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Agnieszka Zuk (Traducteur)Laurent Alaux (Traducteur)
EAN : 9782267017373
147 pages
Christian Bourgois Editeur (24/09/2004)
3.83/5   15 notes
Résumé :

Dans les Contes de Galicie, Stasiuk raconte un lieu, un village du fin fond de la Pologne, au travers de la vie de ses habitants. Ces nouvelles, comme autant de portraits, peuvent exister de manière autonome, mais les histoires des uns et des autres s'imbriquent, s'entrecroisent, se lient et tissent une toile des correspondances qui échafaudent progressivement une mémoire commune, celle du village. Edek, Gacek, Maryska, Jôzek...- des i... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Des contes sur un village oublie de Galicie, des habitants oublies qui cherchent tout le temps quelque chose ou quelqu'un ailleurs, alors que personne ailleurs ne pense a eux ni les cherche pour quoi que ce soit. Une societe vieillissante, qui n'arrive pas vraiment a s'adapter aux changement des temps, aux debuts de la transition politique en Pologne, apres la liquidation des cooperatives agricoles d'etat. Des desherites, perdus dans une Galicie ou les “eternelles" certitudes d'antan fondent comme neige au soleil.

Un village croupissant, traverse par une rue pavee a moitie, limite par deux sites, deux noyaux enblematiques, le coeur et les poumons, l'eglise et le bar. Les petites vieilles noires se fondent dans l'obscurite de l'eglise, les hommes boivent leur amertume dans la grise poussiere du bar.

Des contes sur des personnages et des lieux. Chaque personnage a droit a un conte, mais des le milieu du recueil il y en a qui reviennent hanter ceux des autres, s'y imbriquent et finissent par tisser une trame qui donne a ce livre une semblance de roman.

Tous un peu paumes. Jozek, le petit demerdard, un peu voleur, un peu simplet. Wladek, grand feignant a l'epoque du kolkhoze, qui se decouvre une nature d'entrepreneur. Kruk, le forgeron retraite, et Lewandowski l'esseule, qui racontent inlassablement les insignifiants details de leurs voyages, a Krakow ou a Varsovie. Janek, le bucheron tractoriste, qui partira travailler a l'etranger. le sergent de police Roux, timide, qui reste chez lui a regarder par la fenetre ce qui se passe dehors. “L'element essentiel du service est l'immobilite, pensa-t-il”. Quelques femmes: la vieille Meme, qui pousse des cris pour faire fuir les loups quant elle fait paitre ses chevres. Son mari s'est noye suite a une cuite et six de ses sept filles sont parties. Quand la foudre s'abat sur sa maison, elle murmure, fouillant les decombres brulees: “Dieu est un homme, Dieu est un homme”. Maryska, sa fille, qui se donne a tout le monde jusqu'a ce que Gacek la prenne en main. Mais que lui est-il arrive de grave, et pourquoi met-on Gacek en prison? Mystere.

Et puis il y a Kosciejny, l'abatteur de cochons. Kosciejny, qui sert de fil reliant les histoires de tous les autres, cousant les differents contes en une amorce de roman. Kosciejny: “son air habituel d'epouvantail echappe du jardin. A quarante ans, c'est a ca que ressemblent les hommes maigres dans leur treillis. Leurs traits sont gommes par le temps, mais en vieillissant, reconcilies avec lui, ils retrouvent leurs visages propres. Peut-etre pour que la mort puisse les distinguer”. Un jour gris il entre dans le bar et plante son couteau de boucher dans un voisin qu'il soupconne de coucher avec sa femme, puis se rend directement au poste de police ou le sergent Roux dans son uniforme deboutonne lui dit : “Dieu te garde, Kosciejny ”. Emprisonne, il meurt de froid lors d'une permission, n'ayant droit ni a une sepulture chretienne ni a une messe. Il devient un fantome qui hante le village et s'introduit dans les maisons et les reves de ses habitants. Il parle au sergent Roux et lui promet des tuyaux sur un homicide (s'agit-il de la mort de Maryska?) s'il commande une messe a son intention. Roux, non croyant, entre pour la premiere fois a l'eglise parler au cure etonne. Et il reussit a organiser une grande messe, embarquant de force tous les piliers du bar pour faire foule et meme convaincant Lewandowski a jouer de l'harmonium. Un final d'apotheose mystique. Mais que lui murmurera le fantome de Kosciejny a l'oreille? On ne le saura jamais.

