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Critiques de Rick Bass (246)
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La rivière en hiver

Huit nouvelles composent ce recueil de Rick Bass qui porte d'ailleurs le titre de l'une d'elles, des nouvelles qui sont de véritables condensés de romans, chacune d'elles s'inspirant de la nature sauvage dont l'auteur est le chantre. Toutes sont de véritables tranches de vie où les personnages sont confrontés à ces grands espaces américains.

La première, Élan nous invite à une initiation à la chasse à l'élan, d'un nouvel arrivant par son voisin Matthew, au-delà de la Yaak River et ceci afin de faire provision de viande pour l'hiver. Les deux hommes devront affronter pendant plusieurs jours les étendues glacées et enneigées dans un froid glacial pour d'abord traquer la bête, puis la tuer et enfin la ramener. La puissance physique déployée par ces chasseurs dans ces conditions extrêmes m'a épatée.

Ce dont elle se souvient nous conte l'histoire de Lilly et son père se rendant de Missoula à Yellowstone, en plein été : un véritable road-trip empli de mélancolie, durant lequel défilent de sublimes paysages et beaucoup de souvenirs…

L'arbre bleu est le récit d'une famille vivant dans la forêt et dont le père Wilson décide avec ses filles un soir de Noël d'aller couper un sapin. Leur voiture tombant en panne, ils devront rentrer à pied avec la menace d'un cougar à leur poursuite. Ici ce sont la beauté et la force de la nature ainsi que ses dangers qui sont évoquées de même que la fragilité de ce père.

Dans Les chasseurs de Baux, un jeune homme, travaille à racheter à bas prix des terrains pétrolifères, dans les collines d'Alabama. Rick Bass raconte à merveille la fièvre des chercheurs d'or noir tout en livrant une fine étude psychologique du personnage.

La rivière en hiver nouvelle qui, bien que très courte est cependant glaçante ! le jeune Brandon plonge sous la glace pour attacher une chaîne à un pick-up tombé dans la rivière pour qu'ainsi les villageois puissent le remonter ! Ce sera une véritable bataille contre les éléments.

Coach, surnom donné à cet homme de quarante-trois ans, marqué par l'abandon de son père à 6 ans et dont la mère est maintenant malade ne connaissait que la bagarre et la désertion. Il est devenu entraîneur d'équipes féminines de basket grâce à un vieil entraîneur qui l'avait sauvé de l'abîme quand il était au lycée. C'est devenu une thérapie. Outre le combat de cet homme pour contrôler ses pulsions, je suis restée sans voix devant l'imagination terrifiante et désolante dont ont pu faire preuve des hommes, dans ce dernier village où arrive Coach, pour réhabiliter d'anciennes carrières effondrées...

Avec Guide du Pérou et du Chili à l'usage d'un alcoolique, on retrouve Wilson et ses deux filles Stéphanie, bientôt 18 ans et Lucy 15 ans. Celui-ci diminué par une chute et devenu alcoolique a décidé ce voyage à trois vers l'Amérique du sud, avant que ses filles bientôt adultes ne le quittent, pour qu'elles gardent en mémoire le souvenir d'un père aimant. Il fera des efforts pour ne pas boire… Amour paternel, amour filial, rencontres imprévues et une fin sublime.

Histoire de poisson clôture ce recueil. Il y est question d'un énorme poisson-chat pêché dans le Colorado et remis à un garagiste par un client pour régler ses dettes. Ce poisson va bientôt susciter bien des envies et prendre une autre dimension.

Toutes ces nouvelles sont tissées autour de la nature avec sa beauté et la marque qu'elle dépose au creux de nos mémoires, mais aussi ses dangers quand l'homme s'y confronte.

Rick Bass décrit à chaque fois, des êtres fragiles, souvent cabossés par l'existence, qui tentent des expériences pour redonner un peu de sens à leur vie, pour « se réparer » ou tenter de donner une image meilleure de leur vie. Il y a un climat de danger permanent dans chacune de ces nouvelles. Souvenirs et mémoire sont aussi très présents et le fantastique pointe souvent son nez.


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Le livre de Yaak : Chronique du Montana

Entre "Always" de Spielberg ,"'L'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux " et "Au milieu coule une rivière" de Robert Redford, il y le Montana...





Pour Rick Bass; il y a le Yaak, une vallée reculée du Montana, où il y vit depuis 20 ans. "Pourquoi je veux sauver le Yaak? "interview de l'auteur à L'Express. "Après 43 années de quasi-indifférence - depuis le vote, en 1964, de la Loi sur la protection de la nature, le Wilderness Act .





"Si un lieu est source de paix, ne peut-il transmettre cette paix à ceux qui l’habitent ? Et si tel est le cas, jusqu’où – telle une pierre jetée dans un étang – cette paix s’étendra-t-elle ?

Quelle est la valeur d’un lieu ?"





La vallée du Yaak est sauvage, et si elle ne ressemble pas au reste de l'Etat - ni au reste du monde -, elle porte en elle l'esprit du Montana, l'esprit d'un lieu sans frontières,





"Le Yaak héberge une population diminuée mais tenace de grizzlys et d'ours noirs, de loups et de gloutons, de lynx et de chats sauvages, de martres et de pékans, d'aigles dorés et à tête blanche, sans compter une myriade de hiboux, de renards, de coyotes, de porcs -épics, jusqu'à de rares caribous, étroitement liés aux rennes de Laponie et aux régions arctiques, émigrés du nord du Canada."





"J'aime le cri solitaire et troublant des coyotes, les nuits d'hiver. J'aime la façon dont il surgit après une journée passée à scier du bois, quand la lumière s'en va et que s'en vient la nuit, et que les coyotes prennent la parole."





"En écrivant ceci, je tremble. Je tremble parce que c’est l’hiver dans la cabane où j’écris, ce nid à rats sans fenêtre et sans chauffage.

