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1.4/5 (sur 5 notes)

Nationalité : Canada
Né(e) à : Asbestos, Québec , le 17/05/1944
Biographie :

Pauline Michel est une écrivaine et autrice-compositrice québécoise.

Elle a commencé une carrière dans l'enseignement, avec un baccalauréat en pédagogie de l'Université de Sherbrooke et une licence en lettres de l'Université Laval à Québec.

Après avoir publié deux premiers romans (en 1975 et en 1978), elle en tire des chansons qui la font connaître comme auteur-compositeur, surtout après avoir remporté le concours "Québec en chansons" en 1980 et lancé deux albums microsillons la même année.

Après la publication du recueil de poésie "L’Œil sauvage" en 1988, elle fait plusieurs tournées de poèmes et chansons et participe à divers événements littéraires au Québec et en France, notamment la décade de L'Atelier Imaginaire, dans le Sud-Ouest.

Dans les années 1980 et 1990, Pauline Michel travaille beaucoup pour le cinéma et la télévision.

Pauline Michel a publié plus d'une quinzaine de livres : romans, contes, nouvelles, poésie et théâtre. Elle a aussi composé des dizaines de chansons, pour adultes et pour enfants, dont la plupart sont enregistrées sur disques, en plus d'avoir été scénariste pour la télévision et le cinéma.

Elle a été notamment Poète officiel du Parlement du Canada, de 2004 à 2006.
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Source : Wikipédia
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Qu’y a-t-il derrière un nom ?

Pendant ce temps, pressentant qu’Alice pouvait détenir une clé importante de l’énigme, Viviane résolut de retourner la voir sur-le-champ. Et elle lui rapporterait, en même temps, sa poupée Sophie. Celle-ci pourrait être un élément déclencheur pour sa mémoire, comme l’avait été la tempête de verglas, qui l’avait replongée dans l’atmosphère de la guerre.

Viviane arriva au Foyer des artistes juste après le repas du soir. Alice eut un choc en revoyant sa poupée préférée :

– Sophie, ô ma Sophie, je te croyais perdue… perdue à jamais !

– J’ai pris garde de bien l’envelopper pour qu’elle ne prenne pas froid.

– Ah, vous êtes bien bonne, Viviane. Ce n’est pas drôle de perdre un enfant, vous savez.

Alice prit sa poupée avec un attendrissement touchant. Elle la regarda longuement et se mit à la bercer en chantonnant. Elle avait l’air perdue dans ses souvenirs tout à coup. Continuant à bercer la poupée, elle se mit à chanter distinctement « Sometimes I feel like a motherless child », et des larmes commencèrent à rouler sur son visage.

– Ce blues semble vous toucher beaucoup, hasarda Viviane.

– Je l’entends toujours me le chanter.

– Qui donc ?

– C’est trop loin maintenant… tout est disparu… Je l’ai chanté toute seule dans le train… J’étais si seule… si désemparée.

– Quand vous êtes arrivée ici ?

– Ici ? Je n’avais personne dans ce pays. Heureusement qu’il y a eu Carl… Sans lui, je ne sais pas ce que j’aurais fait… On serait mortes ensemble, Sophie et moi… mortes… Il n’y avait que Carl qui pouvait me comprendre, m’accepter…

Viviane venait d’entendre le nom qu’elle voulait, mais elle ne chercha pas à interrompre tout de suite le monologue de la vieille actrice. Alice était penchée sur Sophie, absorbée dans la contemplation de sa poupée et la rumination du passé.

– Ma pauvre petite Sophie… la guerre… c’était terrible, terrible…

– Vous savez que Klaus est accusé de crimes de guerre, intervint tout à coup Viviane, résolue à jouer le tout pour le tout.

– Crimes de guerre ?… Klaus ?… Quoi donc ? De qui parlez-vous ?

– Le prince de Galles. Il est menacé d’arrestation d’un jour à l’autre.

