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Critiques de Michaïl Lermontov (59)
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Un héros de notre temps

"Ah ! quel ennui que de vivre ! et on vit tout de même... par curiosité. On attend quelque chose de nouveau... C'est ridicule et absurde !"



Je me souviens encore du "camarade professeur", tonnant devant le tableau noir. Il soutenait que Petchorine, le héros de ce livre, était un personnage tout à fait condamnable, l'image même d'une vie immorale, un lâche incapable de s'intégrer correctement dans la société. Et on écoutait, et ensuite on recopiait tout cela comme des ânes dans nos rédactions, parce que personne n'avait vraiment envie de lire le livre. En tant que héros de "notre" temps, celui de la "normalisation" de la fin des années 80 en ex-Tchécoslovaquie, le blasé cynique Petchorine a lamentablement failli.

Quelques années plus tard j'ai découvert la poésie de Lermontov. Elle m'a fait plus ou moins réviser l'étiquette de "l'homme inutile", que l'on collait alors systématiquement à tous les héros "byroniens" ; à tous ces individualistes poussés sans cesse par l'envie de "partir ailleurs", dégoûtés et fatigués par la société dans laquelle ils vivent. Et maintenant, après la lecture d'"Un héros de notre temps", je me rends compte une fois de plus à quel point on peut facilement se laisser convaincre par l'opinion d'un tiers, simplement parce qu'on est trop paresseux pour vérifier les faits.



Contrairement à mon camarade prof, j'étais enchantée par la franchise du héros de Lermontov, qui dévoile sans pudeur ses pensées les plus secrètes, en analysant froidement ses faiblesses et ses erreurs. Petchorine est tellement différent de tous ces héros positifs et clairement profilés de l'ère héroïque des radieux lendemains, qu'on peut difficilement considérer sa recherche et ses tâtonnements comme quelque manifestation d'inutilité et de futilité. C'est davantage une rébellion intérieure, une décision de chercher la vérité même dans cette bouse sociale censurée dans laquelle il a vécu et qui l'a largement façonné.



Lermontov a doté son Petchorine d'intelligence qu'il utilise à son avantage, et grâce à laquelle il s'élève au-dessus de son entourage. L'un de ses passe-temps favoris est de manipuler les gens, en particulier les femmes stupides, mais après un certain temps il n'y trouve plus aucune satisfaction. Il désire plus qu'un divertissement qui vide agréablement l'esprit. Mais sa nature ne lui permet plus de trouver le bonheur - même illusoire - ni dans l'amour, ni dans l'amitié. Prisonnier de son intraitable ego et de son arrogance, il commence à mépriser tout, y compris son éducation et son intelligence, le destin, l'humanité et même sa propre mort.

Il fait en effet triste figure dans la joyeuse société de la petite-bourgeoisie, dans ce théâtre tragicomique où les uns font semblant d'être sincères, et les autres font semblant de faire semblant d'être sincères.

Comme il ressemble à Onéguine de Pouchkine, ou à Oblomov de Gontcharov ! A Manfred, Heathcliff et tant d'autres. Comme il ressemble aux héros de Kundera... comme il est éternel.



La nouvelle, très agréable à lire, a été écrite entre 1838 et 1840.

Cinq chapitres presque indépendants, liés seulement par le personnage de Petchorine (tantôt on l'évoque dans des souvenirs, tantôt on lit son journal), se déroulent dans de luxueuses stations thermales caucasiennes au milieu de la haute société militaire et civile, mais aussi dans des coins reculés et sauvages de la montagne. Lermontov connaissait bien ces paysages et les habitants du Caucase. Il y avait passé ses années d'exil, après avoir écrit un poème en l'honneur de la mort tragique de Pouchkine ; il n'est d'ailleurs pas sans intérêt de comparer la fin de Pouchkine avec celle de Lermontov, à vingt-six ans seulement !

Lermontov a choisi le nom de son héros encore en hommage à Pouchkine : tout comme Onéguine était créé d'après la rivière Onega, Petchorine est né de la rivière Petchora.

En comparant la vie de Lermontov au livre, on ne peut pas chasser l'impression que nous lisons une sorte d'autobiographie voilée de l'auteur.

"Un héros de notre temps" est véritablement un portrait, mais pas d'une seule personne. C'est un portrait composé des défauts de toute une époque. Vous pourriez argumenter que l'homme ne peut pas être aussi mauvais, mais si on est capable de croire en la véracité des malfrats tragiques et romantiques de toutes sortes, alors pourquoi ne pas croire en Petchorine ? Pourquoi nous est-il si difficile de l'absoudre ? Il contient peut-être plus de vérité qu'on n'aurait souhaité...?

L'abus de sucreries dérange l'estomac, et le remède est amer. Lermontov ne prétendait jamais vouloir devenir un prêcheur contre les vices humains, son esprit était bien trop large, pour cela. Il a seulement pris plaisir à peindre un homme tel qu'il le comprenait, et tel que, malheureusement, il le rencontrait trop souvent. Il a détecté la maladie, comment la guérir - Dieu seul le sait.

