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EAN : 9782070301577
123 pages
Gallimard (30/11/1966)
3.87/5   47 notes
Résumé :
Et où que j'aille, dans l'univers entier, Je rencontre toujours, Hors de moi comme en moi, L'irremplissable Vide, L'inconquérable Rien.
Que lire après Les poésies de A.O. BarnaboothVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Il y a ce paradoxe majeur dans "les poésies d'A.O. B." à savoir qu'elles sont écrites par le double imaginaire du poète mais composées de souvenirs de voyages très personnels, de vécu débordant la à la forme et la métrique plus que personnelle... paradoxe irréductible donc où se trace un paysage à la fois cosmopolite et intime.
De cette expérience de dédoublement, de l'exil perpétuel mais voulu décrit dans les vers, de ce sentiment de rejet par la condition financière très favorisée de Barnabooth (et l'auteur) ressort une fort sentiment de solitude.
Impossible de démêler un quelconque vrai d'un visiblement faux. Tout est sincère et signé de vent.
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Écrits et publiés pour la première fois en 1908 sous le titre étrange de "Poèmes par un riche amateur", "Les poèmes de A.O Barnebooth" - hétéronyme de Valéry Larbaud - (Barnebooth est la contraction de la ville de de Barnes, située près de Londres et de Booth, nom d'une chaîne de pharmacie anglaise) restent une oeuvre assez particulière.

A.O Barnebooth, nous dit Valéry Larbaud, est un riche rentier, un jeune homme au caractère volontiers irrévérencieux, cynique. Érudit polyglotte, il est aussi un grand voyageur. Ses poèmes retracent les nombreux voyages qu'il a faits, ils sont les souvenirs, les rêveries et les aspirations de son auteur. Sous sa plume, il décrit une réalité d'apparat, sa vie fastueuse mais qui ne va pas sans un certain désenchantement, une idéalisation qui compose avec la gravité, une intimité qui touche à l'universel, au doute métaphysique. Les poèmes sont surtout la marque d'un rejet des classes dominantes de l'époque dont son auteur (Valéry Larbaud également) est issu, une vive condamnation de cette hérédité d'esprit et de moeurs, de cette élite refermée sur elle-même.

Tout au long des pages, des images se succèdent qui mêlent présent et souvenirs, réalité prosaïque et grandeur historique. Les textes sont pleins d'exaltation, de lyrisme mais aussi d'ironie, de cynisme. Outre la très belle écriture, c'est sans doute ce refus chez le poète des rêves trompeurs que procurent l'argent, des convenances d'une élite refermée sur elle-même, ce voyage fait jusqu'au bout de soi, de sa condition d'homme, qui rend ce recueil des Poèmes de A.O Barnebooth si singulier et si attachant. 
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Valéry Larbaud en tant que poète peut-être immédiatement comparé à Thomas Chatterton, en particulier pour sa précocité avec d'excellents premiers vers dès sept ans, également pour sa démarche artistique, en créant un faux personnage littéraire, comme ce double imaginaire, héros fantasmagorique de son recueil de voyage : les poésies de A.O Barnaboth, enfin, pour la critique caustique du monde dans lequel il évolue, celui des riches occidentaux. La poésie de Larbaud ou Barnaboth est géniale, tellement le jeu de mimétisme patronymique et poétique est subtil, s'entrelaçant délicieusement pour troubler le lecteur dans un labyrinthe inextricable telle une odyssée homérique sans fin. Pour bien appréhender la poésie de Larbaud, il faut s'imaginer l'homme, dandy fantasque, aux goûts raffinés, mais sans la prétention et le mépris de sa classe envers les âmes simples. Car l'auteur est un être ouvert, aux sentiments pétris d'un cosmopolitisme sincère, désireux de connaître le monde et les cultures qui ne sont pas les siennes. Cet amoureux des voyages, sur des paquebots de luxe, cultivé, polyglotte, se veut aussi le chantre d'une révolution individuelle, sorte d'anarchie bourgeoise capricieuse pour un monde meilleur, de progrès et d'universalité, mais attention, ne nous leurrons pas, Larbaud alias Barnaboth, reste marqué par sa classe sociale, offrant dans ses vers transfigurés son amour de l'art poétique et des autres grands noms de la rhétorique versifiée, ainsi qu'un désabusement décadent sur la société qui l'entoure, l'entrainant dans une métaphysique recherche de lui-même, énigme insoluble d'une finalité existentielle plus générale sur l'avenir de l'homme, restée sûrement sans réponse et trouvant un ultime réconfort empreint d'exotisme dans ses périples aux quatre coins du monde.
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Borborygmes et voyages exotiques, les mots de Larbaud, simples, nus et divers, se lisent avec un sourire ou un regret, pas plus, modestes évocations d'un monde en dérive et d'un homme qui s'y attache. Cendras sans aventure ou Appolinaire sans extravagance, Larbaud coule de source, photographe des petits moments et des petits êtres, une mendiante qui danse, quelque part en Espagne, un femme russe qui porte des seaux d'eau, ou un fumoir anglais qui met dans la tête une chanson de François Morel. Ne demandons rien de plus à la poésie. Ainsi, elle suffit, loin de son ordinaire prétention à dire plus qu'elle ne peut.
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Pour moi, Valéry Larbaud (1881-1957) n'était jusqu'ici qu'un nom: je ne connaissais rien de sa vie, ni de son oeuvre. Je suis tombé par hasard sur l'une de ses oeuvres et, du coup, je me suis informé à son sujet. Ce riche héritier très doué a vécu agréablement, voyageant beaucoup, avant d'être terrassé par une hémiplégie et par l'aphasie. Avant cet accident de santé, il fut un auteur et traducteur prolifique.
Le présent recueil de poèmes a été écrit sous un pseudonyme, mais A. O. Barnabooth est une sorte d'alter ego de Larbaud. J'ai découvert ces quelques poésies, très nettement influencés par le thème des voyages et de l'exotisme. Certaines m'ont bien plu. Valéry Larbaud me semble être à mi-chemin entre les poètes du XIXème siècle et ceux du XXème siècle (y compris le génial Apollinaire). Une belle découverte.