– Le prince de Galles ? Ce n’est pas possible.

– On a découvert que Klaus Bauer a été un criminel de guerre, précisa Viviane.

– Criminel de guerre ? Comment ça ?

– Le sénateur Goldberg dit avoir des preuves que Klaus Bauer a fait envoyer des juifs dans les camps de concentration nazis.

– Ça ne peut pas être lui.

– Pourquoi ?

Alice ne répondit pas. Elle avait détourné la tête. Elle paraissait absente, tout à coup. Elle chantonna quelque chose entre ses dents, en se remettant à bercer sa poupée.

– Notre ami risque d’être arrêté d’un moment à l’autre, reprit Viviane. Il faut agir rapidement. Si vous savez quelque chose qui peut l’empêcher, je vous en prie, Alice, c’est maintenant qu’il faut le dire, maintenant !

Alice parut revenir à la réalité. Elle releva la tête et fixa Viviane de ses yeux turquoise, assombris par une pointe de colère :

– Encore la guerre… toujours la guerre… on n’en finira jamais !

– Ce n’est pas de ma faute, Alice, si on poursuit encore les criminels nazis.

– Les criminels nazis ? Mais le prince de Galles n’a rien à voir avec ça. Il détestait Hitler et sa bande d’assassins.

– Comment le savez-vous ?

– Parce que… parce que je sais d’où il vient, et ce qu’il a fait.

– Vous avez connu Carl Brunner durant la guerre ?

– Après.

– Je sais. Vous avez dit tout à l’heure que Carl vous a aidée… Mais il est mort vite en arrivant au pays, n’est-ce pas ?

Alice était effarée. Elle se rendait compte maintenant qu’elle avait livré, par inadvertance, un secret de longue date. Elle s’effondra un moment, la tête sur sa poupée.

– Mon Dieu, mon Dieu, Sophie, qu’est-ce qui nous arrive ? Qu’est-ce que j’ai dit ?

– Alice, je suis désolée, vraiment désolée de vous mettre à l’envers avec ça, de vous ramener des souvenirs terribles, mais il s’agit d’une question de vie ou de mort. Notre ami, le prince de Galles, est vraiment menacé. Il est accusé d’avoir envoyé des juifs dans les camps de concentration, comprenez-vous ?

– Klaus Bauer ne peut plus être arrêté, parce qu’il est mort !

Alice avait lancé cette phrase dans une sorte de rage. Viviane sursauta, mais elle ne perdit pas le fil de sa pensée :

– Je sais. Nous l’avons découvert, Arnaud et moi. Il est mort peu de temps après être arrivé au pays, dans un accident de la route.

– Alors, si vous savez tout, pourquoi me poser toutes ces questions ?

– Parce que nous voulons savoir à coup sûr que notre ami de la montagne n’est pas Klaus Bauer. Il s’appelle bien Carl Brunner, n’est-ce pas ?

– Ah, mon Dieu, mon Dieu, geignit Alice, en mettant la main devant ses yeux… C’est un secret entre lui et moi. Je ne dois pas le dire !

– Mais pourquoi a-t-il changé de nom ?

– Je ne sais pas… je ne sais pas… Il se reprochait des choses…

– Des choses ?

– Mein Gott… mein Gott… j’ai tant voulu oublier tout ça… toute cette horreur… Et Carl était comme moi. Il voulait tout effacer, recommencer à neuf, à zéro, vous comprenez ?

– Je comprends. Mais que se reprochait-il tant ?

– C’est à cause de ma cousine.

– Votre cousine ?

– Oui, ma cousine Émilie, il était amoureux d’elle. Elle a été assassinée par la Gestapo parce qu’elle avait continué de distribuer des tracts de la Rose Blanche. Après l’exécution de Sophie Scholl, de son frère et des autres.

– Ah oui ?

– Carl a toujours pensé que c’était à cause de lui qu’elle a été tuée.

– Comment ça ? Qu’est-ce qui est arrivé ?