J'ai été convaincue de la sincérité de l'auteur, qui a si impitoyablement révélé ses propres faiblesses et défauts. L'histoire d'une âme humaine, même si cette âme semble ignoble , est peut-être encore plus intéressante et utile que l'histoire de toute une nation, surtout quand elle est le résultat d'une introspection profonde, et quand elle n'est pas écrite dans un désir ambitieux de provoquer la pitié ou l'admiration.



Quant à mon opinion définitive sur le personnage de Petchorine, je réponds par le titre de ce livre. "Mais c'est une cruelle ironie !", me diriez vous. Je ne sais pas. 5/5
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Oeuvres poétiques

"Non, non, je ne suis pas Byron; je suis un autre,

un autre élu, mais de tous ignoré;

un pèlerin par le monde exécré :

mais mon âme profonde, ô Russes ! c'est la vôtre."



Non, Lermontov n'est pas Byron, même s'il y a comme un lien entre les deux. Il n'est pas Pouchkine non plus; et pourtant, tous ces poètes romantiques ont beaucoup en commun.

J'ai vécu quelques débats animés (plutôt autour d'une chope de bière qu'autour d'un samovar) censés trancher si Pouchkine est "meilleur" que Lermontov ou vice-versa, et comme d'habitude, je me situais quelque part au milieu. Ils sont comme les deux côtés de la même pièce de monnaie : l'un ne peut pas être compris sans l'autre.

Lermontov est peut-être plus vrai, plus radical et rebelle que Pouchkine, élevé dans le classicisme... ? Quoi qu'il en soit, ce vieux recueil "Stihy i poemy" (que je n'ai jamais rendu à l'un de ces pro-lermontoviens féroces) fonctionne comme un remède universel pour n'importe quel état cafardeux.

Il y a dedans tout ce qu'il faut. Les larmes qui devraient sortir, mais qui ne viennent pas. Tristesse, colère, mélancolie et souffrance qui mériteraient d'être ventilées pour mieux respirer, mais qui s'accrochent malgré tout. Toutes les désillusions terrées au fond de l'âme.



Si vous essayez de compter quel mot revient le plus souvent dans la poésie de Lermontov, ce serait le mot "solitude". Parfois la solitude voulue et libératrice, mais la plupart du temps la solitude qui consomme de l'intérieur et n'apporte rien que la souffrance. Lermontov a parfaitement - mais tout simplement parfaitement, et d'une façon inimitable - saisi le moment quand on voit le bonheur nous faire un signe au bout du chemin et on court vers lui, le coeur grand ouvert... mais le bonheur se détourne avec un petit sourire gêné, et s'en va en haussant les épaules.



"Je me penche et longtemps j'écoute :

Je crois entendre sur la route

le son qu'un pas léger produit...

Non, ce n'est rien ! C'est dans la mousse

le bruit d'une feuille qui pousse

le vent parfumé de la nuit."



Mais les vers de Lermontov ne sont pas uniquement mes illustrations de la dépression décrite par les mots merveilleux. Ce sont aussi des poèmes remplis d'amour pour la patrie (qui n'est pas toujours compréhensible, mais quel amour l'est ?), de souvenirs de guerre et de Caucase, de moments de joie. Puis le folklore et les légendes, la nature... et, à nouveau : passion, déception, hésitation, appréhension. La mélancolie russe dans toute sa splendeur.



"Je connais un rocher dans le ravin d'une montagne,

Sur lequel seuls les aigles pourraient être vus,

Mais une croix de bois noire sur un précipice règne,

Il pourrit et il vieillit des tempêtes et des pluies."



Merci, maître Lermontov, vos poèmes guérissent. 5/5 pour cette essence pure de romantisme russe, ce radical et panslaviste dont le plus grand rêve était de se dissoudre dans l'air et ne devenir qu'un avec la nature.

Il ne reste qu'à fermer le recueil, et continuer à avancer sur ce long chemin poussiéreux... Pour aller peut-être nulle part, mais un peu plus loin. "Выхожу один я на дорогу..."



"Je n'attends rien de l'existence brève -

et du passé, nul regret, nul désir.

La liberté, la paix sont mes seuls rêves,-

je ne voudrais qu'oublier et dormir..."
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La princesse Ligovskoï

La Princesse Ligovskoï de Mikhaïl Lermontov (1814-1841) est un roman inachevé et c'est bien dommage !

Lermontov le commence en 1836 mais à la suite d'une dispute avec son cousin Nicolas Stolypine, il est arrêté, emprisonné, accusé d'« appel à la révolution », puis exclu de la Garde et envoyé dans un régiment de dragons dans le Caucase où il écrira entre autres le Démon. La Princesse Ligovskoï est publié pour la première fois en 1882 dans la revue littéraire le Messager russe, bien après la mort de son auteur.





le roman débute par un accident spectaculaire et emblématique. « En 1833, le 21 décembre à quatre heures de l'après-midi » dans le centre de Saint-Pétersbourg, un jeune fonctionnaire est renversé par un traineau qui appartient à un officier de cavalerie de la Garde. le trotteur bai et le plumet blanc filent sans se retourner. Pendant que le jeune fonctionnaire rumine son amertume, l'officier qui est arrivé dans son riche palais décoré d'un luxe clinquant, oublie immédiatement ce qui s'est passé. Grégoire Alexandrovitch Piétchorine, que les siens appellent Georges, à la française, a bien d'autres chats à fouetter. Il intercepte une carte de visite destinée à sa mère et y lit , imprimé en caractères gothiques : «  le prince Etienne Stiépanovitch Ligovskoï et la princesse ». Il tressaille, il pâlit et jette la carte au feu avant de s'en repentir. le soir même, au théâtre Alexandra, Piétchorine revoit une ancienne conquête et s'empresse de l'éviter. Puis il se rend au restaurant Phénix et tombe sur Krasinski le petit fonctionnaire qui exige des excuses. Piétchorine en réponse propose de régler leur différend par un duel...



