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EAN : 9782914388023
331 pages
Max Milo (30/10/2000)
3.29/5   48 notes
Résumé :
Un homme est enfermé dans un asile d'aliénés. Est-il fou ? Ou bien sont-ce les aliénistes qu'il faudrait mettre à sa place ? Il se croit habité par un esprit d'une autre planète et tombe passionnément, follement, désespérément amoureux d'une femme, Irène, internée comme lui dans le même établissement. Il s'enfuit, elle sort de l'asile, disparaît... Il court jusqu'au bout du monde pour la retrouver... Au début du XXe siècle, quelques écrivains, et quels écrivains! ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
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Force ennemie, premier prix Goncourt De 1903 est mis à l'honneur par la maison d'éditions "L'apprentie" gérée par des étudiants en licence et master, spécialisés aux métiers du livre.
Depuis 2018, les promotions successives présentent leur création éditoriale, comment, alors, ne pas soutenir cette faculté d'autant plus que leur catalogue est plutôt fort attirant.
C'était donc le moment pour moi de lire enfin John Antoine Nau, cet écrivain oublié en commençant par "Force ennemie" considéré comme une oeuvre culte.

" Je prie les amis inconnus qui voudront bien me, ou plutôt nous, lire de ne pas réclamer, d'urgence, mon internement à Saint-Anne ou dans tout autre asile."

Ainsi commence ce livre, ainsi il se poursuit en ne faisant qu'attiser ma curiosité au fil des pages.
Avec une écriture tantôt biscornue, tantôt d'une beauté baudelairienne, un humour ébouriffant, une élaboration littéraire totalement inhabituelle et une stylistique d'une particularité fort étonnante, John Antoine Nau nous donne à lire les exultations, le feu sacré des personnages internés avec cette pointe de malice délirante.
Esprit extravagant , situations prodigieusement renversantes, une force surprenante se dégage de ce livre singulier.

Bienvenue dans le monde de John Antoine Nau !

Philippe Veuly se réveille dans une chambre, enfermé dans un asile, son gardien l'accompagne au quotidien, les âmes qui peuplent cours et couloirs, peu à peu, se livrent à de grandes envolées.
Égarements, absurdités, divagations et délires fantasques emplissent les pages de multiples pathologies non identifiées et plurifactorielles.
Schizophrènie ou démences hallucinatoires , les hôtes affrontent leur force ennemie, cette puissance définie comme surnarturelle, extraterrestre venant de la planète Tchoukra habitant leur cerveau, cependant , ne serait-ce tout simplement pas eux-mêmes ?

-Tchoukra :" le meilleur moyen à employer pour libérer ton esprit est le suivant : vouloir très fortement échapper à ton apparence matérielle. Par exemple, il faut savoir vouloir, vouloir d'une certaine façon que je ne pourrais t'expliquer ; certains êtres découvrent peu à peu ce secret en eux. "

C 'est ainsi que Veuly, empli de cette sensation d' être bien plus incarné sans enveloppe corporelle , ressentant cette énergie spirituelle, court vers ce rêve d' un amour rencontré au sein de l'hospice dont découle un monologue féminin somptueux aux saveurs des mille et une nuits habité par une frénésie hypnotique.
Puis, Nau, avec brio, décrit au travers de la planète Tchoukra l'humanité qui dérive vers la haine et la peur, la souffrance des tortures que l'on s'inflige et des pulsions animales.

Alors, roman SF décalé ou récit sulfureusement anti conventionnel en 1903 ?
Si certains le liront tout en restant en surface, il en restera une lecture loufoque pour les uns, opaque pour les autres.
Si vous creusez pour en saisir le fond, vous y verrez tout un monde représentant l'humain accompagné par son démon à l'image du cauchemar de Fussli, un face à face avec nos propres peurs.

