AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Francis Gorgé (Compositeur)Jacques Demarcq (Narrateur)Benoît Casas (Narrateur)Jeanne Duprat (Narrateur)Frédéric Folmer (Narrateur)
EAN : 9782913549241
337 pages
Nous (09/06/2008)
5/5   2 notes
Résumé :

Jacques Demarcq, traducteur d'oiseaux et de littérature, interroge les limites du sens, et celles de l'humanité. Il fallait trouver une échappatoire à l'anthropocentrisme régnangnant. Pourquoi pas les oiseaux ? La légèreté de leur intelligence face aux événements, leur refus de croire au ciel qu'ils connaissent trop, et ce manque d'entêtement qui les fait ne pas tenir en place, en page, en cage...
>Voir plus
Que lire après Les Zozios (1CD audio)Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
"Livre bouquin multiple" dit son auteur, ajoutant que ces Zozios appartiennent à leurs lecteurs. Autant dire : approprions-les nous, lançons le jeu.
Qu'est-ce donc que Les Zozios ? Il ne s'agit pas, loin s'en faut, d'un simple recueil de portraits d'oiseaux. C'est un livre total, le «paradis du zoziolisme», une somme, une oeuvre, le «chef-d'oeuvre» d'un compagnon poète. Car que fait le poète ? Jacques Demarcq répond : le poète suppose, mélange, exagère, invente sans y croire, se méfiant plus que tout des mots, jusqu'à ce qu'une vérité le rattrape.» Dans les Zozios, la variété des formes, et des formes entrecroisées, est confondante. Certaines pages tiennent du journal, d'autres du récit, du dialogue, du conte, de l'essai. Mais toujours, le poète est là, dans cette «pouhésie qui tourneboule». Tout cela brassé et construit, nourri de littérature, de voyages, d'observations, d'histoire, de philosophie, de linguistique.
Proses et poèmes alternent, et Demarcq excelle dans le grand écart entre les phrases classiques et les propositions éclatées, entre les narrations linéaires et les explosions typographiques. Grand écart que l'on retrouve entre les mots les plus anciens et les plus neufs, accueillis sans vergogne, avec de savants recours à plusieurs langues étrangères. Toniques télescopages.
Voilà, d'évidence, un grand oeuvre (à chacun son Grabinoulor), long chantier abouti, fruit d'un considérable travail, d'une érudition impressionnante, mais invisible travail car comme Degas Demarcq sait effacer les traces du travail.
Rien de gratuit, de facile, de relâché ni d'approximatif dans ces pages soutenues par une maîtrise remarquable du sujet initial, les oiseaux, dont Jacques Demarcq semble tout savoir, sans pourtant se prétendre ornithologue, chants et moeurs, habitats, etc., mais on n'ignore pas que la connaissance n'est innée pour personne et que nous avons donc à saluer ici le travail opiniâtre de vingt années — le travail mais aussi la jubilation qui l'accompagne, une jubilation éclatante, dans chaque page. L'hirondelle, on la voit, la tourterelle on l'entend. Et plus de cent autres, ce merle par exemple, qui « picole » un raisin. On en saisit jusqu'aux caractères, oiseaux dans tous leurs lieux et leurs états, de la nature au zoo, de la volière à la casserole.
On l'a compris, l'intérêt et la curiosité de Jacques Demarcq ne s'arrêtent pas aux oiseaux, sa culture est universelle, qui force d'autant plus le respect qu'elle ne se prend jamais au sérieux, que jamais elle ne pontifie — on appréciera les deux pages où l'auteur s'autocritique plaisamment.
Car c'est drôle, irrésistiblement drôle, inventif, fantaisiste (une fantaisie qui plie et tord la langue), étonnant, déconcertant, volontiers coquin et toujours malin : «Jamais je n'ai rêvé poème plus remuant» avoue-t-il. Et : «J'écris pour voler dans les plumes, davantage que pour fixer». C'est vrai, Les Zozios ébouriffent leur lecteur. Et Demarcq de plaider : «La rime est un outil à bousculer la langue, à lui faire violence, peut-être à faire vaciller les certitudes de la pensée.»
Si écrire est traduire, traduire est aussi écrire et Demarcq traduit les oiseaux en littérature traduitcuicui les oiseaux et bien davantage, on l'a dit: familier de Baudelaire, de Mallarmé, de Cummings, de Leiris (Demarcq serre ses gloses), j'en passe, et d'innombrables, il consacre plus de soixante textes à des évocations truffées de références (où l'on apprécie donc un insatiable lecteur), et non pas des pastiches, saluant autant d'artistes ou de personnalités, de" the stein" à "la rouzeau" en passant par "l'aristophane", "le bashô", "il giotto" ou "un shakespeare".