Ce petit roman est épatant. On ne s'ennuie pas une seconde. D'abord les deux intrigues sont savamment entrecroisées avec digressions et clins d'yeux au lecteur. On se demande jusqu'au bout comment vont tourner l'affrontement entre le petit fonctionnaire désargenté et le riche officier, et puis les retrouvailles sentimentales entre Piétchorine et la Princesse. Ensuite la peinture de la société mondaine pétersbourgeoise est formidable, précise et ironique. On a une galerie de portraits esquissés en deux ou trois traits saisissants et cruels à la Gogol. Les descriptions des lieux sont remarquablement concrètes et précises. Les dialogues sont fameux, dans la vie quotidienne, chez les domestiques, au bal ou au dîner. Les conversations y sont vides et pompeuses, les potins, les calomnies terribles s'enchainent avec le plus grand sérieux, au point qu'une vieille dame manque de s'étouffer avec ses asperges. Les dames ne sont pas épargnées. Piétchorine est arrogant, cruel et cynique mais aussi très complexé. Il cherche constamment à savoir ce que les femmes pensent de lui. Il est jaloux de Krasinski au physique avantageux qui fait tourner les têtes. Piétchorine feint le cynisme à la mode pour épater la galerie «c'est-à-dire être connu comme une personne capable de faire le mal quand bon lui semble » et il réprime en même temps ses véritables sentiments. Il rappelle par certains aspects Eugène Onéguine, cité en exergue ("Tire ! Tire ! crie une voix"). Il cherche à être reconnu de la bonne société et la méprise tout à la fois. le personnage de Piétchorine sera amplement développé dans le chef d'oeuvre Un héros de notre temps.



Lermontov est un immense écrivain, méconnu en France. Ce petit livre permet de le découvrir.
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Le Démon

Nouvelle fantastique de LERMONTOV Michaïl – Le Démon est bien à l’image de son auteur qui dans sa vie a souffert tel le docteur Jekyll et M. Hyde, de dédoublement et n’a jamais pu choisir entre le bien et le mal. Ce démon particulier va, par amour, désirer renoncer aux ténèbres et nous de penser que, l’amour est plus fort que tout, mais va-t-il y parvenir ? Une très belle écriture, poétique et riche pour aborder un thème aussi sombre et pourtant qui nous enchante.



Texte à lire sur le site « littérature russe et slave »

http://bibliotheque-russe-et-slave.com/Livres/Lermontov%20-%20Le%20Demon.htm

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La princesse Ligovskoï

Les princesses ne sont plus ce qu’elles étaient… l’ascension sociale, les mariages arrangés et l’importance accordée au profil social ont transformé le visage de l’aristocratie pour donner jour à des princesses dont seule l’illégitimité semble incontestable. Afin de transmettre une image de cette situation bien connue de son quotidien, Lermontov écrit dès l’âge de vingt-deux ans l’histoire de la Princesse Ligovskoï.





A Saint-Pétersbourg, au cours de la première moitié du 19e siècle, Georges retrouve Viérotchka, une ancienne maîtresse. Le désarroi de la jeune femme semble immense –elle ne le cache même pas à Georges, reconnaissant avoir compromis son avenir et sa jeunesse pour obtenir un titre qui ne lui apporte finalement aucune satisfaction. Les retrouvailles s’effectuent donc sous le signe du malheur ambitieux, recoupé par le regard cynique et moqueur –insensible !- de Georges. On reconnaît derrière ce personnage le caractère du jeune auteur : son désenchantement, ses désillusions amoureuses, son goût pour l’(auto)dérision et son ambivalence vis-à-vis des soirées mondaines se confondent pour former un autoportrait dont la sincérité ne manquera de convaincre aucun lecteur.





L’histoire, si elle avait été racontée du point de vue de la princesse larmoyante, aurait sans doute été lourde, gonflée de colifichets, artificiellement éplorée ; racontée du point de vue de Georges, elle prend une tournure cruellement joviale, virevoltant de l’aversion la plus injustifiée (quoique toujours assumée) à l’humour le plus piquant. Le ton est enlevé, léger, faisant la part belle aux divagations et aux considérations les plus extravagantes d’un personnage enflammé. Surtout, Lermontov réussit à prendre suffisamment de distance avec son sujet pour en faire ressortir les caractéristiques les plus notables –ouvrant ainsi une voie de communication directe avec le lecteur français du début du 21e siècle.





Bien que l’histoire soit inachevée, la frustration sera légère. Lit-on l’histoire de la Princesse Ligovskoï pour son dénouement ? Non. Mais pour la cruauté réjouissante de ses considérations –oui !




