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Critiques de Ursula K. Le Guin (859)
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Les chats volants

" I fait voler l'tchet ". Proverbe wallon. Lesoir.be, le 12/12/1988:

L'histoire se déroule en 1641, Monsieur Chat-roléa, ( euh Saroéla) apothicaire de Verviers ( principauté de Liège) et inventeur eut une idée un peu folle : Faire voler un chat… Afin de réaliser son projet, il décida d'attacher le chat à des vessies de porc gonflées au gaz pour qu'il puisse décoller.





Mais quel chat-rivari cette naissance inhabituelle à Londres. Roger, James, Harriet et Thelma sont des chatons volants? Dès "poltron -minet ", ils doivent se méfier des "mains et des souliers" des humains, prêts à les exhiber comme bêtes de foire. "Peut-être ont-ils des ailes parce qu'avant leur naissance, j'ai rêvé que je m'enfuyais loin d'ici, dit Mme Jane Tabby", la maman qui leur conseille donc de voler ... de leurs propres ailes.

J'en ronronne de plaisir!





Car les chatons se chat-maillent comme tous les frères et soeurs. Ils font des bêtises dans le dos de leur maman. Et pleurent quand ils sont tristes et chat-fouins... Les faubourgs de Londres sont dangereux , la fratrie va se cacher à la campagne et découvrir la nature. Les chat(r)mants chatons vont devoir chat-sser par eux mêmes et se protéger des serres de Mme Hulul un chat -huant, euh une chouette!. Deux enfants vont leur venir en aide...

C'est un joli roman d'apprentissage sur fond d'écologie.





Quelle est cette chat-lade? Mais les chats ailés existent:

"Manchester Evening News" en 1975. la première photo d'un chat ailé. le plus étonnant cas qui fut observé puisque ses ailes mesuraient 29 centimètres de long.

Xyanyang, en Chine - La dernière photo d'un chat ailé .Gentside.com le 28/08/08. Images dans boobalechat.colm

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La Main gauche de la nuit

ADIEU, MADAME.



Ces quelques mots ne sont en rien une énième critique de ce texte absolument merveilleux qu'est La Main gauche de la nuit - peut-être l'un des plus beaux, esthétiquement, philosophiquement et humainement, que la Science-Fiction a jamais présenté au monde.



Non.



Ces quelques mots sont un petit, tout petit hommage à cette grande, cette immense Dame des Lettres que fut Madame Ursula K. Le Guin, dont on apprend, ce jour, l'envol définitif vers ces mondes si lointains, si proches qui furent les siens quatre-vingt huit années durant.



Aujourd'hui, l'Ekumen est en deuil.

Aujourd'hui, les jeunes apprentis sorciers de l'île de Roke sont orphelins.

Aujourd'hui, Lavinia pleure.

Aujourd'hui, Les Dépossédés le sont encore un peu plus.

Aujourd'hui, c'est bien sûr le monde de la SF et de la Fantasy - dans ce qu'ils ont de plus élevé - qui sont frappés de chagrin, mais c'est le monde tout entier qui est un peu moins beau, depuis lundi dernier (les nouvelles ne vont pas toujours si vite qu'une communication par "ansible"...).



Je vous ai découvert très tardivement, Madame le Guin. Il y a seulement deux petites années, pour être honnête. Et avec ce roman, précisément. Qui ne m'a jamais réellement lâché depuis, même si j'écume le reste de votre oeuvre avec frénésie, admiration et passion. Vos livres d'une poésie tellement douce, immédiate, profonde, délicate. Qui, depuis, m'émerveille un peu plus à chaque nouvelle lecture, à chaque creusement : vos sillons sont profonds.



Dans ce roman, il est question d'un monde où les rapports entre les sexes ne posent enfin plus les éternels problèmes que notre petite planète connait depuis sa création puisque les êtres qui vivent dans votre planète imaginaire sont asexués, la plupart du temps. de cette androgynie quasi parfaite - il faut bien que, de temps à autres, ces terriens-là, sur cette planète "Hiver", se reproduisent un peu, alors vous avez trouvé une astuce aussi ingénieuse qu'éthiquement riche -, vous nous offrez rien moins qu'un sublime hommage à la vie, un hymne universel à l'amitié, à la tendresse et à l'amour. Sans l'encombrement douloureux des hormones...

Par cette androgynie universelle, vous montrez, et avec quel talent, comme l'humanité - NOTRE humanité - est riche de bien autre chose que de leur seule dialectique sexuelle et autre "genrisation" des temps. Vous rappelez aussi que ce qui est beau en soi, ce n'est pas l'hétérosexualité balourde, l'homosexualité joyeuse, la "trans-genralité" difficile ou que sais-je encore ? Non ! Vous nous rappeliez que ce qui est beau, fondamentalement beau, c'est l'amour, fondateur et agissant, que deux êtres, quels qu'ils soient, de quelque univers culturel, social, sexuel puissent-ils venir, peuvent se porter, s'apporter, l'un à l'autre.



Vous ne le saviez que trop bien vous même que tolérance, dignité, amour, reconnaissance de l'altérité sont les vertus cardinales sur lesquelles une société tolérante, fraternelle et aimante devrait s'appuyer, vous qui étiez la digne fille de deux grands ethnologues ayant été parmi les premiers à vivre parmi ce peuple déraciné, "génocidé", quasi effacé des mémoires (à commencer par la leur propre) que sont les amérindiens, et à tâcher de leur rendre leur vraie place dans ce monde triomphant des colonisateurs américains blancs. Vous qui fûtes aussi une grande féministe, mais de ces femmes qui considèrent que ce qui est une lutte, superbe et juste, n'a cependant rien à voir avec une guerre. Vous aimiez trop l'AUTRE pour vous abaisser à la guerre.



On retrouve un peu de ces thèmes-là, et bien d'autres encore, dans La Main gauche de la nuit, mais aussi dans le Dit d'Aka, dans cet autre aussi, au titre si pur et émouvant qu'est "Le nom du monde est forêt".

Il y aurait aussi tant à dire de ce cycle étonnant de Terremer dans lequel, assez éloignée d'un Tolkien, vous avez concentré votre pensée sur ce thème qui traverse toute votre oeuvre, au fond : Qu'est-ce que l'humanité, qu'est-ce qui fait de nous tous, avec nos différences, nos qualités et nos défauts, des Êtres Humains ?



