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Critiques de Victor Hugo (2699)
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Notre-Dame de Paris

On peut reconnaître toutes les qualités ou tous les défauts qu’on voudra à ce roman, force est de constater que peu sont ceux qui peuvent se targuer d’avoir contribué aussi décisivement à la préservation d’un patrimoine que l’on dit, désormais, mondial. Aujourd’hui, j’ai décidé de ne pas trop vous parler du roman (un certain nombre d’entre-nous s’en sont déjà chargés admirablement), mais plutôt de son impact culturel actuel.



Outre le fait qu’il s’agissait d’une des premières fois où un monument tenait autant lieu de véritable personnage principal d’une œuvre de fiction (Zola par la suite s'inspirera beaucoup de la méthode pour bâtir son roman Le Ventre De Paris, en y faisant même, à un passage, clairement référence), on peut affirmer qu’il a marqué le retour en grâce du monument dont il est question dans le cœur des Parisiens.



À telle enseigne que cette cathédrale, croulante, misérable, en fin de vie, expirante, lourde, massive, poussive, telle qu’on peut la deviner sur le daguerréotype de 1840, dont le principal espoir d’avenir était une destruction en bonne et due forme, à telle enseigne, disais-je, que les autorités, suite au succès du roman, ont reconsidéré la question, et finalement entrepris la fantastique restauration menée à bien par le très controversé (mais à sa façon génial) Eugène Viollet-le-Duc.



Les principales contributions (il y en a d’autres) de cet architecte à l’édifice est l’adjonction de la fameuse flèche qui est maintenant si « typique » de Notre-Dame ainsi que des non moins célèbres chimères qui s’étalent sur toutes les cartes postales. Encore un lien entre littérature et patrimoine, vous savez sûrement que si Viollet-le-Duc a été mandaté pour cette rénovation, c’est avant tout parce qu’il était l’ami d’enfance de Prosper Mérimée, lequel était en charge à l’époque, des monuments historiques.



J’ajouterai encore que, face au succès de la restauration de Notre-Dame de Paris, il a été entrepris, sous l’impulsion de Viollet-le-Duc mais réalisée par ses deux élèves Paul Gout et Édouard Corroyer, une autre non moins fameuse restauration et adjonction de flèche, à savoir celle de l’Abbaye du Mont-Saint-Michel. On a du mal à se figurer désormais le Mont sans cette fameuse flèche, or, elle est extrêmement récente.



Imaginez, donc, Notre-Dame sans sa flèche ni ses chimères, imaginez même qu’elle pourrait ne plus du tout exister, imaginez le Mont-Saint-Michel sans sa flèche, et imaginez que tout cela, tout ce patrimoine si emblématique de la France, nous le devons incontestablement à l’impulsion décisive qu’a constitué ce roman de Hugo.



À tous les amateurs d’histoire de l’art, et je sais qu’ils sont nombreux sur Babelio, sachez que nous lui devons tout cela, et que, rien que pour ce détail, ce roman a un immense mérite. Il y en a bien d’autres, car cette fiction historique se lit avec grand plaisir.



Bien évidemment, on peut reprocher, de temps en temps à notre Victor national de faire un peu trop grincer les violons ou d’en faire un peu trop, mais, dans l’ensemble, il sait toujours se tenir sur la délicate ligne de crêtes tendue entre grandiloquence et kitsch, entre poésie et too much, même si, dans cet exercice de funambule au long cours, il pose de temps en temps le pied sur l’un ou l’autre terrain. Mais malgré tous ces " mais ", j'arrive encore à beaucoup aimer ce roman et je ne m'en cache pas.



Et pour conclure, je dirais que, par l’écriture de ce livre, Victor Hugo a réussi la prouesse de métamorphoser, de transfigurer la cathédrale Notre-Dame de Quasimodo qu’elle était en Esmeralda qu’elle est devenue. Et rien que pour cela, chapeau l’artiste et merci.



Vous noterez que ceci est la vision éminemment partiale d’une amoureuse du patrimoine, avec toutes les déformations de regard que la partialité entraîne, c’est-à-dire, bien peu de chose, un pet de chimère, ou une chiure de pigeon sur le crâne chauve de la statue de Viollet-le-Duc de la flèche de Notre-Dame de Paris.
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Les Misérables, tome 1

On a tout dit, écrit ou filmé sur ce livre, mais le mieux, c'est encore de le lire car notre vieux Victor est plus que jamais l'immense écrivain que nous connaissons. C'est toujours un plaisir de lire une telle langue, à la fois sophistiquée et abordable.



Dès l'abord du roman, on fait la connaissance de l'incontournable Jean Valjean. D'abord vaurien puis, écoeuré par sa propre noirceur, initié à la générosité par un évêque sans prétention, et qui deviendra le bienfaiteur de certaines âmes sans titre ni fortune (le père Fauchelevent et quelques autres dont je préfère vous taire les noms au cas où vous n'auriez pas connaissance de l'histoire).



Victor Hugo nous fait aussi de temps en temps quelques digressions sur des sujets qui l'intéressent, notamment la bataille de Waterloo. Bien que n'ayant qu'un vague rapport avec le fil de la narration, on ne s'ennuie pas de ces méandres dans le panier ventripotent de notre histoire de France (Du moins y ai-je pris plus de plaisir qu'à la lourde digression sur le couvent du Petit Picpus).



Outre Jean Valjean, nous suivons les mésaventures de la pauvre Fantine, où l'on se heurte à l'une des scènes les plus horribles jamais écrites : la séance chez le dentiste. Je ne vous en dit pas plus, mais ce passage remue bien les entrailles ! Les " méchants " sont sublimes de méchanceté : Javert, le flic zélé et obtus, les Thénardiers, veules et cupides à souhaits, sont tous aux petits oignons...



Après l'épisode du couvent, on fait la connaissance du dernier personnage central du roman en la personne de Marius. C'est le fils d'un vaillant soldat de la grande armée, " volé " (sous peine de se faire déshériter) à son père par le grand-père maternel, vestige vivant de l'époque Louis XV et fervent royaliste.



Le petit Marius grandit donc dans cette schizophrénie des origines et se retrouve un peu déboussolé à la mort de son père, qui lui est quasi inconnu, lorsqu'il prend conscience que celui-ci fut un héros sous Napoléon, traité comme le dernier des gueux par son vieux royaliste de grand-père. En somme, tempête sous un crâne, quête identitaire, et tous les assauts de la misère jusqu'à ce que son oeil croise celui d'une belle jeune fille...



