Pierre Coran

Anagrammes

Par le jeu des anagrammes
Sans une lettre de trop,
Tu découvres le sésame
Des mots qui font d’autres mots.

Me croiras-tu si je m’écrie
Que toute neige a du génie ?

Vas-tu prétendre que je triche
Si je change ton chien en niche ?

Me traiteras-tu de vantard
Si une harpe devient phare ?

Tout est permis en poésie.
Grâce aux mots, l’image est magie.

Pierre Coran -L’écharpe d’Iris -

Le pagivore

Il eut soudain grand faim de livres,
En avala cent trente-trois,
Dont un traité de savoir-vivre,
Mi à l’envers, mi à l’endroit.

Il épargna la poésie
dévora l’encyclopédie
Et juste à l’heure du dessert,
Mi à l’endroit, mi à l’envers,
Croqua la bibliothécaire.

La grenouille

Une grenouille
Qui fait surface,
Ça crie, ça grouille
Et ça agace.

Ça se barbouille,
Ça se prélasse,
Ça tripatouille
Dans la mélasse.

Puis ça rêvasse
Et ça coasse
Comme une contrebasse
Qui a la corde lasse.

Mais pour un héron à échasses,
Une grenouille grêle ou grasse
Qui se brochette ou se picore,
Ce n'est qu'un sandwich à ressorts.

Pierre Coran ( Jaffabulles)

L'ibis

Un ibis avait un bec
Comme le sabre d'un cheik.

Aussi, notre volatile,
Au mépris des crocodiles,

Becquetait, becquetait-il,
Des serpents le long du Nil.

Becqueta, becqueta tant
Qu'il mourut en becquetant.

Dans le ventre de l'ibis,
On trouva deux tournevis.

Deux tubes de dentifrice,
Deux épingles de nourrice,

Deux étoiles de police
Et deux balles de tennis.

Puisqu'il trouvait fabuleux
De becqueter tout par deux,

De Port-Saïd à Tunis,
On l'appela l'ibis bis.

Pierre Coran

A Par le jeu des anagrammes,
A Sans une lettre de trop,
N Tu découvres le sésame
A Des mots qui font d'autres mots.

G Me croiras-tu si je m'écrie
R Que toute NEIGE a du GENIE?

A Vas-tu prétendre que je triche
M Si je change ton CHIEN en NICHE?

M Me traiteras-tu de vantard
E Si une HARPE devient PHARE?

S Tout est permis en poésie
Grâce aux mots, l'IMAGE est MAGIE.

Avec l'argent dont je disposer chez Sarah et que j'ai eu le réflexe d'emporter , je peu passer commande : de la bière de table , du chocolat , du papier et un stylo à bille. J'ai décidé d'écrire ma vie. Pour tuer le temps. Peut-être aussi pour me vider l'esprit. Mon dossier servira aux assises. A moins que je ne meure dans ma cellule , pendu ou les poignets ouverts , comme certains autres.

J'allais pouvoir dormir. Dormir. Dormir. Dormir sans avoir bu. (P12)

Marchands d'histoires

- Quand je serai grand,
- Quand je serai grande,
- Je serai marchand,
- Je serai marchande.

- Nous serons tous deux
Des marchands d'histoires :

- Du dragon sans feu,
- De l'ogre au miroir,
- Du monstre à trois yeux,
- Du fantôme noir.

- Quand je serai grand,
- Quand je serai grande,
- Nous serons tous deux
Marchands de légendes.

Un kangourou en kimono kaki
Faisait du karaté
Sur un kiosque de kermesse
Avec un koala et un kakatoès
Les kilos du kangourou
Les kilos du koala
Le bec du kakatoès
Ont fini par faire un trou
Dans le kiosque de kermesse
Et quand le kiosque craqua
Kakatoès, koala et kangourou en kimono
Furent tous trois mis K.O.

L’aventure qui est mienne née d’un hasard de vie a cette saveur troublante qu’on perçoit dans un fruit inconnu.

Le matin, dès qu'il se lève, Ugo s'envole comme
Un oiseau, du lit à la salle d'eau.

Nombreux et nombreuses sont les danseurs et les danseurs qui tourbillonnent, légers, légères et s'envolent comme des corolles.

Je suis dans mon lit. Comment suis-je rentré ?
Ma mémoire est blanche.
Il en est toujours ainsi quand j'ai trop bu et que je m'éveille fourbu , en proie à cette sensation bizarre d'être sur un fil tendu au-dessus d'un brouillard de mer. (p7)

Je vais vous conter l'aventure
D'un chevalier des temps anciens
Qui s'en alla par les chemins
D'un pays d'eau et de verdure
Avec un chien et un cheval
Chasser un terrible animal.

Le premier qui chanta l'histoire
La tient pour vraie d'un charbonnier
Qui a connu le chevalier,
Preux neveu d'un roi de naguère.

Tout à coup, la frousse me prend. La sueur me poisse le tee-shirt. J'ai la gorge nouée comme un foulard de scout.

Chèvre
Qui a une barbiche ?
Une queue en potiche ?
Des sabots rigolos ?
C'est la chèvre de Picasso !

Voyez-vous, monsieur le bourgmestre, il y a dans mon école de bons élèves et de moins bons, mais pas un seul mauvais élève, pas un seul. Gardons le mot "mauvais" pour qualifier ceux qui nous empêchent de vivre libres, de vivre en paix. (p. 151)

Je voudrais n'être qu'une ombre sur un mur, celle de l'homme que j'aurais pu être.

Ma mémoire reste blanche. Personne ne me croyait. Personne n'avait une bonne raison de me croire. (P10)

Avant la corrida,
Dans l'arène à midi
Le grand matador dort,
Les picadors aussi.
Le taureau ne dort pas
Mais dans ses yeux il voit
Il voit une hacienda
Sans pique et muleta
En un grand pays vert
Là où la mort n'a pas

Un habit de lumière