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Citations de Pierre-Jakez Hélias (77)


Soudain, il lui vint à l'esprit que le départ de Pierre Goascoz, juste avant le raz-de-marée, signifiait que son ami (était-il vraiment son ami?) avait trouvé la bonne heure pour atteindre l'autre rivage.

Et maintenant, il savait.
Alain Douguet, Corentin Roparz, Yann Quéré et le mousse Henri savaient aussi. Lui, Nonna, était laissé pour compte.
Il eut envie de mourir.
mais, la mort serait une défaite pour qui n'avait eu d'autre désir que d'entrer vivant dans l'au-delà.
A tout prix, il lui fallait rejoindre ceux de "l'Herbe d'Or."
Le moyen, il le trouverait.
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Quand on est né le plus pauvre parmi les pauvres, il est bon d'avoir quelque hautesse dans le cœur.
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page 90

Un jour, Alain Le Goff me demande : "Seriez-vous capable de me trouver avant ce soir deux bâtons qui n'ont qu'un seul bout chacun ? J'en ai grand besoin et le temps me manque pour les chercher moi-même. Vous aurez une pièce de deux sous pour votre peine."
Je ne réponds pas tout de suite. [...]. Avec ses deux bâtons à un seul bout chacun il me prend de si court que je suis sur le point de me tirer d'affaire en inventant quelque prétexte sur le chaud. Si je ne le fais pas, c'est parce que j'appréhende de voir les yeux bleus du grand-père se détourner de moi pendant qu'il dira en soupirant : "Alors, il faudra que je donne mes deux sous à quelqu'un d'autre."
Jamais de la vie ! Les deux sous, je m'en moque, mais le quelqu'un d'autre je ne veux pas en entendre parler. [...].
- Alors, dit Alain Le Goff en tirant sur sa pipe, je ne peux pas vous faire confiance ?
- Deux bâtons à un seul bout chacun, c'est difficile à trouver. Mais peut-être, si vous pouviez vous contenter d'un seul ...
- Ils vont toujours deux par deux, c'est tout ce que je sais. Si vous mettez la main sur l'un, vous tenez l'autre en même temps.
- Et de quel côté sont-ils les plus nombreux ?
De tous les côtés, dit Alain Le Goff.
- Mais comment reconnaît-on qu'un bâton n'a qu'un seul bout ?
- Comment ? Vous ne savez pas ? C'est quand l'autre bout n'est pas là ! [...]
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Un notaire en saura toujours plus qu'un percepteur et un médecin moins qu'un vétérinaire. Quant au gendarme, il ne saura rien du tout à moins qu'il ne soit du pays en question, auquel cas il sera très peu gendarme.
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L'ignorance n'est jamais une offense, mais c'est toujours un plaisir d'apprendre ce qu'on ignorait jusque-là.
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Il y a trois sortes d'hommes : les vivants, les morts et ceux qui vont sur la mer. PLATON
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Et je n'ai jamais vu l'océan se mettre dans cet état. C'est parti sans crier gare, ça s'est mis à fermenter dur sous l'Herbe d'Or et aussitôt le ciel est entré en action, les vents nous ont foncé dessus de partout, ils n'arrivaient pas à trouver leur lit. Par moments tu te rappelles, ils se contrariaient tellement, ils barattaient si bien la surface qu'on aurait dit un tremblement de terre.
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De midi à trois heures, on fera un énorme fricot. On fera connaissance d'une famille à l'autre, on échangera des nourritures et des propos de bon sens. (...) Et tous les reliefs seront ramassés, rien ne traîner, au besoin on creusera un trou pour y mettre les petits débris inutilisables et l'on rebouchera soigneusement. Il ne faut pas salir ce qui n'est pas à vous. Pauvres, sans doute, mais civilisés. (...)
Et nous les enfants, déchaussés, nous partons dans les champs d'écueils à la recherche des crabes verts et des petits poissons à grosse tête qui pullulent dans les trous d'eau. Mais on nous a bien recommandé, à chaque fois que nous retournons un caillou, de le remettre à sa place.
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L'enfant de la campagne n'avait pas de jouet. On ne peut même pas dire qu'il s'amusait à jouer. Il apprenait en s'amusant, c'est tout.
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« Avec le français, on peut aller partout. Avec le breton seulement, on est attachés de court comme la vache à son pieu. Il faut toujours brouter autour de la longe. Et l’herbe du pré n’est jamais grasse »
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Quand le dernier homme quitta le village, ceux qui restaient là-haut savaient déjà qu'il ne reviendrait plus que pour rendre visite à sa parenté, de loin en loin, si sa bourse était assez forte pour supporter les frais du voyage et lui permettre de faire bonne figure aux lieux de son berceau. Bonne figure, mais pas plus.
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Au Pays Bigouden, la misère était encore le lot de bien des gens au début du siècle. C'était une calamité comme une autre et contre laquelle on ne pouvait pas grand-chose. Le moindre coup du destin suffisait à y faire tomber ceux qui étaient déjà en prise au diable sans le loger dans leur bourse ni le tirer par la queue, comme on dit en français. Le naufrage, l'invalidité, la maladie sur les hommes ou sur les bêtes, le feu dans la paille, une mauvaise récolte, un maître trop dur ou simplement les sept malchances quotidiennes vous jetaient pour un temps sur les routes, vous obligeaient à tendre la main au seuil des portes, la prière entre les dents et les yeux fermés sur votre humiliation. Quelquefois, les hommes choisissaient de se pendre et il y avait toujours, dans l'appentis, une corde qui ne demandait que cela. Les femmes préféraient se noyer et il se trouvait toujours un puits dans leur cour ou un lavoir au bas de leur champ.

