…Je souhaiterais que notre voyage ne se termine jamais. C'est la première fois que je découvre le vrai sens du mot vivre. Jusqu'à présent, j'avais toujours eu l'impression d'exister pour quelque chose d'extérieur à moi-même: le travail, la famille, les amis… Oh! Je ne renie pas pour autant ce genre de vie dans lequel on parvient sans doute à s'épanouir, mais il impose une multitude d'exigences qui ne nous permettent pas d'être assez disponibles pour nous ouvrir à d'autres valeurs tout aussi essentielles. Ce que je croyais être fondamental hier ne l'est plus aujourd'hui et, cependant, je me sens heureuse… Oui, heureuse et libre. Libre de décider moi-même de ce qui est important sans que la raison sociale me le dicte, libre de profiter de la nature autrement que par acomptes, libre de choisir la solitude sans que ce soit elle qui viennent me traquer… libre de t'aimer comme jamais je n'aurais pu l'imaginer…
Au Japon, on entrait parfois dans un W.C. comme dans le sanctuaire d’un temple. Le chœur, composé d’un éden de verdure, était animé par des jeux de lumière qui rendaient les couleurs plus douces, plus apaisantes, plus sensuelles aussi. Mais le jardin idyllique ne renfermait ni pommier ni serpent perfide. De petits oiseaux invisibles gazouillaient des mélodies innocentes qui vous invitaient à vous détendre et à prendre position sur le trône où régnait le tabernacle-ordinateur, destiné à prendre en charge tous vos besoins : lavage, shampooing, rinçage ( l’essorage demeure encore un programme à haut risque) et, bien sûr, le séchage. Très perfectionniste dans le détail, il composait même le murmure du ruisseau afin d’étouffer le glouglou impudique que nous émettions en assouvissant nos vénérables besoins transcendantaux…
Le voyage, c'est aussi une aventure de la conscience où l'on est amené à dépasser ses propres limites, parfois au seul compte de la survie…