– Aaah…

Après avoir laissé échapper un grand soupir, Alice s’interrompit un long moment. Elle paraissait exténuée, dépassée. Elle mesurait maintenant toute la gravité de ce qu’elle révélait. Ses yeux erraient, égarés, comme si elle cherchait à s’accrocher à quelque chose pour se rétracter, ou, du moins, s’esquiver :

– Je ne sais plus, je ne me rappelle plus… j’en ai trop dit déjà…

Alors, elle se fendit d’un large sourire, comme on fait une pirouette, et lança d’un air déterminé :

– Viviane, ma belle Viviane, je vous en prie, ne me parlez plus de la guerre ! Versez-moi un verre, s’il vous plaît !… Je ne veux plus sombrer dans ce passé maudit. Que les morts enterrent les morts ! Nous autres, il faut se réjouir d’être encore en vie… d’être ici… Il faut rire, chanter et boire avant qu’il soit trop tard ! Versez-moi encore de ce whisky ! Buvons !

Voyant qu’elle ne pourrait en tirer davantage de la vieille actrice, Viviane se résigna à prendre un verre avec elle. Puis elle s’empressa d’aller informer Arnaud de ce qu’elle venait d’apprendre.

Vu l’urgence de la situation, le couple décida d’appeler le père Célestin sans délai, même si la soirée était déjà avancée.

Le moine se montra un peu sceptique, au départ. Mais les deux amoureux lui expliquèrent toutes les recherches qu’ils avaient faites depuis les dernières semaines, et l’énigme grandissante de Carl Brunner qu’ils avaient résolue, en fin de compte, grâce à un coup de pouce du hasard : parce qu’Alice avait laissé échapper par mégarde le nom de Carl, en voulant parler de Klaus. Et Viviane avait réussi à faire confirmer par Alice que Klaus s’appelait bien Carl Brunner. Il avait changé d’identité parce qu’il se reprochait la mort d’une jeune fille tuée par la Gestapo.

Le père Célestin était ébranlé par tout ce que lui racontait Viviane. Il comprenait maintenant tout ce qui pouvait se passer dans l’âme du troglodyte de la montagne, et surtout il voyait l’urgence de prévenir Goldberg avant qu’il ne soit trop tard : avant qu’il ne faille dévoiler tout cela devant un tribunal. Il téléphona donc sur-le-champ au sénateur. À cette heure de la nuit, il fallait s’y attendre, il n’y eut pas de réponse. Le dominicain laissa un message dans la boîte vocale : « Sénateur, il faut tout arrêter ! Notre ami de la montagne n’est pas Klaus Bauer. J’en ai maintenant la preuve. En réalité, il s’appelle Carl Brunner. Loin d’être un criminel nazi, il a milité dans une organisation antinazie, appelée la Rose Blanche, que vous devez sans doute connaître. Merci de me confirmer dès que possible que vous avez bien reçu mon message ! »

Après avoir raccroché, le dominicain se dit qu’il irait voir Klaus sans faute, le lendemain matin, pour tirer tout cela au clair.

Entre-temps, dans la nuit qui régnait sur la montagne, une ombre s’approchait peu à peu des bâtiments du monastère. On entendait des halètements, les soupirs d’un homme qui cherchait son souffle, suivis par intermittence de raclements sur le sol, comme si on traînait un objet lourd. Puis le frottement d’un coffre, hissé de peine et de misère sur les marches d’une petite galerie, sise derrière la chaufferie du cloître.

Le sénateur Goldberg avait l’habitude de prendre ses messages à distance, en fin de soirée. Il était donc près de minuit, quand il entendit le message du père Célestin. Il tapa du poing sur son bureau :

– Ah fichtre, qu’est-ce que c’est encore ? Bauer n’est pas Bauer, maintenant !