Je tremble parce que je m’apprête à révéler, sans pudeur et sans rien dissimuler, les chers secrets de ma vallée..."
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Le livre de Yaak : Chronique du Montana

« Le livre de Yaak : Chronique du Montana » n’est pas un roman, c’est un témoignage, un compte rendu, « une arme du cœur » de la part d’un auteur américain, Rick Bass, tombé en amour pour cette vallée du Yaak, dans le Montana à l’Ouest des États-Unis, une vallée aujourd’hui au deux tiers défrichée.

Pourtant, cette vallée, somme étrange de roches, de forêts et de rivières, est magnifique à tel point que l’auteur en exode vers l’Ouest, avec sa femme, tombe immédiatement sous le charme lorsqu’il découvre ce paysage quelques années plus tôt et s’y installe, lui pour écrire, elle pour peindre :



« une vallée bleu-vert tapie derrière une couche de nuages, avec un peu de fumée qui montait d’une ou deux cheminées tout au fond, une rivière paresseuse qui serpentait en contrebas, et une puissance, une immensité qui nous força à faire halte. C’était un peu comme de voguer en pleine mer tout en traînant derrière soi une ancre que retient un obstacle dans les bas-fonds ».



Les industriels pillent les fonds et le domaine publics à un rythme tel qu’ils ne laissent à ce territoire aucune chance de s’en remettre, des coupes à blanc sévères et brutales, scalps intolérables vécus par l’auteur comme autant d’incisions chirurgicales qui lui déchirent le cœur, le mettent en miettes. Rick Bass n’a que sa plume pour raconter la magie du lieu, dénoncer le pillage, espérer sauver cet endroit. Un plaidoyer dans lequel on ressent les sentiments de ce grand marcheur, sa contemplation, ses méditations, ses observations, ses colères sans jugement.



« Il nous faut la force des lys, des fougères, des mousses et des éphémères. Il nous faut la virilité des lacs et des rivières, la féminité des pierres, la sagesse du calme sinon du silence ».



Ce livre, qui relate un combat écologique sans réelles surprises, comme il en existe tant d’autres, offre cependant de très belles réflexions sur la vie sauvage, le retour aux sources, sur l’art également ainsi que son rapport avec la nature. De très beaux passages littéraires nous sont offerts, même si ce livre souffre de quelques répétitions. Il m’est d’avis qu’il ne se lit pas comme un roman, pour pouvoir s’émerveiller face aux loups, grizzlys, caribous, esturgeons, hiboux et aigles géants que nous croisons, ou encore à la vue et à la senteur des cèdres, des épicéas, des sapins, ou autres mélèzes, il faut le lire de temps à autres, déguster quelques chapitres, respirer…Le simple fait de lire ces quelques pages apaise, libère les tensions accumulées, malgré le combat mené. « Comme lorsque vous, ou quelqu’un d’autre, posez vos mains et l’extrémité de vos doigts sur votre visage, sur vos paupières, et que vous les effleurez lentement, de haut en bas, pour en chasser les stigmates de la fatigue. C’est ce que je ressentais dans mon cœur et je me sentais heureux ».



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Colter

Colter m'a un peu moins séduit que les autres livres que j'ai lus de Rick Bass même si j'y ai retrouvé son humour, son respect de la nature, son admiration devant les couchers de soleil sur les Rocheuses et découvert sa relation avec l'un de ses chiens qui donne son nom comme titre du livre, Colter.



Rick Bass n'est pas un grand chasseur, mais il aime voir débusquer les oiseaux, par le travail du chien, le tir en suite semble peu importer. Il doit pourtant rendre hommage à son chien en abattant quelques pièces pour justifier tout le travail de Colter.



Le livre est assez court, les sentiments exprimés par Rick Bass sont toujours nobles, altruistes, soucieux de la qualité qu'il apporte aux rencontres qu'il fait. Le dressage du chien par un professionnel -- et en quelque sorte également du maître -- est un peu fastidieux , de même que les tirs sur les pigeons d'argile.



En revanche la relation du maître avec le chien est splendide avec un niveau de compréhension réciproque qui fait que l'on peut parler d'amour entre eux.



J'aurais souhaité davantage de descriptions de la nature, de l'automne dans le Montana, Rick Bass donne quelques moments fulgurants mais trop rares à mon goût.



C'est le livre du chien et de ce point de vue l'objectif de Rick est rempli.
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Sur la route et en cuisine avec mes héros

Rick Bass livre dans cet ouvrage un récit étourdissant, malgré la lenteur de l'écoulement du temps au fil des rencontres, journées et soirées, qui permet de rencontrer avec lui quelques grands auteurs américains, ses héros, tout en partageant les repas qu'il a voulu leur préparer.



Pour la cuisine, malgré le détail de ses recettes et de ses réalisations, Rick n'est pas un champion et les héros sont souvent indulgents devant le raté de certains de ses plats que lui-même reconnaît et dont il désespère. Il est anxieux dans ses préparations culinaires, prenant des risques impensables, comme transporter de la viande d'élan jusqu'en Suisse. Et pourtant les repas partagés sont toujours réussis, quelquefois par le menu, toujours par la qualité et la saveur des échanges au cours de ces moments de vie intense avec les écrivains.



En effet, ces rencontres sont extraordinaires où se mêlent admiration, respect, amitié découverte. Et pour le lecteur, Rick Bass livre une mine de références littéraires des écrivains de l'ouest, avec les mythes comme Abbey, Peacock, Matthiessen, Mc Guane et bien d'autres qui ne font pas partie de ces rencontres dont Rick évoque les oeuvres en donnant envie à ses lecteurs de les découvrir ou en leur en rappelant les délices s'ils les connaissent déjà.



