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Erika Abrams (Traducteur)
EAN : 9782264041074
752 pages
10-18 (20/01/2005)
4.2/5   476 notes
Résumé :
1862. Lant Street, Londres. Le rendez-vous des voleurs et des receleurs. Sue Trinder, orpheline, est confiée dès le berceau aux bons soins d'une trafiquante de nourrissons. À la veille de ses dix-huit ans, un élégant, surnommé Gentleman, lui propose d'escroquer une héritière, Maud Lilly. Orpheline elle aussi, cette dernière est élevée dans un lugubre manoir par son oncle, collectionneur de livres d'un genre tout particulier. Sue, en entrant au service de la riche je... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (98) Voir plus Ajouter une critique
4,2

sur 476 notes
Une histoire d'amour balbutiante au milieu des plus sombres complots. Absolument fantastique.
Tout est noir, crasseux et crapoteux dans ce roman fleuve. À l'image de ce à quoi devait ressembler la Tamise, omniprésente dans ce livre, en cette deuxième moitié du XIXème siècle. Il n'y a pas de place pour la compassion, la bienveillance et l'affection. L'amour, le vrai, celui qui est désintéressé, est considéré de manière particulièrement suspecte. Autant de penchants réservés aux faibles, et les faibles ne survivent pas à Londres, cette mégalopole grise, inhumaine et dévoreuse d'âmes…
Les personnages de Lant Street, le quartier londonien des voleurs, ne sont pas des perdreaux de l'année. Ils sont durs, ils sont d'airain, et prêts à toutes les gredineries, toutes les fourberies pour échapper une bonne fois pour toute à la misère crasse qui les cerne.
L'élégant Gentlemen, Sue, la petite « fourline » aux joues roses, et la rusée Mme Sucksby ont mis au point un chef d'oeuvre de filouterie, de la fine dentelle, pour déposséder de sa fortune une riche et innocente héritière.
Je ne peux pas en dire plus, car ce serait alors dévoiler une intrigue aussi extraordinaire que pernicieuse. Laissez simplement Sarah Waters vous guider par la main pour ne pas vous perdre dans les méandres de son histoire, et vous irez de stupéfaction en stupéfaction. A chaque tiers du roman, le récit se retourne comme un gant, et tout est chamboulé. Ce que vous teniez pour acquis, pour certain, dans cette grande aventure humaine disparaît en fumée. D'autres réalités surgissent. Les masques tombent et vous voyez les personnages sous un angle totalement différent. Personne n'est tout à fait victime, ni tout à fait manipulateur au milieu de cette sombre machination…
Du grand art, je trouve ! du fatras dont on fait les romans de gare, diront certains ? Si tous les romans de gare ressemblent à ce livre, alors vive les romans de gare !
Au milieu de toutes ces ruptures inattendues, de ces révélations, il y a cependant ce fil ténu qui relie tous ces récits : cette passion souterraine, cette histoire d'amour qui n'ose pas dire son nom, ces demandes suppliantes de pardon, toutes ces caresses du bout des doigts.
Un roman fort et émouvant. J'ai été littéralement transporté.