Contes de Galicie. Contes d'un village de Galicie saupoudres de realisme magique. Contes en une langue qui se veut simple et se revele tres poetique. Contes d'une fin d'epoque en Galicie. L'epoque d'antan n'etait pas tres faste mais la fin est pitoyable. Navrante, comme nous le fait ressentir le conte intitule le lieu, qui decrit un carre de terre rasee ou s'elevait une eglise en bois viellissante, demontee pour etre transportee en un musee lointain; un grand espace vide ou traine encore l'air de l'eglise. Son air, peut-etre reste pour toujours au village: “Les tableaux et les objets, c'est ce qu'il y a de moins fascinant dans une eglise; ils rappellent trop le reste de la realite. Ils essaient de s'en arracher, mais y retombent, preuve de la vanite de tout effort. Par contre, l'air enferme dans le cube, l'espace circonscrit par la voute, les murs et tous les details architecturaux, constituent le plus parfait moulage de la langueur. On y entre, on sent un frolement sur la peau, mais tout coule entre les doigts, on peut juste en garder dans les poumons un bref instant”.

Un village, declinant. Serait-il condamne? Je ne pourrais l'affirmer, mais en cette epoque de capitalisme sans freins et sans remords, c'est une possibilite a envisager. Alors lisez ce livre, le livre que lui a consacre Andre Stasiuk, avant qu'il ne disparaisse. C'est tout court. Quelques pages, une rue, quelques maisons, une eglise, un bar, une poignee d'etres oublies de Dieu. Oublies, mortifies, confus, tellement humains… Que ce soit votre b.a. scout de 2022. Vous en serez recompenses.
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En guise d'explication, la Galicie est une partie du territoire du royaume de Pologne attribué à l'Autriche pendant les démembrements de la Pologne au XVIIIem siècle. A l'heure actuelle, ces territoires se trouvent dans différents pays, ce qui en reste en Pologne, se situe au sud-est, à la frontière avec l'Ukraine, c'est le territoire le plus oriental, et le plus pauvre du pays.

Andrzej Stasiuk nous parle des gens qui vivent dans ce territoire, et plus exactement dans un village. Tout d'abord, il semble s'agir de nouvelles, chacune d'entre elles nous brosse le portrait d'un personnage, en quelques pages à peine. Un conducteur de tracteur dans un kolkhoz, qui bien sûr a complètement périclité depuis les changements politiques par exemple. Ou un retraité qui passe son temps à raconter avec des détails les plus infimes les petites choses de sa vie. Mais progressivement, nous voyons les personnages revenir, et raconter une sorte de récit collectif, de la vie d'une communauté. Les récits apparemment sans lien, se répondent, se complètent, et dessinent une fresque dont les couleurs se découvrent en même temps que les vies et les destins des personnages. C'est parfois tenu et il faut capter le fil qui relie les choses les unes aux autres. Mais les personnages sont tenaces, et même morts, ils reviennent parfois hanter les vivants et finir de jouer leur partition.

Il s'agit de toutes petites gens, essentiellement des paysans, qui vivent tant bien que mal, et plutôt mal, voir très mal. Les hommes boivent, terrorisent leur famille, travaillent dur, et boivent ce qu'ils ont gagné. Les femmes travaillent, mettent au monde des enfants, beaucoup d'enfants. Un réel sordide, triste, désespéré pourrait-on dire.

Alors comment l'auteur arrive à lui donner toutes ces couleurs, et cette extraordinaire vitalité ? Là c'est vraiment du grand art. Il utilise un vocabulaire, recherché, précieux, même si sa phrase est économe, le choix des mots est essentiel, il donne des allures d'épopée mythique, d'épisodes lyriques à des scènes qui décrites autrement pourraient sembler d'une trivialité et d'une laideur repoussantes. Il magnifie ces personnes, dans lesquelles on pourrait voir des déshérités, des miséreux, et en fait des héros, essentiellement de tragédie, car tout cela ne peut avoir de fin heureuse. le mari qui tue sa femme supposée infidèle et dont le fantôme hante certains habitants du village, et en premier lieu le policier qui la arrêté. Et le chapitre final, est hallucinant, drôle et pathétique à la fois.

