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Critiques de Étienne Balibar (15)
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Les philosophes face à la guerre

"Philosophie magazine" d'Avril-mai 2022 en édition spéciale, les philosophes, sociologues, essayistes nous livrent leurs réactions face à la guerre en Ukraine. Il s'agit d'une édition spéciale.

J'étais évidemment comme tout le monde en plein ébahissement. Comment était-ce possible, nous en Occident qui, depuis notre naissance, après 1950 dans mon cas, n'avions connu qu'un monde en paix loin du spectre de la guerre, dans nos pays ?

Je croyais vraiment à la paix garantie par la création de l'Union Européenne, grâce à la chute du mur de Berlin et tous ces signes d'échanges entre les pays occidentaux.

De plus, j'affirmais bien fort mes convictions.

La première fois que j'ai douté de la liberté d'expression et de l'avenir de la démocratie, c'est lors des attentats meurtriers de Paris contre Charlie Hebdo et ensuite contre la population.

Que de questionnements lors de l'invasion de l'Ukraine !

C'est avec un réel intérêt que j'ai lu le magazine qui s'intitule "Face à la guerre" qui nous présente des réflexions différentes sur le sens des conflits, la motivation, l'historique des guerres dans le monde, le devenir et la considération des réfugiés, la différence entre les réfugiés syriens et ukrainiens, la vision du monde par un dictateur.

Les articles vont en profondeur et rassemblent les idées afin qu'elles s'éclaircissent.

Toutes les chroniques sont intéressantes et différentes.

Merci à la Masse critique de Babelio et à Philosophie Magazine pour cette lecture bien enrichissante
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Les philosophes face à la guerre

Face à la guerre en Ukraine, une fois la surprise passée, il était indispensable de prendre du recul et d’essayer de comprendre non seulement ce que signifiait cette guerre, quel était son but, mais surtout comment on allait pouvoir en sortir.

Pour ce faire, Philosophie magazine, dont le but est d’éclairer les événements de l’époque à la lumière de la pensée des philosophes, a sorti un numéro spécial en avril. Les articles ont donc été écrits en mars, mais en les lisant fin juillet, ils sont malheureusement toujours d’actualité.

Au départ, j’étais surtout curieuse de lire la contribution d’Etienne Klein, mais au final je dois reconnaître que ce n’est pas la plus intéressante, même si elle est agréable à lire grâce au style d’Etienne Klein.

De toute façon, la question n’est pas de savoir quel est le meilleur article car ce magazine constitue un ensemble avec des articles très différents mais qui contribuent tous à nous faire réfléchir sur une question ou une autre soulevées par la guerre en Ukraine.

La lecture de ce numéro spécial s’est donc avérée très intéressante et je remercie les équipes de Babelio et de Philosophie magazine pour cet envoi.

Je salue également l’accessibilité de ce magazine, car les articles étaient tous très clairs et faciles à lire tout en abordant en trois ou cinq pages des notions d’une certaine complexité.
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Le fond de l'air est jaune

Les textes de différents philosophes, historiens ont été réunis par Joseph Confavreux ; parmi eux : Ludivine Bantigny, IsabelleCoutant, Samuel Hayat, Thomas Piketty, Pierre Rosanvallon, AlexisSpire, et Sophie Wanich.



Les regards de ces intellectuels éclairent le mouvement des gilets jaunes et le replace dans l'histoire des mouvements sociaux française.





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Les frontières de la démocratie

Plus qu'un essai, "Les frontières de la démocratie" est une série de treize essais à dominante philosophique et politique et autant de sujets de réflexion sur le monde qui nous entoure sur le thème de la crise de la démocratie, la citoyenneté et l'exclusion notamment.