Marius fait ensuite la connaissance de son voisin, qui s'avère être également une vieille connaissance du lecteur et dont je vous laisse découvrir l'identité. Une embuscade gigantesque attend l'infortuné Jean Valjean, et toutes les vipères sont prête à lui sauter sur le dos. Marius assiste impuissant à l'exécution d'un traquenard diabolique. Il apprend à craindre ce voisin et décide de quitter son voisinage. le dépit le gagne car sa belle inconnue lui a glissé entre les doigts.



Ses amis républicains suivent attentivement la montée de la pression sociale et sauront prendre les armes et monter des barricades en temps voulu. Victor Hugo nous fait alors entrer de plain-pied dans une des multiples insurrections qui ont émaillé la période de la restauration.



Il nous fait monter sur les barricades et comprendre pourquoi, quelques années plus tard, Napoléon III a tant tenu à faire redessiner Paris par Haussmann, vu la facilité avec laquelle une guerre de rue pouvait voir le jour dans le Paris d'alors.



L'émeute en question est celle du 5 juin 1832, c'est-à-dire l'une de celles qui ont avorté, à la différence de leurs glorieuses consoeurs de 1830 et 1848.

Marius se joindra-t-il a eux lors de l'insurrection ? Retrouvera-t-il son aimée ? Jean Valjean parviendra-t-il à s'extirper de l'étau et de la malédiction qui le pressent toujours un peu plus ? le père Gillenormand pardonnera-t-il à son petit-fils et le petit-fils au grand-père dans ce gigantesque malentendu ?



Victor Hugo saura-t-il nous faire haleter jusqu'au bout ? La réponse à cette dernière question est oui. Et pour conclure, si papy Hugo ne vous arrache pas une petite larme avec son final, allez d'urgence consulter un cardiologue car vous avez sûrement un petit problème de myocarde.



Bref, lisez, relisez, re-relisez, délectez-vous de notre vieux Victor. Un style qui allie la grandiloquence et la simplicité, le tout appuyé sur un excellent scénario, donc, tous les ingrédients pour façonner un roman qui tient toutes ses promesses. Chapeau bas MONSIEUR Hugo, même si ce n'est qu'un misérable avis et qu'il ne signifie pas grand-chose sur une barricade.



P. S. : COMMENTAIRE CONCERNANT L'ÉDITION DE LA PLÉIADE

Il est à noter que ce volume pléiade est d'assez mauvaise qualité selon moi pour au moins deux raisons : d'une part, lorsqu'on achète un volume de ce prix, on espère qu'il y ait un vrai travail de relecture, or, il y a beaucoup de coquilles disséminées dans l'ouvrage.



Deuxièmement, les commentaires sont presque systématiquement inutiles ou inintéressants, car Maurice Allem, fait toute une comparaison avec la première version de l'oeuvre intitulée Les Misères et l'essentiel des notes consiste à dire « cette phrase manque dans Les Misères », « tel mot est différent dans Les Misères », etc. En somme, on s'en fiche, à moins de faire une thèse sur les différentes versions du manuscrit d'Hugo avant publication définitive.



On aurait espéré des vrais commentaires éclairants, utiles ou des explications ciblées, pas cette glose de spécialiste sans intérêt. À la fin, j'ai carrément arrêté de regarder les notes tellement c'était barbant. Cependant, le fait de tenir l'intégralité de l'histoire dans un seul volume, pas trop encombrant, est assez agréable, et en cela le format pléiade est intéressant.



P. S. 2 (du 27/04/2018) : il semble que les gens de Gallimard aient également constaté cette carence car ils vont lancer une toute nouvelle édition pléiade qui, je l'espère, gommera les lacunes de la précédente.
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Le dernier jour d'un condamné

Il n'a ni nom , ni crime défini mais dans six semaines , il sera guillotiné .



Hugo fut souvent le témoin d'éxécutions capitales . Toute sa vie , il combattit ardemment la peine de mort . Il écrivit ce court mais intense récit à l'age de 27 ans . Sa parution en 1829 souleva un véritable tollé . Cependant , nombreux furent les pays abolitionnistes ( Colombie , Portugal... ) a lui rendre un hommage vibrant pour leur avoir ouvert la voie . La graine est desormais semée et nombreux seront les porte drapeau de renom ! En effet , Jaures , Dostoievski , Camus , Robert Badinter ( qui réussira à en obtenir l'abolition en 1981 , il ya juste 30 ans ! 30 ans seulement ! ) s'y opposeront farouchement , parfois avec succes...



Le dernier jour d'un condamné est d'une force rare ! L'empathie et l'identification que suscite un tel monologue ne peut laisser insensible . L'on partage les états d'ame d'un condamné sans avenir ; le questionnement d'un sursitaire en proie à la terreur face au chatiment qui lui est réservé loin de ceux qu'il aime et qu'il ne chérira plus ; la torture psychologique engendrée par un compte à rebours désormais inéluctable égrénant les jours , les heures , les minutes beaucoup trop rapidement à son gout . Ah , pouvoir arreter le temps... Et cette question qui ne cesse de le tarauder , quid de la souffrance ?

Le condamné égrenera une palette de sentiments . De l'acceptation a la panique la plus complete en passant par le fol mais vain espoir d'une grace royale . Si Hugo condamne de telles pratiques , il jette également l'opprobe sur tout un peuple qui vient assister à cela comme l'on vient au spectacle . Indécence terrifiante de l'humain qui vient se réjouir de la mort de l'un des siens .



Un theme fort traité magistralement !

Pour peu que vous soyez curieux de ce que l'on peut ressentir dans une telle situation , Le Dernier Jour d'un Condamné devrait pleinement répondre à vos attentes ! Pour peu que celles-ci n'excedent pas six semaines...



Chiffres Amnesty International 2010 :

- 23 pays ont procédé à des éxécutions .

- 17833 personnes etaient sous le coup d'une peine capitale .

- Méthodes utilisées : décapitation , électrocution , pendaison , injection létale , fusillade .

- Officiellement , de 714 en 2009 , l'on serait passé à 527 en 2010 .