Lien : http://colimasson.over-blog...
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Un héros de notre temps

Loin de Moscou et de St-Petersbourg se trouvent les postes frontaliers, aux confins des régions les plus sauvages et les plus inconnues du continent, à la lisière de l’Europe et de l’Asie. Et c’est dans l’une de ces régions, le Caucase, entassé entre la mer Noire et la mer Caspienne, que s’ouvre le roman Un héros de notre temps, écrit par Mikhail Lermontov.



Le narrateur, qui voyage entre l’Ossétie, la Géorgie, l’Arménie et d’autres petites contrées sous contrôle russe, traverse les montagnes, les cols et les défilés de cette étroite bande de terre. En route, il rencontre Maxime Maximitch. Ce militaire est de bonne compagnie et lui raconte une des aventures de Grigori Alexandrovitch Pétchorine, un homme de sa connaissance. Un héros plus grand que nature, qui ne craint ni les balles des montagnards hostiles ni les duels des nobles russes.



En effet, Pétchorine, pour se divertir, sème la zizanie entre Tchétchènes, Tatars, Circassiens. Il promet le magnifique cheval de l’un contre Bella, la sœur d’un autre. Lorsqu’il parvient finalement à se faire aimer de sa nouvelle femme, arrachée à sa famille, il s’en lasse tout comme il s'ennuie de la compagnie de ses semblables. Rien dans ce bas-monde ne s'élève aux idéaux auxquels il aspire. La mort tragique de Bella semble l’affecter un moment mais la fatalité le destine à d’autres aventures. Bref, il souffre de spleen bien avant qu’on ne commence à parler de ce phénomène…



Loin des bals et des raffinements de la capitale et des grandes villes, on découvre la rude vie des militaires, leur éternel combat contre les contrebandiers, les peuplades montagnardes soumises mais hostiles, etc. Le tout dans un paysage caucasien merveilleusement dépeint. Les monts Elbrouz et Krestovoï, la rivière Tchertovaïa, le col du Diable, etc. Des habitants déguenillés mais fiers, des sauvagesses envoutantes, etc. Bref, une Russie assez peu évoquée dans la littérature classique.



C’est dans ce décor que Pétchorine, dans une partie du récit où il devient le narrateur, développe une relation amoureuse avec Véra, se lie d’amitié avec Grouchnitzky, puis fait la cour à la princesse Mary pour contrarier son nouvel ami intéressé par elle. Il s’ensuivra bien des complications et un duel. Après tout, ces petites gens ne sont-ils pas des pions pour lesquels il ne peut que devenir un ennemi implacable, voire vicieux? Qu’est-ce qu’un homme blasé ne ferait pas pour s’amuser un peu, faire valoir sa supériorité, se prouver qu’il est vivant ? Se lancer vers d’autres aventures !



Lire Un héros de notre temps fut également une aventure : les changements de narrateurs agacent. On passe du voyageur (dont le nom demeure inconnu) à Maxime Maximovitch, on retourne au voyageur pour passer à Pétchorine, mais en plus tous racontent à la première personne. Confusion à l’horizon. Heureusement, le lecteur ne s’attaque pas à un roman fleuve comme les Russes avaient l’habitude d’en écrire !



Ceci dit, les décors pittoresques, les voyages dépaysants, les aventures rocambolesques, les élans amoureux, les intrigues rebondissantes… enfin tout ne peut que compenser et plaire. Mikhail Lermontov a pondu une œuvre qui a influencé des générations de Russes et qui continue sans doute à émerveiller des lecteurs partout à travers le monde.

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La princesse Ligovskoï

Je m’empresse de poster mon avis sur ce petit roman de 122 pages. Commencé en 1836 et inachevé, il laissera (tout comme moi), les lecteurs sur leur faim mais peut-être est-ce là le secret de son succès ? Son auteur, Michel Lermontov, né le 3 octobre 1814 à Moscou, exilé à deux reprises au Caucase. Il est tué dans un duel en juillet 1841.

A premier abord, la princesse Ligovskoi ne laisse pas indifférent. A Saint-Pétersbourg, tomber amoureux d’une femme est chose naturelle, lui faire une cour assidue rentre dans les convenances de la société Russe, éconduire une et faire souffrir une autre est une « bataille gagnée ».

Je ne peux dire laquelle des deux femmes est à plaindre le plus car sont égales dans la douleur du cœur et même leur bourreau, le beau Pietchorine n’est pas aussi vainqueur qu’il le croit.

Je vous recommande de lire ce petit bijou, juste pour découvrir une plume aussi légère et gracile qu’une valse à Saint-Pétersbourg.

La couverture est magnifique !!!

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Un héros de notre temps

Formidable roman d'une grande richesse qui m'a captivée de A à Z. Peut-être n'est-ce pas la meilleure des traductions, mais elle est fluide et facile à lire. C' est un chef d'oeuvre, en tant que tel et non pas parce qu'il aurait inspiré d'autres écrivains russes par la suite.