À cause de tout cela, et mille autres pensées, propositions, recherches, comme d'avoir tant œuvré, et avec quel sagacité, quelle verve, quel enthousiasme, pour que ces genres supposés mineurs de la "SF-F-F" (Science Fiction - Fantastique - Fantasy, en bon français...) trouvent enfin la place qu'ils méritent dans ce monde foisonnant mais souvent jaloux de ses prérogatives et de son antériorité qu'est l'univers de la Littérature (avec un grand "L"), à cause de tout cela, disais-je, nous sommes nombreux sur cette petite boule bleue à vous pleurer, à vous estimer toujours, à vous regretter déjà un peu...



Fort heureusement, vous nous avez offert vos livres en partage et c'est rétrospectivement plein d'une sincère émotion que je me permets de recopier ces quelques mots tirés de ce pur petit chef d'oeuvre de grâce et d'intelligence, cette fameuse "Main gauche" dont j'ai eu l'envie de lire un extrait, maladroitement parce qu'à haute voix, devant un parterre d'amoureux des mots et des livres, à l'occasion de cette belle rencontre d'un soir que fut cette nuit de la lecture, samedi soir dernier.

Voici :



«Le jour est la main gauche de la nuit,

et la nuit la main gauche du jour.

Deux font un, la vie et la mort

enlacés comme des amants en kemma,

comme deux mains jointes,

comme la fin et le moyen.»



Au revoir, Madame Le Guin,

Vous nous manquez déjà...

Mais à tout bientôt de vous lire.
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Terremer, tome 1 : Le sorcier de Terremer

« Infinies sont les arguties des mages »…



Ursula le Guin est une magicienne…elle a l'art de provoquer un véritable enchantement se basant sur une subtile compréhension des forces occultes à l'oeuvre dans toute rencontre entre un récit et son public. Sa plume est bâton de sorcier, ses mots sortilèges, son récit élixir de jeunesse, son message incantation apaisante…



Se basant sur la magie, plus précisément sur la sorcellerie, le tome 1 des contes de Terremer est envoutant et passionnant, étonnamment épique mais en même temps très doux et attachant. Un roman de fantasy publié en 1968 qui saupoudre avec grâce des étoiles dans les yeux, de celles que nous avions enfant, et offre avec générosité cette volupté rare, celle de nous maintenir pelotonnés des heures durant, à ne pouvoir lâcher le livre tant on s'y sent bien. Je comprends totalement le succès rencontré par cette série et même à mon âge Ursula le Guin a réussi à me redonner, le temps de cette lecture, un peu de mon âme d'enfant et d'adolescente. Je crois que je peux affirmer désormais que j'aime la Fantasy. Ce dont je n'étais pas certaine auparavant ayant eu quelques rencontres difficiles, n'arrivant pas à me projeter totalement dans le monde imaginaire proposé, parfois violent, souvent guerrier. Ici le récit est doux, féminin si j'ose dire, il n'y a pas de grandiloquence, d'armes, de combats telluriques, juste une quête métaphysique et philosophique afin que la lumière réapparaisse dans les ténèbres. Je ressens aujourd'hui combien un tel monde offre évasion, rêves, déconnexion, et connaissance de soi.



Oui, la connaissance de soi imprègne ce récit : comment affronter et accepter, du moins savoir contrôler, son ombre maléfique, celle qui fait partie de tout un chacun, pour devenir un être complet ?



Nous suivons Ged, un jeune garçon turbulent et impétueux qui s'avère avoir de véritables dons. Des dons de magicien. Il sauve notamment son village de l'attaque d'ennemis sanguinaires grâce à un enchantement de brumes et de brouillards. Il est ainsi envoyé auprès d'Ogion, le sorcier mage de ce territoire de Gont, pour lui enseigner les rudiments de la magie. S'avérant être doué et avide de connaissances, il est ensuite envoyé sur l'île de Roke, dans une institution réputée, école de sorciers en quelque sorte, pour parfaire son éducation et devenir Mage. Là il apprend les arts magiques et les différentes techniques de sorts. Cependant, Ged est trop impatient, trop jaloux et trop orgueilleux, et une rivalité avec un camarade le pousse à montrer ce dont il est capable alors qu'il ne maitrise pas encore tout à fait son don n'étant qu'un apprenti. Sa vantardise va invoquer accidentellement un esprit maléfique qui n'aura alors de cesse de le poursuivre. Il doit fuir et apprendre à maîtriser ses pouvoirs pour vaincre l'esprit maléfique et se libérer de sa malédiction. Ged, pétri de remords, expie pour son péché d'orgueil, et comprendra que la fuite ne fait qu'amplifier son malheur. Il lui faut plutôt affronter cette force, devenir le chasseur et non le gibier. Il sera aidé dans cette quête de son ami Vesce.



« Il suivait à présent cette peur comme le chasseur suit les larges empreintes griffues de l'ours qui, à tout instant, peut surgir d'un fourré et se ruer sur lui ».





Cette quête au sein des différentes îles de l'Archipel voit défiler des paysages d'une beauté renversante où la magie est connue de tous et semble naturelle. Chaque hameau a son sorcier comme s'il s'agissait d'un médecin. Mais au-delà de la guérison des maladies, seuls les mages peuvent changer le sens des vents, jeter des sorts bénéfiques aux bateaux de pêche pour leur éviter de sombrer, apporter la lumière au milieu des ténèbres, comprendre le langage des oiseaux. le mage est respecté dans tout l'archipel de Terremer.



J'ai retrouvé quelques ingrédients que j'avais tant aimés dans la Horde du Contrevent de Alain Damasio…Cette quête exténuante, appréhendée dans la Horde comme un contre, des vents fous contre lesquels lutter ou avec lesquels s'allier, des eaux tempétueuses, des déserts arides et désolés dans lesquels errer pour mieux méditer. Comme dans la Horde, Terremer c'est également un territoire, un Archipel avec Havnor en son coeur, Ea où sont nés les mythes, les terres étranges des Marches lointaines, la passe des Dragons où on trouve encore en effet ces créatures monstrueuses, les terres désolées et stériles d'Osskil, au nord la Terre de Hogen et ses bancs de glace…Ursula le Guin imagine un territoire, une géographie essentiellement aquatique parsemée d'îlots rocheux et de grandes îles escarpées sur lesquels quelques peuples des terres centrales méconnaissent la mer.