Épris de liberté, c'est, peut-on l'imaginer, celle qu'il décrit au travers de ces personnages enfermés dans cet asile et qui, paradoxalement, ont cette indépendance de pensée , cet affranchissement des conventions qui laisse entrevoir avec lucidité, la complexité de notre condition mise à nue, soumise aux perversions et transgressions et révélant nos identités multiples.

" Oh ! L'univers vrai n'est-il que terreur et horreur !"

Alors est ce une force obscure venue d'ailleurs ou l'esprit à l'état pur, défait de toute annexion idéologique et morale qui se révèle être , loin de l'aliénation extérieure, une "Force ennemie" ?

" La force ennemie !
N'y aurait-il pas, en effet, une puissance occulte, maléfique, hostile à l'espèce humaine, guettant infatiguablement une occasion de tourmenter nos intellects bornés, perdus dans un monde mystérieux dont ils ne connaissent que quelques apparences ?
Et me voici épris de cette absurdité, parce que j'en ai peur ! "

John Antoine Nau met en lumière le mal qui nous habite, met à sac la psychiatrie de l'époque en dénonçant les methodes pratiquées par des médecins chez qui la folie se constate également.
Il met en parallèle tout au long de ce livre de manière sardonique, patients , notables, ecclésiastiques, manants, intellectuels, médecins, et sa virtuosité est de démontrer, sans toutefois jamais les évoquer distinctement, les névroses et psychoses de tout à chacun. L'aveuglement de la condition bourgeoise , chimère d'une cérébralité exemptée du déséquilibre au beau milieu du vice, de la vanité et du mépris.

Des dédoublements de personnalité à nos tréfonds psychologiques , c'est bien sous un air de littérature proche du romantisme noir à la Allan Poe associé à l' ubuesque d'un Alfred Jarry que Nau met en exergue La force ennemie extraterrestre qui n'est autre qu'une part de nous même, enfouie dans le tourbillon des vicissitudes humaines.

Vous comprendrez sûrement, du moins une part d'entre vous, la raison pour laquelle "Force ennemie" est méconnu, comme beaucoup d'oeuvres extraordinaires, il demande à l'imaginaire de se connecter à une réalité sous entendue qui elle-meme surfera sur la vague du politiquement incorrect, le tout relevé d'une verve révolutionnaire.
Une double lecture qui en fait un livre précieux hors des sentiers battus que l'on découvre tel un trésor enterré.
Alors pour les plus curieux(ses) lisez-le et suivez la voix de Huysmans qui le considérait comme le meilleur livre qu'il ait couronné en tant que président de l'académie Goncourt.

Un roman d'une ingéniosité remarquable.












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Je me suis lancé il y a peu un petit défi personnel qui devrait pouvoir courir sur quelques années : lire l'ensemble des prix Goncourt.
Tout comme m'sieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, j'avais déja lu quelques "Goncourt" sans le savoir et qui pour beaucoup m'avait énormément plus (Les filles du calvaire de Pierre Combescot, le rocher de tanios d'Amin Maalouf) et d'autres dont je connaissais la "Goncourisation" comme Au revoir la haut... Il ne m'en reste donc plus que 108 à lire :)

Mon défi a donc démarré par le tout premier Goncourt (1903) décèrné à John-Antoine Nau pour Force Ennemie, un roman qui nous conte (ou qui nous rapporte fidèlement, le doute plane...) la vie de Philippe Veuly interné dans un hopital psychiatrique de normandie. Habité d'une présence venue d'une autre planète qui lui parle et le mène sur un chemin qu'il ne souhaite pas toujours suivre, monsieur Veuly va nous faire découvrir la vie de cet hopital, ses docteurs, ses gardiens, ses patients et surtout Irène...

La forme est parfois rebutante par l'utilisation du parler et de l'accent local retranscris en phonétique. Mais lorsque l'auteur abandonne cette mauvaise manie, on découvre une langue très chantante et très plaisante à lire. Quelques passages sont un peu longuets et casse la dynamique du récit mais rien de suffisament pesant pour poser le livre.