133 – [Terre humaine/Pocket n° 3000, p. 29-30]
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Il est plus facile d’être de son temps que d’être de quelque part.
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Cependant, mon père put fréquenter l’école communale de Plozévet jusqu'à l’âge de onze ans. Le sabotier aurait voulu que tous ses enfants eussent de l’instruction. Lui-même lisait dans les livres et c’était assez rare, à l’époque, pour un homme de sa condition. Il lisait en breton et en français, de préférence à haute voix. Quelqu'un m’a dit l’avoir entendu déclamer dans son champ un livre à la main, en guise de récréation. Moi, je l’ai vu manier mes livres de classe comme un prêtre les évangiles. Un tel homme, ne pouvait qu’ambitionner de l’instruction pour ses enfants.

320 - [Terre humaine/Pocket n° 3000, p. 15-16)
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Pour Sachka

Quand vous arrivez à Pouldreuzic qui serait presque un village breton de plus qu'il vous faut traverser pour rejoindre la côte et pour malchance si l'on s'égare un peu à cause d'un gros bahut suivi de trop près, vous êtes bons pour faire trois fois le tour de l'église si vous n'avez pas votre gps ; sauf que ce n'est pas possible ! Il y a au moins trois choses qui vous font mettre le cap sur Pouldreuzic, le cidre Kerné qui coule à flot, le pâté Hénaff dont on bourre sa besace pour faire le pique nique sur une sente de douanier et la maison de naissance de Per Jakes Hélias.

Oui le cidre Kerné vaut le détour, l'entreprise familiale a su faire prospérer l'affaire et le produit du terroir est excellent ; la boîte Hénaff, sa réputation n'est plus à faire, j'en ai même trouvé au Goum de Moscou, ils devraient juste sur place améliorer le prix (à mon avis), mais alors la maison de Jakès Hélias, elle est pratiquement toujours fermée, on est priés de faire demi-tour. C'est bien dommage pour un bled qui a trois cartes maîtresses dans les mains et n'en jouer qu'avec une et demie, à moins que les choses aient changé depuis !..
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Tout a déjà été dit., mais comme personne n'écoute, il faut toujours recommencer. André Gide.
Remonté par la 4e de couverture des Lettres de Bretagne de Per Jakez Hélias
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En Bretagne et ailleurs aussi, la chasse aux "langues secondes" :