Officieusement , la Chine aurait éxécuté des milliers de prisonniers en 2010 mais garde le secret absolu sur son application de la peine de mort . Le 25 Fevrier 2011 , elle aurait voté un amendement au code pénal qui retire 13 crimes passibles de la peine capitale . Desormais , 55 crimes sont passibles de la peine de mort au lieu de 68...Cynisme quand tu me tiens...
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Le dernier jour d'un condamné

Victor Hugo - Le dernier jour d'un condamné -1831 : Une société civilisée doit-elle faire mourir un condamné ? La loi du talion peut-elle être la seule alternative pour répondre à un meurtre ? Le jeune Victor Hugo s'engageait dans cet ouvrage contre le système judiciaire français coupable à ses yeux d'encourager la mise à mort des prévenus par gout du spectacle et du sang. Quarante ans après Maximilien Robespierre qui fut un des plus fervent abolitionnistes de la peine de mort avant de faire lui-même de la guillotine l'outil principal de son régime de terreur, Victor Hugo s'inscrivait comme un des maillons prépondérant d'une chaine de volontés qui mènera jusqu'à la déchéance constitutionnelle de cette peine cruelle sous l'action combinée de Robert Badinter et de François Mitterrand. L'horreur que Victor Hugo ressentait pour ce châtiment transformait ces lignes éprouvantes en un indicible plaidoyer. L'impasse terrible dans laquelle était plongée le condamné était vécue de l'intérieur par le lecteur qui vibrait à l’unisson de sa terreur et de son désespoir. Victor Hugo ne disait rien du crime de son personnage, il n'en disait rien car il ne souhaitait pas justifier l'acte promulgué par une société barbare par un autre tout aussi horrible. L'écriture de Victor Hugo était ici très simple et émouvante. Les sentiments du condamné lors de sa préparation à l'exécution, sa dernière rencontre avec sa petite fille, ses échanges avec l'aumônier chargé de l'assister, tout participait à un sentiment de claustrophobie effarée que ne contrebalançait même pas l'attente d'une grâce qu'on devinait dès le début impossible à obtenir. Bien sur certains nous diront que les affres des victimes valaient celles des meurtriers et que la pitié montrée dans ce livre pour l’assassin aurait dû surtout aller vers elles. Soit mais il est impossible de penser que le futur auteur des misérables ait pu manquer à ce point d'empathie envers des êtres ou des familles frappés par la violence. Quand on voyait le malheureux tenter de gagner du temps pour une minute de survie dérisoire jusque sur l’échafaud on ne pouvait qu’être révolté par l’ignominie de son supplice. C'était là tout le propos de ce manifeste qu'on pouvait considérer comme historique car il faisait figure de précurseur de toutes les pensées humaniste du 19ème et du 20ème siècle... édifiant
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Les Misérables, tome 1

Je n'ai encore jamais lu un livre qui arrive à la cheville de celui-ci.



Il y a toute la littérature, toute l'humanité et toute la vie dans les Misérables. C'est toute la différence entre un classique et un chef d'oeuvre. Les Misérables, indémodable comme tout chef d'oeuvre qui se respecte est bien plus moderne que beaucoup de romans récents.



C'est un roman absolument parfait, c'est LE roman. Il est inconcevable et impardonnable de ne pas le lire, de préférence en version intégrale, parce qu'il n'y a pas un mot de trop en 1800 pages.



Si je pouvais je l'apprendrais par coeur.



PS : Je voue un culte éternel à Éponine, bien qu'on lui préfère presque toujours cette petite cruche de Cosette. Le destin d'Éponine en est d'ailleurs rendu d'autant plus tragique, puisque dans le roman et jusque dans la réalité, tout le monde se fiche de sa pauvre vie.

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Le dernier jour d'un condamné

Je ne connaissais de Victor Hugo que les poèmes des Contemplations, c’est donc la première fois que je me penche sur un de ses textes, et quel texte !!!!

Hugo vous prends par la main dès les premières lignes pour accompagner un condamné vers la guillotine ; pendant les six dernières semaines de sa vie, tantôt longues, tantôt courtes, certaines seront teintées d’espoir, les autres de cris et de douleurs.

C’est un texte magnifique qui vous fait vous rappeler qu’il y a seulement un peu plus de trente ans, on votait l’abolition de la peine de mort. C’est aussi un texte qui vous rend fière, quelque part, au fond, de faire partie des pays l’ayant abolie, un peu tard par rapport aux souhaits d’Hugo, mais plus tôt que d’autres.

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Claude Gueux

Voltaire avait versé dans le conte philosophique ; Hugo, lui, verse plus volontiers dans le conte politique, la plaidoirie grandiloquente et parfois larmoyante. Mais le but était le même pour les deux hommes : utiliser tous les ressorts de leur plume pour faire évoluer la société dans laquelle ils vivaient.



On trouve déjà dans Claude Gueux les prémices de Jean Valjean, mais aussi des avatars distordus de Bug-Jargal ou de Claude Frollo. Victor Hugo a pris le soin de le prénommer Claude, c'est-à-dire, selon l'étymologie latine " qui boite ". Le même mot est à l'origine des mots clochard ou claudiquer. Quant au patronyme Gueux, il n'est nul besoin, je pense, de l'expliciter davantage.



Voilà, le cadre est posé : le héros est un miséreux, un nécessiteux. Que fait la société pour le secourir : rien. Que fait la société s'il dévie moindrement de son sillon d'aisance : elle l'incarcère. Que fait la société lorsqu'il subit l'injustice : rien. Que fait la société lorsqu'il se fait justice lui-même : elle lui tranche la gorge.



C'est schématique, c'est très simple, c'est caricatural mais c'est efficace. On n'est pas si éloigné, somme toute, de L'Étranger de Camus, à la différence près que Victor Hugo rend son Claude Gueux attachant et qu'il est un " bon " sujet qui a été " contraint " de mal agir, ce qui n'était pas le cas de Meursault. Pour le reste, tout est très proche, à savoir que la réponse de la société est inadaptée aux dérèglements qu'elle prétend soigner ou éradiquer : la peine de mort ne résout rien.



Hugo met en avant le rôle capital de l'éducation dans le processus d'amendement social qu'il envisage et suggère de modifier considérablement son système répressif. J'adhère forcément à ce volet de l'argumentaire.



En revanche, je ne me reconnais pas du tout dans la nécessité mystique ou religieuse qu'il envisage comme palliatif pour apaiser les malheurs du petit peuple afin d'accepter sa condition de pauvre comparativement à la minorité riche. L'opium du peuple, en somme.



Je ne peux pas adhérer car il y a un syllogisme là-dedans : comment un peuple éduqué pourrait-il trouver le moindre réconfort dans la religion qui prescrit, justement, de ne pas se poser de question et de croire au surnaturel, en la justice et en la toute puissance de son seigneur et sauveur ?