Sur le fond, j'ai apprécié le burlesque de certains portraits et situations décrits dans le livre. Ce qui pourrait paraitre "gentillet" aujourd'hui a du passer pour terriblement insolent et irrévérencieux à l'époque. La médecine et la bien pensance bourgeoise sont égratinées à souhait avec beaucoup d'humour.

Par ailleurs, j'ai beaucoup aimé le flou, créé au début et à la fin, sur l'origine de cette histoire : est elle pure invention, vient elle des entretiens de l'auteur avec le pensionnaire d'une maison psychiatrique???

Une lecture que je recommande (et l'autre, à l'intérieur de ma tête, il est d'accord aussi, c'est vous dire!!)
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Difficile de voir dans cet ouvrage un livre de science fiction ou alors on est dans la « soupe au choux »  avec le Glaude (sans les choux mais avec Kmôhoûn de Tkoukra dans le rôle de « la denrée » ) Je ne sais pas s'il a été présenté ainsi à l'époque par son auteur ou ses pairs et pourquoi il traîne cette réputation mais assurément il est plutôt dans le style médical et du fantastique (d'ailleurs il est fait référence à Edgard Poe par le personnage du Dr Froin qui sait de quoi il parle ) si on considère que le patient Veuly est l'objet d'hallucinations et où son délire est le résultat d'un trouble psychiatrique sans qu'on en soit vraiment certain.
Dédoublement de la personnalité du personnage ou même delirium tremens d'alcoolique mais pas de SF.Tout au plus le malade maniaco-dépressif ou asthénique attribue consciemment sa folie à un bouc émissaire non humain.Et puis situer une perturbation psychique loin dans la galaxie c'est mieux que de la situer dans sa tête on se sent moins coupable Artifice d'auteur ?
« Force ennemie » se situe dans le domaine de la farce étant donné les situations très cocasses au comique troupier appuyé , voire dans le vaudeville avec des quiproquos amoureux du malade situé dans un monde bourgeois et conservateur.
Il y a plus dans ce livre une volonté d'amuser que de critiquer le monde psychiatrique exception faite de Bid'homme l'aliéniste plus fou que ses patients, et les intrigues familiales bourgeoise liées à l'argent. En fait il y a des deux voilà tout et si a l'origine il y a volonté de critique du monde aliéniste avec certes une présentation peu glorieuse de ce monde, le divertissement bon enfant me semble prendre le pas sur le sérieux.
Toutefois la vie bourgeoise et, ses bonnes manières en général, est tourné en ridicule Sans être méchant, le ton est… quand même assez féroce et les gentes dames ne sont pas épargnées. Misogynie ou réalisme ? Il y a du Desproges dans cet auteur !

Pas de volonté non plus d'explorer les exohumanités bien qu'une description assez sommaire soit faite du prétendu extraterrestre et de son environnement, pas de saga galactique non plus !
Pas de quoi décrocher le Nebula ou le prix Hugo. Au mieux celui du Prix du Cafard cosmique conviendrait et encore car l'ambiance n'est pas si morose que ça !

Le style de l'ouvrage préfigure « Un homme si simple » de Baillon , écrivain assez perturbé , livre burlesque sur des malades déséquilibrés écrit toutefois 25 ans plus tard ( à lire absolument)
Pour les éructations verbales (bragouillon »« strigouillât »« schniffamouck »salampouff »« vachardouillaud » « sacribouillacastafouinouillard !) il annonce les invectives et jurons de Céline (je voyais celui-ci en initiateur mais je me suis trompé ) et même celles de Haddock de Hergé (bachi-bouzouk la préférée de Haddock) L'utilisation du patois ou dialecte attribué aux sous-fifres notamment gardiens attitrés et bienveillants de l'asile , confère un petit comique d'époque supplémentaire le parler « des bons gars »a toujours fait rire... surtout le noble ! Et le parisien… Ainsi que celui plus précieux des notables provinciaux imitant les parigots Il confère aussi une véracité plus grande aux dialogues populaires et comme disait Bourvil « il a un bon accent on peut le suivre je crois ... » les accents sont, semble-t-il, bien rendus : une aubaine pour les linguistes et dialectologues d'aujourd'hui
A part cela Nau fait preuve de lyrisme en évoquant les Antilles et ses descriptions sont très chargées en contraste avec des situations cocasses du personnage cherchant dans les îles sa Dulcinée.
Un road movie d' un malade atteint de crétinisme simple


