Ce livre ne m'a pas enchantée.
L'Enchanteur est la dernière nouvelle écrite en russe de
Nabokov sous le pseudonyme de Sirine. Elle a été rédigée en 1939 à Paris, quelques mois avant son départ pour les États-Unis. Retrouvée en 1959, peu de temps avant son retour en Europe et son installation en Suisse, cette longue nouvelle ne parut pas du vivant de l'auteur. Traduite en anglais par son fils Dmitri, elle ne fut éditée qu'en 1986. La version originale russe est parue en 1991. Je l'ai lue dans la version traduite de l'anglais, malheureusement.
Le résumé qui suit révèle toute l'histoire.
Ce récit raconte l'obsession funeste d'un homme d'âge mûr pour une fillette, aperçue en train de faire du patin à roulettes dans un jardin public. Il va épouser la mère, malade, pour avoir la fille. Une fois la mère morte, il emmène la fille en voyage. Elle s'endort. Il la dénude, elle se réveille, hurle. Il s'enfuit et court se jeter sous un camion.
Ceux qui ont lu
Lolita peuvent s'amuser à comptabiliser les similitudes et les différences dans la trame du récit mais ce sont deux oeuvres totalement différentes.
Lolita est un chef d'oeuvre, une symphonie poétique avec des personnages complexes et subtils.
L'Enchanteur est une nouvelle mineure. Sans le succès de
Lolita, l'aurait-on publiée ? Je l'ai trouvée brouillonne et gênante en dépit de fulgurances poétiques et humoristiques. Les personnages sont anonymes. La fille est objectivement pas très jolie et le quadragénaire est un bijoutier qui n'a donc aucun goût ni aucune élégance. C'est un philistin en plus d'être un pédophile. le récit commence par un long monologue pathétique où le satyre tente de justifier l'injustifiable. Ensuite on passe à la 3e personne, ce qui nous évite de trop sympathiser avec ce gars. Mais il n'empêche qu'on se soucie moins de la gamine, qui n'a aucune épaisseur psychologique, que de savoir comment l'obsédé va s'y prendre d'abord pour se marier, ensuite pour accélérer la mort de la mère, puis pour coucher avec la fille. Ses déboires sont assez drôles car le Grand méchant Loup n'est pas très dégourdi. le texte parodie de ci de là les contes de fée plus ou moins légèrement. le Petit Chaperon rouge bien sûr, Blanche Neige, la Belle au Bois dormant. Il utilisera d'ailleurs un album de contes de fée pour endormir la belle et jouer crûment de sa baguette.
Je vous recommande plutôt la lecture de
la Vénitienne et autres nouvelles. Là oui vous serez enchantés par la magie nabokovienne.