« de la mer s'élèvent des monstres et des tempêtes, mais pas de puissances maléfiques, car le mal naît de la terre ».



Si le vocabulaire de Damasio se veut inventif et créatif, celui d'Ursula le Guin est classique mais porté par une plume fluide, poétique et épique. Il n'y a aucune longueur, aucun temps mort, et pourtant l'action s'entremêle toujours à l'observation des beautés de la nature.



« Il garda le cap au sud-est, et le lointain rivage disparut alors que la nuit engloutissait la frange orientale du monde. le creux des vagues était plongé dans l'ombre, tandis que leurs crêtes brillaient encore du reflet rougeoyant de l'ouest ».



L'ombre maléfique est fascinante. Je la vois comme notre part la plus sombre, celle qui peut rejaillir en cas de haine, d'orgueil, celle qu'il nous faut accepter et apprendre à maîtriser. Pour cela une vie est nécessaire, et parfois même ne suffit pas, pour apprendre ce qu'elle est, comprendre son essence, ses racines, avant que cette ombre ne prenne notre apparence et devienne nous-même, nous engloutissant complètement.



Ursula le Guin, sous couvert d'un roman de fantasy dont elle maitrise les ressorts à la perfection, nous offre une belle leçon d'humanité où le retour aux sources est la clé de toute complétude.



« Un homme sait vers où il se dirige, mais il ne peut le savoir qu'à condition de se retourner, de revenir à son origine et de garder cette origine à l'intérieur de son être. S'il veut être autre chose qu'une brindille ballottée par les tourbillons du torrent, il doit être le torrent tout entier, de sa naissance jusqu'à l'endroit où il se jette dans la mer ».

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La Main gauche de la nuit

Un roman créé comme un entonnoir… qui nous laisse beaucoup de liberté en début de lecture pour finir par ne plus nous en laisser aucune ( et oui au bout d'un certains nombre de pages il devient addictif).

C'est d'ailleurs le même principe dans l'évolution des deux personnages principaux. Qui apprennent à se connaître et a s'apprécier au fils des pages



J'ai particulièrement apprécié ce roman , qui nous explique en détails la planète Nivôse, ses us et coutumes, les particularités de ses habitants, sa géographie, son histoire , sa politique. Ainsi que la visite d'un être humains sur cette étrange planète venant proposer des échanges commerciaux.



L'écriture d'Ursula Le Guin est fluide agréable et détaillées, sans avoir cet aspect de lourdeur dans les descriptions. C'est avec aisance qu'elle montre la société et l'amitié entre deux êtres…. et en fait elle nous embarque tout simplement dans son monde imaginaire si bien imaginé.





Un énorme roman de SF, qui vaut le détour et que je pourrais même considérer comme un incontournable

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Terremer

Décidemment en ce moment je ne suis pas vraiment chanceuse avec mes choix de romans. C'est le troisième d'affilé qui ne me convainc pas .



Et pourtant une fois de plus j'aurais du être emmené dans les contrées de Terremer sans problème. La fantasy j'aime ça, en général.

Alors déjà le personnage principal ne m'a pas plus emballé que ça. Sans doute qu'il était au départ un peu trop prétentieux à mon goût , et j'ai du lui en tenir rigueur tout au long de ma lecture. Du coup je ne me suis pas attachée au personnage et l'écriture distante de l'auteure n'a certainement pas du aider.



J'ai aussi trouvé l'histoire assez lente et ponctuée de longueur. Et pourtant la plume d'Ursula Le Guin n'est pas désagréable, elle est même poétique à certains moments. Mais l'ennui s'est vite fait sentir. Et j'avoue , un peu honteuse , que je n'ai continué cette lecture que parce le challenge pavé rapporte un peu d 'argent à une association.
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Terremer, tome 1 : Le sorcier de Terremer

Terremer : c'est d'abord un monde d'eau qui tolère la présence de quelques pitons rocheux éparpillés ici et là sur lesquels, vaille que vaille, les hommes s'accrochent. Dans ce monde liquide et de terres éparses, la magie est omniprésente. On la trouve dans le vent qui agite les cheveux ; elle pénètre au coeur des arbres vénérables dans les forêts profondes, ou au milieu des haies vives à l'orée des champs. Aux yeux du mortel, elle parait aussi naturelle que la respiration, aussi indiscutable que les cycles de la vie. Pour lui, elle peut se montrer bienveillante ou effroyablement cruelle.

Seuls les mages peuvent maîtriser cette terrible puissance capable d'infléchir les vents, de raisonner la vague impétueuse, de soigner les maladies ou de comprendre le chant des oiseaux. Elle peut être destructrice, cette puissance, si elle n'est pas utilisée avec sagesse et tempérance.

Ainsi commence l'histoire de Ged le chevrier ! Ce sale gosse, insolent, impétueux, a les dons d'un grand mage. Il voit les choses invisibles pour tous les autres ; il comprend et maîtrise les mouvements désordonnés de la nature. Mais la sagesse manque à ce jeune trublion. Malgré les enseignements et les avertissements de ses Maîtres, il fait preuve d'une effarante vanité. Dominé par la jalousie et l'esprit de compétition, il finit par se perdre. Pauvre Ged, l'apprenti mage le plus doué de sa génération, qui se retrouve poursuivi sans trêve ni repos par son ombre maléfique…

Ce premier livre, c'est comme une chanson de geste, un poème épique. C'est un roman de Fantasy différents des autres, enfin ! de ceux que j'ai pu lire… Pas de fracas des armes, pas de râles des morts, pas de civilisation qui s'effondre, où de perfidies immondes… Rien d'autre qu'un malheureux qui expie pour ses errements, aidé dans sa quête par de fidèles compagnons, et qui sème la joie là où il passe. Ce roman, c'est une union permanente avec le vent fou, les arbres, les vagues endiablées, et les grands oiseaux… Et pourtant, allez comprendre ! durant tout le livre, je me suis retrouvé baigné dans une sorte de douceur attachante. J'ai vraiment hâte de retrouver Ged…



Club imaginaire 2017 Poul Anderson et Ursula le Guin

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L'effet Churten

D'abord rendons hommage à cette auteure brillante et humaniste qui est décédé il n'y a pas si longtemps et qui est heureusement toujours parmi nous par la grâce de ses merveilleux récits.