Le  lundi soir 21 décembre 1903 au  restaurant Champeaux place de la Bourse, l'Académie Goncourt au grand complet soit neuf jurés déjeune. Ont-ils mangé un oeuf meurette, un « crève à fous » ou un « fou-fou » nul ne le sait mais séduits par John-Antoine Nau ils lui décernent le premier prix de l'académie et octroient la coquette somme de 5000 (anciens) francs or soit l'équivalent de 20.000 euros
Un premier choix intéressant et justifié qui se lit encore bien (comme le second « maternelle » de Léon Frapié) ce ne sera, malheureusement, pas toujours le cas par la suite
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" Force ennemie " de John Antoine Nau (255p)
Ed. Decalou
Bonjour les fous de lectures ...
John Antoine Nau fut le premier lauréat du prix Goncourt (1903)
Philippe Veuly, rimailleur sans succès, se réveille interné en asile psychiatrique à la demande de son cousin qui veut l'éloigner de sa femme et de sa fortune ( mais cela nous le découvrons assez tard dans la lecture).
L'homme semble en pleine possession de ses moyens.
Sauf que par moment, notre gus, étant persuadé d'être habité par un extraterrestre ( envahisseur d'une autre planète selon les termes employés), a un comportement et des réflexions étranges.
Tombé amoureux d'une patiente, dès celle-ci sortie de l'asile, le bellâtre s'enfuit et essaye de la retrouver jusqu'à l'autre bout de la terre.
Tout pourrait être simple si Philippe Veuly ne devait partager son corps avec son pire ennemi Kmôhoûn, un habitant de la planète Tkoukra.
Voilà... voilà, voilà….
En fait, je ne sais pas si j'ai bien compris l'histoire.
Livre présenté comme un des premiers roman de SF, je n'y ai vu que le récit d'un pauvre hère atteint de schizophrénie ou de dédoublement de personnalité.
L'histoire aurait pu être plaisante si il n'y avait tout ces passages en patois picard qui rendent la lecture vraiment poussive…. très poussive!
On a présenté ce roman comme visionnaire et un Céline avant la lettre … il ne faut pas pousser le bouchon trop loin non plus !
Disons qu'il se présenterait plus comme un pamphlet contre la bourgeoisie de l'époque.
Mais peut-être était-il le meilleur roman parmi ceux présentés de cette année là … soyons indulgent !!
Et l'audace de son langage a peut-être du séduire les membres du jury!
En tout cas pour moi, ce roman est un véritable OVNI dont l'histoire est… assez folle .
Mais soyons indulgents c'est le premier Goncourt
Lu pour le défi … " je lis tous les Goncourt"
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Et le premier Goncourt de l'histoire est attribué à .... Un roman de l'imaginaire.
De là à voir une corrélation entre le désamour des lecteurs et la SFFF, il n'y a qu'un pas.

C'est l'histoire d'un homme qui se fait posséder par un extraterrestre. Écrit en 1903, j'étais très impatient de découvrir ce roman, et comment le sujet allait être traité. J'ai vite déchanté et après une semaine laborieuse de lecture, j'ai fermé le livre en poussant un ouf de soulagement, en ayant à peine lu plus de la moitié !

