est apaiser. Apaiser les peaux déchirées, les coeurs, tout ce bordel.