Voici un petit recueil de nouvelles assez cohérentes et un peu longues aussi . Elles sont toutes situées dans le « cycle » et donc dans l'univers de l'œkoumène. La thématique centrale traite des effets du voyage spatial qui est une contrainte déterminante et très productive de réel dans cet univers.

Les effets physiques du parcours de distances immenses dans l'espace-temps sont ici au centre des récits qui font ce recueil.

L'histoire des Sobies ,est au centre des processus qui font le voyage instantané au travers l'espace-temps en abolissant finalement le temps et l'espace. Ce processus est une nouveauté et c'est le churten. Dix Personnes inaugurent le voyage spatial churten qui est un déplacement instantané.

Le récit s'efforce de clarifier ce qu'est le churten d'un point de vue structurel et conceptuel . Il s'agit aussi de décrire ses effets qui conduisent à ce qui semble être une altération du réel et de sa perception relative et donc intrinsèquement c'est une invitation à réfléchir sa définition .Les voyageurs ne sont pas sauf un seul, spécialistes et leurs difficultés à saisir ce qui se passe et les mécanismes à l'œuvre font le corps du texte. Un texte qui est donc assez embrumé du point de vue de ses formulations et de sa narration très animée de dialogues difficiles.

Les personnages sont très réels le ton est très agréable mais le texte tourne autour des incompréhensions des processus (et de sa formulation) des effets du churten avec l'exploration des limites du langage et de celles de la pensée qui font une réalité qui est de surcroît par nature subjective. C'est le sujet du texte à mon humble avis. Il pose que la réalité est le résultat du discours que l'on tient sur elle. il n'est pas difficile il est pas non plus un texte de hard science mais certains lecteurs peuvent être lassés par son effet philosophie du langage appliquée et scénarisée à chaque pages. Mais les voyageurs sont très sympathiques et avenants mais bon.



La seconde nouvelle, La danse de Ganame s'épanche sur les effets pratiques des divergences culturelles que l'on peut , une fois en situation , être incliné à tort à minimiser dans ses comportements en contexte ethniques exogènes et de contact avec les «Autres". Sur un monde politiquement très fractionné mais fonctionnant unanimement sur la base du matriarcat , un des membres de la délégation permanente de l'œkoumène sur ce monde trouvera inconsidérément , judicieux d'accepter une union matrimoniale royale fatalement funeste pour l'époux dans cette vision politique. Se comprendre et s'entendre autour de cette situation fait partit du corps du texte et l'effet churten arrive à se nicher dans l'examen s du sujet. C'est un beau récit tout à fait dans la tonalité des textes situés dans l'oekoumène.



Ensuite et pour finir le texte intitulé : le pécheur de la mer intérieure .C'est un récit excellent magistralement réussit qui embarque le lecteur sur un monde déjà visité dans l'anniversaire du monde. le monde de la planète O. Décidément ce n'est pas facile de vivre dans une union à quatre.

Et quel monde que ce monde ! Ce type d'union est très encadré et les règles s'apprennent c'est ce que les personnages de cet univers démontrent dans la pratique et dans les émotions. Ce texte traite aussi de l'œkoumène et des motivations et du champ des possibles de ses agents dont les choix ont des incidences personnelles ,familiales et sociétales. Si vous aimez O vous pouvez, faire un tour dans l'anniversaire du monde qui est un des meilleurs recueil de textes de SF selon Moi .

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Tehanu

J'imagine les nuages noirs de contrariété au-desssus de Mme le Guin alors qu'elle relit, vingt ans après, sa trilogie Terremer, vous savez, celle où les hommes font des études supérieures, deviennent archimage et sauvent le Monde, tandis que les sorcières restent au village pour soigner les verrues. Inquiet, je la vois alors prendre une résolution.



- Mais c'était fini, madame ! Un Roi sur le Trône, le Monde sauvé, rien à ajouter !

- Mon p'tit Bernacho, tous mes personnages sont encore là. Même ceux que tu as oubliés. Je vais reprendre pile où j'ai arrêté.

- Mais... votre Ultime Rivage... bof... ultime... je m'interroge sur l'opportunité de...

- Cesse de radoter dans ton bec. N'aie crainte, tout est pareil, mais ce n'est plus pareil. Ferme les yeux. Fais le vide. Déploie les ailes. Laisse toi emporter.



Tehanu, Terremer bis ? Oui, mais non. D'ordinaire, je déteste comparer les livres, mais, après tout, ceci est un tome 4. Il n'a pas beaucoup de sens sans les trois précédents. Donc comparons, et bienvenue en Terremer 2.0.



Terremer 2.0, c'est d'abord l'incarnation de ce qui avait jusque là

encore des allures de conte. Dans Tehanu, on vit pleinement dans un environnement concret, une vie villageoise, sociale, agricole, dans les saisons, dans la nature, avec le vent et sous les étoiles, et sans rien oublier des tâches quotidiennes, vous savez, toutes ces corvées qu'esquivent les archimages partis sauver le Monde, et qui échoient aux sorcières restées au village.



Mais quand c'est avec Mme le guin qu'on désherbe une plate-bande ou qu'on recherche une biquette disparue, ça ne peut pas être ennuyeux. Parce qu'elle écrit rudement bien, sans ostentation, toujours avec les mots et les expressions justes, et juste ce qu'il faut pour donner son effet à chaque scène, de l'écossage de petits pois au souffle brûlant des dragons.



Et ses personnages aussi se sont incarnés, tant en relief qu'en profondeur. Goha surtout, alias Tenar, alias Ursula (?), une jeune grand-mère paysanne, mi battante, mi fataliste, dont on suit tous les états d'âme.



Goha est une des rares femmes de Terremer qui a eu, dans sa jeunesse, le choix de faire ces fâmeuses études, et devenir, peut-être, une femme de pouvoir. Elle a préféré fonder une famille et vivre une vie simple à la campagne (pendant que les archimages sauvaient le Monde). Voilà qu'elle retrouve un homme de sa connaissance qui avait un immense pouvoir, et qui l'a perdu. Est-ce le pouvoir qui faisait de lui un homme ?



