Nous voici enfin parvenus par degrés au plus haut sommet des figures ingénieuses : en comparaison, toutes les autres figures précédemment mentionnées apparaissent sans valeur, la métaphore étant de tous les rejetons de l'intellect humain le plus ingénieux et piquant, le plus insolite et merveilleux, le plus plaisant et profitable, le plus prolifique et productif.
Mais à l'inverse, c'est de la logique et de la pure raison que se méfie la rhétorique. Car la raison exige des preuves ; la méthode apodictique bâtit sur elle la connaissance ; or si les démonstrations exigent qu'on remonte aux principes déjà connus, comment connaître ces principes mêmes. Comment saisir ces arkhai, ou tenter au moins de les dire ? Impossible de se fonder sur le langage démonstratif, qui comporte toujours des médiations, seul vaut le langage "indicatif" tel celui de l'oracle de Delphes, qui ne dédaigne pas le pathos. Dans cette perspective, note Grassi, la métaphore ne peut être qualifiée d'ornementale ; elle supplée la pensée logique, en manifestant l'impuissance de celle-ci à "rendre compte de ses principes". Elle est en somme plus près de l'être, précisément parce qu'archaïque ; ou plus proche de l'originel, parce que porteuse d'une image et d'une puissance émotive. Voilà qui dote la rhétorique de la plus haute dignité.
Ce rêve de transparence, cette peur des mots, ce rejet de l'illusion font horreur à Tesauro : pour ce subtil critique, issu de l'école jésuite, c'est sur la possibilité de mentir que se fonde la vérité.
Nous éprouvions cette impression à l'endroit de Venise .A mesure que l'instant du départ s'approchait,elle nous devenait plus chère .