Pierre Lance raconte : Savants Maudits, chercheurs exclus.
On ne peut se résoudre à croire que des hommes apparemment de bonne moralité puissent faire échec sciemment à une découverte capitale pour la santé humaine.
(...)
Pour tenter de comprendre l'incompréhensible, il faut se mettre soi même par la pensée en situation de danger potentiel. Faites un test ami lecteur. Imaginez que vous êtes un ingénieur spécialisé de haut niveau construisant des plates formes en mer pour une grande compagnie pétrolière. Vous avez une situation enviable et vous faites partie de l'élite technologique de la société moderne. A la seule lecture de votre carte de visite n'importe quel quidam est pénétré d'admiration et de respect. Et vous voyez débarquer chez vous un inventeur enthousiaste venant vous révéler qu'il a mis au point le moteur à eau claire et que bientôt plus personne n'aura besoin d'essence. De surcroît il ajoute, avec une admirable candeur, qu'il compte sur vus pour faire connaître son invention.(...) Allez vous sans la moindre hésitation le serrer dans vos bras en lui disant :"Bravo! Vous pouvez compter sur mon aide et mon soutient"? En fait vous serez totalement paniqué, et votre premier réflexe, je vous en fait le pari, sera plutôt de lui dire: "(...) Cela m'a tout l'air d'une idée farfelue".
Vous dites? Je vous calomnie? Vous êtes d'une scrupuleuse honnêteté, capable de pousser celle ci jusqu'à l'héroïsme?
D'accord, admettons. Mais vous n'êtes pas tout seul. Et dès que vous allez emmener votre nouvel ami et ses plans mirifiques dans les somptueux bureaux où s'édifie l'avenir du monde, vous allez vous heurter à la levée de boucliers de la légion formée en tortue de tous ceux qui ne sont pas des héros, ni des créateurs, ni des visionnaires, et, croyez moi, ça fait du monde.
Quelle que soit la maladie qui traduise en dernier ressort la déchéance organique, son apparition témoigne seulement que l'on arrive au commencement de la fin, et que le système immunitaire n'est plus en mesure d'assurer pleinement son rôle. Pour franchir la dernière porte de sortie, une simple grippe peut faire l'affaire. D'ailleurs, l'avez vous remarqué, aucun certificat de décès ne porte plus la mention "mort de vieillesse". La médecine a systématiquement évacué la mort naturelle. On doit obligatoirement être mort de "quelque chose". Même l'embarquement pour le dernier voyage a été médicalisé.
Avant la guerre de 1914, les « dispensaires marins » créés par René Quinton fonctionnaient à Paris mais aussi dans de nombreuses villes de France: Lyon, Elbeuf, Nancy, Dunkerque, Pont-à-Mousson, Brest, Reims, Creil, Commercy, St-Denis, Dugny... et hors de nos frontières à Bruxelles, Bougie, Alexandrie ... En 1905, alors que la mortalité infantile était énorme et que sévissait une épidémie de choléra, le nombre d'injections de «plasma de Quinton » (eau de mer isotonique) pratiquées sur des nourrissons en danger atteignait 100 000 par an à Paris et 150 000 à Lyon. Paul Macouin relate qu'à ce moment :
« Les médecins qui prescrivent des injections d'eau de mer voient leur nombre croître chaque jour et Quinton atteint immédiatement la célébrité. Il faut bien dire que les résultats dépassent toutes les espérances : le nourrisson cholérique guérit dans presque tous les cas, l'athrepsique, qui est à l'époque voué à une mort inéluctable, accepte sous l'influence marine de se réalimenter, ce qui assure son rétablissement. C'est ainsi que des milliers de nourrissons condamnés par l'hôpital seront arrachés à une mort certaine. »
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Mais la lame de fond est venue se briser contre la digue bétonnée par l'oligarchie médicale qui a réduit en esclavage le bon peuple «sécurisocialisé», tandis que nous devinons le propos non écrit de l'indignation mercantile :
- Comment ? Guérir les malades avec de l'eau de mer quasiment gratuite,
alors qu'on peut les faire durer et endurer grâce à des spécialités chimiques à prix exorbitants ? Vous n'y pensez pas ! Vous voulez gâcher le métier, ma parole !
Mais si cela est vrai, me direz-vous, alors que faire ? Tout simplement essayer de faire voir aux pollueurs, souilleurs et empoisonneurs de toute sorte que ce n'est plus seulement la tombe du voisin qu'ils sont en train de creuser, mais celle de leurs propres enfants. Alors peut-être y regarderont-ils à deux fois, car les crocodiles eux-mêmes veillent sur leur progéniture.
La cruelle réalité, c'est que les seules découvertes scientifiques ou présumées telles qui peuvent se développer, particulièrement depuis un siècle, sont celles qui ouvrent carrière à des puissances financières, lesquelles, une fois installées, ont les moyens d'étouffer dans l’œuf tout ce qui menace leur suprématie, et elles ne se privent pas de les utiliser.
Chacune des personnes présentées dans cet ouvrage mériterait à elle seule un volume entier, et il va sans dire que cette liste est loin d'être exhaustive. Ne connaissant que trop bien les tares de la société française, que j'étudie depuis près de quarante années, je ne doute pas qu'elle ne recèle dans tous les domaines des dizaines, sinon des centaines, d'esprits d'insigne envergure condamnés par la "nomenklatura" à n'être jamais de leur vivant connus du grand public, si même ils devaient l'être un jour longtemps après leur mort.
Quelle que soit l'interprétation des résultats, ces expériences étaient de véritables travaux de pionnier qui, à juste titre, «firent frissonner tous les biologistes de toute l'Europe». On se serait attendu à voir une foule de chercheurs s'engager fièvreusement dans la voie ainsi tracée. Il n'en fut rien. Personne n'essaya sérieusement de confirmer ou de réfuter ces travaux.
Koestler
Le bon peuple nourrit l'illusion que les scientifiques sont nécessairement des esprits novateurs, uniquement préoccupés de vérité pure et nantis d'une probité intellectuelle au-dessus de tout soupçon. Mais les scientifiques sont des êtres humains ni meilleurs ni pires que les autres et qui n'ont, pas plus que les autres, envie de bousculer leurs routines et d'abandonner leurs confortables habitudes de pensée au premier coup de trompette lancé par un pionnier. La vérité les dérange comme tout le monde et ils n'hésitent pas à la remettre dans son puits si d'aventure elle contredit les erreurs dans lesquelles ils se sont enferrés.
Ils oubliaient l'un et l'autre, comme presque tout le monde, que plus le temps passe après qu'une vérité a commencé d'être dissimulée, et plus il devient facile de la dissimuler encore, parce que le mensonge et l'erreur s'enracinent dans les esprits. D'autant que si d'aventure la vérité montre le bout de son nez, elle se brise sur l'affirmation sans réplique qui représente le summum de la crédulité populaire : « Si c'était vrai, ça se saurait ! ».
Non, rien ne s'oppose, hélas, à ce qu'une vérité demeure éternellement cachée.