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Francis Lacassin (Éditeur scientifique)Armand Lanoux (Préfacier, etc.)
EAN : 9782221058954
1360 pages
Robert Laffont (30/11/-1)
4.13/5   304 notes
Résumé :
Oui, les Mystères de Paris relèvent du feuilleton, comme La Cousine Bette, comme Splendeurs et misères des courtisanes, chefs-d'oeuvre de Balzac, comme tout Dumas et presque tout Sand ; et, comme Hugo dans Les Misérables. Sue donne à son feuilleton une extraordinaire dimension dans le noir. Le mélo est là, assurément. Et colossal, coupant le souffle avec la brutalité en noir et blanc de ses éclairages violents, avec ses héros campés sans ambiguïté dans la noblesse ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (40) Voir plus Ajouter une critique
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A la question : est-ce que la littérature peut transformer le monde, nos mentalités et impacter notre société, je réponds "Les Mystères de Paris" d'Eugène Sue.
Je ne vais pas m'appesantir sur la trame de l'histoire que nous connaissons toutes et tous dans les grandes lignes et qui nous embarque encore tout autant, toutes ces décennies passées. J'avais en mémoire des souvenirs d'enfance de la série télévisée : Fleur de Marie dite la Goualeuse, Monsieur Rodolphe, le chourineur et surtout... La Chouette, personnage qui m'a valu quelques cauchemars à l'époque. Et c'est donc avec grand plaisir que j'ai découvert les multiples rebondissements et surtout la fin de cette histoire.

Par contre je souhaiterai pouvoir vous faire partager mon admiration pour tout ce qui tient "aux à-côtés" de cette histoire romanesque :
Dans un premier temps, Eugène Sue n'était pas convaincu par l'idée d'écrire sur le peuple (conseil que lui avait donné un ami). L'auteur est à l'époque un dandy de bonne famille, plus prompt à briller sur les bancs de la bonne société qu'à s'apitoyer sur les malheurs des gueux. Pas plus "emballé" que cela, il "descend" dans les basfonds de Paris et assiste à une rixe qui sera sa première source d'inspiration. Puis, il décide, contre l'avis de son éditeur, de répondre à l'offre de publication sous forme de feuilleton dans le journal des débats.

C'est un succès fulgurant : les gens de tous milieux font la queue pour acheter le dernier numéro et connaître la suite des aventures de la Goualeuse, de Rodolphe et du chourineur. Les malades s'accrochent à leur paillasse pour ne pas trépasser avant la fin de l'histoire, les illettrés quémandent à de bonnes âmes la lecture des épisodes... et la chambre des députés débat de façon houleuse des faits relatés par Eugène Sue et de ses propositions "scandaleuses" pour améliorer le sort des gueux, mais néanmoins honnêtes gens, qu'il soutient à grand renfort d'exemples et de comparaisons avec nos voisins européens, de théories scientifiques et ... de bon sens. Certaines les ont fait rire aux éclats, paraît-il...

A partir de là, c'est un engrenage qui va métamorphoser l'auteur et va contraindre les dirigeants de la France du XIXième à un débat dont ils se seraient bien passés...
Et tout cela se ressent au fil de la lecture. On sent cet investissement croissant, cet intérêt qui émerge pour "ces pauvres gens". D'un début somme toute, légèrement voyeur et divertissant, on approche petit à petit de la dénonciation de l'oppression des classes aisées et le social, la justice et l'équité montrent leur nez au détour des pages.
Eugène Sue "sort son drapeau rouge" et force les classes dirigeantes à poser les yeux là où l'indifférence, le dégoût et la supériorité de leur position les y détournaient...