Rick Bass livre aussi ses préoccupations par rapport à son âge, même s'il est encore dans la force physique et intellectuelle, à la vieillesse, la solitude, la nostalgie précédant les séparations, la fierté par rapport à ses élèves qui participent à la cuisine, à sa fille qui réalise aussi une partie du voyage.



Ainsi, près de 350 pages coulent tranquillement, chacune apportant le plaisir de découvrir des maisons d'auteurs, leurs cuisines, leur manière de vivre et d'écrire, leurs endroits secrets, bref de la nouveauté à chaque étape.



En filigrane, l'immense Jim Harrison, lui meilleur cuisinier que Rick, dont les citations émaillent avec à propos le récit de Rick Bass.



Une très belle lecture pour tous les amateurs de l'ouest américain, du bien manger et du bien vivre, de littérature américaine emplie des saveurs de l'ouest, de passionnantes références littéraires.

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La rivière en hiver

Huit belles nouvelles sous la plume magistrale de Rick Bass qui a le talent pour emporter l'adhésion du lecteur dès les premières lignes de chacune de ces courtes histoires.



Alors, bien sûr, comme toutes les nouvelles, elles sont inégales, d'abord en longueur, deux d'entre elles prenant beaucoup plus d'espace que les autres, et en qualité, ceci selon la perception du lecteur et l'attachement qu'il a pu ressentir envers les personnages, qu'il ne retrouvera pas, sauf exception, au fil de sa lecture.



Chacune présente néanmoins des personnages intéressants, aussi bien les chasseurs d'élan et de cerf que les fillettes parties avec leur père couper dans la nuit le sapin de Noël (on les retrouve d'ailleurs dans une autre histoire, devenues adolescentes, portant et tentant de sécuriser leur père ainsi que lui-même l'avait fait pour elles dans la forêt) ou ce fameux chasseur de baux plein de scrupules, ce jeune à la pêche d'un pick-up englouti sous la glace de la rivière et même cet autre jeune gardien éphémère d'un poisson-chat.



Mélancolie, nostalgie, fuite du temps et conscience de l'inéluctable peuplent ces histoires avec la toile de fond de la nature où Rick Bass est le maître pour saisir et traduire les faits les plus simples, comme l'image du feu, le froid, ce fameux wild du Montana, mais aussi, pour une fois l'Amérique du Sud avec Chili et Pérou.



Un vrai plaisir de suivre les méandres de la rivière en hiver, avec Rick Bass, sachant que même si l'immuable sera toujours là au prochain printemps, d'autres choses auront ou vont changer, inéluctablement, Rick Bass sachant faire ressentir l'intime, le profond, ce qui nous habite finalement tous et que nous ne sommes pas toujours capables d'exprimer.
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Les derniers grizzlys

Reste-t-il des grizzlis dans les montagnes San Juan au Colorado ?



Si oui, il faut arriver à persuader les agences gouvernementales de les laisser tranquilles, de ne pas les surveiller par hélicoptère, de ne pas leur poser de colliers émetteurs et encore moins de leur faire la chasse, car ils ne sont ni perdus ni désorientés. Tel est le but de Doug Peacock, spécialiste reconnu des grizzlis, qui « intrigué par la persistance de rumeurs selon lesquelles il y aurait encore des grizzlis au Colorado », veut en avoir le cœur net. L’espèce n’est plus menacée ni aux Etats-Unis, ni au Canada, même si la folie meurtrière des hommes a poussé les ursidés à fuir plus loin et plus haut.



Pour ceux qui s’intéressent aux grands espaces de l’Ouest des Etats-Unis, Doug Peacock n’est pas un inconnu. C’était le meilleur ami d’Edward Abbey, cet autre défenseur acharné de la nature. Leurs livres sont autant de témoignages et d’expériences qui font autorité auprès des Américains.



Rick Bass, biologiste et géologue de la génération suivante, marche sur leurs traces. Il relate ici dans le détail les trois équipées qu’il a faites en 1990, 91 et 92 à travers les San Juan pour trouver des preuves de l’existence des grizzlis. La première est emmenée par Doug Peacock, ancien vétéran du Vietnam et féroce défenseur de l’environnement. Son langage fleuri et ses marches forcées donnent parfois du fil à retordre à ses compagnons mais leur désir à tous de trouver des preuves tangibles les soude comme les cinq doigts de la main.



Une trace dans la boue ravive l’espoir, des marques de griffes sur l’écorce d’un tremble font monter la tension, des déjections caractéristiques échauffent les esprits, des poils de mue accroissent l’enthousiasme. La marche devient une quête quasi mystique, la quête une obsession. Une obsession comme la certitude d’une présence, de ce quelque chose de précieux qui a été perdu, qu’il faut retrouver, ce quelque chose qui les dépasse. La bête est là, ils en sont convaincus. L’idée qu’il pourrait y avoir un ours derrière une crête est aussi importante que de voir réellement la bosse du dos, les longues griffes et l’ours lui-même.



Les territoires sauvages réservent toujours des surprises, même à des hommes aguerris, et quand ils se retrouvent quasi nez à nez avec des centaines de cerfs, ils s’inquiètent du manque de prédateurs nécessaires au maintien de l’équilibre biologique. Quand ils découvrent des squelettes de martres dépecées pendus aux branches, des restes de campement déchiquetés, des déchets non dégradables abandonnés depuis des années, leurs cris de colère déchirent le silence.



Les deux autres randonnées, plus pédagogiques, se révèlent aussi plus fructueuses en indices, plus foisonnantes en rencontres, plus profondes dans les questionnements et les réflexions.



Il y a aussi les bivouacs où la bouteille de whisky circule, où la transmission des connaissances scientifiques nécessaires à la sauvegarde de cet environnement exceptionnel est faite auprès de jeunes recrues et où l’ombre d’Edward Abbey est omniprésente. Comme celle du grizzli.



Grand merci à Blandine5674 de m'avoir soufflé de lire Rick Bass, ce fut un souffle palpitant.