La religion fonctionne d'autant mieux que le peuple est moins éduqué. Sitôt qu'il s'éduque, la religion décline. Donc, non, je ne vous suis pas là-dessus, cher Victor, mais je vous pardonne, vous avez mon absolution, Inch Allah.



Bref, un ouvrage très court, idéal pour l'étude en fin de collège ou au lycée, mais pas non plus de très haute volée sur le plan de la réflexion philosophique et politique. En outre, ce n'est qu'un gueux d'avis, un claudiquant d'avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Notre-Dame de Paris

Bien avant "Intouchables" et autre "de Rouille et d'Os", M. Victor Hugo a pris le parti de choisir des êtres disgraciés, rejetés, bannis de la société, pour en faire des héros.

Rien de plus sulfureux que cette immense cathédrale, son parvis où grouille la misère, son prêtre halluciné par le désir, son gnome habité par la grâce, sa princesse en haillons, ses murs de forteresse qui ne protègent ni du vice ni de la mort. Les démons et les anges s'y affrontent, indifférents aux souffrances humaines, combattants éternels dont les âmes sont l'enjeu.
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Les Misérables, tome 1

Difficile de faire la critique d'une oeuvre aussi « monstrueuse ». Elle nous dépasse, elle nous illumine, elle nous écrase. Victor Hugo pointe son doigt sur la misère, il la décortique, il l'explique. Il donne sa voix au peuple.



Romancier, philosophe, prophète, historien qui se mêle de tout, tant des évènements, que des coeurs et des âmes, des idées et des moeurs. Il ausculte la civilisation. Il interroge l'ombre, la boue. Il n'a pas peur d'éclabousser les habits des élégants. La vérité doit jaillir.

Il remue les sables mouvants, la vase des égouts, pour mettre à jour ces misérables, ces hommes que l'on empêche d'atteindre l'idéal. L'ignorance, la faim, engendrent les ténèbres, le crime, la haine, la colère.



La colère et la haine engendrent la révolte. Il y a l'émeute qui est le cri de celui qui a faim, il y a l'insurrection qui émane de celui qui réclame justice, lumière, vérité. De la révolution naît le progrès, l'élévation de l'homme.



Pourquoi la route de Jean Valjean le conduit-il au bagne ? Est-ce la fatalité ou la société qui le façonnent en monstre ? La loi est faite par les hommes, les hommes ne sont pas infaillibles, ils peuvent se tromper.



La société crée, par son égoïsme, par sa bêtise, les enfants des rues, les prostituées, les voyous, les forçats. Faire sortir les misérables de leur enlisement, de leur nuit, oblige à ouvrir les yeux. Il faut remuer la vase, l'éclairer sans avoir peur d'y laisser des plumes. Il faut du courage et de la générosité. Le fumier est un trésor, il fait fleurir la rose, l'ortie a ses vertus, il faut en prendre soin. Chaque graine a sa valeur, chaque pièce est indispensable au puzzle de l'humanité.



Un forçat peut s'avérer compatissant, bienfaiteur, protecteur, s'il rencontre la bonté, la sollicitude, la confiance. Un homme comme Javert, aussi dur que le granit, peut douter si on l'ébranle. Il peut se fissurer, et laisser un rayon de lumière le traverser. Une "Cosette", alouette, paraissant laide et idiote, peut devenir lys, si on l'arrose d'amour et de chaleur.



« il n'y a ni mauvaises herbes, ni mauvais hommes. Il n'y a que de mauvais cultivateurs. »

« Humanité, c'est identité. Tous les hommes sont de la même argile … Mais l'ignorance mêlée à la pâte humaine la noircit. »



Victor Hugo, patriote de l'humanité nous dit ceci :

« À l'heure, si sombre encore, de la civilisation où nous sommes, le misérable s'appelle l'homme ; il agonise sous tous les climats, et il gémit dans toutes les langues. »



Un roman majestueux qui s'adresse à chaque homme, quelques soient l'époque et la nation où il vit. L'homme progresse, sort de sa nuit, mais il reste encore des zones d'ombre partout sur la planète. Tant que les égoïstes ne laisseront pas plus de place aux misérables, de crainte de perdre leur bonheur, l'idéal ne sera pas atteint.



Selon un proverbe mohave, "un homme ne peut être riche que s'il refuse d'aider ceux qui sont dans le besoin." (Enfants de tous les temps, de tous les mondes)

L'idéal n'est pas dans la richesse, il est dans l'égalité et la fraternité. Ne laissons pas que des miettes aux plus démunis.



Victor Hugo a ce don de résumer en une phrase une vérité étincelante et criante. Il assène cette vérité dans nos crânes à coups de mots terriblement beaux. Il a pour mission de faire fondre l'enfer sur terre, de faire que chaque homme puisse toucher les étoiles. Il nous impressionne par son sens aigu de l'analyse et par la richesse de ses connaissances. On ne peut que saluer le génie.



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Le dernier jour d'un condamné

Comme un cri de révolte et d’indignation lancé à la face de la société de 1827, ce récit est bref et coupant ; il claque à l'oreille et dans l'esprit de ceux qui l'entendent et le lisent.



Manifeste contre la peine de mort, plein d'audace et d'humanité, "Le dernier jour d'un condamné" garde aujourd'hui encore toute son actualité et pose les mêmes questions métaphysiques sur le droit de vie et de mort et sur l'usage que les hommes en font.



Alors que Hugo est très jeune au moment de la rédaction de cette oeuvre, on sent déjà entre ses lignes la grandeur de l'homme exceptionnel, du poète cérébral, de l'artiste engagé, de l'intelligence humaniste. Bien des années plus tard, à l'heure de la maturité, Hugo traitera à nouveau avec brio le thème du bagne dans "Les Misérables" et offrira à Jean Valjean cette seconde chance capitale que la société refuse aux condamnés, et lui ouvrira ainsi la voie de l'expiation, de la réhabilitation, du don de soi, en un mot, de l'humanité.
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Ruy Blas

Hum ! Hum ! Je n'ai pas franchement aimé, Victor,

ce mets que vous nous avez servi à peine

échauffé, tiède, sans sel ni bel accord.

Quoi ! D'un plat si bas faire un repas de reine ?

Qu'était-ce, au juste ? Un ragout de castor ?

Du madrépore ? Un morceau de cul-de-porc ?

Que sais-je encore ? Non, vous plaisantez Victor !

Et vous voulez qu'un tel repas tienne au corps ?