Tout y passe :
- le système judiciaire et la mise en question de la peine de mort et de son utilité
- la pauvreté extrême des travailleurs qui face au moindre incident de la vie (chômage, maladie, ..) se voient pousser au crime pour survivre
- la condition des femmes à la merci des maris et des pères qui pouvaient à leur guise et en toute impunité les envoyer sur le trottoir après les avoir inscrites sur le livre de police
- le sort des malades dans les hôpitaux publics, plus cobayes soumis aux recherches de la médecine, que patients
- l'abandon des malades mentaux dans les mouroirs où on les enfermait
- ...
La liste est encore longue, je m'arrêterai donc là.

Eugène Sue ne fait pas que dénoncer : Il réfléchit aux solutions envisageables. Il se documente. Il interroge les spécialistes : médecins, juristes... Il propose des lois.
L'auteur livre au débat publique et au jugement populaire les grands faits sociaux et les questions éthiques de son époque et leurs solutions possibles. Un lanceur d'alertes, dirions-nous aujourd'hui ?

Justement, il est frappant de s'apercevoir que bon nombre de maux qui empoisonnaient les gens et la société de son époque sont encore présents et font toujours débat.
L'être humain n'est encore pas au centre des préoccupations des dirigeants de notre société. Il est toujours relégué derrière les intérêts financiers, gouvernementaux (puissance et pouvoir) de quelques uns au détriment de tous les autres. Est-ce une fatalité ? La démocratie participative, un mythe ?
Est-que tout cela n'est qu'une grande farce ? Un grand théâtre "où des idiots dirigent des aveugles" et nous, pauvres fous, nous y croyons ?
Tel ce magistrat du parquet de Toulouse écrivant à Eugène Sue "Continuez, monsieur, à faire servir votre voix puissante à signaler d'aussi déplorables lacunes dans notre législation : il est impossible qu'elle ne soit pas enfin entendue de nos législateurs."

Je vais ranger "mon drapeau qui n'a de rouge que le nom" et espérer vous avoir donner l'envie de vous plonger dans cette oeuvre d'une puissance de peu d'équivalence.
Quels auteurs soulèvent aujourd'hui des vérités qui dérangent et lancent à ce point des débats sociétaux d'une telle force ?
J'ai en tête certains noms. Plutôt des journalistes. Des poètes. Où sont les philosophes ? Et pour les romanciers ?
Qu'en pensez-vous, si vous êtes arrivés jusqu'au bout de cette encore fort (trop) longue chronique ?
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Les Mystères de Paris est typiquement le genre de livres qui, une fois refermé, nous fait dire : "youpee, je l'ai fait ! J'ai lu ces 1200 pages ! Et chose extraordinaire, je ne me suis même pas ennuyée !"

Il faut dire que notre regard de lecteur contemporain est bien loin de l'état d'esprit des lecteurs d'Eugène Sue, lorsque le feuilleton commence à paraître dans le Journal des Débats au milieu du XIXe siècle. Car, il faut poser cela tout de suite : ce roman-feuilleton a eu énormément de succès, a fait couler beaucoup d'encre, mais surtout a fait l'effet d'une bombe dans le milieu bourgeois bien pensant, faisant un scandale comparable à celui de la publication d'Indiana par George Sand quelques années auparavant. Preuve s'il en est, cette même George Sand fit partie des intellectuels qui défendirent Sue envers et contre tout.

Mais laissez-moi vous emmener au coeur des Mystères de Paris.

Tout commence par une sombre nuit. Une jeune fille, la Goualeuse, se fait agresser par un truand présumé, le Chourineur. Au coeur de la lutte, un homme surgit, tel Zorro et sauve la jeune fille. le Chourineur calmé, offre à boire à son maître et à la Goualeuse pour marquer son respect. Après quelques bières, les langues se délient face aux questionnements de l'homme, Rodolphe. Les deux personnages des bas-fonds parisiens se livrent et racontent leur enfance et ce qui a mené à leur triste sort d'aujourd'hui, voleur pour le Chourineur, prostituée pour la Goualeuse. Ému, Rodolphe décide d'entamer un vaste plan d'action pour récompenser ces misérables malgré eux, qui ont gardé une humanité et une sensibilité malgré les malheurs qui les ont accablé.