L'auteur y évoque principalement la fracture via l'exclusion. En nous focalisant sur le chômage ou la pauvreté, ne s'écarte t-on pas de la question de l'égalité des droits et de leur exercice, et au final de la citoyenneté ?
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Spinoza politique: Le transindividuel

Très bon essai sur la pensée politique de Spinoza qui n'aborde de l'Ethique que ce qu'il est indispensable de savoir pour fonder sa cohérence ; pas de finalisme religieux ou politique : il n'y a pas de progrès continue de l'humanité. Les individus, en démocratie, délèguent une partie de leur souveraineté à l'Etat qui doit s'adapter à une société en continuelle modification. Il est le garant de la paix en assurant à tous la stabilité requise pour les affaires humaines. Il exige en contrepartie le respect des institutions tout en protégeant la liberté d'opinion, qui seule permet un sain exercice du pouvoir et écarte le danger de la dictature et de la guerre civile.

C'est le produit des fluctuantes interférences entre individus, autrement dit le "transindividuel" qui légitime le pouvoir étatique: la démocratie est un équilibre précaire, mais c'est le seul régime éclairé possible.

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Les philosophes face à la guerre

C'est peu de dire que la guerre en Ukraine a bouleversé toutes nos certitudes. Mais elle a aussi profondément questionné ce que nous croyons être la paix, ce que nous croyons être une relation entre les peuples basée sur l'intérêt commun, ou même l'intérêt individuel.

10 penseurs habitués de philosophie magazine se soumettent à l'exercice de prendre du recul par rapport à cette guerre et de penser notre rapport au monde à sa lumière. De niveaux inégaux, ces textes interpellent toutefois chacun par l'angle choisi. Qu'est ce que le pacifisme? Fallait-il donc cela pour créer cette unité européenne? Que penser de la chute annoncée par certains de notre civilisation? Est-ce la faute de l'Otan? Y a t il des réfugiés plus acceptables parce que plus semblables à nous, et qu'en est il de l'universalisme des lumières? Sommes nous dans le déni du réel?

Aucune de ces réflexions ne permet évidemment de venir à bout du problème, mais elles ont chacune le mérite de bouleverser certaines de nos certitudes. Celle qui m'a le plus interpellé est la réflexion de Hartmut Rosa sur notre insécurité ontologique. Et si elle était la source de tous nos maux, à commencer par cette affreuse séduction des extrémismes qui nous promettent un avenir bien cadré, protégé des insécurités, par le prisme de l'homme fort?

Ce n'est pas dans ce livre, mais j'en ressors en me disant que ces soi-disant hommes forts sont décidément de vilains petits garçons qui refusent de devenir adultes, et de sortir de la toute puissance fantasmée. Avons nous donc besoin d'un ennemi, d'un bouc émissaire pour exister?
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La philosophie de Marx

Ce petit livre – un peu plus de cent pages – prend le contrepied de toute la vulgate habituelle. Tout est méconnaissable, le matérialisme, la dialectique ... Loin de l’esprit de système, l’auteur nous donne à voir une pensée marxienne en évolution incessante, en chantier permanent. Etienne Balibar converse avec le grand penseur : les échanges sont philosophiques et absolument passionnants – il est question de la façon dont Marx travaille la philosophie, et la philosophie travaille dans Marx. Balibar plaide pour une philosophie de Marx qu’il préfère à une philosophie marxiste. La pensée communiste s’est souvent présentée en effet comme une alternative à la philosophie, une non-philosophie. Elle est pour elle au mieux une entreprise individuelle d’interprétation du monde, qui pense un ordre du monde conduisant à le valoriser et à le laisser en place. « Les philosophes ont seulement interprété différemment le monde, ce qui compte, c’est de le changer ». Trois sujets sont abordés dans cet ouvrage.

1) Le premier parcours, partant des définitions classiques de l’essence humaine (idéaliste, matérialiste), nous conduit vers la problématique du rapport social. Balibar tout d’abord réaffirme la prise de position de Marx contre l’idéalisme mais également contre l’ancien matérialisme qui réduit toute abstraction intellectuelle à la sensation et à l’affectivité ; ensuite, il définit ce qu’est l’essence humaine pour l’auteur du « Capital ». L’activité subjective dont parle l’idéalisme est la négation d’une activité plus réelle de constitution du monde extérieur et de transformation de soi. Le matérialisme de Marx n’a pourtant rien à voir en avec une référence à la matière. Le renversement de l’idéalisme en matérialisme qu’il propose est le renversement qui consiste à prôner le changement des conditions matérielles par l’action pratique. Pour Marx, nous dit Balibar, le sujet n’est pas autre chose que la pratique. Marx encourage à l’action elle-même, sans phrase. L’essence humaine n’est donc pas pour lui une idée ou une abstraction inhérente à l’individu singulier, une idée logée dans les êtres de même genre. Ce sont les relations qui définissent ce que les hommes ont en commun. L’essence humaine dans la réalité est pour Marx l’ensemble des rapports sociaux.

2) Le deuxième parcours, partant d’une critique des illusions de la conscience, va examiner la constitution du sujet dans les formes de son aliénation. Ce second parcours, nous dit Balibar, n’est pas linéaire, mais marqué par une bifurcation chez Marx : l’abandon du terme d’idéologie. S’inspirant de Feuerbach, Marx affirme en effet dans un premier temps que l’illusion de conscience, l’aliénation, procède de la division même de la société. La conscience sociale se constitue pour lui à partir de la vie réelle de la production. Il y a un caractère de classe de la conscience, c'est-à-dire des limites dans l’horizon intellectuel qui reflètent ou reproduisent les limites de la communication imposées par la division en classe de la société. Il y a donc pour Marx une impossibilité à l’universalité inscrite dans les conditions même de la vie matérielle au-delà de laquelle il est possible de penser qu’en imagination. Il y a par conséquent à la fois une limitation et une autonomie de la conscience. L’idéologie est pour Marx l’abstraction de la conscience. La division du travail manuel et intellectuel génère, pense-t-il, un monopôle de l’idéologie et une autonomisation des idées. L’état ainsi est un fabriquant d’abstraction en raison même de la fiction unitaire qu’il lui faut imposer à la société. Pour toutes ces raisons, les pensées de la classe dominante sont pour Marx les idées dominantes. L’idée d’une idéologie prolétarienne, dans ces conditions, devrait être dénuée de sens ? La masse devrait être extérieure au monde de l’idéologie dont les abstractions et les représentations idéales du rapport social pour elle ne devraient pas exister ? Cette assertion a été malheureusement cruellement infirmée tout au long du mouvement ouvrier et du temps même de Marx. De cette déconvenue d’ailleurs devait naître le concept marxiste de classe en soi et de classe pour soi.

Il ne sera plus guère question dans les derniers travaux de Marx d’idéologie mais de fétichisme de la marchandise. Ce qui se présente comme un rapport quantitatif donné – le temps de travail – est en réalité pour Marx l’expression d’un rapport social. En effet, des unités indépendantes des unes des autres ne peuvent déterminer qu’à postériori, en ajoutant leur production à la demande, le degré de nécessité de leurs travaux, la quantité de travail social qui doit y être consacré. C’est la pratique d’échange qui détermine la proportion mais c’est la valeur d’échange qui détermine pour chaque producteur, de façon inversée comme une propriété des choses, le rapport que son travail entretien avec celui de tous les autres. Dès lors, il est indéniable que le travail des producteurs apparait socialisé par la forme valeur, au lieu que celle-ci figure comme l’expression de la division du travail. Les relations sociales qu’entretiennent leurs travaux privés apparaissent aux producteurs comme rapports impersonnels entre les personnes et rapport social entre les choses impersonnelles. Le fétichisme de la marchandise fait qu’un rapport entre les hommes prend pour eux la forme fantasmagorique d’un rapport entre les choses. Les sociétés sont des sociétés de marchandises dont les hommes ne sont que les intermédiaires et non des sociétés d’hommes nous dit Marx. Mais qu’elle est pour Marx la genèse de cette subjectivité ? L’activité du monde pour lui ne procède d’aucun sujet pensable sous la forme d’une conscience (contre l’idéalisme classique de Kant). Le monde social en revanche constitue des sujets – ou des formes de subjectivité et de conscience – dans le champ même de l’objectivité. Ainsi, si la constitution de l’objectivité dans le fétichisme ne dépend pas de données préalables d’un sujet, en revanche elle constitue des sujets, qui sont partie de l’objectivité elle-même, c'est-à-dire qu’ils sont donnés dans l’expérience à côté des choses, des marchandises, et en rapport avec elles (sujet constitué non constituant).