Non, non, cher drôle, cessez ces sauces lourdes ;

nous allons produire des météores

et flatuler jusqu'à nous en rendre sourdes

si par malheur vous nous en servez encore !



Que diable ! Une fable ! Du feu ! Du fluor !

Voilà ce qu'il faut à nos dents d’alligator !

Affutez-moi vos histoires d'un gros piment

rouge et faites qu'au moins les verbes nous touchent.

Je ne veux pas vous faire la fine bouche

mais céans je ne saurais faire compliment

à ce vieux frère d'Hugo pour son Ruy Blas,

dont les actes et les tirades me lassent.

Il est si bon parfois, il est souvent si fort

qu'on peut bien pardonner à notre ami Victor.

Au vrai, cette pièce n'est pas un drame,

on peut trouver pire et beaucoup plus infâme

mais quand on connaît l'homme dans ses grands moments

on peine à lui voir fair de si faibles élans.

Qui suis-je, au demeurant, pour de la sorte

discuter de mon cœur et de son aorte ?



Ruy Blas est un laquais épris de la reine.

L'Espagne a connu des heures plus sereines.

Là les grands du royaume sont dans l'arène

et dans leur direction tirent tous les rênes.

La reine s'en est prise au fat don Salluste

qui n'aura donc de cesse que de se venger

d'une sentence que lui juge injuste.

Pour ce faire, c'est Ruy Blas qu'il va engager.

Tout ça sans oublier un certain don César

qui dans la pièce parfois choit par hasard...



Mais d'en dire bien davantage je n'ose,

car ce n'est que mon avis..., oui..., pas grand-chose...

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Claude Gueux

Ce livre qui marque l'engagement de Victor Hugo contre la peine de mort est incontournable...



A travers l'histoire vraie de Claude Gueux, un jeune homme de trente-six ans, menant une vie misérable avec sa maîtresse et son enfant, obligé de voler pour subvenir à ses besoins, Victor Hugo fait ici un profond réquisitoire contre une arme fatale heureusement disparue aujourd'hui : la peine de mort. Le brillant écrivain éveille la conscience de ses lecteurs devant l'atrocité d'une telle justice, dans une société pourtant développée à cette époque. Le cas de Claude Gueux n'est pas le seul qui a ébranlé les esprits, loin de là, mais cette condamnation à mort a fini par consterner Hugo, qui signera l'un de ses romans les plus engagés...



Claude Gueux est pourtant un honnête homme, intelligent, gentil, attentionné, qui finit par devenir le "Roi" des autres détenus par son courage, sa sagesse et sa force, auquel le lecteur s'attache très facilement ; le seul coupable dans cette affaire, c'est la pauvreté. Ainsi, ce pauvre homme rencontre Albin, un autre détenu, d'une vingtaine d'années, innocent, inexpérimenté, et cherchant un soutien parmi ses compagnons ; une grande amitié naîtra entre eux. Hélas, la disparition du jeune homme touchera Claude en plein coeur, ce qui va lui faire commettre l'irréparable et l'entrainera vers une issue fatale...



Ce récit touchant m'a beaucoup émue par la véracité de ses propos, la personnalité de la victime, l'éloquence de son auteur, et bien évidemment, par la dénonciation de l'une des plus terribles erreurs humaines, la guillotine...



A lire !!
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L'Homme qui rit

Lire Hugo c'est entrer en littérature.



Car la première rencontre dans ce roman, ce n'est pas l'Homme qui rit, c'est Victor Hugo. Plus exactement son style, toujours le même, de la première à la dernière page. Hugo ne se contente pas d'une comparaison par-ci par-là, non il impose son ossature stylistique “être ceci c'est encore être cela”, “cela a besoin de ceci pour exister” etc et à partir de là il déroule tout un nuancier de maximes, comparaisons et de métaphores, presque jusqu'à la redondance parfois, pour que son lecteur touche au plus près et au plus complet de sa pensée, tenez par exemple :



“On résiste à l'adversité mieux qu'à la prospérité. On se tire de la mauvaise fortune plus entier que de la bonne. Charybde est la misère, mais Scylla est la richesse. Ceux qui se dressaient sous la foudre sont terrassés par l'éblouissement. Toi qui ne t'étonnais pas du précipice, crains d'être emporté sur les légions d'ailes de la nuée et du songe. L'ascension t'élèvera et t'amoindrira. L'apothéose a une sinistre puissance d'abattre.



Se connaître en bonheur, ce n'est pas facile. le hasard n'est autre chose qu'un déguisement. Rien ne trompe comme ce visage-là. Est-il la Providence ? Est-il la Fatalité ?



Une clarté peut ne pas être une clarté. Car la lumière est vérité, et une lueur peut être une perfidie. Vous croyez qu'elle éclaire, non, elle incendie.”



Vous-êtes encore là ? Je vous le concède, le père Hugo dérange, agace, son héritage moral est comme trop lourd à porter dans une société à l'individualisme exacerbé, plus Stendhalienne qu'Hugolienne regrettait Régis Debray dans un récent essai.



Déjà l'auteur de “L'Homme qui rit” n'amuse pas ses contemporains, lors de la parution du livre Barbey d'Aurevilly, acerbe, écrit (pas sur babélio ça n'existait pas encore hein…) : “Il (Victor Hugo) coupe le fil à son récit et à ses personnages avec des dissertations abominables” … ce qui est un comble quand on sait à quel point le dandy normand aime à s'écouter gamahucher avec force amphigouris et prolégomènes au carré, il bave son encre sur des kilomètres de feuillets, mais c'est pour ça qu'on l'aime, n'est ce pas !



Néanmoins il est indéniable que cet ouvrage d'Hugo n'est pas qu'un roman. L'écrivain total, poète, romancier, dramaturge et essayiste a voulu en quelque sorte disserter par l'exemple, s'intéressant, sous le prisme de sa Noblesse, à l'Histoire de l'Angleterre, où il s'est exilé après avoir traité de nabot et de guenon Napoléon III (malaise…). Hugo historien vient manger le pain de Michelet ! Les familles aristocrates, les intrigues royales, les coutumes notabiliaires et l'exercice du pouvoir font l'objet de longues et énumératives digressions, laissant le lecteur sonné par l'énoncé de tant de patronymes facultatifs à la narration qui se retrouve quelque peu archipelisée… Histoire donc, mais aussi politique, Hugo le député, l'orateur, n'oublie pas son combat pour la démocratie c'est à dire l'égalité, l'Etat de droit ; c'est le système des castes, des classes qu'il veut démolir dans un discours à la chambre des Lords à la fois enlevé et lucide (dans l'accueil qu'il reçoit de l'auditoire), une leçon de rhétorique en direct pour le lecteur, par l'un des plus grands tribuns de son temps !



