Jeudi 5 octobre 1944 – Une association intitulée « Les Amis du Maréchal », et un corps de volontaires français animé par un ancien cagoulard, ancien inspecteur de police, avaient formé des corps-francs appelés « troïkas » répartis en régions sur tout le territoire métropolitain, disposant de dangereux et puissants appuis politiques. Cet organisme, s'il conservait son activité clandestine, pourrait être un élément de future désintégration des services administratifs et de police.
2751 – [p. 236]
Mardi 15 août 1944 – Il est ... question de l'arrivée d'un général américain à l'Hôtel-de-Ville. Où la presse de collaboration a-t-elle ramassé cette histoire dont il me serait bien venu quelque écho ? Pourtant la chose ne serait pas invraisemblable. Je me souviens en effet qu'à l'heure où Weygand succédait à Gamelin en mai 1940 et bien avant que ne soit consommé le drame de Dunkerque, une voiture allemande était arrivée jusqu'à l’École Militaire. Ses occupants insolents et ravis, n'ayant trouvé aucun obstacle sur leur route s'étaient offert l’orgueil d'être les premiers à Paris.
2738 – [p. 132]
Le dialogue de Camus et de Mauriac qui a dominé nos pensées dans les semaines et les mois qui ont suivi la Libération ne nous fait-il pas comprendre les deux aspects si proches l'un de l'autre d'une même recherche ? Controverse capitale sur les choix d'une société et sur les voies d'accès à celle-ci. Pourtant controverse de méthodes pour l'essentiel.
Nul ne défendait l'ancienne société. Tous en attendaient une nouvelle.
2784 – [p. 340]
Mardi 14 novembre 1944 – L'agence Reuter rapporte ... qu'Hitler se trouverait depuis une semaine environ aux mains de quatre médecins dont un spécialiste des affections du cerveau.
- Le problème du statut de Tanger revient de nouveau en discussion. Dans une dépêche de l'A.F.P. que reproduit la presse de ce matin, le statut international de Tanger a été aboli par l'Espagne. Il semble que l'Espagne doive perdre l’espoir de conserver les avantages qu'elle s'est acquis, en raison de son attitude favorable à l'Allemagne.
2779 – [p. 327]
Samedi 29 juillet 1944 – 11 h. On s'interroge à Paris sur la situation de Rommel. Arrivé de Bernay à la Pitié avec une fracture du crâne, voici qu'on le dit mort (?). On raconte que Rommel et Eisenhower sont d'anciens condisciples de Janson de Sailly.
2733 – [p. 94]
Mardi 24 octobre 1944 – Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'U.R.S.S., le Canada, le Brésil, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Colombie reconnaissent officiellement le Gouvernement provisoire de la République française.
2766 - [p. 272]
21 juillet 1944 – Il semble qu'il y eut 5 000 morts en suite de la répression qui suivit le 20 juillet (attentat contre Hitler) parmi lesquels 2 000 officiers ! Entre ceux-ci le maréchal von Witzleben, l'amiral Canaris, les généraux Lindermann, Herfert, Oster, Fellgieble, von Hase, Hoepner, von Rabeneau, Stieff, von Thüngen, Tiel, von Zielberg et naturellement Rommel qui, plus tard, guéri de ses blessures, sera invité au suicide.
2732 – [p. 79]
Lundi 16 octobre 1944 – Un passage du discours du général de Gaulle a été censuré et modifié par les services de la censure alliée.
Le Général avait dit dans son allocution, en parlant des destructions que le pays a subies :
« ... tous nos grands ports, sauf Bordeaux, détruits, 4000 ponts sautés... »
A ce texte, la censure alliée a substitué : « ... la plupart de nos ponts sautés ... »
2757 – [p. 257]
Vendredi 27 octobre 1944 – Une grande partie de la presse publie encore des photographies d'effroyables atrocités allemandes.
- (Dans Combat) Camus évoque la mémoire d'un des meilleurs combattants de la Résistance, René Leynaud, fusillé par les Allemands.
Camus rappelle avec noblesse les sentiments d'amertume que lui cause l'absence de ce combattant. Il termine ainsi :
« ... Qu'on ne craigne rien, nous ne nous servirons pas de lui qui ne s'est jamais servi de personne. Il est sorti inconnu de cette lutte où il était entré inconnu. Nous lui gardons ce qu'il aurait préféré, le silence de notre cœur, le souvenir attentif de l’affreuse tristesse de l’irréparable. Mais ici où nous avons toujours tenté de chasser l'amertume, il nous pardonnera de la laisser revenir, et de nous mettre à penser que, peut-être, la mort d'un tel homme est un prix trop cher pour le droit redonné à d'autres hommes d'oublier dans leurs actes et dans leurs écrits ce qu'on valu pendant quatre ans le courage et le sacrifice de quelques Français. »
2773 – [p. 285]
Jeudi 9 novembre 1944 – Il arrive qu'assez fréquemment dans le 6e arrondissement des éléments de gardes patriotiques et certains groupes F.F.I. se battent à la mitraillette.
- Il est beaucoup question à Paris en ce moment de l'idée de débaptiser la fraction de la rue de Lille où se trouve l'ambassade d'Allemagne, et de lui donner le nom de rue d'Oradour.
2778 – [p. 321]