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Citations de Nina Berberova (317)


Extrait tiré de la nouvelle "Le Violon de Billancourt" :

Il la regardait longuement, ne sachant pas s’il pouvait lui prendre la main ou non.
- Ma théorie est la suivante, dit-il enfin, en posant sa main sur la sienne – mon Dieu comme ses doigts sont maigres ! Sonia avait tressailli, mais elle ne bougea pas. Ma théorie est celle-ci : nous ne reviendrons plus sur cette terre… Oh mon Dieu ! ne pleurez pas, je vous parle de quelque chose de joyeux ! Donc nous ne reviendrons plus sur cette terre, pourtant nous ne connaissons pas d’autre vie, et n’en connaîtrons, sans doute, pas d’autre. Il faut donc s’en arranger.
Deux larmes glissèrent des yeux de Sonia sur le jambon.
- Réfléchissez à ce que je vous dis, c’est très important. Elle opina de la tête. Vous pourriez vous reposer un peu… après tout, on en reparlera.
Elle le regardait en silence d’un air pensif. Il se rapprocha d’elle.
- Je pourrais changer mon répertoire.
Elle se taisait toujours.
- Je pourrais me limiter aux romances, si vous acceptiez de chanter. Ce n’est pas du tout effrayant. Et puis, vous savez, ce n’est que temporaire. »
Elle fit un signe de tête et sourit.
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Nina Berberova
LE MAL NOIR