Ce ne sont que des exemples. Tehanu aborde les rapports entre sexe et pouvoir. Pouvoir magique, souvent, mais c'est transparent, car c'est de nous qu'elle parle. Goha est confrontée aux mentalités patriarcales, au sexisme, ordinaire et extraordinaire, bienveillant et malveillant. Tehanu est un roman féministe, qui parle de condition féminine dans un monde dominé par les hommes. Mais toujours avec une certaine discrétion et subtilité. Elle utilise plusieurs personnages, comme Tante Mousse la sorcière malodorante, pour amener des points de vue différents, une vraie dialectique.



- Euh... il y a une histoire quand même ? Une quête ? Des dragons ?



Oui, il y a une histoire, avec des dragons et un enjeu. Une révolution dans Terremer.



Parce que sauver le Monde, c'est bien, mais il faut aussi cultiver notre jardin. Alors allons arroser le pêcher qui en a bien besoin.



Un voyage agréable en Terremer poursuivi en compagnie de Siabelle. Je vais de ce pas lire sa critique.
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Le Cycle de Hain, tome 1 : Le monde de Roca..

Un petit roman du cycle de l'oekoumène .

Je me suis laissé dire que c'était le premier roman de l'auteur .

L'envoyé est ici, un ethnologue .

Il est dépêché sur une planète ou cohabitent cinq espèces intelligentes différentes , diversement développées et biens campées ( pour la plupart ) dans ce récit ..

Il y a du danger dans l'air , car des malentendus " ethniques " , des rivalités et conflits d'intérêts perturbe ce monde .

Il y a aussi la difficulté et le danger de contribuer au développement technologique de sociétés qui auraient une difficulté à digérer des transferts de technologies .

L'auteur a créé une biosphère déroutante qui affiche beaucoup de présence malgré une indéniable économie d'effets .

Cette histoire est à la croisée de la science-fiction et de la fantasy , de ce fait ce roman possède un cachet très particulier et un statut un peu entre deux genres même si on

est transporté par la lecture dans un planète opéra de science-fiction assez classique.

La nouvelle qui sert d'introduction au roman est un petit bijou sur le thème : " voyage spatial vu par un sujet vivant dans une société archaïque " .

Cette voyageuse est incapable de comprendre la relativité du temps et cela lui vaudra quelques déconvenues .

L'auteur pose comme à son habitude de sérieuses et passionnantes questions .

Mais ici elle vise plus à distraire et à sensibiliser qu'à couper les cheveux en quatre .

Fondamentalement le roman diserte sur le postulat que la science peut sembler être de la magie plus que de la science dans le cadre de contacts entre deux civilisations inégalement développées et sur la difficulté de songer à envisager des transferts de technologies même dans un esprit généreux , en effet , le chemin de l'enfer n'est-il pas pavé de bonnes intentions ? Une menace plane sur l'oekoumène , mais jusque le final ce ne sera que comme un bruit lointain et avant la fin ce ne sera jamais une réalité tangible ..

Sauf dans le final .

Un bon moment de lecture avec ce dense petit roman qui de façon très étrange et nuancée est autant : de la science-fiction que de la fantasy !!



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L'Autre côté du rêve

"Confucius et toi, vous n'êtes que des rêves ; et moi qui dis que vous êtes des rêves, je suis moi-même un rêve. C'est un paradoxe. Un sage pourra l'expliquer demain, mais ce demain ne viendra pas avant dix mille générations." Tchouang-tseu, II.



Ce livre est un incroyable roman à tiroirs: on ne sait jamais lequel on va ouvrir, ni ce qu'on va trouver à l'intérieur. Paru en 1971, il n'en demeure pas moins très actuel, bien que se déroulant dans un futur antérieur. La mise en place est assez lente - ou c'est moi qui aie eu du mal à me projeter dedans, je ne sais pas trop -, et agrémentée d'explications scientifiques sur le sommeil. Puis ça s'emballe - ou s'enlise, question de point de vue ! - Onirisme quand tu nous tiens... Les rêves de George Orr nous plongent dans des univers aux réalités multiples. Pourtant, ce n'est pas tant les univers et les conséquences qui sont mis en avant que les comportements humains. La passivité de George fait face à l'exaltation du docteur Haber. Et pendant ce temps, le monde n'en finit pas de changer...



L'aspect SF du livre n'est qu'un paravent pour aborder diverses réflexions sur l'être humain: valeurs éthiques, expérimentations scientifiques, rôle du psychiatre, pollution, différences (halala, l'un de ces mondes m'a littéralement fait frémir!)... Mais les deux axes de réflexions omniprésents sont vraisemblablement ceux du pouvoir, et de la frontière parfois ténue du bien et du mal, ou pour l'exprimer autrement: le bien de tous, ou les meilleures intentions du monde, peuvent-ils tout justifier?



Bref, dans ce livre, rêve et réalité cohabitent pour notre plus grand plaisir et notre plus grand désarroi. Nous avançons par à-coups en nous enfonçant dans une terre meuble et c'est paradoxalement addictif. On se demande bien comment tout cela va finir...

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La Main gauche de la nuit

Voilà, j'ai enfin lu un livre d'Ursula Le Guin. Et quel livre ! "La main gauche de la nuit" est un superbe planet-opera, un roman riche, à la fois exigeant et agréable à lire.



Ce qui m'a le plus frappée, c'est la peinture de la planète Gethen. Finesse, subtilité, profondeur sont les maîtres mots de cette découverte. L'auteure créé un univers très cohérent et très riche. On découvre tous les aspects de cette planète ; sa géographie, sa politique, ses mœurs... Tout ça est très fluide et les longues descriptions ne sont jamais pesantes. La peinture est saisissante. De plus, l'originalité de certains aspects, tout particulièrement l'indifférenciation sexuelle des habitants de Gethen, apporte un intérêt supplémentaire au roman.



L'auteure prend son temps pour raconter son histoire. Et ce rythme tranquille, parfois contemplatif, participe à l'immersion du lecteur et rend la lecture encore plus agréable.



La qualité de l'aspect "sociologique" du roman n'est jamais développé au détriment des personnages. Le Guin met ses 2 personnages principaux et l'évolution de leurs relations au centre de son récit. Et l'émotion est au rendez-vous, et ceci en un beau crescendo. Si au début du récit, il y a une certaine distante entre les personnages et le lecteur, cette distance s'amenuise au fur et à mesure du récit pour culminer dans un dénouement d'une charge émotionnelle rare et belle.

