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Bernard Lortholary (Traducteur)
EAN : 9782253044901
279 pages
Le Livre de Poche (20/09/2006)
4.19/5   27464 notes
Résumé :
Au XVIIIème siècle vécut en France un homme qui compta parmi les personnages les plus géniaux et les plus horribles de son époque.
Il s'appelait Jean-Baptiste Grenouille.
Sa naissance, son enfance furent épouvantables et tout autre que lui n'aurait pas survécu.
Mais Grenouille n'avait besoin que d'un minimum de nourriture et de vêtements, et son âme n'avait besoin de rien. Or ce monstre de Grenouille avait un don, ou plutôt un nez unique au m... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1128) Voir plus Ajouter une critique
4,19

sur 27464 notes
Livre à la fragrance millésimée.
Cueillez-le, sentez-le, humez-le à vous en étourdir.
Ayez du flair, du nez, du tarin, ne passez pas à coté !
J'ajouterais qu'à ce prix, un tel Parfum, dont l'arôme n'a d'égal que la générosité, en est presque indécent...

La perfection olfactive a un prix et pour ce faire, votre vie, aux yeux de Grenouille, n'en a aucun !
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Inclassable, ce livre est devenu… un classique ! Inclassable car d'une grande originalité : pour la première et peut-être unique fois dans un roman, la description des lieux, des objets, des personnes, est d'abord rendue par les odeurs. le personnage principal, Jean-Baptiste Grenouille, est doté d'un odorat d'exception qui fait de lui un quasi surhomme (un super-héros dirait-on aujourd'hui, si l'action n'était pas située au XVIIIème siècle).

Son fabuleux odorat lui permet en effet de se diriger dans l'obscurité et de « voir » à travers les murs et les placards, il pourrait presque être aveugle, tant ses autres sens lui sont devenus inutiles. Mais cet étrange héros a bien entendu plusieurs défauts dans la cuirasse. Son intelligence est mise au service exclusif de son besoin d'accaparer et de mémoriser de nouvelles odeurs, et il passe donc auprès de ses semblables pour un parfait idiot, même doué de ce talent unique. Grenouille s'accommode parfaitement de cette situation (rien ne l'intéresse en dehors des odeurs). Rien ne peut l'émouvoir, tout lui est indifférent y compris la beauté et la vie humaine, et il ira donc jusqu'à devenir un tueur en série pour capturer l'odeur des jeunes femmes qu'il cherche à collectionner.

Ce roman est inclassable, car il est à la fois un roman historique, un roman fantastique, un polar et un conte philosophique. le héros est un monstre mais on finit par l'accompagner dans sa folie meurtrière et à comprendre sa quête qui correspond à la construction d'un idéal. L'auteur mène son idée très loin en opérant à notre insu une inversion des systèmes de valeurs, il nous entraîne vers l'acceptation de l'ignominie, la chosification des victimes - et donc leur déshumanisation - et la transformation inattendue de son antihéros en personnage quasi-divin, finalement capable après une condamnation et une résurrection spectaculaire de prendre le pouvoir absolu sur ses congénères et de choisir lui-même l'heure de sa disparition.

Il va sans dire que certaines scènes du roman et son épilogue procureront un sentiment de malaise à certains, car malgré son édifiant parcours olfactif, Jean-Baptiste Grenouille n'est certes pas un personnage en odeur de sainteté !
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Je me suis interrogée sur l'intérêt de mettre en ligne une énième critique. Aujourd'hui je l'écris. J'ai découvert ce matin une très belle critique de scoubs ce qui a ravivé certains souvenirs.
J'ai lu ce livre à sa sortie il y a une trentaine d'années. Je ne l'ai pas touché depuis. Deux raisons à cela:
Ce livre est le dernier cadeau que m'a fait ma chère maman, décédée peu de temps après. J'ai commencé cette lecture, embourbée dans le chagrin, le doute, la maladie. Patrick Süskind m'a offert une magnifique parenthèse faite d'évasion, et de sérénité. Dans une bulle on est si bien quand les murs se fissurent autour de soi. Jean-Baptiste Grenouille est bien doté d'un pouvoir magique. J'ai pu le vérifier.
La seconde raison pour laquelle je ne le relirai jamais. Simplement parce que je veux garder ce souvenir intact. La surprise ne sera plus jamais aussi vive. J'étais certainement en demande et ce texte a eu sur moi un effet lénifiant parce que je le voulait ainsi. L'auteur m'a raconté une histoire enveloppante parce que j'avais terriblement froid.


