Nicolas Perge

— C’est grâce à vous, monsieur Doyle !
— Comment cela ?
— Je suis, comme on dit, tombé dans ce genre de littérature grâce à Sherlock Holmes.

Philippe Soupault la défend. Paul l’encourage et Louis Aragon la comprend. Man Ray la désire et la photographie.

Et elle trouve grâce à ces deux défauts, l'orgueil et l'insolence, la force de survivre.

Ses carnets, ses pages, ses feuilles volantes sont remplis de pensées libres.

Lise et les surréalistes rejettent le fantastique car il désigne une irruption inopinée du surnaturel dans un réel bien établi. Il souligne donc l'impermeabilité des deux univers. Alors que le merveilleux les réconcilie. Lorsque le surnaturel et le réel se frôlent, que leurs dimensions s'unissent, voici ce que la poétesse appelle l'invisible.

Ça me révolte, on vit dans un monde où chacun est persuadé d’être meilleur que l’autre, plus noble et plus méritant que son prochain. Le mystère Agatha Christie m’apparaît insondable. Trop à mon gré !

Lise pose la main sur la poignée de la porte et pense à cette phrase de La Fontaine : "Les ennuis d'amour ont cela de bon qu'ils n'ennuient jamais."

La séduction est sa délicieuse drogue.

Avec ces grands murs que sont l'art et les sentiments, elle a espéré repousser la mort. Les visiteurs se sont souvent trompés. Ils ont perçu Lise terrifiante, ricaneuse, redoutable. Colérique. Dure. Un peu folle. Et si, au fond, elle était seulement désemparée.

En 1966, Lise fait un rêve. En remontant le boulevard Saint-Germain, elle tombe sur André Breton qui s'apprête à entrer dans la galerie d'art Roudillon. Il est pourtant mort depuis quelques mois mais il se trouve devant elle. Et, de sa voix puissante, lui lance :
"Lise, la mort n'existe pas."
Elle en pleure d'émotion.
"André... Vous êtes là près de moi... Qu'est-ce que vous faites ?
- Ne soyez pas triste. Oui, c'est bien moi."
Et, comme s'il s'époussetait, André Breton s'enlève des morceaux de chair. Lise est fascinée.
"Dites-moi. Est-ce que le passage vers la mort est affreux ?
- C'est beaucoup plus que ça, mais ça ne dure pas. Après, c'est merveilleux."