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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Ode

Prête-moi ton grand bruit, ta grande allure si douce,
Ton glissement nocturne à travers l'Europe illuminée,
Ô train de luxe ! et l'angoissante musique
Qui bruit le long de tes couloirs de cuir doré,
Tandis que derrière les portes laquées, aux loquets de cuivre lourd,
Dorment les millionnaires.
Je parcours en chantonnant tes couloirs
Et je suis ta course vers Vienne et Budapesth,
Mêlant ma voix à tes cent mille voix,
Ô Harmonika-Zug !
J'ai senti pour la première fois toute la douceur de vivre,
Dans une cabine du Nord-Express, entre Wirballen et Pskow .
On glissait à travers des prairies où des bergers,
Au pied de groupes de grands arbres pareils à des collines,
Etaient vêtus de peaux de moutons crues et sales…
(huit heures du matin en automne, et la belle cantatrice
Aux yeux violets chantait dans la cabine à côté.)
Et vous, grandes places à travers lesquelles j'ai vu passer la Sibérie et les monts du Samnium ,
La Castille âpre et sans fleurs, et la mer de Marmara sous une pluie tiède !
Prêtez-moi, ô Orient-Express, Sud-Brenner-Bahn , prêtez-moi
Vos miraculeux bruits sourds et
Vos vibrantes voix de chanterelle ;
Prêtez-moi la respiration légère et facile
Des locomotives hautes et minces, aux mouvements
Si aisés, les locomotives des rapides,
Précédant sans effort quatre wagons jaunes à lettres d'or
Dans les solitudes montagnardes de la Serbie,
Et, plus loin, à travers la Bulgarie pleine de roses…
Ah ! il faut que ces bruits et que ce mouvement
Entrent dans mes poèmes et disent
Pour moi ma vie indicible, ma vie
D’enfant qui ne veut rien savoir, sinon
Espérer éternellement des choses vagues.
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SCHEVENINGUE, MORTE-SAISON

Dans le clair petit bar aux meubles bien cirés,
Nous avons longuement bu des boissons anglaises;
C'était intime et chaud sous les rideaux tirés.
Dehors le vent de mer faisait trembler les chaises.

On eût dit un fumoir de navire ou de train:
J'avais le cœur serré comme quand on voyage;
J'étais tout attendri, j'étais doux et lointain;
J'étais comme un enfant plein d'angoisse et très sage.

Cependant, tout était si calme autour de nous!
Des gens, près du comptoir, faisaient des confidences.
Oh, comme on est petit, comme on est à genoux,
Certains soirs, vous sentant si près, ô flots immenses!
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Des villages couleur de la terre et de vieilles forteresses;
Ou bien l'approche d'un port russe, annoncé
Par des milliers de courges vertes flottant sur l'eau brillante
(Comme I'Ausonie parfois, plus discrètement,
S'annonce au navigateur par un fiaschetto vide que berce
Le flot tyrrhénien).

Ob, les levers du soleil d'été sur les mers retentissantes
Et le silence des rivages vus au loin!