Aidé par sa grande fortune, car bien sûr c'est un prince déguisé très riche, il va aider ici et là des familles pauvres et méritantes, au cours d'aventures variées dans lesquelles on découvre les secrets toujours à point nommé.

Mais le roman et les personnages ne sont que des prétextes pour Sue qui a écrit une oeuvre sociale. Très proche des saint-simoniens et de tous les penseurs de son époque qui commencent à s'intéresser à la question ouvrière, Eugène Sue a développé un certain nombre de thèses qui faisaient débat depuis des années et que son roman a ravivé.

« Nous n'avons pas reculé devant les tableaux les plus hideusement vrais, pensant que, comme le feu, la vérité morale purifie tout.

Notre parole a trop peu de valeur, notre opinion trop peu d'autorité, pour que nous prétendions enseigner ou réformer.

Notre unique espoir est d'appeler l'attention des penseurs et des gens de bien sur de grandes misères sociales, dont on peut déplorer, mais non contester la réalité. »

Envoie-t-il un personnage en prison que hop ! On a des pages sur la réforme nécessaire du système pénitentiaire.

Un personnage est envoyé à la guillotine, son fils part sur la même pente criminelle, et hop ! Des paragraphes de développement sur les devoirs de la société envers ces enfants abandonnés à eux-mêmes et frappés d'une telle hérédité.

« Qu'il soit démontré qu'un criminel lègue presque toujours à son fils le germe d'une perversité précoce …

Fera t-on pour le salut de cette jeune âme ce que le médecin fait pour le corps lorsqu'il s'agit de lutter contre un vice héréditaire ?

Non … Au lieu de guérir ce malheureux, on le laissera se gangrener jusqu'à la mort. »

Rodolphe agit tel un prince vengeur, aussi bien d'une manière sporadique que plus organisée par une banque de prêt pour les pauvres, très ingénieuse (qui sera mise en place dans plusieurs villes après la publication du roman).

Malgré tout, la morale est assez terrible : « Il voyait, avec un mélange de joie et d'amertume indicibles, que chez certains hommes, l'habitude de la souffrance et du malheur est telle, que leur raison se refuse à admettre la possibilité d'un avenir qui serait, pour un grand nombre, une existence très peu enviable. » Les miséreux sont frappés par un destin contre lesquels ils ne peuvent rien, telle cette femme travailleuse dont le mari disperse les économies, et qui ne peut se permettre de payer un divorce : « La loi était trop chère pour les pauvres. » Et Rodolphe a parfois du mal à introduire ces bienfaits.

Mais surtout, il se fait la remarque suivante, que l'histoire de Rodolphe et la Goualeuse illustre toute entière :

« Enfin tout ce qu'il y a d'admirable dans la créature et dans la création se révèle à la fois et en un moment à son âme étonnée. A ce spectacle imposant, son esprit s'agrandit, son intelligence se développe, ses nobles instincts s'éveillent … Et c'est parce que son esprit s'est agrandi, parce que son intelligence s'est développée, parce que ses nobles instincts se sont éveillés … qu'ayant la conscience de sa dégradation première, elle ressent pour sa vie passée une douloureuse et incurable horreur, et comprend, hélas !, ainsi qu'elle le dit, qu'il est des souillures qui ne s'effacent jamais. »

Une histoire qui fait que je ne relirai probablement jamais ce roman, tellement j'étais fâchée contre l'auteur .. mais pour en savoir plus, il faudra que vous le lisiez vous-mêmes !

Et me direz-vous (et vous aurez raison), finalement, qu'est-ce qui a choqué à l'époque ?

Eh bien c'était la première fois qu'un roman abordait de telles questions, montrait de telles misères. Un peu comme un reportage d'aujourd'hui sur les conditions de vie d'un pays lointain dont on soupçonnait l'existence sans connaître la profondeur de leur misère. Sauf qu'ici, Sue a mis les bourgeois face à un monde qu'ils côtoient chaque jour. Et ceux-ci ne le croiront pas.