La première parti se résume à la présentation de l'asile et de la galerie d'internés, en compagnie du gardien de l'hôpital psychiatrique. Problème, ce dernier parle avec le patois du coin. Cela donne :
"Quand alle est guérie a' se souvient d'un peu de ce qu'alle a vu l'promier jour ; mais ça lui semble « loin de loin ». Y a rien comme l'egzitation pour faire paraître le temps long… après ; parce que « durant » c'est pas ça qui gêne."
Très pénible à lire lorsque le personnage a un place prépondérante dans le récit...

Nous découvrons quelques pensionnaires, l'occasion de longues digressions sans intérêts sinon celui de retarder l'arrivée de notre alien. Et lorsqu'il fait son apparition, il est aussi pénible que le gardien.
Arrivé à ce stade, on se doute que l'enjeu se fera entre possession extraterrestre ou maladie mentale. Pour ma part, je ne connaitrai pas le fin mot de l'histoire, et c'est très bien ainsi.
Il s'agissait sûrement à l'époque de dénoncer la bourgeoisie et la condition asilaire, ne reste désormais qu'un intérêt historique, entre autre autour du langage, pour ce pamphlet vaudevillesque.
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Citations et extraits (37) Voir plus Ajouter une citation
― Et puis tout est de la… mécanique, de l’effort, sur ce fumier de planète ! Il faut s’habiller, se déshabiller. On ne peut jamais rester dans un état. Il faut toujours changer d’état ! Imbéciles, cochons que nous sommes ! On est bien couché, n’est-ce-pas ? Eh bien, crac ! il faut se lever ! On est bien debout ? Eh bien ! boum, blim, bloum ! il faut se coucher ! S’habiller, se déshabiller ! Cochonnerie ! Mécanique ! Avons perdu notre fourrure, nos poils, en les frottant, en les raclant avec des cochons de costumes ! Regardez les macaques ! Bien plus jolis que nous, mieux parés et pas de mécanique pour se vêtir. La Mécanique, savez, c’est tout ce qui est le contraire de pensée et de bonne inertie : mouvement, remuement bête des bras, laborieuse imbécillité d’être humain bon élève, pas révolté contre stupidités acceptées par la masse lâche, contente de se tyranniser elle-même quand elle est déjà assez embêtée par les « padischahs ». Oui, regardez macaques, les jolis macaques ! Pas de mécanique pour se vêtir, veinards de macaques, bons macaques ! Rien à faire qu’à se foutt à l’eau… (quand ça leur chante !…)— et ils sont prêts ! Ah ! Monde actuel ! saloperie où il faut travailler, ne fût-ce que pour boutonner des saletés de bottines ! Ah ! quand serons-nous dans un monde supérieur où l’on n’aura plus de ces infects « battoirs » ? Rien que des petites choses pour voler dans le bleu chaud, — chaud ! savez-bien ? Des petites… mécaniques… ah ! bloum ! pas mécaniques, — infamie ! — des petites affaires en plumes comme en ont les petits… choses qui font des saletés sur nos têtes du haut des arbres et après ça poussent des : couic ! couic ! dans l’air, les… machins, les… oiseaux, parfaitement, oui !…
Et ce Mongol qui professe des opinions de Polynésien ou de Gabonais est originaire de Saint-Etienne, ville où l’activité va jusqu’à l’épilepsie industrielle ! Mais, au fait, c’est bien simple ! Il est « fatigué de naissance », comme le disait un de mes amis qui était dans le même cas, sans avoir rien de commun avec Saint-Etienne. Enfin Nigeot est franc, plus franc que moi qui n’oserais pas avouer aussi carrément mon amour, ma vénération, pourtant sincères, pour la bonne Paresse !
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Voici, trottinant prestement à nos côtés, levant très haut le pied, arrondissant la jambe, steppant comme un cheval turcoman, un vieux Monsieur sec et menu dont le visage rasé offre une trop grande ressemblance avec certaines têtes d’oiseaux ; il chantonne tout en courant un bizarre petit motif en mineur qu’il interrompt à chaque instant pour grogner des « pouac ! pouac ! » nasillards dont l’effet sur mes nerfs ne se peut décrire.
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Vous n'êtes pas d'âge, mon petit Monsieur, à savoir ce que c'est qu'une femme. J'entends une femme légitime, une épouse, comme disent les législateurs et les égoûtiers. Eh bien ! Mon petit Monsieur, c'est une cuillerée de vert-de-gris dans le plus fade des entremets sucrés. Que dis-je ? J'en fais quelque chose de bien trop tragique. A m'entendre, ce serait un efficace, un souverain et prompt remède contre l'Amour et contre la Vie, ces deux épouvantables calamités qui procèdent l'une de l'autre et l' "autre de l'une". N'exagérons rien. C'est plus vulgaire et surtout plus exaspérant, parce que ça dure généralement longtemps, une femme légitime ! Cela vaut une éternelle poignée de poil à gratter dans des draps de grosse toile parfumés à la lavande, un breuvage à l'ipécacuanha qui vous démolirait un peu plus tous les jours sans vous achever, une série de morsures de fortes punaises et de fourmis rouges, une grosse poignée de clous faiblement empoisonnés, continuellement posés la pointe en l'air sous Monsieur votre derrière ! Ah ! Jolie invention que le mariage !
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Mon habituelle modestie - encore peu notoire - mais que le public aura, je l'espère, mainte occasion d'apprécier dans un prochain avenir, me pousse à faire aux amis lecteurs une dernière recommandation.