C’est, comme nous le montre Balibar, un parcours de Marx qui mène de l’idéologie au fétichisme. La scission de la communauté réelle des individus est suivie d’une projection ou transposition du rapport social dans une chose extérieure. Dans un cas, c’est une idole, une représentation abstraite (liberté, justice…), dans l’autre cas, c’est un fétiche, une chose matérielle (la marchandise, et surtout l’argent).Dans le premier cas s’esquisse une théorie de la constitution du pouvoir ; dans le deuxième cas il est décrit un mécanisme de sujétion. La théorie de l’idéologie est fondamentalement pour Marx une théorie de l’état qui conduit à une réflexion sur la division du travail; celle du fétichisme une théorie du marché qui conduit à une réflexion sur la forme de la circulation marchande.

3) Le troisième parcours enfin que nous propose Balibar est celui qui va d’un schéma de causalité (matérialiste en ce sens qui renverse le primat de la conscience dans l’explication de l’histoire, mais pour lui assigner une place de médiation) vers une dialectique de la temporalité, immanente au jeu des forces de l’histoire. Il y a plusieurs ébauches de cette dialectique chez Marx, la principale étant celle de la contradiction réelle, c'est-à-dire des tendances et contre-tendances de socialisation (voies alternatives, singulières qui peut ébaucher une critique interne de l’évolutionnisme marxien). Il faut noter que cette dialectique temporelle existe chez Marx avec son contraire : l’idée d’une histoire universelle de l’humanité, d’une ligne ascendante, uniformément progressive, des modes de production et des formations sociales. Pourtant, nous dit-il, l’histoire ne se fait pas du bon côté, c'est-à-dire en raison de la force intrinsèque et de l’excellence des idéaux humanistes, moins encore par la force de la conviction et de l’éducation mais par la douleur du négatif, l’affrontement des intérêts, la violence des crises et des révolutions. L’histoire, ajoute-t-il, n’avance pas seulement par le mauvais côté mais du mauvais côté celui de la domination et de la ruine. Le progrès n’est pas programmé. L’historicité, pour l’auteur du Capital, doit être envisagée comme une succession de contradictions réelles, comme une problématique de causalité ou d’actions réciproques de force de l’histoire qui se posent dans chaque moment, dans chaque présent.

« La philosophie de Marx » d’Étienne Balibar est je crois un bilan critique qui libère cette pensée de tout dogmatisme et nous invite à penser par nous-même.

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Le fond de l'air est jaune

Ce livre reprend un ensemble d'articles publiés dans la presse. Il est étonnant que l'expression collective de personnes mécontentes donne lieu à des réflexions aussi variées. La profondeur des analyses reste assez faible. Certains auteurs sont plus réalistes que d'autres qui restent dans les références à des auteurs ou événements (on sent qu'ils ne sont pas allés sur le terrain). Il faut savoir penser par soi-même, mais c'est le plus difficile.

J'ai aimé l'article de Louis chauvel (le ressenti ne ment pas) mais aussi l'article d'Etienne Balibar (le sens du face à face) et celui de Pierre Rosanvallon (accroître le pouvoir de vivre).
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Europe Constitution Frontière

La réunion de ces textes et interviews en un petit volume permet de s’interroger de manière plus théorique que lors des riches débats que nous avons eu lors de la campagne référendair sur la ”constitution européenne”.