On le qualifie de « tableaux les plus révoltants, les moeurs les plus abjectes, le dialogue le plus hideux qui se puissent imaginer ? », on l'accuse de « travestir la vérité littéraire, de tracer un type menteur qui ne peut exister, qui n'existe pas. » Pour beaucoup, c'est l'enfant monstrueux de la presse quotidienne et de la littérature romantique, littérature de bagne ou d'échafaud qui excuse le vice et exalte les réprouvés. On lui reproche en effet d'excuser le crime, de le justifier, alors qu'il fait simplement état de faits et de quelques pistes pour améliorer les conditions de vie de la population.

Bref, on dit qu'il a créé un « un monde de fantaisie ».

Le roman est mis à l'Index en 1852.

On peut se demander si justement toute l'encre qu'il a fait couler n'est pas une preuve qu'il a touché sa cible. En donnant à voir « une misère exclue de la littérature », il s'inscrit pleinement dans les questionnements de l'époque, en particulier en jouant sur l'intérêt du public pour le paupérisme (nouvelle misère provenant de l'exploitation et de la faiblesse des salaires plutôt que du manque d'emploi) ou en discutant sur la réforme de l'administration pénitentiaire.

Et c'est ainsi que ce roman aura un grand succès, sera traduit dans de nombreux pays (même en hébreu biblique !), adapté même (The Mysteries of London, G. Reynolds, 1844, quoique avec un langage plus cru).

Mais aujourd'hui, il nous est difficile de le lire. du fait de la diffusion sous forme de feuilleton, Eugène a pu adapter son récit aux demandes des lecteurs, et au fur et à mesure que son audience grandit, les digressions sociétales sont de plus en plus longues. Ce dont il se défend parfois : « Les exigences de ce récit multiple, malheureusement trop varié dans son unité, nous forcent de passer incessamment d'un personnage à un autre afin de faire, autant qu'il est en nous, marcher et progresser l'intérêt général de l'oeuvre. »

En bref, un grand roman qu'il faut lire en se replaçant dans le contexte de l'époque, et se préparer à suivre les débats qui en fait un reflet très complet des problèmes les plus courants.

Ce livre fut par la suite la source de quantités de mystères urbains ; de nombreux motifs furent repris, dans la littérature policière par exemple. Léo Mallet lui a rendu un hommage ironique, près de 100 ans après avec Les Nouveaux Mystères de Paris.

Par son roman-feuilleton, Eugène Sue a enfin contribué au mythe moderne de Paris, au même titre que Balzac ou Baudelaire.
Lien : http://wp.me/p1Gkvs-169
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Quel grand livre ! Par la taille, certes, avec ses 1300 pages dans l'édition Bouquins, mais aussi et surtout par sa qualité ! Je me suis régalée tout du long et ne remercierai jamais assez Dixie pour ce conseil de lecture.

C'est d'abord l'histoire qui m'a séduite, en bonne grisette que je suis. La Goualeuse alias Fleur-de-Marie, le Chourineur, Monsieur Rodolphe alias le Prince de Gerolstein, la fantastique Louve, la gentille Rigolette, l'horrible notaire Ferrand, les effrayants Martial, les comiques concierges Pipolet... Je n'en connaissais aucun, n'ayant jamais étudié le feuilleton ou vu la série TV, et pourtant ils m'ont accompagnée toutes mes vacances.

Impatiente de découvrir la suite de leurs aventures après chaque interruption, j'ai souvent pensé aux grandes sagas d'Alexandre Dumas, et bien compris pourquoi les lecteurs du XIXè protestaient tant lorsque le Journal des Débats arrêtait le feuilleton pendant quelques jours.