Ce livre n'est pas seulement un roman psychologique. C'est d'abord, dans la première partie, un roman d'aventures, un genre de western caucasien avec, enlèvements de femmes, rebondissements invraisemblables, courses poursuites à cheval, duels au soleil, dans des paysages à couper le souffle. Ensuite, toujours dans la première partie c'est un faux roman sentimental avec clins d'oeil du narrateur ou de l'auteur. Petchorin est un héros à la Byron, qui séduit avant de larguer. Sa conquête n'en est pas dupe du tout, car c'est toujours mieux que d'être mariée à un Tatare...Le personnage sentimental est Maxime, c'est lui la victime de la première partie.

Dans la deuxième partie, on découvre Petchorin de l'intérieur. Il porte sur lui-même et sur ses aventures un regard plein d'ironie. Le personnage est détestable car il est rempli d'arrogance à l'égard de son prochain et terriblement franc. Il fait tout pour qu'on le déteste mais il nous montre aussi les coulisses du théâtre mondain aristocratique. Le récit intitulé "La Princesse Mèré" (ou Marie), s'apparente à un mélodrame en trois actes, tournant autour d'un duel complètement truqué.

Le dernier récit, très cruel, fait froid dans le dos. On joue à la roulette avec sa vie. Il est significatif du profond ennui de ces officiers rebelles et déchus, envoyés dans le Caucase. Ils n'ont d'autre occupation que de boire, de se provoquer en duel, de jouer avec la mort. Aucun courage là-dedans mais un profond mépris de la vie. Lermontov a tracé le portrait d'une génération perdue complètement anti-héroïque.
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Bela, princesse caucasienne

Superbe nouvelle, histoire d'amour et de vengeance, dans le cadre naturel grandiose des Monts du Caucase.



L'histoire est racontée au narrateur par un officier de l'armée russe, Maxim Maximitch, qui raconte le sort de son ami officier Grégory Alexandrovitch Pechorine, lorsque tous deux envoyés en mission dans les contrées reculées et dangereuses du Caucase, il tombe amoureux d'une belle princesse, Bela. Mais les peuples de ces contrées sont souvent rustres, fourbes, voleurs, fiers, à commencer par Kazbitch, le bandit au superbe cheval.

Pechorine parviendra-t-il à conquérir Bela et à la garder face à la jalousie de Kazbitch, mais aussi face à ses propres démons intérieurs ?



Lermontov, contemporain et grand admirateur de Pouchkine, livre là une des pièces d'"un héros de notre temps", son oeuvre majeure, qui préfigure et inaugure les grandes oeuvres romantiques des classiques russes qui s'annoncent, de Tourgueniev, Tolstoï ou Dostoïevski.



On y trouve un sens du drame, de l'aventure, des grandes épopées, mais aussi une couleur locale très présente et éloquente. On imagine ces superbes et rudes paysages des montagnes caucasiennes, et l'auteur nous fait partager les particularismes des mentalités de ces différents peuples, Tatars, Ossètes et autres Tchétchènes...marqués par les influences turques et perses (plusieurs jolis mots ou expressions dans ces langues sont jetés là avec parcimonie et à propos dans le texte), par la religion musulmane.



Une lecture agréable d'un auteur rare et injustement méconnu mort en duel à 27 ans, dont l'oeuvre forcément peu étoffée a pourtant influencé les plus grands écrivains russes.

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Le Chant du Tsar Ivan Vassiljevitch

Chant épique en l'honneur d'Ivan le Terrible

A la table du Tsar Terrible, Ivan Vassiljevitch, tout le monde fait bonne chère et se réjouit sauf un seul de ses gardes. Le Tsar fronce ses noirs sourcils et l'interroge menaçant. Le jeune garde s'incline jusqu à la terre humide et explique au Tsar qu'il a vu une beauté au regard de colombe, à la voix de rossignol... le Tsar souriant lui donne son anneau orné de rubis comme précieux cadeau de noce. Mais Alona Dimitrevna est déjà l'épouse d'un jeune marchand...

C'est un poème, épique et lyrique, en trois chants probablement inspiré d'une légende ou d'un conte traditionnel russe. Il est magnifique et terrible à la fois tant il mêle la beauté à la cruauté. La traduction en prose est fluide et laisse entendre un peu la puissante musicalité de l'oeuvre.

Lu gratuitement sur le site de la bibliothèque russe et slave ( 19 pages)

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Le Démon

Un poème beau et sombre

Le Démon n'est pas un conte de fée du tout ! le Démon, c'est Lermontov, l'Exilé, le Proscrit, le Damné !

