Une pluie fine lui arrive en pleine figure. Le contact de l'eau sur sa peau encore brûlante est apaisant, pourtant il n'arrive pas à se détendre. Le hurlement horrifié résonne encore dans sa tête, persiste comme le ferait un bourdonnement entendu trop longtemps. Il est mal à l'aise, et les méduses phosphorescentes, étrangement plus nombreuses à chaque instant, remontant en surface, éclosant par centaines, ne font que confirmer son sentiment de mal-être.
Son air satisfait disparaît. Il vient de poser le pied sur une substance molle, encore chaude. Sa chaussure fume. De la vapeur remonte de sa semelle.
– Et merde !
Le crapaud détend instantanément les cuisses, pour aller atterrir maladroitement sur une autre pierre, à quelques dizaines de centimètres de là. Il laisse l'étrange être de pierre dans son dos. Torsionnant les yeux dans sa direction, il ne le quitte pas du regard.
Si je tenais les salopiauds qui font ça, crie-t-il en serrant les poings et les dents.
Certainement les jeunes qui restent tard le soir à boire et à fumer. Mais, je ne comprends pas l'intérêt de ce vandalisme.
– C'est le principe du vandalisme, détruire par pur plaisir.
Les larmes coulent le long de ses joues, une goutte tombe, nourrissant la mer de son chagrin.
Le garde forestier passe la petite butte et disparaît de la vue. Les trois randonneurs reprennent timidement leur route, accompagnés du regard par le crapaud. Ils disparaissent à leur tour, engloutis par les épais buissons qu'ils font trembler.
L'eau monte en trombe à plus d'un mètre. Paul voit de nouveau un visage translucide se former, plus distinctement cette fois-ci. Deux yeux ronds aussi vides que le néant ornent une grande bouche ouverte sans dents. Elle ne cesse de s'allonger donnant l'impression de vouloir l'aspirer.
En cours de matinée, j’ai croisé un des clients de l’hôtel dans le couloir. Il me dévisageait tout en marchant. Je sais bien ce qui l’attirait. Les habits de travail qu’on nous oblige à porter doivent être commandés dans des sex-shops, la petite panoplie parfaite de la soubrette.
Un gros bouillonnement en surface et puis plus rien, plus aucun mouvement. Des sons métalliques résonnent et s'élèvent du fond de la piscine, ressemblant à s'y méprendre à des rires.
Ce sont surtout des hommes qui viennent à l’hôtel, particulièrement en semaine, des commerciaux pour la plupart. Ces types qui semblent plus pervers que la moyenne, qui nous matent les seins sans aucune discrétion ou qui se tordent au risque de se déboîter une lombaire pour essayer de deviner la couleur de notre culotte.