Sean James Rose

"La littérature était notre liberté. Les auteurs morts fous, suicidés---Nietzche, Mishima, Pavese; les poètes maudits-----Rimbaud, Lautréamont , Baudelaire, Mallarmé......
Nous répétions tel un mantra " La chair est triste, hélas, et j'ai lu tous les livres ".
Mauvaise foi de la jeunesse : à l'époque, j'étais avide de lecture et bien loin de penser que le sexe était triste. La noirceur était la séquelle d'une adolescence qui ne voulait pas finir, un exutoire à l'obligation de réussite ......."

Vous verrez c'est un pays très particulier, m'avait assuré le garçon de l'accueil, le brouillard se lève tous les matins et recouvre le sol. C'est à cause du Ciron, le taux d'humidité élevé produit le botrytis, un champignon qui fait moisir le raisin et donne la pourriture noble, sans quoi il n'y aurait pas de vin. Ce nectar à la robe dorée à vieil or, au nez d'abricot confit, d'orange amère et de cire d'abeille, selon le magazine d'oenologie qui traînait à l'hôtel. A dire vrai je m'y connais plus en ivresse qu'en vins.

Je me suis longtemps interrogé sur la disproportion entre nos efforts pour atteindre un but qui nous est agréable et la fugitive sensation de plaisir lorsque ce but a été atteint. Sensation quoique brève, intense. Mais que vaut une intensité qui ne dure pas ? La volupté est dérisoire au regard du manque dont la jouissance aura imprimé la marque.

On a tort de ne pas méditer sur la colère des jeunes, on a beau sourire de leur pensée brouillonne, hyper-radicale, exacerbée par leurs hormones en ébullition, se moquer de leurs solutions simplistes, c'est pour beaucoup de gens l'unique moment de lucidité sur l'existence qui les attend.

Elle aimait trop la littérature pour l'étudier. Faut-il connaître pour aimer, ou l'ignorance, le mystère, si vous préférez, est-il le voile nécessaire à toute passion ?

C'est fou comme l'amour occupe, il faut être étudiant ou au chômage pour pouvoir s'investir autant.

Je me suis longtemps interrogé sur la disproportion entre nos efforts pour atteindre un but qui nous est agréable et la fugitive sensation de plaisir lorsque ce but a été atteint.

Les choses du coeur sont plus faciles pour certains que pour d'autres. N'ayant reçu que de l'amour il n'avait rien d'autre à donner.

La deuxième est souvent plus angoissante que la première. La première fois vient en quelque sorte par surprise. Un étonnement rétrospectif - on se surprend- d'avoir fait ce qu'on vient de faire, l'action se consume dans son mouvement, pas d'anatomie mais de l'alchimie, pas de mémoire juste une adhésion, le corps fait corps avec l'autre corps. La deuxième fois c'est différent, au plaisir s'ajoute son souvenir qui l'amplifie - le grain de la peau, l'odeur des cheveux, le goût du sexe, on découvre qu'il y a toujours à découvrir, l'inédit se cache dans les détails, pâles éphélides sur les épaules, naevus insolite, infine tâche dans l'iris. La deuxième fois est néanmoins précédée d'une différente appréhension, celle de décevoir, d'être déçu, peur de n'être pas à la hauteur de son désir.

Faut-il connaître pour aimer, ou l'ignorance, le mystère, si vous préférez, est-il le voile nécessaire à toute passion ?