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Donc ce livre aurait, parmi d'autres, changé la vie de l'immense David Bowie...
Attiré, forcément, vu la richesse de la liste, et l'année de parution (période non encore recouverte par la morale intersectionnelle...).
Cela commence plutôt bien, même si la langue (ou la traduction ?) apparait assez plate, surtout pour un roman de ce genre. Ce n'est pas désagréable, ni fulgurant... Les pages avancent, et les personnages pas vraiment:
du trait, mais rien qui ne vient l'épaissir.
Et puis l'on comprend que l'intrigue va fonctionner par coups de théâtre, que les personnages se jouent des autres, et que ce roman va être lu très rapidement... mais passé quelques surprises, on s'enfonce rapidement dans une intrigue dont l'auteure a sans doute privilégié la "morale" au déroulement, et l'ennui revient au galop... comme si l'auteure n'était juste pas au niveau pour nous parler de ces drames aussi courants qu'insoutenables de cette époque, tel l'internement de femmes jugées "folles" par leur mari ou leur famille.
Un "méchant", nommé "Gentleman" (les noms des personnages feraient hurler un professeur d'atelier d'écriture), à la personnalité de bernard-l'ermite, d'importants "trous" narratifs (volontaire ou pas) entre les histoires de chacun, un cruel manque de finesse générale, bref, un bon cale-porte qui doit sans doute son succès à un emballement de genre, très loin du "roman décadent et virtuose" promis sur la 4ème (décadent ? hum... faudrait voir à se mettre d'accord sur les termes employés... Ambivalence, quand tu nous tiens...).
Bref, ce n'est même plus de la déception...
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Du bout des doigts m'a été offert par un ami, dont les goûts littéraires sont sûres. Un peu sur la réserve face à ce quatrième de couverture, je me lançais tout de même dans la lecture du roman de Sarah Waters.
Sue Trinder, habitante du quartier de Boroughs à Londres en 1862, est une jeune orpheline élevée au sein d'une famille de voleurs et d'escrocs. Préservée par sa vieille mère d 'adoption, elle désire lui montrer toute sa reconnaissance. le jour où Gentleman, escroc patenté, débarque dans ce petit monde avec une arnaque d'envergure contre une jeune fille de bonne famille, Sue n'hésite qu'un instant et se lance dans une aventure qui bouleversera son existence...
Roman victorien par excellence, ce livre est une sorte de roman policier historique. L'intrigue labyrinthique est menée d'une main de maître. La toile de fond, la bibliophilie érotique, n'est qu'un rajout de perversité au sein de cet univers glauque et interlope. le champ des misères humaines est infini, et rien ne nous sera épargné.
L'alternance des points de vue enrichit l'intrigue et l"ironie des situations n'en est que plus mordantes. Les personnages sont riches psychologiquement et attachants.
Sarah Waters, à la manière d'un Wilkie Collins, suggère plus qu'elle ne décrit et c'est tant mieux.
Complot, trahisons en cascade, enlèvements, amour mais aussi témoignage d'une époque où les femmes étaient réduites à quelques catégories superficielles (hystériques, filles de mauvaises vies ou objet de décoration), le roman de Sarah Waters est tout cela et bien plus encore.
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Du bout des doigts nous entraîne dans l'Angleterre de 1862, époque victorienne chère à mon coeur de lectrice. Deux voix s'alterneront.

Le récit commence avec Susan Trinders dans le milieu interlope des voleurs et receleurs du Londres populaire. Sarah Waters dépeint avec art le Borough, avec ses pickpockets et ses us et coutumes bien ancrés. On s'y croirait d'autant plus que son texte s'émaille d'argot du milieu. A noter que pour rendre au mieux ce champ lexical, la traductrice s'est basée sur les termes argotiques des Mystères de Paris d'Eugène Sue et des Mémoires de Vidocq. J'ai donc découvert avec plaisir des mots comme grinchir pour voler et fourline pour voleur qui fait les poches. Fourline qui correspond d'ailleurs au titre original Fingersmith.
Il y a du Dickens dans cette partie car l'antre de Mr Ibbs n'est pas sans rappeler celui de Façon d'Oliver Twist, avec le démarquage des mouchoirs volés.
Susan est emportée par un dénommé Richard Rivers alias Gentleman vers un vieux manoir du Buckinghamshire pour un plan visant à mettre la main sur la fortune d'une jeune héritière naïve et esseulée, vivant quasiment en recluse chez son oncle bibliophile. L'affaire semble simple et assurera à Susan une partie du magot. Il lui suffit pour cela d'entrer comme femme de chambre au service de ladite Maud Lilly et d'encourager l'inclination d'icelle pour Gentleman en vue d'un enlèvement et d'un mariage.