“L'éloquence est un mors ; si le mors casse, l'auditoire s'emporte, et rue jusqu'à ce qu'il ait désarçonné l'orateur. L'auditoire hait l'orateur. On ne sait pas assez cela.”



Vous commencez à comprendre qu'en dépit du nom du bouquin, l'Homme qui rit n'est pas spécialement drôle…vous voilà prévenus. Mais si vous avez le courage de poursuivre avec Hugo alors vous allez vous régaler car c'est une superbe aventure littéraire, avec quel éclat Hugo nous plonge au coeur du déchainement des éléments, comme dit la chanson “il y a des tempêtes et des naufrages” dans l'Homme qui rit !



"Victor Hugo n'est pas de la race des hommes, il est né des temps du dragon." écrivait son rival Sainte-Beuve. L'intrigue est résolument romantique, la tragédie grandiloquente, des marginaux dans leur solitude et leurs infirmités physiques ou sociales se réunissent, ils puisent ainsi la force dans le groupe, dans la noblesse (car la vraie noblesse, Hugo la place chez eux) et la pureté des sentiments qu'ils éprouvent les uns pour les autres. Des personnages machiavéliques, merveilleusement décrits, à l'image de Barkilphédro : “Il était habile à cet art qu'on appelle la suggestion, et qui consiste à faire dans l'esprit des autres une petite incision où l'on met une idée à soi.”



“La femme nue, c'est la femme armée.” le romantisme s'exprime encore dans une intrigue amoureuse un peu binaire : la pureté contre la tentation, la vertu contre le vice, la pâleur maladive, condamnée contre le pourpre et les baldaquins.



"L'Homme qui rit est supérieur à tout ce que Victor Hugo a écrit depuis dix ans. Il y règne un souffle surhumain” Emile Zola. Comme avec le personnage de Notre-Dame de Paris, Hugo joue sur le duo laideur/bonté, à contrepied des croyances crétines de son époque (et de la nôtre). Gwynplaine, le personnage principal est en effet affublé d'un triste sourire, scarification indélébile, génie littéraire que de créer ce clown triste au sourire sardonique, à la postérité mondialement connue sous les traits du fameux Joker de la bande-dessinée Batman, dont le sourire se transfigura en un rire retentissant dans les salles obscures avec le concours de Jack Nicholson, Heath Ledger ou encore Joaquin Phoenix…



“– Ne ris donc plus !

– Je ne ris pas, dit l'enfant.

Ursus eut un tremblement de la tête aux pieds.

– Tu ris, te dis-je.”



L'Homme qui rit est comme une bouteille à la mer, jetée par un comprachicos repenti, arrivera t-elle jusqu'à vos rivages…



Qu'en pensez-vous ?
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L'Homme qui rit

Sourire en coin, façon Joker, Gwynplaine ne hante pas les rues de Gotham City pour chasser de la Chauve-souris mais l’Angleterre de la fin du XVIIe et début du XVIIIe siècle. J’écris en chiffre romain puisque certains musées voudraient les supprimer pour simplifier la lecture des visiteurs. Pourquoi ne pas dégenrer monsieur Patate tant qu’on y est ? Ah, ils vont le faire aussi. J’abandonne.

Enlevé par les Comprachicos, qui ne sont pas des guitaristes manouches mais des personnes au CV peu recommandables puisqu’ils mutilaient des enfants pour les revendre dans les foires, Gwynplaine est secouru et élevé par Ursus, un saltimbanque philosophe après avoir été abandonné par ses ravisseurs. L’amuseur possède un chien-loup appelé malicieusement Homo.

Défiguré au scalpel, Gwynplaine grandit dans une roulotte auprès de Déa une jeune fille aveugle et d’une grande beauté. Les deux enfants sont inséparables et tombent éperdument amoureux. A la différence de Quasimodo et d’Esméralada, Déa ne peut voir le monstre et tombe sous le charme de son humanité. La belle s’éprend de la bête.

Gwynplaine constitue l’attraction principale des spectacles joués par sa petite troupe. Nul nez rouge, puces savantes ou numéro de jonglage, son sourire monstrueux suffit à attirer les foules et sa notoriété finit par attirer la curiosité de l’aristocratie.

Comme il s’agit de Victor Hugo, les choses tournent mal. Si femme qui rit à moitié dans son lit, l’homme qui rit, comme la vache, finit plutôt à l’abattoir de l’histoire. Ecrit pendant son exil à Guernesey, la météo locale et ses humeurs politiques lui inspirent ce drame baroque qui tient plus de l’opéra ou du théâtre que du roman. Hugo n’écrit pas ici des chapitres mais des actes, tant sa puissance d’évocation grave chaque scène dans l’esprit du lecteur. Le génie Hugolien mixe histoire et poésie, drame social et philosophie. Au-delà de son goût pour les monstres, le poète est impitoyable avec l’aristocratie et il dénonce une nouvelle fois la peine de mort et les errements de la justice.

Gwynplaine va découvrir qu’il est de noble ascendance et va siéger à la chambre des Lords mais il est éloigné de Déa. Moqué par ses pairs lors d’un discours d’anthologie qui met en cause l’aristocratie, ses privilèges et sa capacité à maintenir son peuple au régime, il fuit ses titres pour retrouver Ursus et sa belle dans un dénouement tragique.

Les descriptions sont parfois interminables, les titres des lords sont énumérés sur plusieurs pages comme si l’auteur organisait des entractes entre des scènes à forte intensité dramatique… et pour permettre à son lecteur de faire des pauses pipi car le livre fait quand même 800 pages. Mais quel style ! Sous sa plume, les personnages fricotent toujours avec le mythe et le ton grandiloquent, ridicule chez certains, se mue en séance d’hypnose ici.

Echec public à sa sortie, peut-être lié à un trop plein d’intentions, « L’homme qui rit » n’est pas le plus lu des romans de Victor Hugo, ni le mieux structuré, mais les discours d’Ursus, la scène du naufrage et celle du gibet en début de roman mériteraient un classement à l’Unesco. Pourquoi pas des mots puisqu’il est question d’y classer la baguette de pain ou certains fromages ?

Une histoire qui ne prête pas à sourire.



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Les Misérables, tome 1

GAVROCHE, Les Misérables. Classiques Hatier.