Le Démon n'a aucun but, ne sait où aller, il survole la Géorgie paradisiaque sans aucun intérêt. Il tombe amoureux de Thamar car elle est pure et vivante. Il voit en elle la possibilité d'une renaissance, d'une régénération. Vivre pour lui, c'est aimer et se battre. Il va donc se battre contre le fiancé de Thamar et le tuer pour la séduire ensuite avec ses belles paroles. Le Démon devient alors poète. Il fait appel à l'imagination de Thamar, qui doit avoir dans les 13, 14 ans. Il lui faut un conte pour l'ensorceler, la promesse d'une route céleste et magique. Il lui offre le monde des songes, la poésie, le merveilleux. Il la couronne d' un diadème d'étoiles. D'un rayon du soir écarlate, il fabrique une écharpe dans laquelle il enroule la jeune fille. Ca y est, il l'a ensorcelée. Par son baiser, Thamar croit donner son âme au Démon mais le Démon lui transmet son souffle, c'est-à-dire la lucidité, l'ennui, la mort. Le soleil n'éclaire plus, ne chauffe plus. Le sourire de Thamar, c'est le reflet de l'au-delà, c'est le désespoir du Démon, l'âme du Démon. Un sourire de marbre. Elle n'aura vécu qu'un instant. Où est dieu ? Où est la Justice divine ? Dieu nous met sur Terre pour y souffrir, C'est L'Ange même qui le dit. L'Ange qui est apparu, disparaît avec le corps de Thamar. Il retourne lui-même au néant, car au Ciel il n'y a rien. Et le Démon retourne à son ennui, sans espérance et sans amour.



(Lu dans la traduction en vers d'Henri Grégoire)
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Un héros de notre temps

Un héros de notre temps est, sans conteste, un classique de la littérature russe puisqu'il est intimement lié à un des épisodes les plus connus de l'Histoire de la Russie, je veux bien entendu parler de la mort de Pouchkine.



Lermontov composera le sulfureux poème « La mort du poète » en l'honneur de Pouchkine mais surtout à charge contre le pouvoir en place. Cela lui vaudra illico presto un exil forcé dans le Caucase russe où il mettra un point d'honneur à finir le roman dont il est question ici: Un héros de notre temps.



Il s'agit, pour moi, d'une oeuvre hybride couvrant une multitude de styles: Roman, conte, nouvelle, poésie, chant, journal de bord, lettre, etc.

Le livre de Lermontov se compose de 5 parties qui peuvent se lire indépendamment les unes des autres (j'avais d'ailleurs lu Taman dans un recueil de nouvelles russes avant de savoir qu'il s'agissait d'une partie d'un roman de Lermontov).



La première partie concernant Bèla m'a fait pensé à Rouslan et Ludmila en plus rugueux où la femme est reléguée au rang de princesse-objet. Sans doute, cela représentait-il l'idéal amoureux de cette époque dans cette région du monde.



La partie la plus intéressante est sans doute celle où le caractère de Petchorine (le personnage principal) est passé au crible. Séducteur-manipulateur usant de cynisme pour arriver à ses fins, il m'a souvent fait penser à un certain Valmont des Liaisons Dangereuses ou à une version inavouée de... Lermontov lui-même.



Alors, à qui est destiné ce livre?



Aux amateurs de nouvelles, du Caucase, de l'Histoire de la littérature russe qui n'ont pas peur de se plonger dans une réalité révolue, celle des duels à bout portant !



« Nous allons tirer au sort celui qui fera feu le premier ... Je vous déclare pour conclure qu'autrement, je ne me bats pas. »



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Un héros de notre temps

Plus risible que les femmes qu’il dénigre (« La race est chose très importante chez la femme, de même que chez les chevaux »), Pétchorine figure le modèle d’un héros de notre temps –à condition que « héros » se confonde ici avec « bouffon ». La comparaison est implicite, elle ne tardera toutefois pas à se révéler au fil des différentes parties qui constituent ce roman.





Les points de vue autour de Pétchorine s’enchaînent ainsi pour constituer un portrait morcelé, qu’il faudra reconstituer au-delà des failles chronologiques et des doutes véridiques que nous inspirent la narration des témoins invoqués. L’imbrication des récits ne permet pas toujours de faciliter la compréhension des événements lorsqu’elle n’empêche pas carrément de suivre correctement le déroulement de l’histoire. Le roman, rabiboché de bric et de broc, semble avoir été composé dans l’hésitation, comme si Lermontov, ne sachant pas quel point de vue choisir pour décrire Pétchorine de la manière la plus convaincante, avait finalement décidé de garder tous ces brouillons et de les unir par un fil conducteur qui convainc surtout par son caractère artificiel. Le thème des amours désillusionnés, de l’individualisme naissant d’une génération, de la quête existentielle impossible à mener sans l’illusion d’une gloire proche, semblent hanter Lermontov qui développe ici les mêmes thématiques que celles qui apparaissaient déjà dans la Princesse Ligovskoï, qu’il avait commencé à rédiger quatre ans auparavant sans réussir à en achever la rédaction. Le héros porte d’ailleurs le même nom –pour un peu, il aurait suffi que la Princesse Ligovskoï trouve une conclusion pour que son histoire constitue un nouveau volet des aventures d’un Héros de notre temps.





Bien sûr, l’écriture enchante par son ton mordant, ses descriptions acerbes et sa verve ironique, et il n’est pas déplaisant de lire six fois de suite la variation d’une même histoire –mais il faut quand même avouer que dès la troisième redite, on commence à espérer une évolution du personnage de Pétchorine. Ce n’est pas le cas et le vaillant guerrier de l’amour, séducteur par fatalité plus que par désir, reste buté du début jusqu’à la fin. S’il s’agit d’un autre des ressorts comiques déployés par Lermontov, il entraîne toutefois davantage de désagréments que de véritables réjouissances. Le bouffon rigolo vire en ennuyeux chantre du désenchantement et ne parvient même plus à convaincre de l’inanité des passions terrestres. Autour du personnage de Pétchorine, la perfection aurait été atteinte si Lermontov avait su allier l’unicité du récit de la Princesse Ligovksoï à la possibilité d’une conclusion à la manière d’un Héros de notre temps.


