AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782707301758
111 pages
Editions de Minuit (01/01/1958)
4.43/5   100 notes
Résumé :

La première édition de La question, d'Henri Alleg fut achevée d'imprimer le 12 février 1958. Des journaux qui avaient signalé l'importance du texte furent saisis. Quatre semaines plus tard, le jeudi 27 mars 1958 dans l'après-midi, les hommes du commissaire divisionnaire Mathieu, agissant sur commission rogatoire du commandant Giraud, juge d'instruction auprès du tribunal des forces armées de Paris, saisirent une par... >Voir plus
Que lire après La questionVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
4,43

sur 100 notes
5
11 avis
4
9 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis
Livre censuré et interdit quelques jours après sa sortie, c'est un témoignage dur et cru de ce que la France a fait subir à ceux qui n'étaient pas d'accord avec sa politique en Algérie. Le début et la fin du livre sont la justification du récit, que les gens sachent ce qui se passait, qu'on ne puisse pas dire "on ne savait pas".

Le témoignage en lui même est poignant, on ne peut que se demander si on aurait la même volonté, la même force de caractère pour résister à des tortures de plus en plus violentes, à la pression physique comme mentale. Les circonstances de sa publication, alors même que l'auteur est encore emprisonné, expliquent le côté "brut" du témoignage, sans trop de recherches d'analyses. Cela contribue à la force de l'oeuvre mais ne permet forcément pas de savoir qui était impliqué dans ce qui s'est passé et jusqu'où il faudrait remonter dans les responsabilités de tels actes.

Le plus terrifiant après avoir lu un tel livre est de se dire que personne n'a jamais été condamné pour les actes commis dans les circonstances décrites à cette époque.
Commenter  J’apprécie          245
Le célèbre journaliste engagé dans la cause algérienne et historien, Henri Alleg, s'insurgeait, il y a de cela de soixante ans déjà, dans «La Question», un livre à travers lequel il dénonçait la torture pratiquée par l'armée française contre les Algériens durant la Guerre de libération.
«Les tortures? Depuis longtemps le mot nous est à tous devenu familier. Rares sont ici ceux qui y ont échappé», avait-il affirmé dans son ouvrage écrit en prison à Barberousse, actuellement Serkadji, à Alger, et publié en France le 18 février 1958 aux éditions de Minuit. Désignant les tortionnaires, le livre a été immédiatement censuré et les exemplaires mis en vente saisis. Directeur du quotidien Alger républicain, un journal qui a été interdit en septembre 1955, Henri Alleg était connu comme un fervent militant de la cause algérienne passé à la vie clandestine en 1956. Voulant contacter son ami Maurice Audin le 12 juin 1957, Henri Alleg fut arrêté le lendemain de la disparition à jamais du mathématicien dont l'affaire vient de connaître un rebondissement 61 ans après. Suite à la récente confidence du président Emmanuel Macron que Maurice Audin eut été assassiné par l'armée, un soldat du contingent vient de libérer sa conscience en avouant que c'était lui qui avait enterré le mathématicien. Une version qui vient contredire une fois de plus la thèse officielle.
L'ancien directeur d'Alger républicain est transféré alors dans un lieu de torture à El Biar sur les hauteurs d'Alger. Après un mois de supplices et de tortures, il est jeté en prison en août 1957 après avoir réussi à faire parvenir en France une copie de sa plainte pour torture remise au procureur général d'Alger. Selon Nils Andersson, un éditeur né à Lausanne, expulsé du territoire suisse par les autorités helvétiques en 1966 suite à la publication de divers écrits, principalement favorables aux combattants algériens puis vietnamiens, l'histoire du livre commence au moment où Léo Matarasso, l'un des avocats de Alleg, lui demande de témoigner sur les tortures subies. Après un moment d'hésitation, l'avocat le convainc de l'importance qu'il décrive les supplices infligés à des milliers d'Algériens. Les feuilles du manuscrit sont transmises clandestinement aux avocats, dont Léo Matarasso, Roland Rappaport qui devient avocat de la famille Audin et Pierre Braun. Sa femme Giberte déchiffrait les feuilles pour pouvoir taper le manuscrit. Plusieurs éditeurs ont refusé le manuscrit qui a été remis par la suite à Jérôme Lindon aux Editions de Minuit qui avait déjà publié Pour Djamila Bouhired un ouvrage dans lequel Georges Arnaud et Jacques Vergès dénoncent les tortures subies par cette moudjahida. Dans son livre, Henri Alleg raconte sa période de détention et les sévices qu'il y a subis avec les Algériens. «J'ai côtoyé, durant ce temps, tant de douleurs et tant d'humiliations que je n'oserais plus parler encore de ces journées et de ces nuits de supplices si je ne savais que cela peut être utile, que faire connaître la vérité c'est aussi une manière d'aider au cessez-le-feu et à la paix», avait-il écrit, indiquant que «des nuits entières, durant un mois, j'ai entendu hurler des hommes que l'on torturait, et leurs cris résonnent pour toujours dans ma mémoire». Il a attesté avoir vu «des prisonniers jetés à coups de matraque d'un étage à l'autre et qui, hébétés par la torture et les coups, ne savaient plus que murmurer en arabe les premières paroles d'une ancienne prière», relatant que c'est pendant cette période qu'il avait appris la «disparition» de son ami Maurice Audin, arrêté vingt-quatre heures avant lui, «torturé par la même équipe qui ensuite me prit en mains. Il a évoqué, entre autres, la disparition de cheikh Larbi Tebessi, président de l'Association des ouléma musulmans, et du docteur Cherif Zahar. Ce livre témoignage a provoqué un véritable choc dans les esprits des milieux intellectuels français et dans la presse comme notamment France-Observateur, L'Express et L'Humanité. Dans une lettre de protestation au gouvernement, André Malraux, Roger Martin du Gard, François Mauriac et Jean-Paul Sartre l'avaient sommé, «au nom de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de condamner sans équivoque l'usage de la torture, qui déshonore la cause qu'il prétend servir».
Commenter  J’apprécie          120
Directeur d'Alger Républicain de 1950 jusqu'à son interdiction en 1955, Henri Alleg doit passer dans la clandestinité en novembre 1956 pour échapper aux mesures d'internement qui frappe la plupart des collaborateurs du journal. Arrêté le 12 juin 1957, il est séquestré un mois entier et livre ici le récit de sa détention, dénonçant les tortures dont il a été victime.
(...)
Si certains passages sont insoutenables, ce témoignage demeure nécessaire comme le conclut Henri Alleg, pour que les Français sachent ce qui s'est fait « EN LEUR NOM ».

Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
Commenter  J’apprécie          270
"La question" est un témoignage bouleversant et essentiel. C'est le récit des deux mois qu'Henri Alleg a passé emprisonné et torturé par les militaires français, en 1957 durant la guerre d'Algérie.
Je n'ai pas choisi le jour de ma lecture par hasard. Pourquoi? Parce qu'Henri Alleg connaissait Maurice Audin également torturé dans une villa du quartier d'El-Biar à Alger d'où il n'est jamais revenu.
Soixante ans plus tard, nous sommes le 13 septembre 2018 et c'est le jour où le président de la République a décidé "qu'il était temps que la Nation accomplisse un travail de vérité" sur l'affaire Audin. le journal le monde indique qu'Emmanuel Macron reconnait d'abord que "Maurice Audin a été torturé puis exécuté ou torturé à mort par des miliaires". Mais aussi que si sa mort dit-il est "le fait de quelques uns, elle a été rendue possible par un système légalement institué : le système arrestation/détention confié par voies légales aux forces armées" pendant la guerre d'Algérie.
Comme son ami Henri Alleg, le mathématicien Maurice Audin était membre du Parti Communiste et militant anticolonialiste. Ils ont été arrêtés par des parachutistes français car on les soupçonnait d'héberger des membres de la cellule armée du PC algérien. Et ils ne sont pas les seuls.
J'ai peu de mots devant l'atrocité de ce que ces hommes et ces femmes ont vécu.
Pourtant les idées d'Henri Alleg, directeur du journal Alger Républicain et contributeur de l'Humanité, défendant l'Algérie libre et la fraternité entre les peuples seront plus fortes que ses bourreaux.
Je ne peux pas m'empêcher d'être admirative et la puissance de ce récit m'a tiré les larmes aux yeux.


Commenter  J’apprécie          156
Alger 1957, Henri Alleg, journaliste clandestin, est arrêté. Son témoignage interdit de publication en 1958 deviendra vite emblématique. Dénonçant l'emploi de la torture en Algérie dans un style sec et bref, rendant l'horreur d'autant plus insupportable. Un livre d'histoire.