Quand ils découvriront, par hasard, dans les pages qui suivent, un passage bien écrit, des finesses d'expression, une phrase détonant de la délicatesse de sentiments, de la hauteur morale, - une belle âme, enfin! - qu'ils n'hésitent pas une seconde à m'attribuer le passage, les finesses, la phrase ...

Quand, au contraire, ils seront choqués par un style bas ou impropre, des idées baroques, des scènes plus ou moins indécentes ou grossières, des longueurs, des platitudes, qu'ils en rendent responsable le mauvais fou, le vilain fou !
AVERTISSEMENT Page 2
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L’homme au bec de perroquet n’est pas aussi absolument idiot qu’on pourrait le croire en le regardant tout
d’abord... et en entendant certaines de ses phrases. Il
vient, je le vois, de me raconter à sa manière, tantôt
fort stupidement et maladroitement, tantôt avec des pré-
cautions assez heureuses, l’histoire de mon entrée dans
l’établissement du Dr
Froin. Çà et là, au cours de son bref
récit et surtout en son explication finale, il s’est peut-être
même montré capable de sécréter une certaine dose de
psychologie rudimentaire.
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Vidéo de John-Antoine Nau
Qui était John-Antoine Nau, lauréat en 1903 du premier prix Goncourt ? Un aventurier comme il n'en existe plus, autant chez lui à San Francisco qu'en Martinique. Un poète féru de liberté et ivre d'indépendance. Un romancier qui envoie le manuscrit vainqueur – "Force ennemie" – à compte d'auteur et ne daigne pas aller chercher sa récompense. Nau est l'anti-Goncourt par excellence. Alors qu'on le sacre, il est installé dans le cabanon du peintre Paul Signac au coeur de la baie des Canoubiers. Entre une partie de pêche et la minutieuse préparation d'un dîner de gourmets, il expose à une pittoresque bande d'amis sa conception du Beau et son abjection pour les cénacles de littérateurs qui, sans cesse, complotent dans les antichambres. Goncourt originel et personnage absolument romanesque, John-Antoine Nau méritait bien un roman. En écho à l'aveu de Huysmans, président de l'académie : « C'est encore le meilleur que nous ayons couronné ! ».
Cédric Meletta est l'auteur de "Jean Luchaire. L'Enfant perdu des années sombres" (Perrin), "Tombeau pour Rubirosa, un roman" (Séguier), "Diaboliques" (Robert Laffont) et en 2020, aux éditions du Rocher, "Les Bukoliques", récit littéraire autour de Charles Bukowski.
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