Dolto, on ne la lit pas, on l'entend penser
La parole de Dolto est fort difficile à reproduire: c'est son propos qui surgit au moment où elle pense, et toujours à partir d'une position de clinicienne. Son propos de penseur s'exprime parallèlement à la construction de sa pensée: on assiste alors, comme dans toutes ses oeuvres d'ailleurs, au pas à pas d'une observation qui crée une hypothèse thérapeutique et une intervention; sa pensée est agie sur le champ, bien loin de la théorie. Nous sommes habitués à lire les analystes au moment de la synthèse des idées, du bilan de l'argumentation, des conclusions à tirer des cas examinés, au chaud de leurs certitudes. Ce n'est pas du tout le cas de
Françoise Dolto: la parole agit alors meme qu'elle est énoncée, elle soigne la personne à qui elle est dite, elle interpelle celle qui la lit, nous entendons une voix qui pense, parfois nous saisissons que nous ne pouvons pas comprendre, qu'il n'y a pas là quelque chose à comprendre, mais à entendre. Mais mieux vaut citer un passage du livre qui tisse une série de regards sur la
solitude, le sens et le besoin de
solitude, ce qu'elle signifie chez l'enfant, et chez l'enfant que reste l'adulte lorsqu'il souffre et qu'il se sent seul:
"Alors, il y a deux sortes de mauvaise
solitude. Il y a la mauvaise
solitude dépressive, et puis il y a un second temps qui ets la mauvaise
solitude a priori agressive par sentiment de persécution. Quel que soit l'autre, il est supposé nous rejeter, alors que dans la
solitude dépressive c'est soi-meme qui ne s'y retrouve pas et qui demande à quelqu'un d'autre: "Dis-moi quelque chose pour que je puisse exister". Une
solitude en demande et une
solitude en refus de contact."