La seconde voix est donc celle de Maud dont on découvre en même temps la très surprenante histoire en dépit de ses dix-sept petits printemps. Je n'en dis pas plus car ce serait gâcher la primeur de la découverte à tout futur lecteur.
Cette deuxième voix parle évidemment comme une jeune fille bien née et éduquée. Point d'argot du Borough ici. En revanche, on s'enrichit des termes propres à la bibliophilie du vieux Monsieur Lilly qui initie sa nièce à son art en vue d'en faire sa secrétaire.
Susan, Maud, à chacune sa spécialité...

En dépit de quelques petites longueurs occasionnelles, du bout des doigts confirme le talent de conteuse de Sarah Waters. Sa prose est un régal pour les yeux et ses reconstitutions du XIXème siècle nous y projettent de plein pied. On sent derrière la fluidité du récit une somme de recherches pour peaufiner son cadre contextuel. Perfectionnisme que j'avais déjà ressenti dans Caresser le velours avec les milieux du music-hall et du travestissement.
Ici les descriptions d'un asile pour femmes aliénées (ou dont la famille cherche à se débarrasser pour x raisons, comme dans L'étrange disparition d'Esme Lennox de Maggie O'Farrell) offrent une vision kafkaienne des aliénistes et de leurs méthodes thérapeutiques.

La quatrième de couverture présente Sarah Waters comme la digne héritière de Dickens et de Sapho. Il y a beaucoup de vrai dans cette affirmation même si ses propres qualités l'amènent à ne pas se figer dans un carcan désigné. Il me reste encore plusieurs ouvrages de sa main qui m'envoient leur chant des sirènes. A vous revoir sous peu, Madame Waters.
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Trois ans après « Affinités », j'ai retrouvé avec délice Sarah Waters avec « du bout des doigts » (ce n'est pas l'intervalle des publications, mais celle de mes deux lectures !). Je crois bien pouvoir affirmer, même si cela est basé sur seulement deux romans, que tous les ouvrages de cet auteur pourraient s'appeler « Jeux de dupes »… Tout n'étant à chaque fois qu'apparences, personnages se déguisant, pour mener à bien leurs manigances ou parfois sans malice, sous de fausses identités.

Tel est l'enjeu principal de ce « du bout des doigts » : Sue Trinder est une jeune orpheline de 17 ans, vivant dans le Londres du XIXe siècle, parmi une tribu de voleurs entretenue par celle qui fut sa nourrice mais qu'elle considère plutôt comme une mère. D'ailleurs, celle-ci l'a choyée et tenue éloignée des rapines et mauvais coups de ses camarades durant toute sa vie. Jusqu'au jour où l'un des voleurs, que tous surnomment « Gentleman » en raison de ses origines aisées, vient embaucher Sue pour l'assister dans une arnaque : celui-ci souhaite en effet enlever une jeune héritière, Maud Lilly, vivant recluse chez son oncle, et qui ne pourra toucher cet héritage qu'en se mariant. le but de Gentleman est donc de l'épouser, de toucher l'argent, puis d'envoyer la jeune oie dans un hôpital psychiatrique pour se débarrasser d'elle. La mission de Sue est de l'assister en devenant la camériste de Maud Lilly, de la convaincre de l'amour de Gentleman et de la persuader que la fuite est la seule solution.

Mission simple en apparence, n'est-ce pas ? Sauf que bien sûr, tout ne va pas se passer comme prévu, les deux jeunes femmes commençant à nourrir quelques sentiment l'une pour l'autre, ce qui va contrarier leurs projets. « Leurs projets », car Maud Lilly n'est peut-être pas la jeune ignorante que l'on imagine au départ… Qui joue alors sur des faux semblants, une partition qui n'est pas la sienne ? Ou plus clairement : qui arnaque qui au final ?

Sarah Waters livre une nouvelle fois avec « du bout des doigts » un roman parfaitement écrit, de facture classique, aux accents « dickensiens », qui ressemble à s'y méprendre aux romans victoriens qu'il imite (encore un faux semblant !), mais qui s'en démarque au final par une certaine dose de modernité : l'histoire est toujours contée par des femmes fortes, qui souhaitent accéder à une liberté que leur sexe ne leur permet pas toujours à l'époque dans laquelle elles vivent, et qui assument leurs désirs (notamment homosexuels).

J'ai particulièrement apprécié ici que les deux faces d'une même arnaque soient vues en alternance à travers les yeux de Sue Trinder puis de Maud Lilly, ce qui apporte une richesse psychologique indéniable, et pas mal de piquant car les narratrices ne savent pas tout de chaque situation, et de chaque personne. le lecteur les accompagne donc dans leurs cheminements, leurs aventures, pour se rendre compte qu'il a bien été berné lui aussi. Seul petit bémol, un petit essoufflement en milieu de roman, et un dénouement un peu faiblard (voire mièvre), bien que Sarah Waters ait eu la sagesse de ne pas verser dans le happy end complet.
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Citations et extraits (62) Voir plus Ajouter une citation
-Un livre ne dure-t-il pas tout autant ?
-Autant que durent les mots, oui. Mais il y a dans une photographie quelque chose qui dépasse les mots, qui dépasse même les bouches qui les prononcent. Une photographie mettra le feu aux sens d'un Anglais, d'un Français, d'un Hottentot. Elle nous survivra à tous pour allumer le même feu chez nos petits-fils. Elle est un objet transcendant à l'histoire.
-Un objet englué dans l'histoire ! proteste mon oncle. Perverti par l'histoire qui l'offusque comme un écran de fumée ! Cela se voit à la façon dont une mule épouse le pied, à la coupe d'une robe, au style d'une coiffure. Donnez des photographies à votre petit-fils: il y verra une curiosité pittoresque. Votre moustache cirée le fera rire ! Mais les mots, Hawtrey, les mots - hein ? Ils nous séduisent dans le noir, et l'esprit de chacun les revêt de chair et d'habits à sa guise.
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A ma manière, je suis un gredin, et il n'y a personne que je comprenne aussi bien que mes semblables. Votre oncle en est, et de la pire espèce, car sa gredinerie est confinée au cadre domestique, où elle passe pour un caprice de vieillard. Ne dîtes pas que vous l'aimez, ajoute-t-il rapidement en me voyant prête à parler. Ne vous souciez pas des bienséances. Vous êtes au dessus de tout cela, je le sais. C'est pourquoi je me suis permis de me présenter ainsi chez vous. Vous et moi, nous nous dictons nos propres lois, nous ne respectons celles des autres que dans la mesure où cela nous arrange.
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Enfin je la vois, une faible lumière dans le brouillard, une simple lueur plutôt, que l'allure du cheval et les arbres qui bordent la route font clignoter comme un signal d'alarme. Je la regarde venir, la main sur mon cœur. La lumière approche - ralentit, perd son halo, s'affaiblit - et je distingue d'abord le cheval, puis la carriole avec William et une silhouette plus vague. Ils contournent la maison. Je me précipite dans la chambre d'Agnès - maintenant elle sera celle du Susan - et me poste à la fenêtre. La voilà, enfin.
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C'est moi qui la réveille le matin et lui sers le thé. Moi qui la lave et l'habille et la coiffe. Moi qui m'occupe de ses bijoux et range tout sans rien voler. Quand elle a envie de se promener, je me promène avec elle, et quand elle veut pas sortir, je lui tiens compagnie à la maison. Je lui porte son éventail, des fois qu'elle aurait chaud, et son manteau, des fois qu'elle aurait froid, et son eau de Cologne et ses sels, des fois qu'elle aurait la migraine et tournerait de l'œil. Je fais le chaperon à ses leçons de dessin, et quand elle pique un fard, c'est pas moi qu'ça regarde.
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En général, le murmure ne sied guère à l'organe masculin - la voix de la plupart des hommes se fausse, détonne, résiste mal à l'envie de sonner plus fort - la sienne cependant sait se mettre une sourdine, jouer des mots couverts, tout en conservant sa limpidité, telle une note de musique.
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