Les instituteurs ne parlent que le français bien que la plupart d'entre eux aient parlé le breton quand ils avaient notre âge et le parlent encore quand ils rentrent chez eux. D'après mes parents, ils ont des ordres pour faire comme ils font. Des ordres de qui ? Des "gars" du gouvernement. Qui sont ceux-là ? Ceux qui sont à la tête de la République. Mais alors, c'est la République qui ne veut pas du breton ? Elle n'en veut pas pour notre bien. Mais vous, mes parents, vous ne parlez jamais français. Personne dans le bourg ni à la campagne ne parle français... Nous n'avons pas besoin de le faire, disent les parents, mais vous, vous en aurez besoin. (...) Qu'est-ce qui s'est passé, alors ? C'est le monde qui change d'une génération à l'autre. Et qu'est-ce que je vais faire de mon breton ? Ce que vous faites maintenant avec ceux qui le savent, mais il y en aura de moins en moins. Mais pourquoi... ?
A l'école, il est interdit de parler breton. Il faut tout de suite se mettre au français, quelle misère ! (...) Nous nous mettons bientôt à la torture, bourrés de bonne volonté, pour fabriquer de petites phrases en français. Est-ce de notre faute si des mots bretons se glissent dedans ? D'ailleurs, le maître est le seul à s'en apercevoir. Quand il assène un coup de règle sur la table, nous savons que nous avons failli. (...)
Lorsque l'un d'entre nous est puni pour avoir fait entendre sa langue maternelle dans l'enceinte réservée au français, (...), une autre punition l'attend à la maison. Immanquablement. Le père ou la mère, qui quelquefois n'entend pas un mot de français, après lui avoir appliqué une sévère correction, lui reproche amèrement d'être la honte de la famille, assurant qu'il ne sera jamais bon qu'à garder les vaches, ce qui passe déjà pour infamant, par le temps qui court, auprès de ceux-là même dont une part du travail est de s'occuper des vaches.
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Ils étaient placés au bas de l'échelle, la meilleure place pour cracher à l'aise.
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Personne n'a jamais souri comme Alain le Goff et voilà pourquoi les hommes sont malheureux sur la terre. Il frappe le tronc rugueux de sa main ouverte : " Vous voyez bien que c'est une grosse corde , le tronc de l'arbre. Il y a même des nœuds dedans, quelquefois. Les torons de la corde se desserrent à chaque bout pour s'accrocher au ciel et à la terre. On les appelle des branches en haut et des racines en bas. Mais c'est la même chose. Les racines cherchent leur chemin dans le sol de la même manière que les branches s'introduisent dans le ciel.
- Mais c'est plus difficile d'entrer dans le sol que dans le ciel . - Hé non! Si c'était vrai les branches seraient droites. Et voyez comme elles sont tordues sur le pommier que voici ! Elles doivent chercher leur chemin, je vous dis. Elles poussent, le ciel résiste, elles changent de direction aussi souvent qu'il le faut. Elles ont bien du mal, vous savez. Peut être plus de mal que les racines en bas. - Et qu'est-ce qui leur donne tant de mal, grand-père ?
- C'est le vent, le vent pourri. Le vent voudrait séparer le ciel de la terre. Il pousse sa langue entre les deux. Et, derrière lui, la mer attend pour tout recouvrir. Mais il y a les arbres qui tiennent bon de part et d'autre. Le soleil béni porte secours aux branches, tandis que la pluie réconforte les racines. Une sacrée bataille, mon fils. Cela n'arrête pas de se battre, en ce monde.
- Et nous, alors! Qu'est-ce que nous devons faire ? - Avoir confiance dans les arbres contre le vent.
Si pacifique est le sourire d'Alain le Goff que j'ai peine à croire que le monde est l'enjeu d'un combat entre les éléments. Je vis en sécurité à la hauteur de tronc des arbres, tandis que les oiseaux surveillent de près les racines célestes et que toutes sortes de bestioles muettes s'activent obscurément autour des branches souterraines.
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C'est pourquoi tu les entends qui s'interrogent sur les aliments spirituels qu'il convient de fournir aux hommes afin de vivifier leur esprit et d'ennoblir leur coeur. Saint-Exupéry (Citadelle)
Remonté par Per Jakez Hélias (1978) Lettres de Bretagne
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— Madame, j’aurai la conscience de vous en dire la raison ; mais je réclame toute votre indulgence en vous confiant un pareil secret. Je suis le voisin de monsieur votre père. J’ignorais que madame de Restaud fût sa fille. J’ai eu l’imprudence d’en parler fort innocemment, et j’ai fâché madame votre sœur et son mari. Vous ne sauriez croire combien madame la duchesse de Langeais et ma cousine ont trouvé cette apostasie filiale de mauvais goût.

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