Pour Etienne Balibar, la condition sine qua non d’une Europe politique sera « d’être en pratique une construction institutionnelle plus démocratique que ne l’ont été les nations dont elle est issue au point maximum de leur développement, et non pas moins ». « Il n’y a rien de nécessaire à ce qu’existe un jour une citoyenneté transnationale, en revanche il est nécessaire qu’une telle citoyenneté représente un progrès démocratique dans des domaines fondamentaux : la reconnaissance des droits sociaux, la participation aux affaires publiques et les possibilités de contrôle du pouvoir politique, etc. C’est la condition pour que les institutions supranationales apparaissent acceptables, et même désirables, à la population, c’est à dire à la masse des citoyens »



Cela implique de se poser la question de savoir ce qu’est une constitution et de rouvrir le problème de l’acte constituant en innovant dans l’histoire de l’idée même de constitution.



Le livre traite aussi de la problématique de l’État-nation, de la territorialisation de l’espace et des « frontières intérieures » c’est à dire de la reconnaissance ou non des populations immigrées « c’est l’institution frontalière elle-même, en particulier les différences qu’elle comporte entre les frontières de sécurité et de simples délimitations administratives, qui produit l’étranger comme un type social et un fait anthropologique »



Etienne Balibar traite aussi des « différences dites culturelles ou religieuses » en affirmant sa position d’une construction active et critique de l’universel.



Par ces multiples thèmes, ce petit livre, nous aide à réfléchir à quelle autre Europe nous voulons.



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Être humain ?

Un fil rouge traverse ainsi l’ensemble de l’ouvrage : l’exploration du visage de l’Autre — ou des visages pluriels de l’humain. Il nous invite à mesurer la fragilité de nos définitions de l’humanité et ainsi à admettre la vulnérabilité des humains qui la composent.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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Les philosophes face à la guerre

L'opération "Masse critique" de Babelio m'a permis de gagner un exemplaire d'un magazine que je ne connaissais pas :"Philosophie magazine".



"Face à la guerre" est un recueil de textes écrits par des philosophes, des penseurs, des sociologues, des intellectuels de tous horizons.



Ces hommes (et ces femmes) livrent une réflexion sur la guerre, plus particulièrement sur celle qui touche d'une manière ou d'une autre l'Europe : la guerre en Ukraine.



Chacun(e) donne ici le fruit de son analyse et fait référence à divers auteurs et personnalités à travers des citations.



Un éclairage sur les causes et les aboutissements de cette guerre qu'on n'attendait pas. Pourtant des signes auraient pu nous mettre la puce à l'oreille...



Des textes intéressants, interpellants, à la portée de tous.



Je remercie Babelio pour l'envoi de ce magazine.



"Nous ne nous opposerons réellement aux puissances qui menacent les libertés intellectuelles et individuelles que lorsque nous aurons reconnu que la notion même de liberté, pour laquelle nos ancêtres s'étaient déjà déchirés, est aujourd'hui en péril". (Einstein)
Lien : http://phildes.canalblog.com..
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Le symptôma grec

Faire tomber les murs transforme la réalité

« Les textes qui suivent correspondent à une partie des interventions prononcées à l’occasion du colloque organisé avec l’université de Paris-8 sous le titre « Le Symptôma grec » en janvier 2013. Il s’agissait de penser dans et sous condition de la circonstance politique, au plus près de l’actualité, sans disposer de la distance nécessaire et de la prudence qui président habituellement aux manifestations académiques ».



Comme l’indique Maria Kakogianni dans un premier texte « L’usage du mot « symptôme » comporte une note ironique qui fait écho à la discursivité dominante d’une politique médicalisée ». Car au delà des prétendues « thérapies » organisées et imposées par la Troïka, il s’agit de politiques concertées, d’attaques frontales contre les droits des salarié-e-s ou des peuples, au nom du remboursement des dettes, dont les caractères odieux et illégitimes ne doivent pas être oubliés, de « leur crise » plutôt que de « la crise ».



