j’entends la paix des automnes
fuir entre les arbres
je me nourris du pain de la mémoire
il fait noir dans l’incendie du monde
j’appelle la parole lâchée sur les traces
une pluie errante en mon corps
le temps semble en exil de lui-même
comme le lichen des chemins
le ciel n’est-il pas un fruit
quand je ferme les yeux
le vent laisse tomber une ombre
que le sol couvre d’espérances
Je confonds les neiges mortes
et les saisons de rouille
l’absence prend forme
l’âme tremble en ses propres eaux
la terre renonce aux murmures
quand elle soutient la nuit
le soir replié jusqu’à l’absence
j’aime les eaux éclatées du mystère
les corps semblables aux départs
l’horizon débute par un silence
la terre console de l’agonie
faudra-t-il cueillir l’ombre
que mon corps donnera
oser le rapprochement
le froid ouvrira ses écluses
retrouvera le nom sensible des choses
assoiffé de légendes
j’éprouve de vieilles blessures
je remue quelques cendres
et le souffle tourne les mots
vers l’autre
enfant déjà je ramassais des images
aussi lourdes que la parole
je pelais mon coeur
en quartiers lumineux
je voulais m'éloigner
un peu de moi
je pleurais
comme une maison
où la lampe va s'éteindre "
Il faut se dépêcher de recueillir
dans nos paumes la mémoire
nous avons hérité d’un soleil inquiet
et on ne cesse d’en alléger le feu
de s’agenouiller devant le monde
on a traîné de soi
trop longtemps une ombre
qu’il est difficile d’approcher
sans que tout le regard se défasse
c’est ton visage
ton horizon
ta soif
et surtout tes lèvres
encore
qui me frôlent
mais la nuit
est comme en dehors de tout
je ne sais pas
ce qui me retient
de fendre les souvenirs
d’incendier la maison fugitive de l’été
il est minuit
et vivre ne fait pas le poids
cette nuit
est en elle-même
toutes les nuits
tout recommence
et tout s’enfuit
on touche
les braises encore chaudes
de quelques promesses habitables
être
est un château vulnérable
quelle éternité s’égare ici
dans quel coin de la chambre
s’est-elle retirée