Lien : http://colimasson.over-blog...
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Le Démon

Un ange déchu erre dans le monde, il « sème le mal sans plaisir » et finit par s’ennuyer. Il survole le Caucase et la Géorgie mais la beauté ne l’émeut pas, il est plein de dédain pour la création divine : les « neiges éternelles du Kazbek scintillant comme les facettes d’un diamant… les fleuves aux replis tortueux de serpent ou bondissant comme un lion à la crinière épaisse »… les bêtes les oiseaux …rien ne le touche. Mais, un jour, il entrevoit la belle princesse Tamara, elle va chercher de l’eau à la rivière et danse dans un rayon de lune ; « le démon la vit et à l’instant il ressentit dans tout son être une agitation étrange. Une bienfaisante harmonie vibra dans la solitude de son âme muette, et de nouveau il put comprendre cette divine merveille d’amour de douceur et d’incomparable beauté. » La belle Tamara vient de perdre son fiancé elle est inconsolable. L’ange déchu lui promet de renoncer au mal et de la libérer de son immense chagrin si elle accepte son amour. La belle Tamara va-t-elle se laisser tenter ?

Ce conte est un très beau poème romantique. La nature est magnifiquement présente, Lermontov exalte la beauté du Caucasse. Il nous trace le portrait d’un démon « démoniaquement » repenti, ses accents de vérité troublent et désarment, il est démon mais aussi amour et tendresse. La magie opère sous la plume de Lermontov. Il pose de multiples questions : Le démon existe –t-il vraiment ? Comment résister au mal ? La rédemption est-elle possible ? Nous n’avons pas vraiment de réponse, l’ambiguïté est là… Difficile de percer la portée philosophique et existentielle, il faut juste se laisser emporter par cette belle poésie.

Remarquons que Lermontov à peaufiner ce texte pendant 11 ans, le résultat est une surprenante poésie aux accents surnaturels !

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La princesse Ligovskoï

J'ai aimé "La Princesse Ligovskoï" de Michel Lermontov. Ce roman inachevé nous offre une description de la société russe du XIXème siècle où Georges (dit Petchorine) et Vierotchka se sont aimés mais, suite à la mobilisation de Georges à la guerre, se sont perdus de vue.



Georges est devenu un officier de la Garde, cynique ainsi que cruel, et le jour où il retrouve Vierotchka, qui est, quant à elle, mariée au vieux prince Ligovskoï, lui avoue (implicitement) qu'il ne l'a jamais oubliée...



J'ai beaucoup aimé les descriptions complètes des personnages; l'auteur, qui emploie tout au long du roman, le pronom personnel "je" nous indique son point de vue et permet ainsi au lecteur de "s'introduire" dans cette fantastique vie mondaine de Pétersbourg.



J'ai vraiment "dévoré" ce livre même si la fin, étant ouverte, m'a laissée curieuse de connaître la suite de cette histoire si captivante !



Un très beau livre que je conseille à tous ! A lire.
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Un Homme étrange - Bal masqué - Deux Frères

Lermontov surnommé « le poète du Caucase » (son lieu d'exil) nous convie au théâtre avec trois pièces, trois drames romantiques qui analysent l'amour sous des formes différenets et conduisant toutes à la destruction.

Un homme étrange

Un homme étrange est une pièce dramatique et romantique. Un homme déchiré par la passion se voit trahi par son ami qui séduit la femme aimée pour de l'argent.



Bal masqué

un drame en 4 actes et en vers écrite en 1835

Cette pièce de théâtre met en scène, Arbénine, Nina sa femme et son ami le prince, après un jeu d'argent au cours duquel Arbénine chanceux gagne une fortune, et le prince lui, vient de tout perdre. Magnanime Arbénine homme riche et un brin flambeur remet ses gains au prince. Ils se rendent ensuite à un bal masqué où va avoir lieu le drame…

Le récit vivant et poétique est un petit bijou, et, justement l'objet de l'esclandre est un bracelet. Une comtesse trouve ce bijou, appartenant à Nina, lors du bal masqué et, par jeu frivole l'offre au prince qu'elle cherche à séduire. Dès lors le quiproquo s'installe, le mari maladivement jaloux referme son piège mortel…

J'ai lu cette pièce avec beaucoup de plaisir, Lermontov excelle dans la description des sentiments amoureux. Il faut savoir qu'elle a longtemps été censuré en Russie pour outrage aux bonnes moeurs et qu'elle a été jouée en 2012 par la comédie française mise en scène par Anatoli Vassiliev, celui-ci a été l'objet de violentes critiques.



- Deux frères, retrace la courte histoire du retour du fils prodigue près de son père mourant.











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La princesse Ligovskoï

Les fastes et les mondanités de l'aristocratie tsariste, à Saint Petersbourg.

Derrière l'histoire sentimentale entre le jeune mondain Georges et la princesse Ligovsköi, intrigue toute en allusions discrètes (on ne sait ni le comment ni le pourquoi de leurs amours), Lermontov peint un monde qui évolue entre réceptions, snobisme, raillerie et jalousie.