Bien sûr, certains éléments sont assez datés. Je pense notamment aux princesses qui doivent absolument être différentes des autres femmes, plus éthérées, sans arrêt défaillantes, évanouies ou larmoyantes... Je pense aussi à la punition qu'imagine Eugène Sue pour remplacer la peine de mort : l'aveuglement, rien que ça. Ou même à ce paternalisme sous-jacent qui laisse entendre que les petits ne sont rien sans un puissant bienveillant pour veiller sur eux.

Cela dit, si ces éléments semblent datés, c'est bien parce que Les mystères de Paris sont un miroir fidèle de la France du milieu du XIXè, particulièrement de celle des classes pauvres. Un miroir, et même au-delà, un plaidoyer pour une réforme de la société dans son ensemble. Travailleurs misérables, prisonniers, malades ou aliénés, orphelins, malheureux vertueux, Eugène Sue a étudié leurs conditions de vie et fait des propositions concrètes d'amélioration, comme cette banque des pauvres, ces fermes modèles ou ce droit au divorce pour les femmes bafouées.

Pas étonnant que le livre ait fait débat, dans les cafés comme à l'Assemblée Nationale, tant son message est révolutionnaire et moderne : il défend des valeurs d'humanisme, de tolérance, de non-racisme, de justice sociale, de droits des femmes et des faibles. Dommage qu'il ne soit plus beaucoup lu aujourd'hui, car il est immensément riche et captivant. J'espère donner envie à d'autres...

Challenge XIX 6/xx et challenge Pavés 2015/2016 : 2 et 3/xx
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Il existe deux types de lecteurs : ceux qui ont lu les Mystères de Paris et les autres.
Cette oeuvre est bien plus qu'un simple livre, qu'une aventure que la quintessence du roman feuilleton. Cette chronique est une certaine manière de voir la société parisienne du XIXème siècle. Bien vite l'objet est dépassé. Non, il n'est pas simplement question des classes dangereuses chères à Louis Chevalier. le monde ouvrier (de toute époque) trouve ici un manifeste en faveur de sa réhabilitation. Car Eugène Sue livre certes une histoire unique mais celle-ci laisse progressivement la place à un pamphlet. Des nombreuses idées qu'il développe, certaines ont vu le jour et d'autres non. Celles-là restent toutefois solidement ancrées dans les représentations des temps actuels (condamner les méchants, récompenser les bons citoyen pour ne citer que cette arlésienne). Ne serait-ce que pour les leçons de morale, l'oeuvre conserve une actualité troublante, dérangeante même.
Le scénario est certes long mais il se suit avec plaisir. Certains passages sont certes un peu ardus et guère passionnants, mais ils sont bien vite oubliés, sans doute car ils sont peu nombreux. La modernité du style de Sue étonne encore. Quelle prétention (et quelle leçon) pour le lecteur contemporain que de découvrir un style qui emprunte moins à cette manie du détail (chère au couple Dumas – Naquet) qu'aux prémices du thriller : les derniers chapitres (bien plus que les premiers bien plus souvent cités pour leur modernité) sont difficiles à quitter.
Les rebondissements, surprises sont légions. Les personnages sont tous attachants et ont marqué la littérature (Rodolphe, Fleur-de-Marie). Ceux-ci sont nombreux mais étrangement ils semblent tous graviter au sein d'un même cycle. de Paris il n'est pas vraiment question. Certes la ville sert d'écrin, l'emprise des rues, des murs, des maisons, des quartiers est omniprésente, mais elle n'occulte jamais le sujet principal. Celui-ci est et demeure le mode de vie des classes pauvres.
Le nombre de pages, l'aspect d'un apparent monolithique ne doivent aujourd'hui être compris que comme autant de défis et donc autant d'invitations à découvrir un oeuvre majeure de la littérature française.
Lien : http://kriticon.over-blog.co..
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Au coeur de la nuit dans les rues de Paris, le prince Rodolphe de Gérolstein, grimé en homme du peuple, tire Fleur de Marie, une jeune prostitué, des mains brutales du "chourineur".
Pourtant Fleur de Marie et le chourineur se liant avec Rodolphe, lui racontent dans une taverne, où ils échouent tous trois, leur triste destinée. le meurtre et la prostitution ne sont que les tristes conséquences d'une enfance abandonnée à la misère.
Rodolphe qui, durant un moment de folie, a lui-même menacé son père de son épée, décide de venir en aide à ses deux nouveaux amis. Il les aidera à sortir de ce milieu qui les avilit.
Pour cela il devra affronter "la chouette" à qui Fleur de Marie fût confiée enfant et "le maître d'école" son associé maudit. Aidé du "chourineur", auquel il offre la rédemption, il vole au secours des pauvres et des opprimés qu'il rencontre au gré de ses errances dans Paris. Il châtiera Ferrand le notaire corrompu, il sauvera François-Germain le fiancé honnête de "Rigolette", une amie de Fleur Marie, du déshonneur et de la prison, il empêchera Clémence d'Harville de sombrer dans les affres de l'adultère...
Au fil de ces aventures et de ces péripéties un mystère semble s'éclaircir. Qui est vraiment Fleur de Marie ? et que deviendront tous les protagonistes de ce grand roman ?
Cette grande fresque littéraire, imposant feuilleton initialement paru dans le "journal des débats" en 1842 et 1843 est un roman populaire d'aventures passionnant, mettant en scène les apaches de Paris avec leur langage et leurs moeurs, mais aussi tout le petit monde évoluant dans les rues de la capitale. Eugène Sue nous offre là une irremplaçable carte postale, peut-être un peu retouchée, d'un Paris "mystérieux et inconnu, dévoilé dans ses recoins les plus secrets".
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critiques presse (3)
LeMonde
26 décembre 2023
Par-delà le temps, la Lena Shanks de McDowell et « la Chouette » borgne et cupide de Sue, « le chourineur » et Charlotte Kegoe, la « pugiliste saphique », donnent une incarnation, dans son sublime feuilletonesque, à la réalité de la violence sociale.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Marianne_
09 octobre 2023
La fresque du romancier français, publiée en feuilleton entre 1842 et 1843, est à l'origine d'un puissant imaginaire social et politique. Elle fut de surcroît saluée en son temps par Victor Hugo, George Sand et Alexandre Dumas.
Lire la critique sur le site : Marianne_
LigneClaire
02 avril 2021
Au dessin Miriam Gambino est dans un registre classique pour ce style d’album, un soupçon manga sur un fond film d’animation. Le scénario est écrit par Eric Summer, bon enfant et sympa.
Lire la critique sur le site : LigneClaire
Citations et extraits (46) Voir plus Ajouter une citation
La perversité contagieuse de vos geôles est tellement connue, est si justement redoutée, que celui qui en sort est partout un sujet de mépris, d’aversion et d’épouvante : serait-il vingt fois homme de bien, il ne trouvera presque nulle part de l’occupation.
De plus, votre surveillance flétrissante l’exile dans de petites localités où ses antécédents doivent être immédiatement connus, et où il n’aura aucun moyen d’exercer les industries exceptionnelles souvent imposées aux détenus par les fermiers de travail des maisons centrales.
(...)
La condition d’un libéré est donc beaucoup plus fâcheuse, plus pénible, plus difficile qu’elle ne l’était avant sa première faute : il marche entouré d’entraves, d’écueils ; il lui faut braver la répulsion, les dédains, souvent même la plus profonde misère…
Et s’il succombe à toutes ces chances, effrayantes de criminalité, et s’il commet un second crime, vous vous montrez mille fois plus sévères envers lui que pour sa première faute…
Cela est injuste… car c’est presque toujours la nécessité que vous lui faites qui le conduit à un second crime.
Oui, car il est démontré qu’au lieu de corriger, votre système pénitentiaire déprave.
Au lieu d’améliorer, il empire…
Au lieu de guérir de légères affections morales, il les rend incurables.
Votre aggravation de peine, impitoyablement appliquée à la récidive, est donc inique, barbare, puisque cette récidive est, pour ainsi dire, une conséquence forcée de vos institutions pénales.
Le terrible châtiment qui frappe les récidivistes serait juste et logique, si vos prisons moralisaient, épuraient les détenus, et si à l’expiration de leur peine une bonne conduite leur était, sinon facile, du moins généralement possible…
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Un dernier mot, monsieur.
Comme vous avez été de moitié dans mon œuvre par l’immense publicité que vous lui avez donnée, je crois pouvoir vous instruire d’un résultat dont vous vous féliciterez, je l’espère, avec moi. On m’écrit de Bordeaux et de Lyon que plusieurs personnes riches et compatissantes s’occupent de réaliser dans ces deux villes mon projet d’une banque de prêts gratuits pour les travailleurs sans ouvrage, et quelqu’un qui fait ici l’usage le plus généreux et le plus éclairé d’une immense fortune m’a donné, au sujet d’une fondation pareille pour Paris, les plus encourageantes espérances.
Souhaitons maintenant, monsieur, qu’un législateur véritablement ami du peuple prenne en main les questions relatives :
« À l’établissement d’avocats des pauvres ;
« À l’abaissement du taux exorbitant de l’intérêt prélevé par le mont-de-piété ;
« À la tutelle préservatrice exercée par l’État sur les enfants des suppliciés et des condamnés à perpétuité ;
« À la réforme du code pénal à l’endroit des abus de confiance. »
Et peut-être ce livre, attaqué récemment encore avec tant d’amertume et de violence, aura du moins produit quelques bons résultats.
Veuillez encore agréer, monsieur, l’expression de ma vive gratitude et l’assurance de mes sentiments les plus dévoués.
EUGÈNE SUE
Paris, ce 15 octobre 1843
Lettre à Monsieur le Rédacteur en Chef du Journal des débats
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Tu es laid... sois terrible : on oubliera ta laideur. Tu es vieux... sois énergique : on oubliera ton âge. Tu es repoussant... sois menaçant. Puisque tu ne peux être le noble cheval qui hennit fièrement au milieu de ses cavales amoureuses... ne sois pas du moins le stupide chameau qui plie les genoux et tend le dos... sois tigre... un vieux tigre qui rugit au milieu du carnage a encore sa beauté... sa tigresse lui répond du fond du désert.
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Étrange, fatal symbole ! On représente la justice aveugle, portant d’une main un glaive pour punir, de l’autre des balances où se pèsent l’accusation et la défense.
Ceci n’est pas l’image de la justice.
C’est l’image de la loi, ou plutôt de l’homme qui condamne ou absout selon sa conscience.
La JUSTICE tiendrait d’une main une épée, de l’autre une couronne ; l’une pour frapper les méchants, l’autre pour récompenser les bons.
Le peuple verrait alors que, s’il est de terribles châtiments pour le mal, il est d’éclatants triomphes pour le bien ; tandis qu’à cette heure, dans son naïf et rude bon sens, il cherche en vain le pendant des tribunaux, des geôles, des galères et des échafauds.
Le peuple voit bien une justice criminelle (sic), composée d’hommes fermes, intègres, éclairés, toujours occupés à rechercher, à découvrir, à punir des scélérats.
Il ne voit pas de justice vertueuse, composée d’hommes fermes, intègres, éclairés, toujours occupés à rechercher, à récompenser les gens de bien.
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« Qu'il soit démontré qu'un criminel lègue presque toujours à son fils le germe d'une perversité précoce …

Fera t-on pour le salut de cette jeune âme ce que le médecin fait pour le corps lorsqu'il s'agit de lutter contre un vice héréditaire ?

Non … Au lieu de guérir ce malheureux, on le laissera se gangrener jusqu'à la mort. »
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