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Winter

L'hiver, ça caille sévère. Postulat difficilement contestable.

Mais pour Rick Bass et sa femme, le froid, ça suffit pas.

Naaan, trop facile.

Tout larguer pour aller se perdre dans le trou du cul du monde, dans un coin paumé du Montana, ça c'est un défi à leur pleine mesure.

Tout abandonner pour aller défier les éléments hostiles et se retrouver, enfin, en plein accord avec soi-même.

Ils imaginaient la chose compliquée, ce qui leur permit de décrocher l'euphémisme d'or à la fin de cet hiver mémorable.



Beaucoup se rêvent aventuriers, bien loin de toute civilisation et de son confort journalier.

Rick et Elizabeth ont franchi le pas.

Passer de citadin à homme de bois nécessite, au mieux, une préparation au cordeau, au pire une bonne dose d'inconscience.

Mais sans folie, on ne fait jamais rien.



Le choc fut brutal, frontal.

Difficile d'appréhender la violence d'un tel climat sans l'avoir connu au moins une fois auparavant.



Récit initiatique et contemplatif, Winter fascine autant qu'il tanne.

Certains gimmick, notamment celui obsédant du bois, échauffent même les esprits.



Mais, en même temps, difficile de ne pas être captivé par la beauté d'un tel monde dépourvu de tout superflu.

Un monde où les rapports humains se mesurent à l'aune des actes et non des paroles souvent creuses.

Un monde de silence bercé par le crépitement de l'âtre et le souffle puissant du vent hivernal.

Un monde sans fard, sauvage, dépouillé de tout oripeau futile, qui permet de revenir à l'essentiel.



Les Bass l'ont fait.

Plutôt que de rêver leur vie, ils ont vécu leur rêve au risque de se perdre, pour finalement se trouver...
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Le livre de Yaak : Chronique du Montana

J'aime bien Rick Bass, son approche de la nature, des arbres, de la faune, des éléments naturels, vent, pluie, orage, poussière, mais son livre de Yaak m' a quelque peu laissé sur ma faim.



En effet, Rick a tendance à beaucoup se répéter et à parler trop de lui, alors qu'il est immergé dans cette immense nature sauvage du Montana, décor fabuleux de son livre auquel elle pourrait suffire.



De même, si je comprends et soutiens son combat contre la déforestation massive, je trouve qu'il la mêle un peu trop à son vécu dans cette magnifique vallée du Yaak au point que le lecteur puisse perdre pied et se lasser de lire toutes ces redites écologiques.



Heureusement, il y a quelques épisode dans ce livre où Rick Bass offre à ses lecteurs des pages merveilleuses comme cette découverte des empreinte du grizzly et la tentative de l'apercevoir, ou bien la partie de pêche sur la rivière sous la pluie, son analyse de la valeur d'un lieu avec des images qui accrochent, saisissent et font peut-être prendre conscience à chacun de nous qu'il a sans doute un lieu qu'il vénère, sanctifie et souhaite voir toujours immuable. Personnellement, je rejoins totalement Rick sur ce point, ayant aussi quelques lieux, que ce soit sur l'Aubrac, dans quelques cirques de montagnes alpines ou pyrénéennes, ou des criques méditerranéennes d'accès délicat.



Alors, bien sûr, il faut lire ce livre pour partager avec Rick Bass ces moments exceptionnels et endurer patiemment ses répétitions sur le sujet qui lui tient à coeur : préserver cette vallée magique, on l'a bien compris.
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Winter

Rick Bass est né au Texas et a toujours connu la chaleur, mais son rêve a longtemps été de découvrir l’hiver.

Sa compagne et lui s’installe donc un jour d’automne dans une propriété isolée dans le Montana.

Ils vont alors réellement découvrir l’hiver, le froid, l’isolement, la neige, les animaux sauvages qui rôdent près de la maison, le bois qu’il faut sans cesse couper et rentrer, les canalisations qu’il faut empêcher de geler, la ville la plus proche qui est à plus d’une heure de route par beau temps, les communications limitées à une seule petite radio, la chasse, l'absence de voisins proches, le silence et la paix.



L’auteur nous raconte leur premier hiver grâce à ce journal de bord qu’il a rédigé durant sept mois, de septembre 1987 à mars 1988.

Pendant quelques heures j'ai moi aussi eu froid le matin en me levant, j'ai eu des courbatures dans les épaules à force de passer des heures à couper du bois, j'ai apprécié la compagnie des rares habitants de la vallée croisés dans l'unique magasin du coin, j'ai aperçu avec émotion un orignal et son petit dans la foret, j'ai croisé des loups, un ours et de drôles de chasseurs, j'ai guetté les premiers flocons, j'ai parié sur la date de la première neige, j'ai appris à me servir d'une hache, d'un générateur et d'une tronçonneuse, à savourer un hamburger maison devant un feu de cheminée....



J'ai beaucoup aimé cette immersion dans un univers froid, difficile et étrange, où la solitude est un refuge contre ce monde qui va trop vite, où les rares contacts humains sont chaleureux et où l'entraide est sincère.

Cette plongée en pleine nature a été comme un bouffée d'air frais, vivifiant et revigorant.
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La rivière en hiver

Je me suis perdu dans cet état sauvage, où le souffle de l'élan pourchassé fume sur la froidure de la forêt, où des os de bisons sont enterrés quelque part en hommage aux dieux protecteurs d'une ethnie indienne, où des saumons remontent des rivières et des bûcherons bûcheronnent... Les yeux qui brillent comme le souvenir d'une lune aux reflets bleus, ou des étoiles éphémères s'aventurent dans ton cœur, ton être, ton âme, j'écoute le silence d'un troupeau venu s'abreuver d'une soif désespérée, la musique mélodieuse des tronçonneuses au cœur de la forêt, les grognements et tintamarres des crapauds-buffles dans le réservoir du champ situé en contrebas... Je remonte « la rivière en hiver », un jour, une nuit, une vie, dans le Montana.



Je traverse des plaines qu’un vent balaye de sa fougue ou de sa folie, à la recherche d’un arbre, l’arbre parfait, ou d’un bar, le bar parfait, celui qui me servira dans le silence d’une nuit une bonne bière, un vieux juke-box crachotant des chansons du loner Neil Young ou de la belle Emmylou Harris, des vieux accoudés au comptoir, le silence devant leurs bières. L’esprit americana de ce partage. Les tronçonneuses résonnent encore dans ma tête lorsque la lune m’apparait toujours de ses atours si bleutés si souriants, le souvenir d’une vie. Le Montana, je m’y sens bien. Je m’y recueille, jusqu’à plus soif, dans le silence d’une putain de vie, dans le silence des hommes et le chant des grenouilles.



Et si c’est un hiver dans le Montana, cela devient un été en Amérique du sud. Entre deux expéditions dans le blizzard du presque Grand-Nord, je me retrouve donc assoiffé, là-également – comme quoi la soif n’est pas une question de latitudes, dans une terre de poussière – asséchée la rivière - et de silence, un guide du Pérou et du Chili à l’usage d’un alcoolique. C’est bien me connaître que de m’imaginer me (com)plaire ainsi dans cette ambiance. Là où il y a des bisons, il y a forcément des bars. Au bord d‘une rivière, au cœur d’un hiver.

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Winter

Récit autobiographique. Rick Bass, Texan d'origine, au cours de l'été torride de 1987, prend la route avec Elisabeth, son épouse, artiste-peintre. Arrivés à Yaak, bourgade située dans l'extrême ouest du Montana, ils s'installent dans une vaste propriété dont ils assurent le gardiennage, le propriétaire n'y venant que pendant la période de la chasse. Sur la propriété c'est dans la serre que Rick décide d'écrire son prochain livre. Yaak fait partie des localités qui ne sont pas encore desservie en électricité ; le principal souci de Rick est de faire suffisamment de provision du bois nécessaire pour face aux rigoureux hivers montagnards. Dans le village, les paris sont ouverts sur le jour où tomberont les premières neiges.

Winter, c'est le récit des moments de vie de Rick pendant la période du 13 septembre au 14 mars, les descriptions du paysage et ses rapports avec les autochtones.
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Toute la terre qui nous possède

D'emblée, le roman accroche par son titre énigmatique mais ce n'est qu'après la lecture qu'on en mesure la profondeur. Car il faut une certaine persévérance pour vaincre cette sensation d'accablement ou d'indolence, et se laisser séduire par la vaste étendue désertique où règne une « chaleur à cuire les cerveaux » que Rick Bass transforme en support à une rêverie intensément poétique et émouvante.

On est dans l'Ouest du Texas, au milieu des puits de pétrole et des mines de sel, un territoire où les colons espagnols comme les pionniers se sont cassé les dents. L'auteur américain fait défiler une étrange procession, des marginaux, des personnages pétrifiés dans leur solitude, des êtres meurtris, dont le mystère est destiné à faire irradier une mystique élémentaire de l'existence.

Pas besoin de noirceur appuyée, ce roman invite juste à s'arrêter sur la vie de ces gens ordinaires qui doivent composer avec le climat, le temps et l'espace étirables à souhait, ils vivent chacun comme des naufragés sur une île déserte avant de se voir réunis en une étonnante constellation.



C'est une œuvre qui impressionne par sa force visuelle, l'Ouest du Texas et le Mexique étaient un écran de cinéma au creux de mes yeux fermés. Rick Bass décrit à merveille un territoire qu'il semble connaître jusque dans ses cavités souterraines, déterrant des histoires de vestige et de poussière incroyables. Elles apparaissent comme des moments de beauté cristallisée de nature à susciter un sentiment d'éternité au milieu de paysages fragilisés par la main de l'homme.

C'est le genre de roman qui invite à un certain flottement, à dériver sur les rives du temps qui n'a plus la densité habituelle. Il faut accepter de perdre ses repères, se laisser happer par les séquences surréalistes de la Nature qui offrent une respiration bienvenue dans un texte peu dialogué parfois suffocant. Mais elles ont surtout le pouvoir d'exalter des expériences de vie désenchantées.
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Winter

Rick Bass est originaire du Texas. A l'aube de la trentaine, alors qu'il cherche avec sa femme un endroit reculé et tranquille pour écrire et elle pour peindre, faute de réussite dans leurs recherches, ils en viennent à s'installer entre le Montana et l'Idaho au sud de la frontière Canadienne.



Ayant peu de moyen, il opte pour une solution de gardiennage dans une grande propriété isolée dans la montagne où les voisins sont tous à quelques kilomètres les uns des autres. Ils se rendront rapidement compte que les relations sont directement en lien avec la nécessité d'entraide, et contrairement au temps, sont plutôt fraiches en été et plus chaleureuses en hiver.

Préparer l'hiver, c'est la préoccupation de Rick qui, débarquant en fin d'été, doit à tout prix faire ses provisions de bois de chauffage. C'est une fixation dont on comprend l'enjeu lorsque des -40° sont annoncés pour la saison froide... Il apprend donc à jouer de la tronçonneuse. En considération de la montagne de bois à provisionner, il faut le dire, c'est un art dont il faut connaitre toutes les partitions si on veut survivre



Mais Rick Bass parvient à trouver l'apaisement dans cet environnement encore préservé mais menacé par les intérêts humains. La déforestation et la pollution guettent, et on sent emerger des idées militantes grandissantes au long de son hiver.