Je dirais que pour moi c'est sans conteste un livre marquant, comme d'autres du même auteur.
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On apprend que « Bonanza » était très populaire en Pologne, que le pays a été envahi par les produits étrangers après la chute du régime communiste, l'omniprésence de l'alcool à la campagne. Je n'ai pas de souvenir désagréable de ces nouvelles plutôt polyphonique, dans le sens où elles sont toutes liées par un lieu. Mais, comme le grésil, elles ont un peu glissé sur moi sans mouiller ma peau, sans que je sache véritablement si j'ai manqué d'attention ou si elles sont un peu trop banales…
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Une plume magnifique ! C'est ce que je retiens en premier de ce livre et de cet auteur. Un vocabulaire riche et une manière de nous décrire les personnages qui nous facilitent grandement l'imagination.
On lit sans effort de transposition, sans effort de compréhension, tout est simple et riche. Il semble si facile d'écrire quand on lit Stasiuk. Et pourtant. le sujet n'est pas nécessairement attirant de prime abord, dresser le portrait chapitre après chapitre de paysans polonais. Mais c'est fait avec une telle précision que l'on accroche de suite.
Tout s'emballe quand l'histoire prend un virage "fantastique" avec un fantôme errant dans l'histoire de chaque personne qu'il côtoyait et en qui il garde une rancoeur tenace. Une fin surprenante et nous avons un livre très réussi, frustrant par sa concision, marquant par le talent de l'auteur et la précision du récit, la saveur des dialogues rythmés et utilisés à bon escient.
A découvrir vivement.
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Une écriture plutôt ciseléen légère, où la desnité de l'air et les changements des couleur prennent parfois autant d'importance que les personnages eux-mêmes. Pour ces derniers, dont les histoires finissent par s'entremêler sans pour autant constituer un scénario linéaire, l'auteur semble à la fois sans concession, et dans la tendresse. Et c'est par le trivial et l'anecdotique qu'il nous fait les aimer.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Olgierd Giemza, celui qui peignit les icones de l’eglise orthodoxe du coin, et de quelques-unes du cote slovaque ; d’ailleurs, pour cela, il fut oblige de se confesser devant les schismatiques, or le pretre ne lui donna pas de penitence, mais lui demanda en revanche de peindre sainte Anne dans la chapelle laterale de l’eglise, seulement voila, chaque fois ce qu’il obtenait, c’etait sainte Paraskewa, alors il devint fou, jeta ses peintures, cassa ses pinceaux et partit en Terre sainte chercher le pardon ou un chatiment. Tout cela est tres lointain.
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Sa fille est nee pendant la liberation, il y a quarante et quelques annees, alors quelque part c’est une chance qu’elle se soit trouve un mari. Il avait un visage comme une vieille pierre. On peut tout cacher sous un masque pareil, on s’attend a tout de cette immobilite. Il avait dans les quarante ans, lui aussi. A cet age-la, on ne change pas ses habitudes : travailler, boire, frapper, dormir. La previsibilite est securisante.
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Où qu'on aille, il y a toujours un bar, comme une consolation pour le silence et l'immobilité de la maison.
(page 57)
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Video de Andrzej Stasiuk (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Andrzej Stasiuk
Le jeudi 25 octobre 2018, la librairie Charybde (129 rue de Charenton 75012 Paris - www.charybde.fr) recevait Hélène Gaudy en qualité de libraire invité.
Elle nous présentait sept livres qui lui tiennent particulièrement à c?ur :
1. Georges-Arthur Goldschmidt, La traversée des fleuves (02:05) 2. Andrzej Stasiuk, Un vague sentiment de perte (12:15) 3. Jakuta Alikavazovic, L'avancée de la nuit (20:40) 4. Sylvain Prudhomme, Là, avait dit Bahi (32:26) 5. Jean-Christophe Bailly, Description d'Olonne (42:16) 6. Georges Perec, W ou le souvenir d'enfance (48:10) 7. Gwenaëlle Aubry, Personne (54:40)
En fin de rencontre, Charybde 7 évoquait chaleureusement plusieurs ouvrages d'Hélène Gaudy (1:00:30)
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