"Un petit mendiant

demande la charité aux oiseaux

Oh! Ne me laissez pas la main pleine

Je resterai là jusqu'à la nuit s'il le faut

Et, il y a dans son regard une lueur de détresse." Jacques Prévert.





Quand j'ai un gamin qui trépigne, réclame des baskets de marque, un portable dernier cri, ou ce qu'il croit être son dû, et mérite des taloches, je lui demande s'il connaît Gavroche ?...

- Tu dis quoi? Répond le môme.





Vous vous souvenez des Misérables de Victor Hugo?

Gavroche n'est qu'un personnage parmi d'autres...

Paris a un enfant et la forêt a un oiseau: l'oiseau s'appelle le moineau: l'enfant s'appelle Gavroche!





Il ne mange pas à sa faim, ni tous les jours. Pas de chemise( avec un logo), ni de souliers ( de marque) ou encore de toit sur la tête...

Il porte un vieux pantalon, jure comme un damné, tutoie les filles et le ciel, chante des chansons obscènes. Si on demande à Paris, ce que c'est?

- C'est un moineau, un titi parisien, un Gavroche!

Pas de gîte, pas de pain et pas d'amour, mais "il était joyeux parce qu'il était libre".





Quand les Thénardier furent arrêtés, Gavroche se retrouva à la rue, avec ses 2 petits frères. De toutes façons, la Thénardier n'aimait pas ses garçons:

- Je n'ai pas besoin d'une thiaulée d'enfants!





En 1830, il y avait un monument bizarre, une maquette d'éléphant,( idée de Napoléon pour commémorer sa campagne d'Egypte) à l'angle de la Bastille.

C'est là que Gavroche va abriter les 2 petits qu'il a recueillis.





Sur la barricade, Gavroche ramasse les poires à poudre et les fusils des révolutionnaires tombés à terre, pour les révolutionnaires. Une balle le rate, une autre renverse son panier, alors Gavroche se dresse:

- Je ne suis pas notaire

C'est la faute à Voltaire

Je suis petit oiseau

C'est la faute à Rousseau.

Un spectacle épouvantable, Gavroche taquine les tireurs, un moineau becquetant sous les fusils des chasseurs. L'enfant ripostait par un pied de nez, en chantant, il n'avait pas 13 ans...





Re lisez "Les Misérables"! Grâce à cet essai des classiques Hatier, on revoit Gavroche et on se souvient du Titi parisien... Il y a de jolis dessins d'enfant, dont celui de Gavroche par Victor Hugo. Et, des textes de Sempé, Prévert, Cesbron, Sabatier et Rimbaud sur les enfants dans la ville...





Elu député en 1849, Victor Hugo lança à l'Assemblée Nationale:

- Vous n'avez rien fait tant que le peuple souffre, Vous n'avez rien fait tant qu'il y a, au-dessous de vous une partie du peuple qui désespère. Je suis de ceux qui croient qu'on peut détruire la misère.

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Les Travailleurs de la mer

Moins connu que ses autres chefs d'oeuvres, le roman « les travailleurs de la mer » est celui que je préfère dans l'immense production de Victor Hugo.

Brisé par la mort de sa fille Léopoldine, emportée par le mascaret à Villequier en septembre 1843, l'écrivain est marqué à tout jamais par la menace incarnée par la mer et ses aléas.

Exilé à Guernesey sous le second empire, l'opposant à l'empire est fasciné par le spectacle toujours renouvelé de l'océan, de ses furies annonciatrices de drames.

En 1866, il rédige son oeuvre en étant quasi certain qu'il ne reverra pas sa patrie, mais en espérant malgré tout que ses pages contribueront à la chute du régime.

Et il imagine cette parabole où la France, symbolisée par « La Durande », épave échouée par un criminel, est sauvée (partiellement) par un obscur marin, Gilliatt, qui triomphe des pièges tendus par la faune et la flore, par amour pour la gracieuse mais inconstante Déruchette.

« J'ai voulu glorifier le travail, la volonté, le dévouement, tout ce qui fait l'homme grand. J'ai voulu montrer que le plus implacable des abîmes, c'est le coeur, et que ce qui échappe à la mer n'échappe pas à la femme. J'ai voulu indiquer que, lorsqu'il s'agit d'être aimé, TOUT FAIRE est vaincu par NE RIEN FAIRE, Gilliat par Ebenezer. J'ai voulu prouver que vouloir et comprendre suffisent, même à l'atome, pour triompher du plus formidable des despotes, l'infini. »

L'atome vainqueur de l'infini …David abattant Goliath … Hugo triomphant de Badinguet … le grand Victor nous offre de mémorables pages maritimes et rédige un redoutable pamphlet anti impérial.

Gilliatt, le marin, rejoint ainsi Jean Valjean, Gavroche et Cosette dans notre panthéon littéraire.

Le tout dans une langue superbe, rythmée et musicale, qui imbibe le lecteur plongé dans les embruns, la brume et le froid des iles anglo-normandes.
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Le dernier jour d'un condamné

Victor Hugo n'a que vingt-sept ans quand il publie Le dernier jour d'un condamné mais a déjà assisté à des exécutions capitales qui l'ont profondément ému. Elles sont probablement à l'origine de son engagement contre la peine de mort. Avec emphase et pathos le grand poète nous fait ressentir l'horreur de la sanction. Au fil des heures le condamné, qui imagine son horrible fin et livre ses pensées torturées, nous inspire de la pitié. Il n'est pire souffrance que les tourments psychiques, imaginer un supplice est souvent pire que de le vivre.



Pour donner une forme d'universalité à son plaidoyer, à aucun moment Victor Hugo ne nous renseigne sur le véritable crime du condamné. Il s'agit de parler de la souffrance de tout homme qui se retrouve devant ses juges, afin d'inciter ceux-la à plus de clémence et d'humanité pour qu'ils renoncent à la peine capitale. Et cela quel que soit le crime, aussi horrible fut-il, pour ne pas répondre à la barbarie par la barbarie. Une grande cause, hélas toujours d'actualité, magnifiquement défendue par ce poète qui, longtemps après sa mort, continue de parler juste.

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Les Misérables, tome 1

Une somme, un chef d'oeuvre absolu, lu, relu, vu, revu, écouté, réécouté...et même chanté, rechanté! J'ai même eu pour livre de chevet un "Paris des Misérables " pour me guider dans mes balades parisiennes...dommage que l'Eléphant de Gavroche ait disparu...