Dans son journal, l'auteur nous donne les détails de son quotidien pendant cette période glacial. Rien de passionnant me direz-vous. Mais c'est pourtant le regard neuf et naïf d'un gars du sud sur la vie à la montagne qui donne son intérêt à son journal car la banalité de la vie prend les couleurs de la découverte au contacte des voisins qui savent et qui on la fierté de pouvoir distiller leurs précieux conseils. Car, c'est une vie à laquelle le moindre oublie ou la moindre négligence peut couter la vie.



Peut-être Rick Bass a t-il trouvé l'inspiration dans ces contrées éloignées, mais il aura fallut la partager avec toutes les préoccupation quotidiennes, l'épuisement, l'adaptation aux modes de vie et de communication avec les voisins et l'exterieur (pas de télé, pas de radio...), la préoccupation de toujours tout anticiper. Quoiqu'il en soit il laisse une part de son écrit à la contemplation de la nature et relate la paix intérieure que lui procure les grands espaces. Une sérénité blanche et silencieuse, communicative.
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La rivière en hiver

« La rivière en hiver » de Rick Bass est un recueil de huit nouvelles, qui partagent une forme d'immobilité, de mélancolie et de douceur, et sont souvent illuminées par la beauté immaculée d'une nature étonnamment préservée et sauvage.



Pour la plupart, les courts récits se déroulent au coeur de l'hiver du Montana. Les protagonistes sont bûcherons ou chasseurs et affrontent la rudesse des éléments dans un décor d'une pureté parfois féérique. L'intrigue est le plus souvent minimaliste. Les nouvelles de Rick Bass sont inclassables, et ressemblent tantôt à un conte ou à un long poème en prose tant l'écriture ciselée et délicate de l'auteur accorde une place saisissante à la beauté d'un arbre bleu qui surgit au coeur de la nuit comme à celle de phalènes virevoltant autour d'un feu de joie.



Le nouvelliste nous emporte dans la première nouvelle sur les traces de chasseurs, qui souffrent mille maux en trainant à travers la montagne enneigée l'énorme carcasse de l'élan qu'ils viennent d'abattre, et deviennent par une ironique inversion des rôles les victimes de la revanche de mère-nature.



Le lecteur plonge ensuite au creux des souvenirs émerveillés d'une jeune fille de douze ans au cours d'un long voyage initiatique à destination du parc de Yellowstone, qu'elle effectue en compagnie de son père dont la mémoire est sur le point de vaciller définitivement.



Dans l'émouvante nouvelle qui donne son titre au recueil, un adolescent plonge sous la glace pour tenter d'accrocher à un filin métallique et de remonter à la surface le pickup dans lequel son père s'est noyé un an plus tôt.



La nouvelle la plus poignante se déroule le soir de noël. Un bûcheron emmène ses deux jeunes enfants à la recherche du sapin idéal et tombe en panne au milieu de la forêt. Le chemin du retour fait songer à un conte de Grimm, lorsque des bruits feutrés de pas sur la neige indiquent la présence toute proche d'un cougar et que scintille au loin l'éclat presque surnaturel des ampoules serties de glace accrochées à l'arbre bleu qui surplombe la demeure familiale.



D’autres nouvelles nous emmènent sur les traces d'un chasseur de baux employé par l'industrie pétrolière, d'un alcoolique qui quitte le Montana pour d'étranges vacances en Amérique du Sud, d'un coach de basket féminin qui prend son métier trop à coeur, et d'un enfant qui tente de cuire un gigantesque poisson-chat lors d'une soirée barbecue insolite.



« La rivière en hiver » est un ouvrage touchant, dont les récits introspectifs nous plongent au coeur des émotions de ses personnages. La force des nouvelles aussi belles que des poèmes qui composent le recueil est de tendre vers une forme de pureté, d'effleurer la perfection de la beauté du monde, de toucher du doigt cet instant magique où des centaines de minuscules cristaux dorés éclatent sous nos paupières.



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Le livre de Yaak : Chronique du Montana

Le crépuscule, la moiteur d’un été sans fin, une légère brise agite les tilleuls pleureurs, l’écureuil qui a fait son nid dans notre jardin vole de noisetiers en érables rouges, de frênes en noyers. J’appelle mon jeune fils cadet pour une promenade dans la forêt qui se niche dans la vallée, non loin de notre longère centenaire.



Nous descendons le sentier qui mène à un petit étang dissimulé au creux de la forêt giboyeuse que nous tentons de rejoindre avant que l’astre d’or ne disparaisse à l’horizon. Deux chevaux blancs crème paissent paisibles dans la prairie ombragée, qui abritait autrefois le lit d’une rivière enfuie. Nous progressons tel deux pisteurs à l’affût, un couple de martres traverse le chemin sous nos yeux ébaubis, un milan noir en quête d’une proie pour le dîner dessine des cercles concentriques dans le ciel bleu nuit.



Nous approchons de la clôture qui proscrit l’entrée à la forêt que les chasseurs du coin ont soigneusement réservée à leur usage, peu importe, nous enjambons aussitôt la barrière soi-disant électrifiée et pénétrons dans la pénombre interdite. Après tout, mon fils a emporté son arc en érable ainsi que quelques flèches, ce qui fait de nous des chasseurs d’un autre temps, le temps où les indiens Lakota parcouraient fièrement les plaines de l’ouest américain.



L’endroit n’est pas entretenu et nous devons nous frayer un chemin entre les arbres morts écroulés, les fils de fer barbelé délimitant une frontière paranoïaque, tandis qu’ici et là des bouteilles de bière portent une timide atteinte à la beauté du lieu. La forêt est un curieux mélange d’hêtres immenses, de chênes majestueux dont certains ont plusieurs siècles, de bouleaux faméliques, et de pins maladifs plantés en dépit du bon sens au cœur d’une hêtraie qui semble dater du moyen-âge.



