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EAN : 9782020296953
103 pages
Seuil (02/06/1996)
3.73/5   30 notes
Résumé :
Pardonner ? Dans l'honneur et la dignité

" Le pardon est mort dans les camps de la mort. "

Qui a bien pu écrire une telle phrase ? Un philosophe, un Juif, un Français, un moraliste ? Oui, mais surtout un survivant, un survivant mystérieusement sommé de protester sans relâche contre l'indifférence. Sous le titre L'Imprescriptible, se trouvent en effet réunis deux textes : Pardonner ? et Dans l'honneur et la dignité, parus respectivemen... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
"Si nous cessions d'y penser, (déportés, fusillés, massacrés, torturés, piétinés, offensés), nous achèverions de les exterminer, et ils seraient anéantis définitivement."
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Relecture

Ce livre contient deux textes : "Pardonner" (1971) et "Dans l'honneur et la dignité" (1948) - deux textes assez courts au sujet de l'après de la Shoah et de l'Occupation. Deux, disons, "coups de gueule".

Dans le premier texte, Pardonner, Jankélévitch s'insurge contre l'idée de pardon. 25 ans après la fin de la guerre il constate que la plupart des bourreaux et ceux qui ont soutenu le hitlérisme n'ont jamais été inquiétés, pour les raisons les plus diverses. Au moment de la sortie de ce livre il y a une impunité déjà bien établie définitivement.

Certains criminels, comme Mengele ou Barbie vivaient tranquillement à l'étranger. La totalité des Allemands, même s'ils ne s'étaient pas directement impliqués dans les crimes, ils étaient parfaitement au courant de la politique de dé-judaïsation de l'Allemagne et de l'Europe : ils avaient écouté et acclamé les discours haineux de Hitler.

Et maintenant, au XXIème siècle ? Les vrais bourreaux de l'époque sont quasiment tous déjà morts. Mais il reste encore quelques descendants notables des nazis qui insistent dans l'innocence et les bonnes intentions de leurs parents : Edda Goering ou Gudrun Himmler. Sauf quelques exceptions, les familles de Reinhard Heidrich ou Rudof Höss. Gudrun Himmler a, pendant toute sa vie, oeuvré pour la protection des bourreaux et a participé à la vie des groupuscules néo-nazis.

L'Allemagne fait beaucoup d'efforts pour informer le peuple allemand de ce qui a été cette époque sombre. On peut penser que maintenant, plusieurs décennies après la fin de la guerre, il pourra avoir non un pardon aux Allemands de l'époque mais au moins un apaisement avec les Allemands de nos temps.

Le deuxième texte, "Dans l'honneur et la dignité" a écrit en 1948, juste après la fin de la guerre et à un moment où l'épuration en France diminuait son activité. Jankélévitch dénonce une épuration plus que partielle n'atteignant pas ceux qui méritaient vraiment d'être inquiétés. Selon Jankélévitch, il s'agit d'une certaine bourgeoisie, des fonctionnaires, magistrats ou des intellectuels qui ont bien vécu pendant l'Occupation et dont beaucoup ont partagé la vie sociale de l'occupant. Certains étaient trop visibles pour ne pas être inquiétés : Robert Brasillach, par exemple. D'autres avaient de très bons avocats. Mais on voit bien dans les documentaires que la plupart des épurations, surtout celles publiques, concernaient des personnes des classes inférieures telles les femmes qui avaient couché avec des Allemands (comme si elles étaient les seules).

Finalement, c'est un livre intéressant qui montre ce qui était à des années proches de la fin de la guerre et qui suggère une réflexion sur où on en est actuellement.

On peut faire abstraction de la colère, justifiée de Jankélévitch. Il ne fait pas des efforts pour la cacher.





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Voici une réflexion originale. La colère de la situation ne recouvre pas la logique du raisonnement. S'indigner de ce que l'on accorde un pardon, devient nécessaire et justifié face à la monstruosité et la grandeur du crime inqualifiable et imprescriptible et sa tentative de le plonger dans l'oubli pour dissoudre « le remord latent ».
Pourquoi pardonner, pourquoi passer à autre chose quand la blessure est sans cesse ravivée ?
A qui pardonne-t-on ? Qu'est-ce qu'on pardonne ?
Revenir à l'essence même du crime contre l'humanité montre l'absurdité du pardon : « le pardon est mort dans les camps de la mort ».
Encore faudrait-il, et cela est logique, demander pardon, il faut que le pardon est était demandé. D'autant qu'en réfléchissant sur les conditions d'un pardon, il faudrait pour éviter qu'il ne soit un mot vide, qu'il y est une volonté d'être pardonnée. Or, dans cette période post-criminelle, les responsables ne se sentent pas vraiment concernés et le système de pensées (la métaphysique dominante) semble demeurer. Pourquoi serait-ce aux victimes de faire le premier pas ?







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Un ensemble de textes écrits par Jankelevitch au lendemain de la guerre, puis 25 ans plus tard au moment où se posait la question de la prescription des crimes commis pendant la seconde guerre mondiale. le texte laisse transparaître une colère qui désarçonne un peu le lecteur qui peut s'attendre à une réflexion plus philosophique. Mais c'est précisément ce qui en fait la force. C'est un texte avant tout de révolte face à ceux qui prétendent se faire les garants de la raison, et invitent à la tempérance. Au regard de la gravité indicible des événements en question, Jankelevitch abandonne tout intellectualisme, pour adopter la seule attitude raisonnable : l'indignation.

Le texte est aussi assez frappant sur la perception de la période de l'Occupation, il en donne à la fois une vision beaucoup plus prosaïque, et met en avant la différence tranchée entre ceux qui étaient persécutés et la majorité des personnes qui finalement oubliaient presque la nature du régime en place.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Qu'un peuple aussi débonnaire ait pu devenir ce peuple de chiens enragés, voilà un sujet inépuisable de perplexité et de stupéfaction. On nous reprochera de comparer ces malfaiteurs à des chiens? Je l'avoue en effet : la comparaison est injurieuse pour les chiens. Des chiens n'auraient pas inventé les fours crématoires, ni pensé à faire des piqûres de phénol dans le coeur des petits enfants...
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incipit :
On entend parfois dire que les déportés, les Juifs, les résistants commencent à fatiguer leurs contemporains en évoquant trop souvent Auschwitz ou Oradour. Nos contemporains, paraît-il, en ont assez. Ils voudraient bien qu'on parlât d'autre chose... Les survivants du massacre sont sur ce point d'un autre avis. Nous nous permettrons donc, dans le présent écrit, de contribuer à la lassitude de ceux que tant d'horribles souvenirs dérangent.
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Le pardon ? Mais nous ont-ils jamais demandé pardon ? C'est la détresse et c'est la déréliction du coupable qui seules donneraient un sens et une raison d'être au pardon. Quand le coupable est gras, bien nourri, prospère, enrichi par le "miracle économique", le pardon est une sinistre plaisanterie. Non, le pardon n'est pas fait pour les porcs et pour leurs truies. Le pardon est mort dans les camps de la mort.
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En outre il y a quelque chose de choquant à voir les anciens inciviques, les hommes les plus frivoles et les plus égoïstes, ceux qui n’ont ni souffert ni lutté, nous recommander l’oubli des offenses ; on invoque le devoir de charité pour prêcher aux victimes un pardon que les bourreaux eux-mêmes ne leur ont jamais demandé.
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Les morts dépendent entièrement de notre fidélité...
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« L'esprit de résistance » de Vladimir Jankélévitch, c'est à lire chez Albin Michel.
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