Sombre, merveilleux, riche et terrifiant, ce paysage hallucinant lui inspirait tout à la fois angoisse et fascination. Quand il reprit sa respiration, une terrible odeur s’imposa. Un remugle de pourriture si puissant qu’il imprégna son palais et le saisit à la gorge. Les ordures s’amoncelaient dans la rue devant lui, jonchant au hasard les pavés comme les caniveaux. A cet instant précis, sa vision prit une toute autre nature, celle d’un royaume en putréfaction, un monde agonisant sur le point de disparaître.
Je sais qu’un habitant de cette ville vient d’entrer en possession d’une véritable fortune. Des milliers d’écus. (Ses yeux brillaient). Il ne le mérite pas, soit dit en passant. Il doit avoir fort mauvaise conscience, aussi ai-je décidé de l’en soulager très prochainement. Je n’en suis pas à une action charitable près.
Elle chercha au fond d'elle le sentiment de plénitude qu'elle avait ressenti sous l'eau. Puis elle toucha la pierre, et ele éprouva de nouveau la paix. Un calme souverain, doublé d'une volonté farouche. Le massacre de Pomawok lui revint en mémoire. Froide et implacable, la vengeance s'insinua dans son esprit. La Naïme se laissa gagner par ces sensations, jusqu'à sentir son cœur et son âme durcir, jusqu'à ne faire plus qu'un avec la pierre.
Alors elle ordonna.
Ryniver est une légende vivante au sein de la garde de Malazur. […] Aucune défaite. Un corps couvert de cicatrices comme le ciel d’étoiles. La vitesse du vent, la force de la tempête.
Le feu ne connaît pas de maître !
La vie est une farce. Les dieux eux-mêmes se moquent de nous. Ils nous appâtent avec leurs étoiles avant de balayer nos rêves d’un revers de la main. Ils nous offrent de l’amour pour mieux nous déchirer, ils nous prennent ce que nous avons de plus cher. Ils nous poussent sur la scène et ils rient de nos infortunes. Les dieux veulent que je tremble ? Eh bien, je leur jouerai un tout ! À coups de pirouettes et de pieds de nez, je rirai plus fort à leur barbe que le tonnerre rugissant dans le ciel.
[Morgan Mophus l’achimiste] Je parle trop. Si je commence à parler de nos voyages, je deviens intarissable. Un authentique moulin à parole, pire qu’une grand-mère avec ses petits-enfants. (Au bord des larmes, il éclata d’un rire suraigu et tonitruant qui fit ballotter ses joues flasques. Heureusement que le destin a décidé de me privé de descendance, sinon j’en traumatiserai des générations entière.
Elle se sentait de taille à se frotter aux seigneurs. Ils pouvaient bien, tous, la croire faible, elle s’en moquait, à présent. Cette faiblesse, elle allait en faire une force. Elle se conduirait en agneau pour mieux approcher ses proies, et, quand viendrait le temps de conclure, elle mordait en loup.
Tu vois, ce genre de faux-fuyant me hérisse. Je ne suis peut-être pas aussi fin stratège que vous, mais j’ai le nez assez creux pour savoir quand cela sent le roussi. Et là, l’odeur est tellement forte que j’en ai les poils de nez qui brûlent.
[Malazur, « Ministre de l’Intérieur » de la Cité noire, à Perceron] Aussi stupide que cela puisse paraître, tes péripéties à la forteresse de Tranche-Cime ont circulé partout dans Kan-Pang cette nuit. On parle du Veilleur d’Oustreval, l’homme qui a tenu tête aux Sourgne. L’homme qui est revenu de la citadelle hurlante. On parle d’un Veilleur prodigieux, si subtil qu’il feint la niaiserie à la perfection. Tu as déjà acquis une légitimité. Si j’étais amené à reconnaître que nous nous sommes laissés duper, ou si un autre Veilleur disparaissait si vite, toi en l’occurrence, l’opprobre affecterait Heaumenuit, ainsi que mes représentants.