Plus qu'une langue, c'est un langage que fabrique, unique, Jacques Demarcq, absolument neuf, audacieux, et accordé à son propos. Assonances, allitérations, rimes, jeux de mots (plutôt que bons mots), licences typographiques, onomatopées, néologismes, mots-valises, comme ajoutant un supplément au dictionnaire, composant le Demarcq après le Littré, le Larousse, Le Robert. Joueur impénitent, ce Demarcq fait le Jacques (parenthèse ici pour dire que le "Robert" signale que le mot "jacques" désigne un «oiseau à comportement vif, un peu fou» tel le geai ou, plus rarement, le corbeau, le hibou et la chouette) ; Jacques s'amuse encore avec les règles de la versification, parfaitement connues de lui, s'appliquant à "désailer" le texte. Jeu jusque dans les pages essayistes : incorrigible Demarcq qui ne peut pas s'empêcher, il y a du clown chez lui et, sans doute, une volonté farouche de ne pas s'enfermer, de ne pas se laisser enfermer : «Je délire, ou je fais de la poésie, ce qui se vaut». Et: «Toute écriture vraie, tout geste artistique est une affirmation de liberté.»
On n'enfermera donc pas ce drôle d'oiseau Demarcq dans les cages de la poésie sonore, visuelle, concrète ni d'action ; il les chahute toutes, notre feuilletoniste d'histoire littéraire de "Dans la lune". "Les Zozios" (certes il y a un CD à la fin de ce livre de 337 pages) ne sont pas qu'à écouter. Certaines graphies ne peuvent être appréciées qu'à l'oeil. Il faut donc regarder ces Zozios, les lire, les écouter, plus sûrement les reregarder, les relire, les réécouter.
J'ajouterai ici, et foin des chapelles et autres coteries (j'ai failli dire conneries), pour reprendre une idée de Jean-Pascal Dubost (sans j'espère le trahir même si nos mots ne sont pas les mêmes), qu'en choisissant un sujet emblématique du lyrisme le plus conformiste, à savoir les oiseaux, Jacques Demarcq, par son, par ses écritures, secoue et renouvelle le lyrisme, apportant une réponse éclatante à l'une des questions les plus aiguës qui se posent à la poésie d'aujourd'hui. le lyrisme, pour peu qu'on le bouscule et qu'on n'appelle pas n'importe quoi lyrisme, a encore de beaux jours, des jours neufs devant lui.
Gonflé, Demarcq, car si un livre brille par son intelligence c'est bien Les Zozios dans lequel il cite cette phrase de Proust : «Chaque jour j'attache moins de prix à l'intelligence». Comprenons bien, alors, que ce livre n'est pas fait que d'intelligence même s'il en déborde, il y a là de l'astuce, de la rouerie, du jeu, de l'invention et de la fantaisie (on l'a dit), des surprises, des chausse-trapes, des images (on citera «les photographes d'antan plongeant la tête sous un jupon de veuve»), en un mot du talent, et un sacré talent.
Commenter  J’apprécie          10
Commenter  J’apprécie          00

Citations et extraits (1) Ajouter une citation
ça s’actualise avec culot
ça onomatopète
ça synonymise
ça analogise
ça coupe-colle
ça détonne étonne étourneaux ritournelles
ça jubile
ça assonne et ça sonne
ça chansonne
ça sansonne
ça sansonnette
ça sonnette
ça baudelairise ça mallarMuse
ça rime et dérime ça déride ça pouffe fait pouffer
ça abrège
ça copule
ça côche
ça pornérotise
ça bondit rebondit
ça vole s’envole
ça converse
ça colloque colloque des oiseaux
ça argote langue verte vert jardin
ça gromotte ça lolurote ça débagote ça asticote ça chipote ça tricote ça tripote ça tarabiscote ça margotte ça pisote ça frigulote ça fringote ça gringotte ça truisotte ça chuchote ça zoziotte hot...
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Jacques Demarcq (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jacques Demarcq
Avec Antonella Anedda, Michel Deguy, Jacques Demarcq, Benoît Casas, Andrea Inglese, Sophie Loizeau, Valerio Magrelli, Claude Mouchard, Guido Mazzoni & Martin Rueff
Andrea Zanzotto est né il y a cent ans et mort il y a dix. Ce double anniversaire, marqué par d'importantes publications posthumes, Erratici, disperse e altre poésie (1937-2011 – Francesco Carbognin éd., Mondadori, 2021), Traduzioni, trapianti, imitazioni (Giuseppe Sandri éd., Mondadori, 2021) est l'occasion de nombreuses célébrations en Italie comme en France. Dans le cadre d'un colloque de trois jours, « Zanzotto europeo, la sua poesia di movimento » (25-27 novembre 2021), organisé par Giorgia Bongiorno, Laura Toppan, Andrea Cortellessa et Martin Rueff, la Maison de la Poésie accueille cette soirée exceptionnelle. Des poètes de France et d'Italie évoqueront la figure d'Andrea Zanzotto, l'importance de son oeuvre, la fécondité de son héritage.
Le programme du colloque est consultable sur le site de l'Institut Culturel Italien
À lire – Andrea Zanzotto, Venise, peut-être, trad. de l'italien par Jacques Demarcq et Martin Rueff, éd. NOUS, 2021.
+ Lire la suite
autres livres classés : poésieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (5) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1219 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *}