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Étiemble (Préfacier, etc.)
EAN : 9782070300112
255 pages
Gallimard (02/06/1966)
4.08/5   300 notes
Résumé :
Ce poème s'appelle "Roman" : c'est qu'il est un roman, au sens ancien du mot, au sens des romans médiévaux ; et surtout parce que, malgré le caractère autobiographique, ce poème est plus que le récit - journal ou mémoires - de la vie de l'auteur, un roman qui en est tiré. Il faut le lire dans le contexte de l'œuvre d'Aragon. Il s'agissait ici d'éviter les redites : on n'y trouvera pas le côté politique des Yeux et la Mémoire ou les heures de la Résistance de La Dian... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
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Non, je n'ai pas lu ce livre il y a quelques jours, je le porte en moi depuis l'adolescence. Souvent, je l'ouvre et relis ces vers soulignés jadis mais qui résonnent toujours dans ma tête et dans mon cœur.
Louis Aragon, c'est avec lui que je suis entrée dans ce monde magique des mots dont la couleur s'appelle poésie.
Louis Aragon et ElsA Triolet ont longtemps été pour moi l'union magique de l'amour et de l'intellect sans compter l'attachement d'Elsa à sa sœur Lili Brik qui bien sûr avait épousé, elle aussi un poète,: le damné Vladimir Maïakovski.
Je n'ai lu qu'un roman d'Aragon qui m'a marqué
à vie : Aurélien.
Voilà, j'avais envie de partager avec vous tous cet univers poétique d'Aragon qui me berce encore et toujours.

"Tout ce qui fut sera pour peu qu'on s'en souvienne"
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Dans cette autobiographie poétique publiée en 1956,Aragon offre une grande diversité de formes: prose, vers de longueurs très différentes, ruptures textuelles, pour se raconter, de l'enfance malheureuse aux deux guerres, des voyages en Italie et en Espagne à sa vision de Paris , des désillusions communistes à la rencontre éblouie de sa muse, Elsa.

Mais il est bien conscient de la complexité de sa démarche, et même de sa vanité :

" Et le roman s'achève de lui-même
J'ai déchiré ma vie et mon poème ".

Je trouve que le poète cède parfois à la facilité, certains vers semblent un peu surfaits et jouent sur les mots avec trop de nonchalance, par exemple:

" Je passe le temps en chantant
Je chante pour passer le temps."

Mais je reste admirative devant le jaillissement mélodieux de ses vers, l'amplitude généreuse des images, le sens du chant qui vibre dans sa poésie. D'ailleurs Ferré, Montand et tant d'autres l'ont compris en devenant ses interprètes.

Un poème comme "Strophes pour se souvenir ", qui évoque les résistants étrangers fusillés du groupe Manouchian, me serre toujours la gorge d'émotion, à chaque fois que je le lis:

" Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses
Adieu la vie adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses "...

La " prose du bonheur d 'Elsa " est aussi très intense et passionnée :

" J'ai tout appris de toi comme on boit aux fontaines
Comme on lit dans le ciel les étoiles lointaines
Comme au passant qui chante on reprend sa chanson "

Et ce vers magnifique, que personnellement j'adore:

" J'ai tout appris de toi jusqu'au sens du frisson "...

Au-delà de ses contradictions, entre ses certitudes et ses doutes, Aragon sait nous toucher et exalter en nos coeurs un chant ivre de vent, d'amour et de passion. Son roman de vie en vers pour nous ne s'achèvera jamais ...
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Le Roman inachevé a le goût des chansons qu'on fredonne, des vers qu'on se récite à mi-voix comme pour bercer un enfant..On y revoit les deux guerres et la main salvatrice d'Elsa qui hisse le poète vers la vie...Aragon est notre dernier poète populaire.

Les vers , souvent, s'accrochent à une mélodie de Ferré, à une voix connue, Ferré, toujours, mais aussi Ferrat et Montand...Aragon a accompagné nos rêves, nos luttes, nos regrets..

L'homme s'est souvent trompé, et n'a pas toujours eu la lucidité ou le courage de ses compagnons de route ou de ses frères en poésie - il faut relire Signoret ou Claude Roy...- mais j'oublie toute ses petites et grandes faiblesses quand je lis "La guerre et ce qui s'en suit ", "le front aux vitres..." ou quand je chantonne "Un jour, un jour":

Un jour, pourtant, un jour viendra
Couleur d'orange,
Un jour de palme, un jour de feuillages au front
Un jour d'épaule nue, où les gens s'aimeront
Un jour comme un oiseau sur la plus haute branche..
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C'est, lors de l'entrée au Panthéon de Missak Manouchian et de sa femme Méline, et avec eux tous ces jeunes qui firent le sacrifice de leur vie pour la France, écoutant le coeur serré et les larmes aux yeux la chanson faite par Leo Ferré sur le poème d'Aragon Strophes pour se souvenir, un poème que je savais par coeur, que je suis revenu à ce recueil lu il y a si longtemps.

C'est de la poésie populaire, au bon sens du terme, je trouve.
Ici on est loin du poète surréaliste des années vingt, Feu de joie, le mouvement perpétuel, etc…
Et pas étonnant que tant de poèmes furent mis en musique, chantés par Ferré, Ferrat, Montand entre autres. Ces poèmes ce sont des chansons qui racontent la vie, avec fantaisie ou avec tristesse, l''amour beaucoup, l'absurdité de la guerre aussi, le courage de quelques-uns, la laideur des villes et la beauté de la nature, l'empathie pour toutes et tous les humbles, les délaissés de l'existence, surtout les femmes. Et aussi la désillusion des idéaux perdus, notamment celui du communisme dans La nuit de Moscou.

Et puis c'est fait le plus souvent, malgré quelques poèmes en vers livres, avec une versification savante, variant les mètres et la disposition des rimes, mais qui a du sens, qui accompagne le lyrisme.

En conclusion, ça fait du bien de revenir à tous ces beaux poèmes humanistes.
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Ferrat reviens!
et nous fabrique
la bleue mélodie
de cette belle
triste poésie.
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Citations et extraits (120) Voir plus Ajouter une citation
EST-CE AINSI QUE LES HOMMES VIVENT


Tout est affaire de décor
Changer de lit changer de corps
À quoi bon puisque c'est encore
Moi qui moi-même me trahis
Moi qui me traîne et m'éparpille
Et mon ombre se déshabille
Dans les bras semblables des filles
Où j'ai cru trouver un pays.

Coeur léger coeur changeant coeur lourd
Le temps de rêver est bien court
Que faut-il faire de mes nuits
Que faut-il faire de mes jours
Je n'avais amour ni demeure
Nulle part où je vive ou meure
Je passais comme la rumeur
Je m'endormais comme le bruit.

C'était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenais mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent

Dans le quartier Hohenzollern
Entre La Sarre et les casernes
Comme les fleurs de la luzerne
Fleurissaient les seins de Lola
Elle avait un coeur d'hirondelle
Sur le canapé du bordel
Je venais m'allonger près d'elle
Dans les hoquets du pianola.

Le ciel était gris de nuages
Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage
Au-dessus des maisons des quais
Je les voyais par la fenêtre
Leur chant triste entrait dans mon être
Et je croyais y reconnaître
Du Rainer Maria Rilke.

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent.

Elle était brune elle était blanche
Ses cheveux tombaient sur ses hanches
Et la semaine et le dimanche
Elle ouvrait à tous ses bras nus
Elle avait des yeux de faïence
Elle travaillait avec vaillance
Pour un artilleur de Mayence
Qui n'en est jamais revenu.

Il est d'autres soldats en ville
Et la nuit montent les civils
Remets du rimmel à tes cils
Lola qui t'en iras bientôt
Encore un verre de liqueur
Ce fut en avril à cinq heures
Au petit jour que dans ton coeur
Un dragon plongea son couteau

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent.
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Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l'orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servi simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants

Nul ne semblait vous voir français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE
Et les mornes matins en étaient différents

Tout avait la couleur uniforme du givre
À la fin février pour vos derniers moments
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement
Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand

Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses
Adieu la vie adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erivan

Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le cœur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant

Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant.



Strophes pour se souvenir (Le Roman Inachevé)


"72 ans après la disparition des membres du groupe Manouchian, il est plus que jamais essentiel de garder vivante leur mémoire. A travers leur courage, leur humanisme, leur espoir sans faille en un avenir meilleur ou encore leur lutte contre la haine et le fascisme, ils ont œuvré pour la paix. Arméniens, espagnols, italiens, roumains, hongrois, polonais ou encore français, ces hommes et ces femmes ont su unir leur force au service l’émancipation humaine. Combattants de la liberté et de la fraternité, ils incarneront à jamais le visage de la Résistance."

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Je traîne après moi trop d'échecs et de mécomptes
J'ai la méchanceté d'un homme qui se noie
Toute l'amertume de la mer me remonte
Il me faut me prouver toujours je ne sais quoi
Et tant pis qui j'écrase et tant pis qui je broie
Il me faut prendre ma revanche sur la honte

Ne puis je donner de la douleur Tourmenter
N'ai je pas à mon tour le droit d'être féroce
N'ai je pas à mon tour droit à la cruauté
Ah faire un mal pareil aux brisures de l'os
Ne puis je avoir sur autrui ce pouvoir atroce
N'ai je pas assez souffert assez sangloté

Je suis le prisonnier des choses interdites
Le fait qu'elles le soient me jette à leurs marais
Toute ma liberté quand je vois ses limites
Tient à ce pas de plus qui la démontrerait
Et c'est comme à la guerre il faut que je sois prêt
D'aller où le défi de l'ennemi m'invite

