Avec son érudition et sa sensibilité, Michel Robin est un auteur ayant acquis au fil de soixante années la sagesse de l’homme réfléchi. Pourtant, avec L'Enfant á 60 Ans, il remonte le cours du temps pour retrouver l’enfant qu’il a été, pour embrasser ce qui, en ce garçon, lui ressemble toujours.
Il s’inscrit dans la grande lignée des philosophes et des poètes aux courageuses confessions d’enfance, mais son regard s’illumine d’une honnêteté qui lui est propre. Son roman nous offre une enfance qu’il ne voit pas en rose. Le retour à l’enfance devient une quête de vérité. La vérité sur l’homme qu’il deviendra. La vérité plus large sur le monde tel que le garçon l’a vu, ce monde qui aura évolué avec lui. Toutes ces vérités animent des épisodes tantôt charmants, tantôt difficiles, toujours incisifs.
On ne glissera pas le long du fleuve tranquille de l’enfance nostalgique. L’auteur nous fera revivre une enfance véritable, angélique et tyrannique à la fois. L’enfant Michel sera défenseur de la justice en partageant ses petits soldats avec le fils des voisins en dépis de la barrière sociale qui les sépare. Il mettra le feu aux moustaches du chat. Il mènera la conquête d’une camarade de classe en lui rédigeant intarissablement des lettres sincères jusqu’à ce que le Frère Supérieur, alerté, ne mette fin à son élan. Il répondra aux interventions du monde adulte par des faux-fuyants ou des moments de contrition. Michel adulte va disséquer ce monde, qui est aussi le nôtre, avec la même intransigeance avisée que l’enfant. C’est un dialogue entre deux parties de soi-même. Une révolte contre la malice et l’hypocrisie. Une main tendue à l’amour. Une ode à la vie.
C’est aussi une évocation de la Belgique de l’après-guerre. La famille qui se divise pour des questions de classe sociale ou de religion. Le puritanisme qui affronte la fascination qu’exercent le cinéma, les voitures racées, les belles filles. Chaque personne rencontrée, chaque petit évènement, chaque croyance apparaissent en gros-plan sur l’écran et sont examinés avec lucidité par l’enfant et par l’homme qu’est devenu cet enfant. Le passé et le présent se rejoignent et la vie en devient plus claire.