L'un de mes exercices favoris pour juger de la crédibilité d'un auteur est de lire l'une de ses anciennes parutions, afin de confronter sa vision d'alors avec la réalité d'aujourd'hui. Cela revêt pour moi d'autant plus d'intérêt que les thèmes abordés demeurent actuels : les effets pervers de la mondialisation et de la monnaie unique, l'importance de la démographie et de l'adaptation des règles économiques aux particularités d'un pays, et surtout l'importance de la Nation dans les choix politiques et la cohésion nationale.
Emmanuel Todd a le mérite d'embrasser ces problématiques par une vision large. Il n'est pas question que d'économie, mais de sociologie, d'histoire, où l'auteur apporte de nombreuses références littéraires pour étayer sa pensée.
J'ai été frappé par le bon sens d'
Emmanuel Todd, la cohérence de son propos tout au long des pages, et n'ai relevé que de très rares points où il a pu faire erreur (avec, reconnaissons-le, 25 ans d'avance puisque ce livre date de 1999). L'exemple étant le rachat de la dette publique par la monétisation, chose possible uniquement au niveau européen et non national (puisque le règlement de l'UE l'interdit). A l'inverse, la quasi-totalité de son analyse se révèle juste, un quart de siècle plus tard. E. Todd annonce la crise démocratique avec l'émergence les laissés pour compte de la mondialisation que sont les classes populaires d'abord et les classes intermédiaires ensuite. Il dénonce aussi « la pensée zéro », soit la soumission aux évènements plutôt que le choix de tracer son propre destin par des élites ‘parisiennes' qui représentent les 20% de la population la plus diplômée (mais dispose de 50% du capital et forme le plus gros des consommateurs).
Ce livre est tellement dense qu'il est difficile d'en faire un résumé en quelques lignes, mais l'on peut retenir que la pensée de l'auteur s'affranchit de la pensée unique à propos du destin de l'Europe et surtout de la France. A part quelques règlements de compte avec les BHL,
Alain Minc et autres incarnations du zéro de la pensée (avis que je partage).Son ton demeure objectif, pour qui, comme moi, constate que la mondialisation a placé l'homme au service de l'économie que si le capitalisme a permis une progression jamais vue dans l'amélioration des conditions de vie des populations qui s'y sont converties, les dérives récentes nous mènent tous à la catastrophe.
Cet ouvrage est absolument recommandé pour qui souhaite avoir une vision alternative et pertinente, argumentée, de la mondialisation et de la nécessité du retour de la Nation pour combattre ses excès.
388 pages de cours, limpides et riches d'enseignements vous attendent.. 😉