Le livre aurait pu s'appeler la Nausée comme le livre le suggère ou "grosse mesquinerie" mais ça fait pas très littéraire. le père de del Castillo est peu commun : en plus de s'être très peu occupé de femme et enfant, il n'a pas hésité à les dénoncer dans les années 40 pour s'en "débarasser", ne pas compromettre sa position chez Michelin et les faire interner au camp de Rieucros à Mende. C'est pas ce biais là que je connaissait del Castillo, par contre j'étais loin d'imaginer les circonstances de l'internement.
Le père est bas, mesquin, raciste, imbu de lui même, fuyant d'un bout à l'autre de son existence.
Commenter  J’apprécie         60
Quand on lit les autobiographies de Michel del Castillo, une question se pose (soyons un peu provocateurs). Ne vaut-il pas mieux avoir des parents odieux, qui vous méprisent, vous enfoncent et qui ne ne vous apportent aucun amour mais qui ne vous laissent d'autre choix que de vous en sortir par vous mêmes (si vous ne vous êtes pas effondrés avant) que des parents aimants, bienveillants et attentionnés ?
Car Michel del Castillo n'a pas été gâté. Victime de l'époque (guerre civile espagnole et seconde guerre mondiale), il est abandonné très jeune à son sort par ses parents. Son père n'hésite pas à dénoncer sa femme à la Gestapo pour sauver son entreprise. Un homme lâche, odieux, corrompu, attaché uniquement aux apparences. Evidemment, l'enfant paiera toute sa vie ce manque d'amour, ces abandons et son enfance horrible mais il a eu à coeur de montrer à ses parents qu'il pouvait réussir et s'en sortir.
Commenter  J’apprécie         40
Défi ABC 2022/2023
J'aime bien les brocantes, les réderies comme on dit chez moi. Au milieu des vieilleries en tout genre, on trouve de quoi déroger sans (trop de) culpabilité au sacro-saint "je n'achète plus de livres". de Michel del Castillo, je ne connaissais que le nom. Les premières lignes m'ont séduite, par la musique de la langue, le rythme des phrases. Récit autobiographique, d'une enfance brisée (massacrée, broyée, piétinée, assassinée), un père rencontré à l'adolescence, et les pires intuitions qui se confirment au fil des années. Un adolescent qui se construit, par les livres, par l'amour d'un oncle et d'une tante, et qui malgré tout, maintient un lien avec son géniteur. C'est terrible, c'est prenant, un livre captivant, émouvant, loin de toute pleurnicherie: un constat, non pas froid, mais triste et calme. Bouleversant .
Commenter  J’apprécie         40
Chaque jour, je me retrouve à Ambroise-Paré où Rita a été opérée du col du fémur. Le choc a ébranlé son esprit ; elle divague, elle a des hallucinations. Elle se jette dans mes bras, s'accroche à mon cou. On vient la nuit l'assassiner, on la menace d'un grand couteau, l'infirmier la frappe. Va-t-elle couler dans la démence ?
" - Il ne te manquait plus que ça, murmure Patricia. Tu traverses une sale passe. Tâche de tenir le coup.
- C'est dans l'ordre naturel des choses. Ma tante aura quatre-vingt-douze ans cet été. La première ligne cède... C'est mon tour de monter au feu "... Je la regarde, je lui souris. " Dans les coups durs, je suis assez bon, dis-je. J'ai l'habitude. Ce sont les petites choses qui me désorientent. "...
Nous déambulons un long moment dans le quartier. C'est une soirée douce. Alors que nous contemplons la devanture d'un antiquaire, je m'entends murmurer : " Tu ne peux pas imaginer combien j'ai aimé cette femme. - Mais si, j'imagine. Tous ceux qui te connaissent savent ce qu'elle était pour toi. " Elle tend alors la main, prend la mienne et je colle mon front contre la vitrine pour admirer un secrétaire : " C'est une pièce superbe, tu ne trouve pas ? - Très belle, oui, chuchote-t-elle d'une voix chaude. Je pense : si je hurlais, si... Je ne crierai pas. J'ai appris dans mon enfance que les hurlements n'éveillent personne...
Rémi s'offusque : "on dirait que tu prends plaisir à te démolir!". Pour lui, l'affaire est simple : un homme capable de dénoncer et d'expédier dans un camp la femme qu'il a aimée et dont il a eu un enfant, cet homme est un salaud, point.
J'ai rendez-vous avec mon assassin. C'est mon père et il s'appelle Michel.
Qui voudrait aimer l'écorché vif que je me sens être toujours prêt à rentrer dans ma coquille et à me retrancher derrière une bouderie ? Je me passe très bien de toute affection, grimace ma bouche, alors même que mon coeur cogne à mes tempes. Préparé à recevoir un nouveau coup, j'affecte l'indifférence. Je me veux blindé, mais mon armure est fendue de partout.
Je me sens anéanti. Nadia et Rémi avaient raison, jusque dans la mort, cet homme conserve le pouvoir de détruire. Il n'a pas changé. Il reste tel qu'ilo a toujours été : malin, certes, pervers, surtout. Mon assassin.
Michel del Castillo vous présente son ouvrage "Mamita" aux éditions Fayard.