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Citations de Philippe Besson (3421)


Ça fait mal d'apprendre à quitter ceux qui nous quittent, d'apprendre à les aimer en silence, le dos tourné, les yeux baissés. De devoir apprendre à son coeur la force de se vider tout en demeurant habité. Apprendre à pleurer en souriant, à s'en aller en aimant . . .
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Je t'écris parce que t'écrire, c'est être avec toi.
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Avez-vous remarqué comme les paysages les plus beaux perdent leur éclat dès que nos pensées nous empêchent de les regarder comme il faudrait ?
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[Incipit.]

Clément,

J'ai décidé de t'écrire, plutôt que rien.
Plutôt que rester là, comme ça, dans le silence.
Que je te dise : je me suis honnêtement, sérieusement essayée au silence, je l'ai endossé comme on se glisse dans un vêtement, je m'y suis livrée comme on accepte une astreinte. Je l'ai fait d'abord pour moi, ne t'y trompe pas, c'était un choix égoïste, même s'il m'a coûté. En fait, j'ai pensé que cela me sauverait. Mais le rien-dire ne sauve pas, enfin disons que, moi, il ne m'a pas sauvée. Je crois même qu'il m'a enfoncée un peu plus dans la tristesse, le chagrin. Pour être tout à fait honnête, il m'a dévastée parce qu'il est peuplé d'images, le silence, de souvenirs impossibles à chasser, telles ces mouches importunes qui tournent autour du visage, qu'on tente d'éloigner avec de grands mouvements des bras, et qui toujours reviennent. Et puis, dans le silence, on est sans défense : les assauts n'en sont que plus blessants.

Alors maintenant, j'essaie les mots, ça ne pourra pas être pire. Qui sait si, en parlant, je ne vais pas me délester de la douleur entassée ? Un peu.

Pourquoi t'écrire à toi, me diras-tu ? Mais parce que des paroles sans destinataire ne sont pas vraiment des paroles. Sans écho, elles se perdent. C'est comme si elles n'avaient jamais existé. C'est écrire au vent, au désert, à l'abîme. Si personne ne m'écoute, autant continuer à me taire. Quelqu'un doit m'écouter. Et qui mieux que toi ?

Oui, qui mieux que toi ?

Je vais t'appeler par ton prénom.
Clément.
Je ne peux plus dire : «mon amour», ou des choses approchantes, toutes ces expressions niaises qu'on emploie sans en percevoir le ridicule et qu'on répète à l'envi au point de leur ôter leur signification. Tu serais embarrassé si je disais : «mon amour», de toute façon. Tu prétendrais que je ne suis pas guérie.

Un aveu : je ne suis pas guérie. Mais les malades doivent avoir l'élégance de ne pas indisposer les bien-portants, on leur sait gré de dissimuler leur mal.
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Je crois qu'on survit à tout. Je crois que la vie est plus forte. Je crois que le temps est assassin et balaye les visages du passé en emportant avec lui les épreuves qu'on pensait ne pas pouvoir surmonter.
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Mais aimer, ce n'est pas s'installer une fois pour toutes au sommet de ses certitudes. C'est douter toujours, trembler toujours. Et puis, demeurer vigilant pour éviter que le poison mortel de l'habitude ne s'insinve et nous tue, ou pire : nous anésthésie. Ne pas croire que plus rien ne reste à faire mais au contraire séduire, séduire encore.
Aimer, ce n'est pas gagner à tous les coups. C'est prendre des risques, faire des partis incertains, connaitre la frayeur de perdre sa mise pour mieux savourer le frisson de la douleur.
Aimer, ce n'est pas emprunter des routes toutes tracées et balises. C'est avancer en funambule au-dessus de précipices et savoir qu'il y a quelqu'un au bout qui dit d'une voix douce et calme : avance, continue d'avancer, n'aie pas peur, tu vas y arriver, je suis là.
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C'est à ce moment-là qu'on s'est perdus de vue, lui et moi. J'articule ces derniers mots sans y mettre le moindre affect, comme si la vie, c'était ça, simplement ça, se fréquenter et se perdre de vue et continuer à vivre, comme s'il n'y avait pas des déchirements, des séparations qui laissent exsangues, des ruptures dont on peine à se remettre, des regrets qui vous poursuivent longtemps après.
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Les pires douleurs sont celles qu'on s'inflige.
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Les deux garçons sur ce cliché ancien, c'est Paul et moi.
Je reconnais ses cheveux bruns, ses lourdes boucles brunes qui s'envolent avec le vent, et son regard sombre, ses joues creusées, la peau claire, immaculée. Il baisse un peu la tête, il a les mains enfoncées dans les poches d'un caban de marin. Moi, je suis plus petit que lui, la différence de taille se voit. Les verres de mes lunettes sont embués à cause de la pluie. En arrière-plan, le clocher d'une église, un clocher distinctif, un cône noir surmontant un édifice blanc, celui d'Ars-en-Ré. Je présume que c'était cela, l'effet recherché, montrer que nous nous trouvions à Ars, et faire que la singularité du lieu apparaisse.
Paul a vingt-quatre ans, moi vingt et un.

Pages 11-12, Julliard, 2019.
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Et il faut rentrer. Puisqu'il faut toujours rentrer. Puisque toujours les étés se terminent. Et chaque fois, c'est une sensation déchirante. Quand j'étais enfant, le signal, c'était la mort des tournesols, le moment où leur tête jaune virait au noir et s'inclinait vers la terre sèche, je comprenais que la rentrée des classes appro chait, que c'en était fini du soleil et du désœuvrement, ça me plongeait dans des abîmes de mélancolie. J'ai écrit souvent, après, sur les arrière-saisons, sur la disparition de l'été ; ça vient de là.

Page 28, Julliard, 2019.
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Il est plus aisé de n'avoir rien que de n'être rien
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En vérité, je n'étais pas fait pour le marketing, pas davantage pour la finance, voilà des matières qui me sont tout à fait étrangères, auxquelles je n'entends à peu près rien. J'ajoute que l'idéaliste de gauche que j'étais éprouvait de la méfiance, du mépris, voire de l'hostilité à l'endroit de disciplines ayant pour objet soit de favoriser la surconsommation, soit d'optimiser les revenus du patronat.

Page 15, Julliard, 2019.
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La souffrance, celle du corps, je pourrais finir par m'y habituer, par en faire une compagne. Je la dompterai ou elle m'emportera. Mais la souffrance du coeur, on ne s'y accoutume jamais. Elle est insidieuse. Et bien plus dévastatrice.
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Je découvre que l’absence a une consistance.
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Elle est convaincue que le monde change, que la vie propose des épreuves mais qu'on peut rester soi-même et triompher de ces épreuves. En fin de compte, les souffrances font partie de l'existence, elles ne peuvent pas nous être épargnées mais elles valent cent fois mieux que des moments insipides, elles sont le prix à payer pour affirmer ce qu'on est et accomplir ce qu'on a décidé.
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Il est des circonstances où les maladresses, même les plus familières, vous atteignent davantage que la pure cruauté.
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Thomas meurt.
Thomas accepte de mourir. C'est ici dans la maison de Saint-Clément, la maison de l'enfance, qu'il choisit d'attendre de mourir. Je suis près de lui. C'est encore l'été. J'ignorais qu'on pouvait mourir en été.
Je croyais que la mort survenait toujours en hiver, qu'il lui fallait le froid, la grisaille, une sorte de désolation, que c'est seulement ainsi qu'elle pouvait se sentir sur son terrain. Je découvre qu'elle peut tout aussi bien exercer sa besogne en plein soleil, en pleine lumière. Je songe que Thomas l'accueillera en pleine lumière.
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J'ai dix-sept ans.
Je ne sais pas que je n'aurais plus jamais dix-sept ans, je ne sais pas que la jeunesse , ça ne dure pas, que ça n'est qu'un instant, que ça disparaît et quand on s'en rend compte il est trop tard, c'est fini, elle s'est volatilisée, on l'a perdue.
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L'été 88 est un été d'orages, de rafales, de tornades, le toit d'un hypermarché s'écroule dans une ville de la banlieue parisienne à cause de bourrasques, du poids de la grêle, il se produit des phénomènes comme ça, on ne parle pas encore de dérèglement climatique, des étés pourris on en a déjà connu.

Page 21, Julliard, 2019.
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Rien ne m'émeut davantage que ces instants d'abandon, d'oubli de soi.
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