Toute idée a besoin pour moi d'un contrepied
Je ne puis supporter les vérités admises
Je remets l'évidence elle même en chantier
Je refuse midi quand il sonne à l'église
Et si j'entends en lui des paroles apprises
Je déchire mon coeur de mes mains sans pitié

Je ne sais plus dormir lorsque les autres dorment
Et tout ce que je pense est dans mon insomnie
Une ombre gigantesque au mur où se déforme
Le monde tel qu'il est que follement je nie
Mes rêves éveillés semblent des Saint Denis
Qui la tête à la main marchent contre la norme

Inexorablement je porte mon passé
Ce que je fus demeure à jamais mon partage
C'est comme si les mots pensés ou prononcés
Exerçaient pour toujours un pouvoir de chantage
Qui leur donne sur moi ce terrible avantage
Que je ne puisse pas de la main les chasser

Cette cage des mots il faudra que j'en sorte
Et j'ai le coeur en sang d'en chercher la sortie
Ce monde blanc et noir où donc en est la porte
Je brûle à ses barreaux mes doigts comme aux orties
Je bats avec mes poings ces murs qui m'ont menti
Des mots des mots autour de ma jeunesse morte

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Les mots qui ne sont pas d'amour

Il est inutile de geindre
Si l'on acquiert comme il convient
Le sentiment de n'être rien
Mais j'ai mis longtemps pour l'atteindre

on se refuse longuement
De n'être rien pour qui l'on aime
Pour autrui rien par soi-même
Ca vous prend on ne sait comment

On se met à mieux voir le monde
Et peu à peu ça monte en vous
Il fallait bien qu'on se l'avoue
Ne serait-ce qu'une seconde

Une seconde et pour la vie
Pour tout le temps qui vous demeure
Plu n'importe qu'on vive ou meure
Si vivre et mourir n'ont servi

soudain la vapeur se renverse
Toi qui croyais faire la loi
Tout existe et bouge sans toi
Tes beaux nuages se dispersent

Tes monstres n'ont pas triomphé
Le chant ne remue pas les pierres
Il est la voix de la matière
Il n'y a que des faux Orphée

L'effet qui formerat la cause
Est pure imagination
Renonce à la création
Le mot ne vient qu'après la chose

Et pas plus l'amour ne se crée
Et pas plus l'amour ne se force
Aucun dieu n'est pris sous l'écorce
Qu'il t'appartienne délivrer

Ce ne sont pas les mots d'amour
Qui détournent les tragédies
Ce ne sont pas les mots qu'on dit
Qui changent la face des jours

Le malheur où te voilà pris
Ne se règle pas au détail
Il est l'objet d'une bataille
Dont tu ne peux payer le prix

Apprends qu'elle n'est pas la tienne
Mai bien la peine de chacun
Jette ton coeur au feu commun
Qu'est-il de tel que tu y tiennes

Seulement qu'il donne une flamme
Comme une rose du rosier
Mêlée aux flammes du brasier
Pour l'amour de l'homme et la femme

Va Prends leur min Prends le chemin
Qui te mène au bout du voyage
Et c'est la fin du moyen âge
Pour l'homme et la femme demain

Cela fait trop longtemps que ça dure
Le Saint-Empire des nuées
Ah sache au moins contribuer
A rendre le ciel moins obscur

Qui sont ces gens sur les coteaux
Qu'on voit tirer contre la grêle
Mais va partager leur querelle
Qu'il ne pleuve plus de couteaux

Peux-tu lisser le feu
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Que serais-je sans toi qui vint à ma rencontre.
Que serais-je sans toi qu'un cœur au bois dormant.
Que cette heure arrêtée au cadran de la montre.
Que serais-je sans toi que ce balbutiement.

J'ai tout appris de toi sur les choses humaines.
Et j'ai vu désormais le monde à ta façon.
J'ai tout appris de toi comme on boit aux fontaines
Comme on lit dans le ciel les étoiles lointaines.
Comme au passant qui chante, on reprend sa chanson.
J'ai tout appris de toi jusqu'au sens de frisson.

J'ai tout appris de toi pour ce qui me concerne.
Qu'il fait jour à midi, qu'un ciel peut être bleu
Que le bonheur n'est pas un quinquet de taverne.
Tu m'as pris par la main, dans cet enfer moderne
Où l'homme ne sait plus ce que c'est qu'être deux.
Tu m'as pris par la main comme un amant heureux.

Qui parle de bonheur a souvent les yeux tristes.
N'est-ce pas un sanglot que la déconvenue
Une corde brisée aux doigts du guitariste
Et pourtant je vous dis que le bonheur existe.
Ailleurs que dans le rêve, ailleurs que dans les nues.
Terre, terre, voici ses rades inconnues.
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