Les auteur-e-s revendiquent à juste titre « une liberté inconditionnelle de questionnement et de proposition » et le refus d’abandonner l’avenir, leur/notre avenir à l’Etat ou au marché.



« Notre point de départ était de ne pas construire un colloque « réussi » où finalement nos oreilles entendraient ce qu’elles sont habituées à entendre. Où les gens se rassembleraient de la manière habituelle. Où les gestes ne trembleraient pas mais sont imprégnés de maîtrise. Et parfois même d’un savoir aussi mélancolique qu’accumulé, d’un monde impossible à changer ».



Le projet est louable, reste que certain-e-s, sans la prudence revendiquée par Jacques Rancière (« comment on peut tenter un petit peu aujourd’hui de changer la manière même dont on pense ce que c’est que penser, ce que c’est qu’agir après une pensée »), n’hésitent pas asséner leurs jargons, truffés de « post » de « biopolitique », de « multitude », de « biocapital », de production cognitive ou de travail cognitif (lire aussi le rappel de Jacques Rancière : « Les 250 millions de travailleurs migrants intérieurs en Chine n’ont rien à voir avec le « nomade » des philosophes ni avec le travail « immatériel ». »), de donner des leçons… à l’instar de Antonio Negri, oublieux de son appel à voter pour la constitution ultra-libérale proposée pour l’Europe, ou d’Alain Badiou, qui écrit, sans rire, à propos des « Etats socialistes » et des « Partis communistes » que « cette critique devait être la nôtre », oubliant son passé stalinien, son soutien, entre autres, aux exactions des gardes rouges chinois ou au régime génocidaire des khmers rouges…



Il me fallait exprimer cet énervement devant la morgue de certains, les relents fétides incompatibles avec les auto-émancipations possibles…



Cela étant dit, et dans la limite de mes compétences, j’indique quelques points présentés comme interrogations ou analyses.



Etienne Balibar propose des réflexions autour du « peuple européen », de la démocratie. Il souligne qu’il « convient d’offrir au « peuple européen » les « possibilités d’expression démocratique et de contrôle du pouvoir par la « masse » des citoyens supérieures (et non inférieures) à celles que présentent (ou présentaient naguère) les Etats nationaux même les plus démocratiques ». Contre les visions réductrices de la démocratie, il indique « Il y a une complexité, une hétérogénéité même de la démocratisation, qui est la condition de son effectivité » et fait le lien entre imposition et représentation « no taxation without representation ! » et « no representation without taxation ! » et poursuit sur l’harmonisation fiscale européenne à mettre en place. Pour lui, la politique démocratique peut se définir « en avançant, en créant à mesure ses propres conditions de possibilité « subjectives » et « objectives ». »



Bancocratie, endettement de l’Etat, monnaie et dépossession du pouvoir, gestion de la « crise grecque », Marie Cuillerai et Maria Kakogianni soulignent que « cet échec est ici le nom d’une certaine réussite ». La notion de « monnaie politique » me semble peu pourvu de sens, je rappelle que la monnaie relève d’un rapport social. Les auteures indiquent, et on ne le dira jamais assez, que « les Etats ont activement produit la financiarisation… », parlent des « dettes des vaincus »… Je suis étonné de l’absence de référence sur la bancocratie et sur la dette aux travaux du CADTM (voir par exemple : Damien Millet et Éric Toussaint : AAA Audit Annulation Autre politique. Crise de la dette : la seule façon d’en sortir, ou Eric Toussaint : Bancocratie).Parler de la dette sans la remettre en cause, sans évoquer les multiples mobilisations sur son annulation, sur les politiques sud-américaines, me semble contre-productif. (C’est aussi le cas dans l’article de Yannis Stavrakakis). En rester aux conséquences subjectives sur les individu-e-s reste très restrictif, même d’un point de vue strictement philosophique. Comme l’indique Costas Douzinas, la dette est un rapport social.