L’envol du héron bleu qui veille sans discontinuer sur ce lieu encore sauvage indique que l’étang est tout proche. Les animaux épuisés par la canicule qui sévit depuis plusieurs semaines viennent s’y désaltérer à la nuit tombée et qui sait, peut-être aurons-nous la chance d’apercevoir une biche, un chevreuil, ou un sanglier. Le vent est tombé, le jour est sur le point de faire place à la nuit. Enveloppés dans une chaleur étouffante, nous constatons avec une pointe de déception que l’endroit est désert.



Fatigués par le périple qui conduit jusqu’à l’étang où nagent dans une eau presque brune de gros poissons à la queue noire que je ne parviens pas identifier, nous nous asseyons à l’ombre d’un aulnes pleureur pour reprendre notre souffle. Et soudain, un craquement, puis un autre en provenance du coeur noir de la forêt. Un énorme sanglier au pelage anthracite apparaît sous nos yeux médusés, bientôt suivi de ses deux compères à la fois plus petits et moins sombres qui viennent boire l’eau trouble de l’étang. Nous nous levons sans faire un bruit pour mieux apercevoir ces animaux assommés par la chaleur, qui semblent ne pas nous avoir remarqués. Absence de vent, pénombre, silence du crépuscule. Le mystère de l’apparition de ces animaux d’un autre âge est intact et nous sentons battre dans nos poitrines le coeur sauvage de la forêt. Le mâle dominant au pelage presque ébène se tourne dans notre direction et s’approche doucement. Il est à présent à quelques mètres et je serre la main de mon enfant, conscient de la magie de l’instant. Mon coeur tombe comme une pierre dans un puits sans fonds tandis que mon petit chasseur murmure à mon oreille son émotion devant l’irruption d’une vie indomptée.



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Ce court texte autobiographique est un modeste hommage au « Livre de Yaak » de Rick Bass, qui conte avec un talent invraisemblable sa découverte de la vallée du Yaak, au nord du Montana, à travers plusieurs textes d’une beauté saisissante. L’auteur y décrit son coup de foudre pour la forêt primaire et les innombrables animaux qui se nichent au cœur de la vallée. Il nous fait part de sa crainte qu’un jour toute cette beauté ne disparaisse, et nous fait partager son combat pour sauvegarder ce qui peut l’être, en stoppant enfin notre quête insatiable d’un profit mortifère.
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Là où se trouvait la mer

Ensevelis dans la neige du Montana, dans un monde de silence blanc.

Un monde sauvage dans lequel Rick Bass fait planer comme une menace en y introduisant un personnage décapant, le vieux Dudley, manipulateur, dominateur, destructeur - fascinant. Un vieux fou, d’une richesse inestimable, ayant découvert des centaines de nappes de pétrole aux quatre coins du pays; ayant usé, consumé, désintégré une bonne douzaine de géologues.

«son entreprise était une sorte de bête aux dents pointues qui dévorait le monde, dont la mâchoire inférieure s’élevait et avalait tout ce qu’elle rencontrait, pendant que la mâchoire supérieure se refermait sur la proie»

Dudley a du mal à supporter la beauté et la grâce, et c’est justement ce qu’incarne sa fille, Mel, viscéralement attachée à cette vallée de la Swan si préservée que son ogre de père voudrait dévorer.

L’écriture est dense et profonde, il y a une épaisseur dans cet univers, et ça produit des sensations de lecture singulières et fortes, comme un enfouissement dans un monde à part - un peu comme les personnages lorsqu’ils jouent à s’enfouir dans la neige.
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Toute la terre qui nous possède

Sensation d’avoir lu un roman classique. Les phrases sont longues et littéraires, le rythme est lent. Il faut 300 pages pour comprendre le lien qui unie les personnages. Nous allons, en autre, suivre Richard, jeune géologue, au Texas et dans la Sierra occidentale comme employé dans les forages pétroliers avec les animaux qui s’abreuvent dans les fosses toxiques et meurent. Il n’arrive pas à oublier la femme à la peau claire. Ce roman est une succession de tâtonnements et tout à coup, ça jaillit fort, rendant chaque personnage et créature inoubliables. Pas aisé d’écrire un billet sur ce genre de lecture. Frustration de ne pas pouvoir entrer dans les pages pour leur dévoiler cette chose importante, que nous lecteurs savons, et pas eux. Ce qui est sûr, c’est que Rick Bass est un grand romancier.
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Les derniers grizzlys

Automne 1990, avant l'hivernage des ours et l'ouverture de la chasse, Rick Bass quitte son Montana et fait route vers le Sud. Il a suffi d'un appel de son ami Doug Peacock pour que s'insinue dans ses pensées l'infime espoir que des grizzlys vivent encore dans les montagnes des San Juan, au sud du Colorado.

Officiellement, ils ont disparu de cette région. Avec un autre compère qui a repéré des traces de griffes sur un arbre, ils veulent y croire, passer au-dessus de ces suppositions pessimistes et aller voir par eux-mêmes. Cette première exploration ne se déroulera que sur quelques jours, une reconnaissance en somme plus qu'une volonté de prouver par des indices tangibles la présence de grizzlys dans cet état.



Avant le départ, l'observation des cartes est nécessaire pour viser les endroits sur lesquels se sont attachées quelques rumeurs de la probable présence de grizzlys ces dernières années. Quelques indices, de loin en loin, ont été observés par des randonneurs attentifs. Il faut aussi prendre en compte l'intelligence animale qui a bien sûr modifié les habitudes des ours pour ne plus croiser la route de l'homme, ce prédateur exterminateur.



Alors que les trembles ont revêtu leurs couleurs d'or, nos trois hommes se mettent en route vers le pays des grizzlys. Il faut s'acclimater à l'altitude, ce mal de la montagne avec l'air qui se raréfie, et, les sacs lourdement chargés, se dépouiller progressivement de la civilisation et se fondre dans les bois, le plus discrètement possible. Ils n'ont toutefois pas oublié les bières et le whisky pour ne pas rompre trop brutalement avec notre monde !