Je découvre avec ce roman un auteur qui me semble un brin sexiste.. Pour preuve, le tableau très réducteur des femmes à la page 77 "mais nous autres femmes, nous nous abandonnons si facilement aux accoutumances du cœur, et nous pensons si peu, malheureusement, à la culture en général, à la gloire de l'Etat."

Frivolité, coquetterie et cupidité seraient donc les particularités les plus visibles de la gent féminine, à en juger par la description de ces dames, lors du bal évoqué page 116 : "Que d'yeux étincelants et d'étincelants brillants, que de lèvres roses et de roses rubans... merveilles de modes. ravissants petits pieds et souliers merveilleusement petits, épaules marmoréennes et fards français...phrases sonores empruntées aux romans à la mode, bijoux de location."

Les messieurs, qu'ils soient jeunes officiers, vieux barbons ou fonctionnaires laborieux ne valent guère mieux. Cette société décadente préfigure-t-elle la tourmente qui s'ensuivra ? dans ce pays que j'aime malgré tout.
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La princesse Ligovskoï

Quel dommage que Lermontov n'ait pas terminé ce roman qui porte en lui tous les germes des grands romans à venir de Dostoïevski !



Mikhaïl Lermontov, grand écrivain de l'âge d'or de la littérature russe romantique et contemporain de Pouchkine, ne nous a laissé que les neuf premiers chapitres de ce roman déjà brillant avant de l'interrompre à peine un an après l'avoir commencé. En effet, en février 1837, il est arrêté et emprisonné pour le poème vengeur et jugé subversif qu'il a publié sur la mort tragique de Pouchkine puis est exilé sur le front du Caucase. Lermontov ne prolongera et ne terminera jamais ce roman, expliquant que "les circonstances ont changé". Bien sûr, au Caucase, c'en est fini des bals et des soirées au théâtre et c'est une vie de militaire et des combats qui l'attendent.



Avant cet exil, Lermontov a fréquenté le milieu mondain de Saint-Pétersbourg et a eu quelques expériences sentimentales plus ou moins malheureuses, qui ne lui ont pas toujours fait honneur. Le romancier s'en est directement inspiré pour se livrer à une belle étude psychologique doublée d'un portrait de la vie de plaisirs et d'oisiveté que menait l'aristocratie pétersbourgeoise. Le roman aborde ainsi plusieurs thématiques : l'état d'esprit superficiel de la noblesse de Saint-Pétersbourg, la lutte des classes qui oppose deux jeunes hommes, Piétchorine, oisif fortuné et détestable et Krasinski, fonctionnaire pauvre au caractère ombrageux, les amours contrariées de Piétchorine avec Vièra, les jalousies des deux anciennes conquêtes de Piétchorine...



Les figures masculines m'ont semblé être traitées avec plus de profondeur que les figures féminines. Et le personnage de Krasinski préfigure un certain type de personnage populaire dostoïevskien : un homme au cœur noble, fier et révolté, qui se bat sans moyens contre la société.



Malheureusement, la narration de La Princesse Ligovskoï s'arrête au moment même où les portraits des différents protagonistes sont bien achevés, où la haine entre les deux jeunes hommes s'est durablement installée et l'intrigue suffisamment étoffée pour nous laisser entrevoir les prémices de développements dramatiques...



Bien que le roman soit resté inachevé, Lermontov a repris son cynique héros Piétchorine pour en faire le personnage principal de son roman Un héros de notre temps, mais dans une veine plus réaliste...



Si, à l'instar de Pouchkine, Lermontov n'avait pas connu la même fin tragique lors d'un duel, quels magnifiques romans n'aurait-il pas encore écrits...



Challenges multi-défis 2022

Challenge XIXème siècle 2022
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Récits fantastiques russes

Recueil de 3 contes fantastiques russes de la première moitié du XIX ème siècle à ST Pétersbourg.

Le premier raconte l'histoire d'un monde parallèle avec un moi parallèle accessible par peu de gens. Dans ce monde parallèle, on voit évoluer son moi, on voit de temps en temps le futur ou des visons passées, des êtres maléfiques et d'autres plus angéliques. Les déboires d'un jeune aristocrate qui grâce au Cosmorama (une boîte magique) accède à ce monde pour son plus grand malheur, il ne réussit à pas à décoder correctement les visions vues et les messages reçus.

La deuxième hélas inachevée plonge un personnage mélancolique et désabusé dans un appartement très étrange, où il joue chaque nuit une seule et unique partie qui le mene à la ruine.

La dernière aborde le sujet du diable, de ses tentations, de ses pièges. Comment le héros se laisse berner , attirer par la fête, le jeu, l'insouciance.

Trois contes fantastiques intéressants, une belle écriture. À découvrir.
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La princesse Ligovskoï

Une lecture agréable, avec l'envie d'en savoir le dénouement, l'écriture est un plaisir. L'histoire, je l'ai acceptée, le début est plutôt drôle, curieux, puis, je me suis ennuyée, en raison des répétitions des situations. Superbement écrit, oui, mais je n'ai pas compris le fond.
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