Je l'ai dit un jour, dans l'émotion et la colère qui m’étreignaient ce jour-là : "Vous méritez tous la Légion d'Honneur". C'était une image, bien sûr. Mais il est certain que nos vies de labeur méritent mieux que l'indifférence et l'oubli. Nous allons nous disperser, mais d'une manière ou d'une autre, nous restons, au fond de nous-mêmes, "ceux de Gad."
Je ne dirai jamais assez le soutien très fraternel que m'ont apporté les personnes de l'association "Sauvons Lampaul". Dans la lutte, le syndicat, les syndicats, c'est essentiel, mais leur mandat est limité. Ils sont indépassables pour résister, établir un rapport de force, négocier avec la direction. Mais cela ne fait pas tout dans la lutte. Une chance pour nous, chez Gad, il y avait beaucoup de femmes qui, sans être majoritaires, occupaient toute leur place.
Début 2013, rien ne va plus à l'abattoir Gad, dans le nord Finistère.
La coopérative qui le possède parle de FERMETURE, de plans sociaux... Les salariés et leurs familles sont sous le choc, les MEDIAS à l'affût, les SYNDICATS sur les dents. Leur délégué s'appelle Olivier Le Bras. Le conflit le révèle au grand public : diplomate mais déterminé, sensible, présent sur tous les fronts institutionnels et médiatiques en cette saison qui voit fleurir les Bonnets rouges et s'effondrer les portiques écotaxe. "Métis breton", il trouve aussi dans la bourrasque sociale les ressources pour ECRIRE SA VERITE.
Enfin, nous voilà au 28 juin et je suis à Rennes en qualité de délégué syndical central pour assister au CCE au cours duquel le plan de continuation et le PSE vont être dévoilés. Au moment de l'audience, 700 salariés débrayent sur les sites de Gad pendant une heure. Sans grande surprise, ce plan de continuation prévoit 850 suppressions d'emploi à Lampaul-Guimiliau, 80 à Saint-Nazaire. Il n'y a pas de décisions définitive pour les 50 emplois du siège de Saint-Martin-des-Champs.
Parmi les postes que j'ai occupés, c'est celui du jambon de Parme que j'ai préféré. Au début, je ne faisais que des remplacements quand il manquait du monde. Grâce à Daniel Jézégou, j'ai accédé au groupe des découpeurs. C'est un tapis extrêmement physique, extrêmement technique. Pour résumer, sur les 1 000 salariés qu'il y avait chez Gad, il n'y avait guère que trente qui pouvaient tenir ce poste.