Et ce récit, dans lequel trois expéditions se succèderont dans les San Juan, bien loin de l'assourdissant tintamarre des villes, nous souffle l'air encore sauvage de ces montagnes.

C'est jouer furtivement au détective, traquer l'indice, des griffures sur un arbre, une trace au sol, un reste de fourrure d'été accrochée à l'écorce d'un sapin, fouiller du regard ces bois pour peut-être apercevoir une silhouette brune. Et surtout rechercher et ramasser des excréments, grands révélateurs de l'espèce avec les poils qui s'y trouvent quelquefois.

C'est entendre les doux remous de la rivière, les vents hurlants du canyon, le brame des cerfs qui cavalent en pagaille depuis que ses prédateurs naturels ont quitté les lieux suite à l'intervention humaine.

C'est savourer des piments farcis au fromage belge et grillés sur le feu de camp, écouter les aventures des uns et des autres chuchotées à la lueur des flammes, se délecter de chanterelles dénichées par l'oeil exercé et connaisseur de Doug.

C'est aussi jurer contre le saccage des prairies par le bétail, constater et comprendre l'érosion des sols, piquer une grosse colère devant des morceaux de plastique, des canettes rouillées, le tas d'ordures d'un camp de chasse abandonné par l'homme qui est passé par là et a bien entendu marqué son territoire à sa manière civilisée.





Ceux que j'ai accompagnés, admirative et émerveillée par ce récit, sont animés par une certitude, celle de rejeter toute capture ou pose de colliers émetteurs. Pas De politique interventionniste mais juste savoir que cette espèce d'ursidés persiste dans ces lieux et qu'il faut donc préserver leur territoire sauvage, conserver l'espace de calme nécessaire à leur vie, tout simplement. Discrétion et respect, un devoir envers la nature. Doug Peacock en est un fervent défenseur et on apprend ici à le connaître avec ses sautes d'humeur qui le font osciller entre nervosité et bonheur extatique face aux paysages sublimes.

L'auteur ne s'est pas uniquement contenté de relater les journées de bivouac, il nous fait part de ses interrogations sur la motivation, sur le fond de cette recherche. « Sommes-nous ici pour les ours ou pour nous-mêmes ? Pour les deux, et la façon dont les deux quêtes se mêlent est bien agréable. »

Dans cet écrit, il donne la dimension réconfortante que peuvent procurer ces montagnes boisées et nous pousse à voir ce que l'on a perdu en ne respectant pas cette vie sauvage. Comment pouvons-nous continuer à affirmer que nos lendemains seront meilleurs ?

Il mène aussi ses réflexions sur la manière dont certains organismes officiels gèrent la préservation des zones sauvages sans réelles valeurs éthiques, sans véritable respect pour les animaux protégés puisqu'ils interviennent dans leurs vies. Ce livre fait partie des nombreuses alertes et accusations contre le comportement de l'homme qui, même sous couvert de préservation de certaines espèces, devient inévitablement intrusif. Son obsession du contrôle le pousse à capturer puis baguer les animaux alors qu'ils ont juste besoin qu'on leur fiche la paix.



Belle, discrète, courageuse, intelligente, cette recherche de la présence de grizzlys que les amérindiens nommaient « frères des hommes » nous envoie malgré tout un message d'espoir et de réconfort puisés sur ces crêtes forestières du Colorado.

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Les derniers grizzlys

Années 80, montagnes San Juan, dans les Rocheuses, entre Houston et Kalispell, Colorado. Rick Bass (qui m’avait laissé un excellent souvenir avec « le journal des cinq saisons » ) rejoint d’autres amoureux (dont Doug Peacock, le héros du « Gang de la clef à molette ») du grand air pour une traque aux derniers grizzlys dans ces montagnes. Une décennie a en effet suffi à exterminer cet animal, mais nos hommes gardent l’espoir de retrouver qui des déjections (eh oui), qui une touffe de poils, ou joie ultime d’en croiser la route.



L’ours est un animal fascinant capable de faire du vélo dans un cirque ou de s’habiller tout seul, mais aussi capable d’apprendre des tas d’autres choses. Il était considéré comme un dieu par les Indiens (eux aussi exterminées, par ailleurs). Et il a partout frappé les imaginaires des hommes.



C’est une plongée en plein monde sauvage, loin des « jeunes gens à l’université qui prétendent vouloir étudier la nature, écrire sur elle et même la protéger alors qu’ils sont tout juste bons à organiser des soirées et à faire du deltaplane », qui nous interroge sur la place (infime) laissée au monde sauvage sur notre petite planète malade.



Bass nous parle de l’urgence car « si l’ours, le loup, ou n’importe quel glouton passent la barre de l’extinction, alors eux [les hommes] aussi en feront rapidement autant parce qu’ils sont au sommet de la chaîne alimentaire. Parfois j’ai le sentiment qu’un seul terrain de golf supplémentaire suffira à nous condamner». Les San Juan ont besoin de plus d’espaces sauvages, mais « tracer de nouvelles frontières n’apportera qu’une réponse partielle – rien de plus qu’une façon de gagner du temps, de retarder l’inéluctable disparition. Pour que la nature sauvage puisse survivre, pour qu’elle revienne, il faut que revienne d’abord le respect ».



Il nous parle aussi du besoin vital des humains à garder des endroits sauvages intacts et proches, des endroits que l’on pourrait retrouver, par la pensée ou non, sans être obligé d’aller dans l’Himalaya ou au Congo. Des endroits qui nous rappellent notre lien avec la nature, notre fragilité, notre animalité et notre vanité, aussi.



Bon je ne vous dirai pas si Bass a finalement croisé ou non un grizzly, car finalement on s’en fiche un peu … Ce qui compte c’est de sillonner à ses côtés, de faire les mêmes gestes simples loin d’un monde parvenu à une complexité frénétique et délétère. Et de retrouver calme et apaisement.

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