Sophie Monneret

Monet passe l'été 1869 à Bougival, avec Camille, au milieu d'inextricables soucis d'argent : "Renoir nous apporte du pain de chez lui pour que nous ne crevions pas de faim, écrit-il à Bazille, depuis huit jours pas de vin, pas de feu pour la cuisine, pas de lumière, c'est atroce."

Aussi le sens du bonheur allait-il disparaître et l'impressionnisme lui rendait le plus éclatant des adieux. Exaltant la splendeur de la nature, cherchant le lien avec elle dans la lumière et la couleur, l'impressionnisme , s'il avait relativement peu représenté l'homme , s'était toujours attaché à son allégresse et à ses joies : la détente des citadins au bord de l'océan ou des rivières où il pratiquait le canotage, la splendeur visible des ciels, des eaux, des végétations, la jeunesse, celle des enfants, des amoureux, la danse, la musique parfois et toujours l'éclat de la femme dans la blancheur de sa parure , ou, avec Renoir, dans la pulpe sensuelle de sa nudité.

Les quais de Paris sont omniprésents chez les paysagistes du XIXe siècle. Turner, père spirituel de l'impressionnisme, insiste, déjà dans les années 1830, sur l'activité commerciale qui règne aux abords du Louvre et du Pont-Neuf. Vingt ans plus tard, Jongkind s'attarde, un carnet de croquis à la main, devant ce Pont-Neuf encore couronné d'alvéoles en surplomb de ses renfoncements. Il montre ailleurs l'accumulation des péniches au Pont-Marie, la baignade des chevaux quai des Célestins, les glorieux couchers de soleil dans l'axe de la Seine au pont d'Arcole, le déchargement des barriques à Bercy. (p. 47-48)

Dethomas Maxime (Garges 1867- Paris 1929).
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C'est avec lui que Lautrec loue un bateau pour un voyage en hollande. Tous deux sont d'inséparable compagnons de plaisirs nocturnes dont rendent témoignage les tableaux de Lautrec représentant Maxime Dethomas en joyeuse compagnie dans une maison close, et Maxime Dethomas assis à une table au bal de l'Opéra, sa carrure de géant débonnaire se détachant sur les minces silhouettess colorées des personnages féminins.

Jules Laforgue est alors à Berlin lecteur de français auprès de l'impératrice Augusta. C'est là qu'il rédigera son admirable texte définissant "l'oeil impressionniste".

Ce fut un beau souper (...)
Les dames cependant suçaient des écrevisses
Et se lavaient les doigts avec le vin du Rhin.

La présence de Pissarro à Pontoise fait entrer dans l'histoire de l'art moderne cette capitale de l'ancien Vexin, bâtie en amphithéâtre sur la rive droite de l'Oise, à trente kilomètres de Paris. Rues escarpées au centre, quartiers aérés tout proches, île boisée du Porthuis, la ville a beaucoup de charme. Le peintre y réside pendant deux périodes distinctes. La première, très brève, 1866-1868, le place au rang des grands paysagistes. La seconde, 1872-1883, correspond à l'apogée de son impressionnisme.

Dunes, fourrés et marais baignés d'une lumière incomparable, donnent une magie particulière à l'estuaire de la Somme. Degas vient depuis l'enfance à Saint-Valéry-sur-Somme. "Campagne beaucoup moins grasse et touffue, remarquait-il en 1861, que celle de l'Orne". Le peintre y retrouve sa famille et ses amis. ("La Baie de Somme" p. 151)

L'artiste m'a avoué qu'il adorait le monde et qu'il trouvait des voluptés secrètes dans les délicatesses parfumées et lumineuses des soirées.