La pauvre femme était ahurie et ne savait si elle devait rester ou fuir. Marthe parut : le charivari cessa.
Elle était charmante avec son costume qu’elle avait elle-même découpé dans des moires et des soies à forfait. Une cuirasse rose, couturée de fausses perles, une cuirasse d’un rose exquis, de ce rose faiblissant et comme expiré des étoffes du Levant, serrait ses hanches mal contenues dans leur prison de soie ; avec son casque de cheveux opulemment roux ; ses lèvres qui titillaient, humides, voraces, rouges, elle enchantait, irrésistiblement séduisante !
Les deux plus intrépides hurleurs, qui se répondaient de l’orchestre au paradis, avaient cessé leurs cris : « anneau brisé, la sûreté des clefs, cinq centimes, un sou ! orgeat, limonade, bière ! » Soutenue par le souffleur et par Ginginet, Marthe fut applaudie à outrance.
« Achevé d’imprimer à Bruxelles pour Jean Gay, éditeur, le douzième jour de septembre 1876, par les soins de Félix Callewaert, père, imprimeur », ce livre a été mis en vente, le 1er octobre suivant à Bruxelles.
Vers le milieu du mois d’août de la même année, je me trouvais, dans cette ville en train de surveiller l’impression de Marthe, lorsque j’appris que M. de Goncourt se proposait de faire paraître un roman dont le sujet pouvait ressembler au mien : la Fille Élisa. J’ajouterai que les bruits annonçant l’apparition de ce livre pour le 1er novembre 1876 étaient faux, puisque la Fille Élisa n’a été mise en vente que le 20 mars 1877, à Paris.
Quoi qu’il en fût, j’eus peur d’être devancé et, hâtant la toilette imprimée de Marthe, je fis inscrire, à sa dernière page, l’acte de naissance mentionné plus haut.
Ce volume, le premier roman que j’ai écrit, a été épuisé en quelques jours. Le prix élevé qu’il a rapidement atteint n’en permet plus l’achat qu’aux amateurs de livres rares. M. Derveaux a pensé que les personnes qui avaient voulu s’intéresser aux Sœurs Vatard seraient peut-être satisfaites de pouvoir se procurer aisément ce roman naturaliste du même auteur. Tel est le motif qui a décidé l’édition française de Marthe.
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