- Lioudmila Lvovna, dis-je, taisez-vous. Je ne comprends pas que vous puissiez vous tromper à ce point. Je suis faible, inutile, en proie à une sorte d’immobilité, et il me manque la qualité humaine essentielle : savoir mourir et ressusciter intérieurement. Je n’aime ni la vie ni les hommes, j’en ai peur, comme tout le monde, et même plus. Je ne suis pas libre, rien ne me réjouit ; je ne suis pas honnête, pendant si longtemps je ne vous ai pas parlé de moi, et à présent, c’est si difficile !
- Dites-moi juste une chose, demanda-t-elle en précipitant les mots, sans me laisser terminer. Puis-je continuer à vous aimer ?
Là, elle vit mon visage, et me saisit la main.
- Ne dites rien. J’ai compris. Pardonnez-moi, je vous tourmente.
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Lui : Etes-vous perspicace ?
Moi : Je pense que oui.
— Il y a une chose que je voudrais vous dire, mais je ne peux pas. Il faut que vous deviniez.
— Bon.
Mon cœur battait.
— Maintenant, répondez : oui ou non ?
— Oui.
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“Elle ne savait pas ce qu’était la vie, mais sentait que ce n’était pas ça, pas ça. Et les années passaient, et maintenant, avec ces pensées pénibles, cet ennui au coeur, avec cette poitrine vieillie et ce visage méchant — où aller ? Qui la prendrait, qui lui indiquerait ce qu’il fallait faire ? Il est impossible que tout soit comme ça dans le monde, si mesquin, si amer…”
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Nina Berberova
- Alia, lui dis-je, c’est notre dernier dimanche. Je prends le bateau. Vous êtes contente ?
Elle parut étonnée.
- Contente ? Oui et non. Bien sûr, c’est ce que je souhaitais. Mais je me suis attachée à vous. On était bien, même si la chambre était un peu petite. Vous ne voulez pas changer d’avis ? Si vous restiez ?
Surpris, je ne trouvai rien à répondre.
- Non, vous ne resterez pas, fit-elle avec un soupir. Droujine vous attend. Quel nom, on dirait que c’est fait exprès ! Dérivé de droujba, l’amitié.
Je la regardai. Je faisais semblant de ne pas prendre cette conversation trop au sérieux.
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Il y a des gens comme ça. Ils ont en eux une espèce de magnificence. Près d'eux, on a peur un peu. Il est rare qu'on puisse les modifier, les rendre infirmes. Un être heureux, il vit comme au-dessus de tous les autres (et les écrase un peu, bien entendu). Et cela, on n'a même pas à le lui pardonner, parce qu'il l'a comme on a la santé, ou la beauté.
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La vie passe, emportant les petits événements comme les grands. Des noms et des époques illustres, il ne reste que cendres.
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Depuis des années tout m’est indifférent. Les gens n’aiment pas cela, ils cessent de vous remarquer. Les miroirs ne vous reflètent plus, l’écho ne vous répond pas. Je voudrais bien guérir ! Mais je ne puis venir à bout du mal noir, je ne puis ressusciter.
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Depuis ma prime jeunesse, je pensais que chacun, en ce monde, a son no mans land, où il est son propre maître. Il y a l'existence apparente, et puis l'autre, inconnue de tous, qui nous appartient sans réserve. Cela ne veut pas dire que l'une est morale et l'autre pas, ou l'une permise, l'autre interdite. Simplement chaque homme, de temps à autre, échappe à tout contrôle, vit dans la liberté et le mystère, seul ou avec quelqu'un, une heure par jour, ou un soir par semaine, ou un jour par mois. [...]
De telles heures ajoutent quelque chose à son existence visible. À moins qu'elles n'aient leur signification propre. Elles peuvent être joie, nécessité ou habitude, en tout cas elles servent à garder une ligne générale. Qui n'a pas usé de ce droit, ou en a été privé par les circonstances, découvrira un jour avec surprise qu'il ne s'est jamais rencontré avec lui-même.
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J’ai toujours cru que je défendais une cause juste.
Il était de mon devoir de dire au monde la vérité telle qu’elle était. Cela était indispensable non seulement vis-à-vis de ma patrie et des peuples russes mais aussi vis-à-vis des peuples du monde entier afin qu’ils puissent comprendre à temps la gravité du danger qui les menace.
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C'est aujourd'hui le premier anniversaire de la mort de Maman. Plusieurs fois, à voix haute, j'ai prononcé ce mot: mes lèvres en avaient perdu l'habitude. C'était bizarre et agréable. C'est passé ensuite. Certaines personnes appellent "maman" leur belle-mère, d'autres désignent ainsi la mère de leur mari; un jour, j'ai entendu un monsieur d'un certain âge appeler "petite maman" sa femme, qui était d'une dizaine d'années plus jeune que lui. Je n'ai eu qu'une seule maman et je n'en aurai jamais d'autre. Elle s'appelait Catherina Vassilievna Antonovskaya. Elle avait trente-sept ans quand je suis née, et je fus son premier et unique enfant.
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Ce n’était pas qu’il fût attaché à la musique - il était plutôt le véhicule d’une espèce de sons désordonnés qui, à travers lui, s’arrachaient au néant pour devenir réalité.
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Le train se précipitait. Je sentais que c’était la vie qui s’élançait vers moi, et que je me précipitais en elle, en et inconnu velouté.
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La maladie a ceci de bon qu'on trouve le temps de lire un bon livre.
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Le chanteur était un baryton assez connu autrefois. A présent, il approchait des soixante-dix ans, il sentait le tabac gris et la cave, ses mains étaient noires d'avoir fendu du bois et travaillé à la cuisine. il maigrissait tellement que, de mois en mois, ses vêtements pendaient plus bas, aux genous et aux coudes ils devenaient plus clairs, leurs boutons se détachaient. Il ne se lavait jamais, se rasait de temps en temps le menton et la lèvre, et alors il se mettait tellement de talc qu'il saupoudrait tout autour de lui. Et j'avais l'impression que c'était le crépi qui tombait de lui comme d'un mur vétuste.
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Ce livre, je l'ai écrit dans les années 1936-1937, après avoir achevé ma biographie de Tchaïkovski. Cette fois, je n'avais pas les mêmes facilités: dans mon entourage il n'y avait plus personne de vivant qui ait connu Borodine. Il m'a fallu me contenter de documents: lettres, mémoires, journaux, articles publiés entre 1928 et 1934 dans les volumes de la collection Academia ou dans d'autres ouvrages consacrés au groupe des "Cinq", pris ensemble ou séparément. Rien n'a été inventé par moi. Tout a été glané dans les pages de ces précieux volumes. La collection Académia a disparu en 1937, absorbée par la Maison des Editions de l'Etat, et ses créateurs ont été réduits au silence. Les savants qui collaboraient à Académia furent dispersés. Petit à petit, certains furent liquidés.
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Pendant toute une année , je n’avais pas eu un seul jour de congé. Tout à coup : »Mardi 4, mercredi 5, jeudi 6, vous êtes libre ! » Cette décision avait été prise par une énorme machine, celle-là même qui nous délivrait nos salaires et nos gratifications, qui annonçait qui et combien d’entre nous pouvaient se faire porter malades et qui avait droit à un congé.
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Le portail claqua une dernière fois et se tut, la clé grinça. Mon allée demeurait muette derrière moi. Elle ressemblait ce matin-là à un monument élevé pour perpétuer une réalité depuis longtemps disparue, qui n'existait plus ni ici ni dans mon pays : nulle part au monde.
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Bien qu’elle n’eût pas enlevé son peigne, ses cheveux répandaient un parfum mêlé de muguet et de marrons grillés, de ceux que l’on vend au coin des rues quand vient l’automne. Ses cheveux dorés, eux aussi, rappelaient l’automne. C’est à cet instant que l’idée de partir à la campagne avec elle m’est soudain venue. Depuis que je m’étais installé dans cette ville immense où nous habitions tous les deux, je n’en étais jamais sorti. Nous étions en été, un été chaud, interminable. Il devait bien y avoir quelque part des fleurs, des feuilles et de l’air, doré comme ses cheveux ?
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Nina Berberova
Je ne suis pas un roc, je suis un fleuve. Parce que je bouge : géographiquement, mais aussi intérieurement.
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