Je fais un commentaire au fil de la plume me basant uniquement sur l'image qui me reste de cette histoire riche, dense et originale. Trente ans après les faits, je me présente à la barre.

Jean Baptiste Grenouille naît et vit ses premières heures entouré des déchets de poisson immondes et odorants.
Dès la première page j'étais au parfum! J'ai senti la force de ce personnage qui loin de perdre son équilibre veut survivre, se différencier et tirer parti de cette situation tellement inconfortable et incroyable. Il veut vivre contre vents et marées. Il se renforce à travers cette épreuve de taille et renforce probablement son odorat à cette occasion. Il est prêt à combattre.


Le lecteur est invité à l'accompagner au fil de ses aventures et de ses voyages. Sa situation matérielle est loin d'être brillante. Elle est même précaire. Il survit. Ce n'est pas un problème. Il ferme les yeux et l'image de ce qui lui manque le plus apparaît. Des fauteuils en velours aux assises confortables le comblent lorsqu'il est assis sur une pierre. Et ça marche....Juste parce qu'il a fermé les yeux. le rêve, l'imagination viennent transformer la réalité pour qu'elle soit non seulement acceptable, mais très jolie. Si tout n'était qu'illusion ? Quel ascendant peut avoir le mental sur nos faiblesses ?


Grenouille, tel un compagnon, exerce son talent dans différents lieux. Je me souviens qu'il fait le bonheur d'un parfumeur en fabricant l'élixir le plus merveilleux, le plus remarquable qui ait existé. le parfumeur s'enrichit considérablement tandis que notre pauvre Grenouille reçoit un salaire misérable. Voilà l'imposture, la cupidité soulignées a grands coups de crayon. Grenouille est-il vraiment exploité? est-il pauvre ? le bonheur de créer, de sentir, de se réaliser, d'exister n'est-il pas suffisant à ses yeux ? Une passion épanouie ne vaut-elle pas une charrette de dollars ?


Grenouille assassin ? Et pourtant Il m'a été très sympathique jusqu'à la fin ce drôle de personnage. Il tuait des femmes dont il aimait l'odeur après en avoir tiré la substantive moelle. Les brunes, les rousses, les blondes, personne ne lui résistait. J'ai vécu ces meurtres comme un symbole fort : Il gardait de chacune de ses rencontres, de chaque personne qui l'attirait ce qui lui paraissait essentiel.
Ne pouvons nous aussi garder ce qui s'adapte le mieux à ce que l'on aime? le choix, la bonne couleur, le bon endroit, la bonne tournure, le bon mot. Faire de ce point fort un axe central, un pivot, un cadeau, un diamant. Ce diamant ne se monnaye pas. Il se respecte. Il se contemple. Il se conserve. Garder jalousement ce point fort à l'esprit tout comme Grenouille enferme l'essence de ses conquêtes dans une fiole. Garder ce trésor pour aimer plus, pour aimer mieux, pour aimer durablement. Fermer les yeux sur le reste non pas pour rêver cette fois, mais pour garder le meilleur.

Grenouille ne s'occupe plus de l'enveloppe charnelle, de l'apparence. Il jette tout cela.Il tue ce qui n'est pas si important à ses yeux. Il garde l'essence, l'âme, la personnalité. Il tue ce qui est inaccessible et conserve ce qui est à sa portée. Ce qui le concerne. Ce qu'il maîtrise: l'odeur.


L'auteur m'a embaumé de ces flagrances inouïes et j'ai refermé ce livre rassasiée de belles images en me promettant d'essayer d'être un peu plus forte, un peu plus passionnée, de garder précieusement mes plus beaux souvenirs dans des petites fioles pour ne pas qu'ils s'échappent.


Ce conte peut-être lu de différentes manières et le champ est largement ouvert aux nombreuses interprétations possibles. Grenouille horrible assassin, Grenouille maître nez doté d'un pouvoir magique, Grenouille, errant dans l'ombre, la souffrance, le dénuement, Grenouille le mal aimé......


Je viens d'en ouvrir une petite fiole et l'odeur du livre qu'elle dégage n'a rien perdu de sa force et de son enchantement. Elle est intacte. Je me souviens aujourd'hui à quel point j'avais froid. Et je me suis réchauffée dans les bras d'un assassin.
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Avoir du nez, c'est être capable de dénicher la lecture qui nous conviendra le mieux. Force est de constater que sur ce coup-là, je n'ai pas eu le nez creux. Je n'ai jamais réussi à adhérer, à pénétrer dans la fiction, à oublier l'auteur derrière les mots. Il y avait pourtant beaucoup d'indicateurs susceptibles de m'inspirer : un sujet original, une foule de lecteurs éclectiques convaincus, notamment de celles ou de ceux dont je tiens le jugement en haute estime, etc.

Dans sa critique, à laquelle je souscris pleinement, le lecteur Carré s'étonne du contraste entre son propre ressenti à propos de l'oeuvre (plutôt médiocre) comparativement à celui de la très large majorité des critiques sur ce site ou ailleurs (plutôt exceptionnel). Je vais même, une fois n'est pas coutume, le citer :

« je me sens bien seul devant l'avalanche de superlatifs concernant le roman de Suskind. Trop d'odeurs, à friser l'overdose, de descriptions, plutôt de perceptions odoriférantes qui m'ont souvent plus irrité que flatté. Bien sûr, l'écriture est remarquable, l'intrigue oppressante et la chute tout bonnement stupéfiante, mais ce Grenouille n'a jamais ne serait-ce qu'une seconde réussit à me passionner, ni dans sa folie, ni dans sa quête : je suis constamment resté en retrait, avec le sentiment de passer à côté d'une évidence pour de nombreux lecteurs »

Pour ma part, je vais aller encore plus loin que lui. Je tique notamment sur ce qu'il nomme « écriture remarquable » car pour moi, l'écriture de ce roman n'est pas ce que j'appelle " remarquable ", car, si elle eût été telle, elle m'aurait embarquée avec elle et c'est l'enthousiasme au coeur que je vous en parlerais. Or, point de cela. D'ailleurs, ce critique écrit juste après « je suis constamment resté en retrait », bon indicateur, selon moi, que l'écriture n'était justement pas " remarquable ", mais bon, ça c'est une autre affaire.

À ce titre, permettez-moi seulement d'invoquer Mario Vargas Llosa, qui écrit dans Lettres à un jeune romancier : « S'il n'est pas si difficile de parler de la cohésion d'un style, c'est une autre paire de manches d'en expliquer le CARACTÈRE NÉCESSAIRE, indispensable pour rendre convaincant un langage romanesque. La meilleure façon de le décrire est peut-être de recourir à son contraire, le style qui échoue dans le récit d'une histoire en maintenant à distance son lecteur, lucide et conscient de LIRE quelque chose d'étranger, non de vivre et de partager l'histoire avec ses personnages. Il y a échec quand le lecteur sent un abîme, que le romancier ne parvient pas à combler dans son écriture, entre ce qu'il raconte et les mots pour le dire. Cette bifurcation, ce dédoublement entre le langage d'une histoire et l'histoire en elle-même annule le pouvoir de persuasion. le lecteur ne croit pas à ce qu'on lui raconte, parce que la maladresse et l'inadéquation de ce style lui font prendre conscience d'une insurmontable césure entre les mots et les faits, une faille par où passent tout l'artifice et l'arbitraire, ces fondements d'une fiction, seulement effacés ou rendus invisibles dans les oeuvres réussies. »

Voilà, nous y sommes : quand je n'y crois plus, c'est fini, on peut plier les gaules plus rien ne mordra à l'hameçon. Et bien, en ce qui me concerne, c'est très rapidement qu'il y a eu disjonction et donc, cela fit globalement flop ! Alors voici un héros — anti-héros, assurément, tellement assurément que Patrick Süskind s'échine à nous le présenter tel, espérant qu'une petite voix en nous nous soufflera : « Bouh ! C'est un méchant, ce gars-là ! Rien n'est bon en lui. Rien à sauver. »

Nous débutons, donc, avec ce héros, qui, dès le stade nourrisson et dès sa première journée de vie possède déjà des intentions machiavéliques et qui, tenez-vous bien, pleure à dessein pour faire condamner sa mère à mort. Personnellement, j'ai eu beau arpenter à deux reprises les longs couloirs d'une maternité, j'ai le sentiment que ce postulat de départ à propos d'un bébé ne fonctionne pas bien. À vous de voir.

Ensuite sa première nourrice le prend en grippe et devinez pourquoi ? Parce qu'il n'a pas d'odeur. Vous conviendrez qu'en matière de péché capital et de motif d'exécration, on a déjà connu pire, surtout à l'époque où s'ancre la narration : le XVIIIème siècle. Pour ma part, et à l'instar de cet illustre empereur romain, Vespasien, j'aurais tendance à incliner vers la proposition qui affirme que l'argent n'a pas d'odeur, et que, précisément, s'il n'y a pas d'odeur, nul n'aura tendance à refuser de l'argent, d'où qu'il vienne, surtout si l'on en manque, comme cela semble le cas de cette brave nourrice. Deuxième anicroche, en ce qui me concerne, quant au pouvoir de persuasion de l'oeuvre.

Poursuivons : le sort de l'infortuné Grenouille échoira à la très monolithique et très antipathique Mme Gaillard, qui, comme par hasard, a perdu le sens de l'odorat d'un malencontreux coup sur le nez. Elle sera parfaitement inhumaine et glaciale durant toute la jeunesse du héros. Bon, là encore, qu'une femme puisse élever un enfant, même pour de l'argent, pendant une dizaine d'années, sans qu'aucune espèce de relation ne se noue entre eux, désolée Monsieur Süskind, je n'y crois pas : cela ne s'accorde en rien avec ce que je connais de l'humain.

Et puis, Grenouille prend de l'âge, son sens du tarin s'aiguise, se façonne, se développe jusqu'à atteindre des performances que même un ours ou un coati, pourtant figurant parmi les plus fins naseaux qu'on connaisse dans le règne animal, n'arriveraient pas à égaler. Ici, c'est la cohérence proprement biologique qui est mise à mal, mais admettons, admettons, s'il faut admettre, admettons.

Le voilà, ce méchant, méchant Grenouille, qui échoue chez Grimal, un tanneur, puis, par un hasard vraiment hasardeux se retrouve au contact d'un parfumeur, lequel parfumeur, par un autre hasard hasardeux se trouve n'avoir pas de nez, ce qui, pour un parfumeur de cette époque-là, est pour le moins inattendu. Et donc ce parfumeur aux sens altérés trouve le moyen de se faire rétrocéder l'apprenti-tanneur macrosmate. Et bien, croyez-moi si vous voulez, Paf ! Grimal, le patron tanneur prit sa dernière biture le soir même et ne profita jamais de sa jolie plus-value. C'est tout de même pas de bol, convenez-en.

Que dire du parfumeur au nez taquin, Baldini, qui, à l'orée de la fortune et de la gloire remportée grâce aux talents olfactifs du méchant, méchant Grenouille, se fait, Plouf ! emporter sa demeure, Blam ! comme ça, corps et biens, Flouf ! on n'en parlera plus, par un vilain, vilain effondrement de pont sur la Seine. Aïe, aïe, aïe ! Il porte vraiment la poisse ce satané Grenouille, moi je vous le dis !

Mais jouons le jeu jusqu'au bout, laissons à cette écriture l'opportunité de nous séduire et/ou de nous convaincre. Certes, Patrick Süskind a écrit son livre en allemand et il pouvait certes supposer que pour un public germanophone pas nécessairement francophone les jeux de mots malingres et les clins d'oeil appuyés, ça passerait. Certes, certes, mais tout de même, de vous à moi, quand je lis après une réplique du héros " coassa Grenouille ", j'ai envie de refermer le bouquin, car trop, vraiment, c'est trop.

Ensuite, vient l'épineux épisode de la grotte. Certains s'amusent à passer sept ans au Tibet, mais notre Jean-Baptiste Grenouille décide, lui, de passer sept ans dans le Cantal, au creux d'un boyau étroit et sombre comme la mort, dans la solitude minérale la plus totale. Sachant que les sept années en question correspondent à la période de vie du héros allant de 18 à 25 ans, âge où, c'est bien connu, tous les jeunes hommes hétérosexuels torturés d'hormones n'aspirent qu'à vivre reclus dans un étroit boyau de basalte loin de toute espèce de présence féminine ou même seulement humaine. Bon, bon, bon… voilà qui est pour le moins singulier et toujours hautement crédible à mes yeux.

Oups ! J'ai oublié de vous dire ! Savez-vous ce qu'il fait le méchant, méchant héros quand il est encore à Paris et qu'il sent une odeur subtile, délicieuse entre toutes, une senteur comme il en a toujours rêvé ? Eh bien dès qu'il trouve la jeune fille — car la fragrance en question appartient, bien entendu, à une jeune femme, belle et délicate de surcroît, parce qu'une grosse et moche ne peut pas sentir bon, c'est bien connu — dès qu'il trouve la jeune fille, donc, du haut de ses treize/quatorze ans (si j'ai bien compris) que fait-il ? Il la tue, en toute logique, puisque sans quoi il ne serait pas le méchant, méchant Grenouille qu'on attend. CQFD. Alors moi je m'interroge : Pourquoi tuerait-il l'unique porteuse du seul parfum qui le ravit dans tout Paris, lui qui est si sensible aux exhalaisons ? Ça ne me paraît décidément pas tenir debout. Je veux bien beaucoup de choses, mais là, d'après mes concepts, ça cloche, donc impossible pour moi d'adhérer au propos.

Sachez encore, mes bons amis, qu'à ce moment-là, vous n'êtes qu'au début des incohérences crasses auxquelles l'auteur nous soumet (incohérences crasses selon mes critères, cela va sans dire et n'engage bien sûr que moi). Il vous reste à avaler toute la période Grassoise (ville du parfum s'il en est) qui vaut, elle aussi, son pesant de pétales de rose en terme d'aberrations logiques. de sorte que si fable il y eut, si message ou si symbolique il y eut, elles furent totalement évaporées à mes narines par les insuffisances du reste. Bref, c'est un parfum d'échec sans appel qui se dégage en ce qui me concerne à propos du pouvoir de persuasion et de conviction de cette oeuvre sur la lectrice que je suis (et ça n'engage que moi, je le répète).

Toutefois, ce roman présente, selon moi, des qualités indéniables qui n'ont trait ni à l'intrigue, ni aux personnages qui sont tous, selon mes critères, d'épaisses caricatures, ni au style que je qualifierais de capiteux mais plutôt au fond, c'est-à-dire au terreau informatif que recèle l'oeuvre.

Là, j'avoue sans honte que j'ai été captivée par les passages concernant l'extraction des senteurs et les différents procédés utilisés au cours de l'histoire de la parfumerie. L'auteur a l'immense mérite de mettre l'accent sur des pratiques peu connues et, pour la plupart oubliées à l'époque où il écrivait son roman, sachant, au demeurant, qu'il n'y avait pas d'internet à l'époque et qu'il était très difficile pour monsieur ou madame tout-le-monde d'avoir accès à ce genre d'information dans les années 1980.

Donc, si je dois adresser un coup de chapeau au livre, c'est pour cet aspect-là. le reste, ma foi, me laissera un bien piètre souvenir mais, si vous pensez tout le contraire, prenez garde à ce que la moutarde ne vous monte au nez, car cet avis n'est que mon avis, il a le parfum évanescent des choses qui s'oublient, c'est-à-dire vraiment pas grand-chose.
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Qu'ajouter de plus après 203 critiques je crois sur Babelio ?
Que ça y est, j'y suis enfin, au parfum.
Et que, je me sens bien seul devant l'avalanche de superlatifs concernant le roman de Suskind. Trop d'odeurs, à friser l'overdose, de descriptions, plutôt de perceptions odorisantes qui m'ont souvent plus irrité que flatté. Bien sur, l'écriture est remarquable, l'intrigue oppressante et la chute tout bonnement stupéfiante, mais ce Grenouille n'a jamais ne serais-ce une seconde réussit à me passionner, ni dans sa folie ni dans sa quête, je suis constamment rester en retrait, avec le sentiment de passer à côté d'une évidence pour de nombreux lecteurs : "Le parfum" est inoubliable. Et bien pour moi, c'est sur, mon odorat m'a joué un mauvais tour, car cette fragrance est bien loin du chef d'oeuvre annoncé
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Citations et extraits (425) Voir plus Ajouter une citation
"Au XVIIIe siècle vécut en France un homme qui compta parmi les personnages les plus géniaux et les plus abominables de cette époque qui pourtant ne manqua pas de génies abominables"
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Tout le malheur de l'homme vient de ne pouvoir rester seul dans sa chambre, là où est sa place. Dixit Pascal. Et Pascal est un grand homme, un Frangipani de l'esprit, un artisan dans le meilleur sens du terme, mais les gens de cette trempe ne font plus recette aujourd'hui. A présent, les gens lisent des livres subversifs, écrits par des huguenots ou des Anglais. Ou bien ils écrivent des libelles, ou de prétendues sommes scientifiques, où ils mettent en question tout et le reste. Rien de ce qu'on pensait n'est plus vrai, à les entendre; on a changé tout ça. Voilà que dans un verre d'eau nageraient de toutes petites bestioles qu'on ne voyait pas autrefois; et il paraît que la syphilis est une maladie tout ce qu'il y a de plus normale et non pas un châtiment de Dieu; lequel n'aurait pas créé le monde en sept jours, mais en des millions d'années, si du moins c'étaient bien lui; les sauvages sont des hommes comme nous; nos enfants, nous les éduquons de travers; et la terre n'est plus ronde comme naguère, elle est aplatie en haut et en bas comme melon - comme si ça avait de l'importance ! Dans tous les domaines, on pose des questions, on farfouille, on cherche, on renifle et on fait des expériences à tort et à travers. Il ne suffit plus de dire ce qui est et comment c'est : il faut maintenant que tout soit prouvé, de préférence par des témoins et des chiffres et je ne sais quelles expériences ridicules. Ces Diderot, d'Alembert, Voltaire, Rousseau, et autres plumitifs dont le nom m'échappe (il y a même parmi eux des gens d'Eglise, et des messieurs de la noblesse !), ils ont réussi ce tour de force de répandre dans toute la société leur inquiétude sournoise, leur joie maligne de n'être satisfaits de rien et d'être mécontents de toute chose en ce monde, bref, l'indescriptible chaos qui règne dans leurs têtes!
Où qu'on portât le regard, c'était l'agitation. Les gens lisaient des livres, même les femmes. Des prêtres traînaient dans les cafés. Et quand pour une fois la police intervenait et fourrait en prison l'une de ces signalées fripouilles, les éditeurs poussaient les hauts cris et faisaient circuler des pétitions, tandis que des messieurs et des dames du meilleur monde usaient de leur influence, jusqu'à ce qu'on libère la fripouille au bout de quelques semaines, ou qu'on la laisse filer à l'étranger, où elle continuait à pamphlétiser de plus belle. Et dans les salons, on vous rebattait les oreilles de la trajectoire des comètes ou d'expéditions lointaines, de la force des leviers ou de Newton, de l'aménagement des canaux, de la circulation sanguine et du diamètre du globe.
Et même le roi s'était fait présenter l'une de ces inepties à la dernière mode, une espèce d'orage artificiel nommé électricité : en présence de toute la Cour, un homme avait frotté une bouteille, et ça avait fait des étincelles, et il paraît que Sa Majesté s'était montrée très impressionnée. On ne pouvait imaginer que son arrière-grand-père, ce Louis-le-Grand qui méritait son nom et sous le règne béni duquel Baldini avait encore eu le privilège de vivre de nombreuses années, eût toléré qu'une démonstration aussi ridicule se déroulât sous ses yeux ! Mais c'était l'esprit des temps nouveaux, et tout cela finirait mal !
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Maintenant il sentait qu'elle était un être humain, il sentait la sueur de ses aisselles, le gras de ses cheveux, l'odeur de poisson de son sexe, et il les sentait avec délectation. Sa sueur fleurait aussi frais que le vent de mer, le sébum de sa chevelure aussi sucré que l'huile de noix, son sexe comme un bouquet de lis d'eau, sa peau comme les fleurs de l'abricotier... et l'alliance de toutes ces composantes donnait un parfum tellement riche, tellement équilibré, tellement enchanteur, que tout ce que Grenouille avait jusque-là senti en fait de parfums, toutes les constructions olfactives qu'il avait échafaudées par jeu en lui-même, tout cela se trouvait ravalé d'un coup à la pure insignifiance.
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Quand, ayant fini de prendre leur repas, les cannibales se retrouvèrent autour du feu, personne ne prononça un mot.
L'un ou l'autre éructait un peu, recrachait un petit bout d'os, faisait discrètement claquer sa langue, poussait d'un petit coup de pied dans les flammes un minuscule lambeau qui restait de l'habit bleu.
Ils étaient tous un peu gênés et n'osaient pas se regarder. Un meurtre ou quelque crime ignoble, ils en avaient tous au moins déjà un sur la conscience, hommes et femmes.
Mais manger un homme? Jamais de leur vie ils n'auraient pensé être capables d'une chose aussi affreuse. Et ils s'étonnaient d'avoir tout de même fait ça aussi facilement et de ne pas éprouver, cette gêne mise à part, la moindre trace de mauvaise conscience.
Au contraire ! Ils avaient bien l'estomac un peu lourd, mais le cœur était tout à fait léger. Dans leurs âmes ténébreuses, il y avait soudain une palpitation d'allégresse. Et sur leurs visages flottait une virginale et délicate lueur de bonheur. Sans doute était-ce pour cela qu'ils craignaient de lever les yeux et de se regarder en face.
Mais lorsqu'ils s'y risquèrent ensuite, d'abord à la dérobée, puis tout à fait franchement, ils ne purent s'empêcher de
sourire. Ils étaient extraordinairement fiers.
Pour la première fois, ils avaient fait quelque chose par amour.
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Grenouille était tout à fait détendu, sur son banc de la cathédrale Saint-Pierre, il souriait. […] Un moment, il resta assis, dans le calme du recueillement, aspirant à grands traits l'air saturé d'encens. Et de nouveau un sourire amusé flotta sur son visage : que ce Dieu avait donc une odeur pitoyable ! Qu'il était donc ridiculement mauvais, le parfum que répandait autour de lui ce Dieu. Ce n'était même pas de l'authentique encens, qui fumaillait dans ces casseroles. C'était un mauvais ersatz à base de bois de tilleul, de poudre de cannelle et de salpêtre. Dieu puait. Ce pauvre petit Dieu était puant. On l'escroquait, ce Dieu, ou bien il était lui-même un escroc, tout comme Grenouille — seulement bien plus mauvais !

Deuxième partie, Chapitre 32.
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