D’où venaient pareilles absurdités ? Voulait-on lui mettre des bâtons dans les roues ? Qui donc ? L’Église catholique ? Ses ennemis politiques ? Ses enquêtes portaient peut-être ombrage à des gens puissants, qui tiraient les fils dans l’ombre ? Il savait, depuis qu’il menait ses enquêtes, que d’anciens nazis étaient souvent protégés par divers groupes qui n’avaient pas intérêt à ce que de vieilles histoires refassent surface.

Le sénateur était très embêté. Il avait déjà averti les autorités policières et l’arrestation de Klaus était imminente : elle devait avoir lieu le lendemain matin. Il fit les cent pas quelques minutes dans son salon, avant de prendre une décision. Même s’il doutait beaucoup de ce que lui apprenait le moine, il ne devait en aucun cas prendre le risque de s’exposer au ridicule et à l’opprobre d’une dénonciation injuste et erronée. Sa réputation éta
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Le tribunal des corbeaux

Klaus marchait comme un somnambule dans la montagne. Sa démarche avait l’air encore plus fantomatique que d’habitude. Un grand pli d’inquiétude barrait son front, et il s’arrêtait souvent pour reprendre haleine. Il regardait le ciel. Soudain, il aperçut une bande de corneilles ou de corbeaux s’assembler peu à peu, avec des croassements qui retentissaient tout autour de la montagne. Leurs cris semblaient plus rauques et plus intenses que d’habitude, comme des appels d’alarme, avec parfois des sons qui ressemblaient à des tintements de cloches. Les grands oiseaux noirs volaient en cercle, presque au-dessus de sa tête, un cercle qui allait se rétrécissant, projetant de grandes ombres au sol. Puis ils plongèrent en même temps, pour se poser non loin de l’endroit où il était, dans une clairière près du cimetière.

Ils devaient être plus d’une vingtaine et ils formaient maintenant un grand cercle, au milieu duquel se tenait l’un d’eux : un corbeau de grande taille. Le chef, sans doute, se dit Klaus. Les oiseaux semblaient réunis comme de noirs chevaliers de la Table ronde. Il y eut quelques remous dans l’assemblée des volatiles, puis des croassements s’élevèrent. Klaus se rappela subitement un article qu’il avait déjà lu sur les « parlements » d’oiseaux. Il songea à l’autre parlement, à côté, et aux cours de justice. Il frissonna. Les corbeaux se tenaient cérémonieusement, le bec en l’air, et semblaient croasser à tour de rôle, comme des procureurs et des avocats au tribunal. Et croa-croa par ci, et croa-croa par là.

Tout à coup, le silence se fit. Klaus regardait, de plus en plus fasciné. Alors, il eut peine à en croire ses yeux : d’un seul élan, à l’unanimité, les corbeaux s’étaient jetés sur l’individu au centre. Il s’ensuivit un véritable massacre à coups de bec, qui ne laissa, en moins d’une minute, qu’une bouillie de plumes et de sang. Et les oiseaux s’envolèrent aussitôt, dans un fracas de battements d’ailes qui résonnaient comme s’ils s’en frottaient tous les mains.

Klaus était resté hébété par la violence de la scène. Des images avaient déboulé dans sa tête : des ombres sinistres d’avions dans le ciel, des maisons en flammes, des corps jonchant la rue, guenilles sanglantes. Le jugement cruel des corbeaux, montrant qu’il n’y avait pas de pitié dans la nature, l’avait frappé comme un présage funeste. Oiseaux de malheur, oiseaux de mauvais augure… D’autres images, venues d’un lointain passé, se succédèrent en rafale dans sa tête : le corps d’une jeune fille gisant, criblé de balles, au pied d’un mur; puis, des chiens qui hurlent, des sbires qui frappent, qui frappent, des crânes qui éclatent, le sang qui jaillit… Tout cela lui monta à la gorge comme une nausée insupportable. Il sentit une suffocation terrible. Une violente quinte de toux le plia en deux. Il cherchait son souffle, désespérément, se demandant s’il aurait la force de retourner à sa grotte.
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