SECRÉTAIRE ROUSSE: [...] je l'ai envoyée promener et je suis tranquille, c'est fini le travail, pourquoi travailler, personne ne devrait travailler, le travail c'est de la merde, plus jamais je ne travaillerai, donne-moi la main et partons, je veux que la pluie nous surprenne loin d'ici, là où il n'y aura personne pour nous voir courir, main dans la main et nous embrasser, nous embrasser, nous embrasser.
(Elle embrasse de nouveau le Coursier passionnément.)
COURSIER (À la secrétaire Rousse) : Tu seras toujours une radicale, chérie.
SCÈNE 12 ET DERNIÈRE
HOMME MUR. – Tu ne regardes plus comme avant. Tu es devenue une grande personne. Trop même. Avant, tu regardais, sans plus. Maintenant tu regardes et tu parles. Tu critiques.
Les quatre personnages sont sur le point de d'appuyer sur la touche OK de leur portable. Tous les quatre hésitent. Tension. Soudain, Sara regarde Claudia, d'un air déterminé. Claudia comprend son regard.
SARA: Non.
CLAUDIA: Non.
ROSA : Non.
JAN : Non.
Sara et Claudia se lèvent. Sara jette le portable de Claudia par la fenêtre.
Claudia fait de même avec le portable Sara.
Rosa jette son portable par terre.
Jan jette son portable par terre.
Les portables de Jan et de Rosa vont se rejoindre dans la rue. Et juste au-dessus, deux portables atterrissent, comme tombés du ciel.
Les quatre portables éclatent en mille morceaux.
Jan et Rosa regardent les portables par terre, ils se voient, ils se regardent puis regardent vers le haut.
Sara et Claudia regardent vers le bas et se regardent entre elles.
Rosa regarde Jan, regarde par terre et rit.
FIN
HOMME. – […] Je me rappelle parfaitement, quels relents, je t’ai regardé discrètement l’entrecuisse en retenant ma respiration, en pensant que j’allais découvrir une sorte de buée épaisse et chaude, une vapeur s’échappant de dedans, tellement la puanteur était pénétrante ; mais on s’habitue à ces choses malgré soi ; parfois… figure-toi… parfois l’odeur ne voulait pas partir, et j’étais obligé de me la trimballer avec moi (l’odeur de ton con) le reste de la journée (parce que la plupart du temps, pour ne pas dire toujours, nous avons fait ça à midi, tu te rappelles ?) ; ainsi y avait pas de moyen de t’oublier.
CLAUDIA : Il faut que tu me jettes un coup d'oeil sur les portables dernière génération, ceux qui ne sont pas encore sur le marché. Le mien, c'est une vraie merde. Tu me l'as donné il y a trois mois et il est déjà dépassé. Il y a des tas de choses que mes amies peuvent faire avec les leurs et moi non. IMAGINE UN PEU LA HONTE ! Je ne peux pas me balader avec un machin pareil, tu comprends ça ? J'ai des amies quelconques et pourtant elles ont des téléphones bien meilleures que le mien, et ça, c'est INADMISSIBLE. Bref, tu sais ce qu'il te reste à faire, hein ? Tu m'entends ou pas ? !
HOMME JEUNE. – Je ne sais pas si tu te rends compte.
JEUNE FEMME. – Non. De quoi ?
HOMME JEUNE. – J’ai l’impression…
JEUNE FEMME. – Dis.
HOMME JEUNE. – L’impression étrange…
JEUNE FEMME. – Qu’est-ce qui t’arrive ?
HOMME JEUNE. – C’est comme si…
JEUNE FEMME. – Comme si quoi ?
HOMME JEUNE. – Comme si nous…
JEUNE FEMME. – Nous, quoi ?
HOMME JEUNE. – Comme si nous n’avions plus…
Un temps.
JEUNE FEMME. – Plus, quoi ?
HOMME JEUNE. – Plus rien à nous dire.
LA FEMME.- […] Tout est mal qui commence mal et rien ne change, cher impotent. Et ce n’est pas ton lit de merde qui va changer quelque chose à la merde qu’il y a entre nous. Ni entre qui que ce soit, d’ailleurs. Oui, quand le Destin a décidé de vous niquer, il vous nique pour de bon et jusqu’au bout.
L’AMIE.- Hummm… Il n’y a qu’un petit problème, un petit problème de rien du tout : si toi tu es toi et que moi je suis moi, de la même manière que le lit est un lit (surtout le lit, bien sûr qui est un lit et pas autre chose, comme je le sais désormais grâce à toi…), alors tout ça ici, où nous sommes tous les deux, c’est sûrement une chambre et pas un cendrier, enfin à mon avis.
HOMME JEUNE. – […] Je n’ai pas dit que je n’avais plus rien à te dire, tu m’entends ? […] J’ai dit que nous n’avions plus rien à nous dire. Pas moi. Pas toi. J’ai dit : nous.
LA FEMME. – Je dis que je m’en vais, je ne dis pas que je m’en vais à tel ou tel endroit, non, non, je te dis que je m’en vais, comme ça, en … en général, je veux dire dans l’abstrait, dans l’absolu. Tout a mal tourné.