Voici la forêt où les arbres perdent enfin leurs noms, où j'abandonne tout savoir, où je suis neuf et simple et nu, la forêt où j'aime aller recueillir à midi, tombant en paroles d'ombre sur mes mains, le dialogue des feuilles et de l'intarissable lumière, à la nuit une leçon de ténèbres sans larmes, sans terreur, la forêt, profonde parce qu'on vit en surface de la vie, mystérieuse parce qu'on en a chassé les dieux, terrible parce qu'elle est un premier degré de l'éternité.
Il reste à prendre le premier layon, à gravir la colline vers le bouquet d'ormeaux, à trouver, dans un vieux vallon, une yeuse un peu magique respectée par les bergers, à s'asseoir, à sourire, à écouter le vent.