Mais laissez-moi m'attendrir un peu sur mon enfance,
Me revoir à quinze ans dans les rues d'Odessa;
Laissez-moi pleurer dans la nuit sans savoir pourquoi,
Et chanter dans le vent ces vers :
"Ya que para mi no vives ",
Sur un air de valse entendu je ne sais où, un air des tziganes,
Chanter en sanglotant sur un air de tziganes!
Le souvenir me fait revoir des pays éblouissants :
Des rades pleines de navires et des ports bleus
Bordés de quais plantés de palmiers géants et de
figuiers
Gigantesques, pareils à des tentes de peau pendues aux
cieux;
Et d'immenses forêts à demi submergées,
Et les paseos ombragés de Barcelone;
Des dômes d'argent et de cristal en plein azur;
Et la Petite-Cythère, creuse comme une coupe,
Ou, le long des ruisseaux les plus calmes du monde,
Se jouent toutes les pastorales du vieux temps;
Et ces iles grecques qui flottent sur la mer...
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L'INNOMMABLE

Quand je serai mort, quand je serai de nos chers morts
(Au moins, me donnerez-vous votre souvenir, passants
Qui m'avez coudoyé si souvent dans vos rues ?)
Restera-t-il dans ces poèmes quelques images
De tant de pays, de tant de regards, et de tous ces
visages
Entrevus brusquement dans la foule mouvante ?
J'ai marché parmi vous, me garant des voitures
Comme vous, et m'arrêtant comme vous aux devantures.
J'ai fait avec mes yeux des compliments aux Dames ;
J'ai marché, joyeux, vers les plaisirs et vers la gloire,
Croyant dans mon cher cœur que c'était arrivé ;
J'ai marché dans le troupeau avec délices,
Car nous sommes du troupeau, moi et mes aspirations.
Et si je suis un peu différent, hélas, de vous tous,
C'est parce que je vois,
Ici, au milieu de vous, comme une apparition divine,
Au-devant de laquelle je m'élance pour en être frôlé,
Honnie, méconnue, exilée,
Dix fois mystérieuse,
La Beauté Invisible.


p.79
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L'Eterna Volutta

[...]
Vous voyez en moi un homme
Que le sentiment de l'injustice sociale
Et de la misère du monde
A rendu complètement fou !
Ah ! Je suis amoureux du mal !
Je voudrais l'étreindre et m'identifier à lui ;
Je voudrais le porter dans mes bras comme le berger porte
L'agneau nouveau-né encore gluant...
Donnez-moi la vue de toutes les souffrances,
Donnez-moi le spectacle de la beauté outragée,
De toutes les actions honteuses et de toutes les pensées viles
(Je veux moi-même créer plus de douleur encore :
Je veux souffler la haine comme un bûcher).
Je veux baiser le mépris à pleines lèvres ;
Allez dire à la Honte que je meurs d'amour pour elle ;
Je veux me plonger dans l'infamie
Comme dans un lit très doux ;
Je veux faire tout ce qui est justement défendu ;
Je veux être abreuvé de dérision et de ridicule ;
Je veux être le plus ignoble des hommes.
Que le vice m'appartienne,
Que la dépravation soit mon domaine !
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Videos de Valery Larbaud (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Valery Larbaud
[Rentrée littéraire 2022]
Entre 1942 et 1944, des milliers d'enfants juifs, rendus orphelins par la déportation de leurs parents, ont été séquestrés par le gouvernement de Vichy. Maintenus dans un sort indécis, leurs noms transmis aux préfectures, ils étaient à la merci des prochaines rafles.
Parmi eux, un groupe de petites filles. Mireille, Jacqueline, Henriette, Andrée, Jeanne et Rose sont menées de camps d'internement en foyers d'accueil, de Beaune-la-Rolande à Paris. Cloé Korman cherche à savoir qui étaient ces enfants, ces trois cousines de son père qu'elle aurait dû connaître si elles n'avaient été assassinées, et leurs amies.
C'est le récit des traces concrètes de Vichy dans la France d'aujourd'hui. Mais aussi celui du génie de l'enfance, du tremblement des possibles. Des formes de la révolte.
Cloé Korman est née en 1983 à Paris. Son premier roman, "Les Hommes-couleurs" (Seuil, 2010), a été récompensé par le prix du Livre Inter et le prix Valery-Larbaud. En 2013, elle a publié, toujours au Seuil, "Les Saisons de Louveplaine", puis "Midi" en 2018, et "Tu ressembles à une juive" en 2020.
Lire les premières pages : https://bit.ly/3wVw2Tu
Découvrir tous les romans de la rentrée littéraire des éditions du Seuil : https://bit.ly/3NQpKeq
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