L'aventure est aussi au rendez-vous. L'épopée des 2 héros à travers des glaciers hostiles est très prenante. L'auteure y insuffle un souffle épique à partir de petits riens, sans grands effets. Et c'est là, lors de ce terrible périple, que les dernières barrières qui pouvaient demeurer entre les personnages et le lecteur tombent.



J'ai été totalement séduite par la belle écriture de Le Guin ainsi que par l'humanisme qui se dégage de son récit.



Challenge Multi-défis 2017 - 22 (item 40 : un livre dont le titre comporte un terme du champ lexical anatomique)

Challenge Atout-prix 2017 - 4 (Prix Hugo 1970 - Prix Nebula 1969)
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Cycle de l'Ekumen : Le nom du monde est forêt

Ce texte longtemps épuisé figure dans le recueil disponible : le dit d'Aka qui un superbe récit d’étho-SF.

C'est un petit roman assez court , assez original si on le compare au reste de la bibliographie de l'auteur .

C'est le ton qui est singulier . Il y a dans ce roman beaucoup de violence , d'âpreté et de méchanceté .



Athshe est un monde foret peuplé par des humanoïdes intelligents et assez primitifs ( les Créates ) , qui vivent dans une jungle tropicale impénétrable pour certains et dans le voisinage des hommes qui constituent cette société coloniale , avec ses travers et ses rares qualités ...



Ce monde Vierge regorge de bois et de matières premières et il est mis en coupe réglée pour exploiter et piller ces ressources précieuses .

L'auteur met en scène une société coloniale radicalement indifférente à la population première de ce monde et indifférente également à tout ce qu'il possède de richesse non exploitables ou bien immatérielles .



C'est peut dire que ce roman est une dénonciation du colonialisme et une analyse des situations qui découlent de l'inégalité des termes de l'échange .Ce n'est pas un texte manichéen , mais il est doté d'un souffle et d'une intensité tout à fait entrainant , une véritable gifle .



La violence , la révolte , le mépris des cultures « premières « tout à fait : « autres « et la négation de leur valeurs et de leurs potentialités universalistes et riches

sont développés dans le détail .



La violence et le mépris sont donc obstinément à l 'œuvre dans ce « planète opéra « accomplis et c'est franchement assez difficile à encaisser , surtout que ce texte est moins une caricature du colonialisme , que la dénonciation scénarisée et théorisée de ses effets et de ses moyens d'action.

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Terremer, tome 2 : Les tombeaux d'Atuan

Un livre que j'ai trouvé profondément ennuyeux. Je l'ai abandonné dès la quarantième page. Et encore, je me suis vraiment forcé pour y parvenir, espérant trouver un vague intérêt dans l'histoire de Tenar, cette petite fille appelée à devenir une grande prêtresse des mortels tombeaux d'Atuan ( au sens propre comme au sens figuré).

L'histoire est d'une lenteur exaspérante. On se traine ! Mais on se traine… Et puis, le style poétique et doux d'Ursula le Guin vient se heurter à la cruauté des personnages de cette histoire… Une histoire passablement emberlificotée, soit dit en passant…

Quelle déception ! Où sont passées la poésie et la bienveillance du premier tome du cycle de Terremer ? Où est passé Ged, notre magicien poursuivi sans relâche par son ombre, qui communiait avec le vent, les oiseaux, les arbres, et distribuait tout autour de lui joie et bonheur ?

Il me faudra un peu de temps avant d'oser ouvrir un nouveau livre de Madame le Guin.



Challenge 2017 Ursula le Guin / Poul Anderson
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Cycle de l'Ekumen : Les Dépossédés

Première incursion dans l’univers d’Ursula Le Guin et je peux vous dire d’emblée que ce ne sera pas la dernière. Qu’est-ce qui m’a tant plu dans les dépossédés ? Je vais essayer d’être concise, sans rien oublier, mais ce n’est pas gagné. Déjà le style : impeccable et une histoire qui aborde une tonne de sujets tout aussi essentiels que passionnants dans un questionnement permanent.



Urras et Annares sont deux planètes qui se font face (chacune étant la lune de l’autre). La seconde, aride et inhospitalière, a accueilli les bannis et autres parias d’Urras qui ont instauré une société égalitaire où l’intérêt général est la suprême préoccupation de chacun, où le bonheur et le bien-être de l’un sont conditionnés au bonheur et au bien-être de l’autre. Les conditions de vie matérielles sont difficiles, mais chacun a, de par sa seule volonté ou prédisposition naturelle, la possibilité de devenir ce qu’il est ou souhaite. Étiquette accolée : « meilleures des sociétés possibles».



Pour Annares, c’est un peu comme sur terre : si la cuillère qui te nourrit est d’argent, grandes sont tes chances qu’elle le reste en vieillissant, peu importe que tu sois intelligent, débile profond, âme pourrie ou gentil Samaritain : le monde t’appartiendra et tu pourras joué dans la cour des rois. Par contre si ton berceau est de misère, espère que de dons ou de neurones tu n’aies point, tu pourras au moins croire que ton pauvre sort, tu mérites… Étiquette décollée : « Liberté-Egalité-Fraternité » à remplacer par ce que vous voulez, ça ne manque pas…



Et comme un pont faisant la liaison entre ces deux mondes : Shevek ! Un physicien surdoué d’Annares qui a mis au point une théorie scientifique, invité à en débattre et la partager sur Urras.



"Il n'avait pas eu d'égaux. Ici, au pays de l'inégalité, il les rencontrait enfin."



Mais voilà, les certitudes de Shevek vont petit à petit s’émousser et le fol enthousiasme du début va laisser place à une déconstruction des bases de chaque monde et de ces sacro-saints idéaux qui les tiennent à bout de bras.



On ne peut pas briser les idées en les réprimant. On ne peut les briser qu'en les ignorant. en refusant de penser, refusant de changer.



Le meilleur des mondes n’est pas forcément exempt d’inégalités et entre l’enfer et le paradis d’Urras se dessine malgré tout un entre deux… Sous le mot de liberté, utilisé par chacun de ces deux peuples, émergent deux visions différentes de société possible. La comparaison entre un communautarisme totalitaire passé et un libéralisme effréné actuel serait trop simple : Ursula Le Guin me semble dépasser cette dichotomie pour nous inciter à penser autrement. Au-delà...



"Prouver notre droit par des actes, si nous ne le pouvons par des mots."
Lien : http://page39.eklablog.com/l..
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Le Cycle de Hain, tome 3 : La Cité des illusi..

Dans la cité des illusions il y a deux choses : d'abord , un récit d'exploration à la coloration initiatique pour le personnage principal , amnésique, mobile et surtout , il y a , le très agréable et tranquille style solide , simple et méticuleux de l'auteur.

C'est le troisieme récits du cycle de Hain ( plus un univers que un cycle à mon humble avis).

Dans cette suite de récit (le cycle) on se fait l'idée de la terre comme étant un monde développé qui de manière lâche imprime sa volonté et sa forme au reste d'un univers humain fractionné , désarticulé et sans unité ou conscience de sa dimension existentielle globale .

C'est le seul récit du cycle qui se tient sur Terre et ce monde est une leçon de modestie semble-t-il car , cet univers et ses habitants sont sous la coupe d'extraterrestres mystérieux, supposément bienveillants.

La Terre est un monde sauvage sous-peuplé où règne une nature sans maitres avec cependant quelques rares curiosités et peu de restes des riches heures de l'Age humain . le personnage principal se cherche et cherche alors que le lecteur fait comme lui la découverte de cet univers en profondeur .

C'est un récit assez court et de qualité mais il y a une comme simplicité excessive et une certaine naïveté dans ce texte qui à mon humble avis , effleure à peine son sujet à force d'exploiter seulement le moyen d'un personnage et de maitres qui sont peut-être plus des symboles que des réalités.

J'ai le sentiment qu'il vaut mieux avoir des personnages tangibles à la portée symbolique éthérée que des symboles clairs en vadrouille , qui se baladent dans un univers tangible (sourires).

Sans spoiler , je dirais que la cité des illusions sans être une illusion est quand même un truc bizarre qui n'est pas très porteur en tant que soubassement et fondation pour cet univers qui du coup est plus simple voir assez simpliste, plus qu'il n'y parait .

Les étrangers je vous laisserait découvrir leur mystère , leurs caractéristiques et desideratas .

En somme c'est un roman de qualité qui balade le lecteur dans un univers éloquent et vivant , gouverné par des symboles . C'est un récit qui a des allures de conte sans en être un et au final c'est un texte au sujet riche sans profondeur autre que celle de poser son cadre thématique qui devient toute la consistance d'un roman qui s'effleure lui-même sans profondeur autre que l'énoncé posé et puissant d'un thème aussi prometteur que indigent dans ses développements réels qu'il est riche dans ses énoncés fugaces et dans son potentiel manqué.

C'est en ce sens que je dirais que selon moi La cité des illusions est bien une illusion ( sourire) .



Cependant attention le cycle de Hain est une merveille.

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La Main gauche de la nuit

Mais pourquoi ai-je attendu autant d'années avant de me décider à découvrir Ursula Le Guin ?

Le titre est énigmatique et poétique, à l'image du roman dans lequel on entre sans savoir de quoi sera fait le récit.

Genly est un terrien envoyé sur une lointaine planète pour transmettre un message, son interlocuteur principal sera Estraven. Ses hôtes seront-ils réceptifs ?

Inutile d'en dévoiler davantage, je ne savais rien d'autre en ouvrant le livre, et j'ai adoré me plonger dans cet univers inconnu, comme les deux protagonistes principaux le seront eux-mêmes, en se découvrant mutuellement.

Roman de science-fiction, mais aussi roman d'aventure et récit d'exploration polaire, roman d'amitié, ode à la tolérance et à l’acceptation de l'autre quel qu'il soit, un livre qui ravira les curieux et les gourmands. Curieux des autres et gourmands d'expériences diverses.

Un roman qui vous happe, avec une écriture soignée et une histoire aussi intrigante que palpitante.

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Chroniques orsiniennes

Une très joli panel de personnages à diverses époques . L'auteure nous décrit des personnages solitaires en quête de grandeur, qui vont au fil des pages modifier ou pas un avenir qui leur était prévisible.



Ce recueil de petites nouvelles est vraiment a picorer pour notre plus grand plaisir. Moi ,qui ne suis pas trop fan des nouvelles j'ai franchement adoré et les histoires, le style et l'écriture.



C'est aussi une très belle façon, même si menée a travers le fanstatique de revisiter l'histoire . Et puis le côté humaniste de l'auteure n'est pas non plus pour me déplaire.

Il me semble que ces chroniques ne sont pas les plus connues de l'auteure mais franchement ça vaut le détour de s'y arreter, pour se divertir soit même , mais surtout pour les faire connaitre autour de nous.

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Au revoir, les chats volants

Mimi la petite chatte volante noire veut revoir la ville et sa mère. Alors c'est sans écouter ses grands frères et soeurs qu'elle part seule. Mais les choses ne vont pas se passer comme elle le voudrait.



Encore une belle façon de la part d'Ursula le guin de prévenir les lecteurs des dangers de la vie, de ne pas faire confiance a tout le monde. Avec beaucoup de douceur elle montre que la différence fait partie de la vie .. mais que celle-ci n'est pas acceptée par tous de la même façon..



Avec ce dernier tome des chats volants , je tenais aussi a mettre en avant les magnifiques dessins de S.D. Schindler qui sont plein de douceur. Et donc en plus de se régaler avec les textes on se régale également avec les graphismes .



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L'Autre côté du rêve

Excellent récit aux forts accents Dickiens.

Ursula Le Guin nous livre ici une véritable fable avec comme morale principale : "le mieux est l'ennemi du bien" ou comment il est toujours dangereux de placer trop de pouvoirs entre les mains d'un seul homme.



Comme je l'ai lu dans une autre critique, j'ai régulièrement pensé au film L'Effet Papillon au cours de ma lecture. En partant d'une bonne intention, on veut arranger le monde, le rendre plus beau, et finalement on veut tendre vers une perfection, mais rien n'est plus risqué. Car au final, c'est l'expression "la fin justifie les moyens" qui va prévaloir, quand bien même ces moyens sont absolument atroces. Combien de sacrifices seront utiles pour parvenir au bonheur universel imaginé par un seul homme, un bonheur universel finalement complètement imposé. De plus, il n'y aura aucune justification à apporter puisque personne ne se rappellera des modifications réalisées "manuellement".



L'auteure fait donc, par le biais de la science-fiction, un parallèle captivant sur les régimes autoritaires, totalitaires, communistes.

Et au milieu de tout cas, nous avons un petit héros qui possède cet immense pouvoir mais qui n'a rien demandé et ne demande rien d'autre qu'une vie ordinaire, normale, banale, et connaitre un bonheur simple comme le commun des mortels. Il va se laisser emmener, et il va subir encore et encore.

Mais heureusement qu'il y a de l'amour dans ce bas monde....
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Terremer - Intégrale

J'ai connu bien des déboires avec Terremer, dus à la politique de conservation des documents dans ma bibliothèque de quartier. S'y trouvaient tous les livres principaux se rattachant à ce cycle légendaire d'Ursula le Guin. J'avais donc entamé le cycle, et puis... patatra ! le temps que je fasse une pause entre deux tomes, la totalité avait disparu des collections. Les livres étaient un peu vieux, certes, mais encore largement en état d'être lus, et, surtout, cette bibliothèque était la seule du réseau à les posséder. Et il n'était nullement envisagé de les remplacer par la nouvelle édition en intégrale. Frustration, dégoût, agacement, je suis passée par toutes sortes d'émotions en me rendant compte qu'on avait fait le choix d'éliminer des collections un classique de la littérature et, en même temps, la possibilité de découvrir son auteure, une référence en SF autant qu'en fantasy : ne restait qu'un seul livre de le Guin, qui allait sans doute suivre la même voie que ses compagnons. Ont suivi des demandes d'achats de la nouvelle intégrale par mon conjoint et moi-même, des discussions constructives avec deux bibliothécaires, et on a finalement gagné au change, puisque notre bibliothèque possède maintenant la récente intégrale publiée en poche. J'espère bien que les lecteurs se montreront un tantinet curieux et l'emprunteront souvent - car ils sont eux aussi en partie responsables de la politique de conservation de la bibliothèque.





Je ne vous raconterai pas l'histoire de Terremer, non pas parce qu'il est impossible d'en tirer un résumé (qui serait très long, cela dit), mais parce que, d'une part, je n'ai pas envie de déflorer l'oeuvre, et d'autre part parce que je pense que ce n'est pas la meilleure façon de donner envie de lire ce cycle. Un de ces jours, j'écrirai des critiques pour chacun des romans ou recueil de nouvelles du cycle, mais ce n'est pas ce que j'ai envie de faire aujourd'hui.





Terremer, c'est un lieu, un royaume, un archipel de centaines, de milliers d'îles. Un lieu surgi de l'imagination d'Ursula le Guin, mais auquel elle avait peu réfléchi lorsqu'elle a écrit les premières nouvelles qui se déroulaient dans cet environnement. Puis, en 1967, un éditeur propose à le Guin d'écrire un roman de commande, un roman de fantasy qui s'adresserait aux adolescents. Réticente d'abord (car après tout, pourquoi écrire spécifiquement pour des adolescents?), elle tente tout de même l'aventure en reprenant le monde à peine esquissé de Terremer. Ce sera, avec le Sorcier de Terremer en 1968, l'arrivée de Ged, le futur Archimage, personnage central de Terremer... Central, vraiment ??? C'est cette question du héros, de la place du héros, qui fera, entra autres, la particularité de Terremer. D'un roman à la facture somme toute classique, comme le dit elle-même Le Guin - et quoiqu'on puisse amplement discuter du classicisme de ce premier roman -, va naître un cycle de six livres, qui n'était absolument pas prévu. Assez vite, Le Guin aura envie de creuser ce monde de Terremer. Suivront donc en 1970 et 1972 Les Tombeaux d'Atuan et L'Ultime Rivage. Et plus rien jusqu'en 1990, date de sortie de Tehanu. Ursula le Guin ne savait alors pas ce qu'il allait advenir de ses personnages. Donc, une pause, à nouveau, jusqu'aux Contes de Terremer en 2001 (dont les nouvelles ont été écrites entre 1997 et 2001), pour terminer le cycle en toute beauté la même année. Après des tergiversations, des arrêts qui devaient signer la fin du cycle de Terremer, et des suites imprévues, la boucle a enfin été bouclée. Et quelle boucle !





Car enfin, on pourrait penser qu'un cycle qui a connu tant de méandres a été pensé de façon peu rigoureuse et donne un résultat peu cohérent. Or, c'est tout le contraire. Si on compare Terremer à la série des Harry Potter (bon, c'est pas du tout du même niveau selon moi, que je sois claire, même si j'ai pu prendre plaisir à lire Harry Potter), qui révèle beaucoup d'incohérences et de manque d'exploration du monde imaginé par J.K. Rowling, Ursula le Guin a beaucoup plus travaillé et son univers, et ses textes. Si Rowling retombe tout de même sur ses pieds - je dois lui reconnaître ça -, Le Guin s'est, elle énormément, intéressée au monde de Terremer, s'est posé moult questions au fur et à mesure de son travail d'écriture et pendant ses longues pauses. Elle explique très bien tout ça dans tous les textes de type postface de l'intégrale.





Ce qui a fait de Terremer un magnifique terreau pour développer une multitude de sujets, tout en restant une histoire de fantasy à l'écriture très sobre, qui se lit facilement, et d'un genre un peu à part pour les années 1960, puisqu'il s'agissait davantage de voyages initiatiques individuels, du moins pour les premiers romans, que d'une épopée collective. le voyage intérieur, la découverte de ce qui fait l'identité de chacun, c'est Terremer. La place des femmes dans la société, c'est Terremer. le questionnement sur ce qu'est la magie, c'est Terremer. le questionnement sur la supposée supériorité de la magie pratiquée dans l'archipel, c'est Terremer. le rapport entre les hommes et leur sol natal, c'est Terremer. le rapport entre les peuples qui composent l'archipel, c'est Terremer. le rapport à L Histoire, c'est Terremer. le rapport des hommes à la mort, c'est Terremer. La découverte des origines, c'est encore et toujours Terremer. Et Terremer, c'est encore bien plus que ça. Que votre préférence aille vers Confucius ou Aristote, retenez ceci à propos de Terremer : "Le tout est plus grand que la somme des parties" / "La totalité est plus que la somme des parties".


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