J’ai apprécié des pistes ouvertes par Elsa Papageorgiou. Retours à Henri Lefebvre, à Walter Benjamin. L’auteure souligne que « la capacité destructice produit des lieux de prospérité », parle de l’impuissance politique, des effets compensatoires de la consommation, de menace fasciste, d’image de dépossession et d’impuissance. Il reste étonnant, et cela est valable pour tou-te-s les auteur-e-s, que les élaborations du mouvement féministe ne soient pas intégrées. (Voir par exemple sur la dépossession et l’impuissance, Andrea Dworkin : Les femmes de droite).J’ai été notamment intéressé par l’article d’Amador Fernández-Savater, son traitement des fictions littéraires, du 15-M, sa lecture de « L’homme citoyen », de « Nous sommes tous des juifs allemands » ou de « Nous sommes le peuple », ses questionnement sur les processus de subjectivation, les fables comme choses sérieuses, l’émancipation, « nous sommes et nous ne sommes pas ce que nous sommes », le « nous ouvert et incluant »…



Les éléments les plus intéressants du livre, me semblent se trouver dans les réponses de Jacques Rancière aux questions/discours de Maria Kakogianni : sur des présents contribuant à créer des futurs, les opérations d’universalisation produites par les collectifs politiques, les représentations, les formes de violence, les anonymes, la constitution du nouveau, les rythmes temporels, les processus de subjectivation, la libération « d’autres enchaînements nécessaires »… Ou le rappel que « l’économie du profit ne sera pas vaincue par des arts du vivre » et sa critique du « baratin » post-moderne…



Jacques Rancière développe des pensées intégrant les contradictions, ne lissant les situations, comme par exemple : « Ce n’est pas parce qu’on reconnaît la violence des actes de lutte de classes de l’internationale capitaliste qu’on fait pour autant un discours victimaire sur la souffrance des pauvres grecs ou autres peuples soumis aux mêmes contraintes ».



Une invitation, non à fournir des lunettes pour voir, mais « une méthode artisanale pour construire ces lunettes. Le reste nous appartient ».



Sommaire :

Maria Kakogianni : Essayer encore. Rater encore. Rater mieux

Étienne Balibar : Comment résoudre l’aporie du « peuple européen » ?

Marie Cuillerai, Maria Kakogianni : Bancocratie

Bruno Théret : Pour un fédéralisme monétaire européen

Elsa Papageorgiou : La crise sociale totale et le retour du fascisme

Yannis Stavrakakis : La société de la dette : la Grèce et l’avenir de la post-démocratie

Howard Caygill : Résister à l’escalade : l’image de la villa Amalias

Costas Douzinas : La résistance, la philosophie et la gauche

Antonio Negri : De la fin des gauches nationales aux mouvements subversifs pour l’Europe

Amador Fernández-Savater : Politique littérale et politique littéraire

Maria Kakogianni, Jacques Rancière : Dialogue précaire

Alain Badiou : L’impuissance contemporaine

Camille Louis : Symptôma, suites
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Citoyen sujet et autres essais d'anthropolo..

Etienne Balibar relie tout au long de ces articles et interventions ici rassemblés le concept de Citoyen, issu de Hobbes et celui de Sujet pensant, issu de Descartes, en cheminant à travers l'histoire de la pensée. Un décentrement de la philosophie politique qui nous montre l'imbrication entre anthropologie philosophique et conception de la Cité
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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Citoyen sujet et autres essais d'anthropolo..

Aller ainsi de l'intimité du sujet à son inscription dans le monde a quelque chose d'ironique : en réalité, l'analyse que propose Balibar perturbe à chaque instant les frontières de l'intérieur et de l'extérieur.
Lien : http://www.lemonde.fr/livres..
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Citoyen sujet et autres essais d'anthropolo..

Comme Alain Badiou, Etienne Balibar fut un proche d'Althusser. Mais, alors que la pensée radicale retrouve de l'audience, il récuse l'opposition entre démocratie et révolution, deux faces de notre «cause commune». Il s'en explique avec Eric Aeschimann.
Lien : http://rss.nouvelobs.com/c/3..
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