LE LIVRE par essence sous toutes ses facettes : grande Histoire et fourmillement d' histoires, personnages mythiques et figures populaires, lieux inoubliables et objets symboliques, plaidoyer vibrant et réquisitoire inspiré, présence tutélaire de l'auteur et vitalité quasi-indépendante des personnages, fresque épique des événements et intimité étroite avec les sentiments.



Bien sûr, il y a des longueurs: la bataille de Waterloo, les chandeliers rédempteurs de Mgr Myriel, la grande Barricade, l'ancienne et la nouvelle, les amours un peu gnian-gnian de Marius et Cosette....mais quel souffle, quel panache, quel maelström d'émotions!



On peut fermer le livre, on ne quitte jamais vraiment les personnages, on les retrouve dans la vie, ils sont immortels, ce sont devenus des types : un gavroche, une cosette, une fantine, un javert, une/un thénardier, un valjean..



Pour ceux que les gros pavés rebutent -en particulier les jeunes lecteurs,- je recommande Les Misérables en classiques abrégés, à l'Ecole des Loisirs: le résultat est inespéré...sitôt le livre fermé, ils se jettent sur le VRAI LIVRE pour en savoir plus, en revivre encore les émotions, en prolonger le plaisir..
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Histoire d'esclaves révoltés : Bug-Jargal - Tam..

Avec les relectures, parfois l’on gagne, parfois l’on perd… J’avais lu Bug-Jargal il y a bien longtemps, au tout début du lycée, et j’en avais gardé un très bon souvenir d’ensemble. Me sentant incapable pourtant de me le restituer de façon convaincante, j’ai entrepris de le relire avec mon regard actuel…



… ouais ! y a eu du chemin de fait ! Effectivement je ne positionnerais plus ce livre parmi les trésors littéraires qu’a su nous léguer notre vaillant Victor. Il s’agit d’un roman de toute prime jeunesse, écrit vite fait à l’âge de seize ans et remanié quelques années plus tard, à l’âge de vingt-quatre ans. Il s’agit d’un roman mi-aventure mi-historique ayant pour cadre géographique Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti et la République Dominicaine) et pour contexte socio-politique la révolte des esclaves de 1791.



Léopold d’Auverney, un militaire, neveu d’un planteur colonial de l’île en est le narrateur, plusieurs années après les faits, lors d’une bataille sur le continent européen. On ne peut pas dire que les ficelles de la narration soient inapparentes, bien au contraire, ce sont des câbles épais, qui cisaillent un peu le décor. On ne peut pas dire non plus que cette lecture soit désagréable, mais ce n’est pas encore du Hugo premier cru.



Déjà beaucoup de ses traits romanesques futurs sont présents. On y trouve, par exemple : le monstre difforme de type Quasimodo, ici incarné par le nain Habibrah ; le roman à message social humaniste : ici l’égalité noir-blanc ou le regard que l’on porte sur l’autre ; le renversement d’identité de certains personnages comme dans les Misérables (je ne vous dis rien ici sans quoi je risque de déflorer l’histoire) ; les valeurs ultra romantiques avec des accents de tragédie, qui pour le coup ne sont pas trop maîtrisées dans Bug-Jargal, alors qu’Hugo sait d’ordinaire se maintenir sur la difficile ligne de crête alliant pathos, grandiloquence et point trop n’en faut. Ici, dégainez vos violons, ça grince à qui mieux mieux.



Le roman, de taille assez modeste pour du Hugo, est composé de très brefs chapitres, ce qui en rend la lecture très aisée, notamment pour les plus jeunes lecteurs pas trop rompu à l’art de dévorer un gros roman et qui pourront donc y prendre, éventuellement, un certain plaisir.



L’histoire commence à décoller véritablement au chapitre 15 (sur 59). La petite amourette à deux balles de Léopold me semble franchement mauvaise, par contre, le roman fait une large place à un personnage secondaire intéressant, en la personne du chef noir rebelle Biassou. Le personnage a réellement existé lors de la révolution haïtienne et Hugo prend également beaucoup d’inspiration pour son roman du personnage réel de Toussaint Louverture. Même si l’auteur romance largement la véritable histoire de l’insurrection haïtienne, il a eu le mérite de m’y intéresser, ce qui n’est déjà pas si mal.



J’ai trouvé particulièrement intéressantes les tractations politiques, les manipulations des foules et les incursions de la religion et du surnaturel que pratique Biassou pour asseoir son autorité de chef rebelle. En lisant les passages incriminés, je repensais fréquemment à l’aphorisme attribué à Napoléon (citation de mémoire donc probablement impropre) « Pour gouverner je n’ai pas besoin d’un dieu, mais de religion, si. »



Quant au personnage de Bug-Jargal à proprement parler, il est bien trop bon, trop fort, trop grand dans ses faits et son âme pour être un tant soit peu crédible. Mais les jeunes lectrices (j'en sais quelque chose) ne peuvent que tomber amoureuses de cet intrigant Apollon noir, preux chevalier du temps des colonies.



Si cette thématique de l'esclavage dans la littérature française vous intéresse, je vous conseille vivement, et une fois n'est pas coutume puisque cet auteur n'est ordinairement pas ma tasse de thé, la nouvelle de Prosper Mérimée intitulée Tamango. De ce que j'ai lu de Mérimée c'est ce qui m'a le mieux plu et le plus impressionné.



En somme, probablement beaucoup de maladresse dans ce petit roman, pas un grand Hugo, mais une lecture plaisante tout de même, finalement très appropriée pour le lycée, en tout cas, c’est mon avis actuel, c’est-à-dire, pas grand-chose.
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Le dernier jour d'un condamné

Splendide texte engagé. A seulement 27 ans lors de sa parution, Victor Hugo délivre un réquisitoire contre la peine de mort, sans discours, ni démonstrations, mais de façon subtile et pleine de maturité, en faisant parler le condamné sur ce qu'il ressent avant son exécution. Ce genre de propos n'était pas acceptable politiquement au début du 19ème.

De plus, en le choisissant coupable, l'auteur ne s'est pas rendu la tâche facile, mais cela donne encore plus de poids à son engagement qui est de dénoncer la cruauté de la peine de mort.

Le livre refermé, je suis impressionné par le courage de l'écrivain quant à sa défense de la dignité humaine par rapport aux conditions de détention dans les prisons, le départ honteux des bagnards pour Toulon et enfin "les cris de hyènes" de la foule sur la charrette du supplicié. Un livre d'actualité.
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