Les clandestins c'est nous tous.
C'est tous ceux qui savent pas ce qu'ils veulent faire plus tard.
Et aussi ceux qui font pas ce qu'ils avaient dit qu'ils feraient plus tard.
C'est les étrangers qui veulent devenir français.
Les Français qui veulent devenir étrangers.
Les jeunes qui se comportent pas comme des vieux.
Les flics qui se comportent pas comme des flics.
Les profs qui sont du côté des élèves.
Les sans-papiers, sans métier, sans bureau, sans orientation.
Ceux qui ont pas besoin de tout ça.
Ceux qui ont peur, et ceux qui ont pas peur.
C'est tout ceux-là, les clandestins.
Du jour au lendemain, on est tous des clandestins. (p.80-81)
J'ai toujours ce mot qui résonne dans ma tête : clandestin. Clandestin. Clan-des-tin. Clan, destin. Mon clan, mon destin?
-Moi j'ai compris qui c'est, les clandestins. C'est pas une question de papiers. Nous tous ici, on a des papiers, et pourtant ils nous traitent comme des clandestins, et à la fin on se sent clandestins. Si c'est ça, alors les clandestins ils sont beaucoup plus nombreux qu'on croit. (p.80)
La France elle t'emmerde, espèce de gros con. L'Afghanistan c'était déjà un empire que tes ancêtres ils savaient à peine faire du feu ! Je vous emmerde, toi et ton pays de cons. C'est ça, la France ? Si c'est ça je suis plus français, moi !
Je transpire. Je lutte contre les mots qui bouillonnent dans ma tête, je lutte pour pas les laisser sortir, parce que c'est sûr, c'est contre Zaher que ça va se retourner.
Il paraît qu'ils vont "diligenter une enquête", comme ils disent. S'ils prennent la diligence pour venir jusqu'ici, les enquêteurs, on est pas près de les voir débouler ceux-là. (p.73)
Les flics les ont traités de clandestins, mais c'est faux. Tout le monde savait où ils vivaient, quel travail ils faisaient, à quelle école ils allaient, la preuve... (p.68)
D'un coup on entend des sons bizarres dans le lycée, des échos de voix dans les couloirs, des bruits de pas dans les étages. Ismaël regarde par la fenêtre, il se tourne vers nous, il est tout pâle. La rumeur court dans la classe. On dit :" C'est la police". On dit :"C'est une descente. On dit : "C'est la brigade des stups".
La porte s'ouvre, des policiers en uniforme s'engouffrent.Ils se postent au fond et sur les côtés, ils nous encerclent, ils sont armés...
- Mais ils ont tous peur de nous ! Peur qu'on vienne pas à l'école, peur quand on y est, peur qu'on s'en échappe, peur qu'on soit pas orienté... (p.78)
Je respire un grand coup, je reprends le stylo et je commence à écrire : Je m'appelle Zaher Arash. je suis réfugié afghan en France. J'ai fui la guerre dans mon pays d'origine, et aujourd'hui dans mon pays d'accueil je suis victime des forces de l'ordre, qui ont compromis par des paroles et des comportements agressifs le déroulement d'une opération de police... (p.59)
Ma mère, elle l'a fusillé : "Tu vois pas que c'est le mépris pour les enfants qui engendre leur haine de l'autorité ?" Il l'a traitée de gauchiste et de soixantuitardée ou un truc comme ça, elle était tellement énervée en racontant que j'ai pas osé la faire répéter. (p.76)