Quelque part durant cette interminable dispute, la première à déborder sur les heures qui suivaient le moment où les enfants allaient se coucher, Suren, son frère et ses soeurs préssentirent qu'il n'irait jamais à Bhatkande, pas parce que l'un ou l'autre de ses parents l'avait dit, de façon explicite, mais parce qu'ils se rendaient compte que le désir qu'avait Suren de s'immerger dans la musique serait, dans cette maison, à jamais étouffé par tout ce qui était susceptible d'émouvoir les adultes.
Et peut-être que de tels trous de mémoire sont la preuve qu'il y a une main divine derrière la vie humaine, une bienveillance invisible qui protège aussi bien l'enfant que l'adulte, leur permettant de croire que ce qui arrive en ce bas monde est inévitable et préordonné et que rien de ce qui s'est passé n'aurait pu se passer autrement.