25/08/2009
Commenter  J’apprécie          221

Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Dans la soirée, un autre que je ne connaissais pas, entra à son tour. Un petit blond, au fort accent du nord : un appelé. Il me dit avec un grand sourire : "Vous savez j'ai assisté à tout, hein! Mon père m'a parlé des communistes pendant la Résistance. Ils meurent, mais ils ne disent rien. C'est bien!"
Je regardai ce jeune à la figure si sympathique, qui pouvait parler des séances de torture que j'avais subies comme d'un match dont il se souviendrait, et qui pouvait venir me féliciter sans gêne, comme il l'aurait fait pour un champion cycliste. Quelques jours plus tard, je le vis congestionné, défiguré par la haine, battre dans l'escalier un musulman qui ne descendait pas assez vite : ce "centre de tri" n'était pas seulement un lieu de torture pour les Algériens, mais une école de perversion pour les jeunes Français.
Commenter  J’apprécie          120
Le "centre de tri" s'emplissait alors de cris, d'insultes, de rires énormes et méchants. Erulin commençait l'interrogatoire d'un musulman. Il lui criait : "Fais ta prière devant moi." Et je devinais dans la pièce d'à côté un homme humilié jusqu'au fond de l'âme, contraint de se prosterner en prières devant le lieutenant tortionnaire. Puis, d'un coup, les premiers cris des suppliciés coupaient la nuit. Le "vrai travail" d'Erulin, de Lorca et des autres avait commencé. Une nuit, à l'étage au dessus, ils torturèrent un homme : un musulman, assez âgé semblait-il au son de sa voix. Entre les cris terribles que la torture lui arrachait, il disait épuisé : "Vivre la France! Vive la France!"
Sans doute croyait-il calmer ainsi ses bourreaux. Mais les autres continuèrent à le torturer et leurs voix résonnaient dans toute la maison.
Commenter  J’apprécie          60
(p. 23)

Brusquement, Érulin me releva. Il était hors de lui. Cela durait trop.
«Écoute, salaud ! Tu es foutu ! Tu vas parler ! Tu entends, tu vas parler !» Il
tenait son visage tout près du mien, il me touchait presque et hurlait : «Tu
vas parler ! Tout le monde doit parler ici ! On a fait la guerre en Indochine,
ça nous a servi pour vous connaître. Ici, c’est la Gestapo ! Tu connais la
Gestapo ?» Puis, ironique : «Tu as fait des articles sur les tortures, hein,
salaud ! Eh bien ! maintenant, c’est la 10e D. P. qui les fait sur toi.»
J’entendis derrière moi rire l’équipe des tortionnaires. Érulin me martelait le
visage de gifles et le ventre de coups de genou. «Ce qu’on fait ici, on le fera
en France. Ton Duclos et ton Mitterrand, on leur fera ce qu’on te fait, et ta
putain de République, on la foutra en l’air aussi ! Tu vas parler, je te dis.»
Sur la table, il y avait un morceau de carton dur. Il le prit et s’en servit pour
me battre. Chaque coup m’abrutissait davantage mais en même temps me
raffermissait dans ma décision : ne pas céder à ces brutes qui se flattaient
être les émules de la Gestapo.
Commenter  J’apprécie          40
C'est aux "disparus" et à ceux qui, sûrs de leur cause, attendent sans frayeur la mort, à tous ceux qui ont connu les bourreaux et ne les ont pas craints, à tous ceux qui, face à la haine et la torture, répondent par la certitude de la paix prochaine et de l'amitié entre nos deux peuples qu'il faut que l'on pense en lisant mon récit, car il pourrait être celui de chacun d'eux.
Commenter  J’apprécie          80
Il y a maintenant plus de trois mois que j'ai été arrêté. J'ai côtoyé, durant ce temps, tant de douleurs et tant d'humiliations que je n'oserais plus parler encore de ces journées et de ces nuits de supplices si je ne savais que cela peut être utile, que faire connaître la vérité c'est aussi une manière d'aider au cessez-le-feu et à la paix. Des nuits entières, durant un mois, j'ai entendu hurler des hommes que l'on torturait, et leurs cris résonnent pour toujours dans ma mémoire.
Commenter  J’apprécie          50

Videos de Henri Alleg (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Henri Alleg
Connu sous le nom d'Henri Alleg, qu'il avait pris lors de son passage dans la clandestinité pendant la guerre d'Algérie, Harry Salem est mort le 17 juillet à Paris trois jours avant son quatre-vingt-douzième anniversaire. Dans son livre La Question qui reste un document majeur sur la torture, il avait témoigné sur les sévices qu'il avait subis, en 1957, entre les mains des parachutistes français. En 2005, il était venu sur le plateau de TV5Monde. Entretien avec Xavier Lambrechts.
>Sciences sociales>Problèmes et services sociaux. Associations>Etablissements pénitentiaires (54)
autres livres classés : guerre d'algérieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (273) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3175 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}