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EAN : 9782253027416
Le Livre de Poche (31/08/1991)
3.97/5   50 notes
Résumé :
Voici l'épopée véridique du Chemin de Fer français à travers l'histoire d'une famille, celle d'Henri Vincenot : son grand-père était mécanicien de route, son père dessinateur-projeteur de la Voie, et lui-même a travaillé à la Compagnie P.L.M., avant de collaborer à la Vie du Rail. Henri Vincenot, dans ses souvenirs, fait revivre les travaux, les joies et les drames familiers de ce monde du rail, où la locomotive était un monstre sacré que, tout enfant, au sortir de ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
J'ai l'impression de voir Jean Gabin, Seigneur d'une locomotive 241, La Bête humaine, "Gueule Noire" ( mécanicien-conducteur ), lunettes sur le front, en train de gueuler, car les Gueules Noires, Seigneurs des grosses et belles bouzines A VAPEUR (les électriques sont des boîtes à sardines... Eh bien...
les Gueules Noires, ça gueule ;
les Gueules Noires, c'est toujours de mauvais poil ;
les Gueules Noires, ce sont des Seigneurs ;
les Gueules Noires, ils sont responsables, depuis 1850, depuis la Crampton, d'une énoooorme charge de traction ;
les Gueules Noires ont révolutionné le transport ;
les Gueules Noires ont le visage imprégné de suie, ils ont leur Chaudron, leur machine imprégnée dans le ventre, dans le sang ;
les Gueules Noires ont leurs idoles : Félicité de Lamennais, les Saint-Simoniens, et les Compagnons du Devoir ;
les Gueules Noires sont un clan dans le clan : ce sont les tractionnaires, les Rouges qui font grève, alors que les chieurs d'encre des bureaux de la compagnie sont des Jaunes, qui veulent aller bosser ;
les Gueules Noires, Henri Vincenot, arrière petit-fils, et petit-fils de Gueules Noires, il connaît ;
même qu'il a aussi cinq oncles Gueules Noires du prestigieux Paris-Lyon-Marseille !
Les compagnies de cheminots, dans les années 30, forment de grandes familles, avec leur langage, leurs syndicats, leur communauté, leurs quartiers, leur médecin, leur sécurité sociale, leur retraite, leurs coin de pêche à la retraite... Et surtout leurs discussions politiques familiales épiques de Gueules Noires, contre les planqués du « Central » qui s'en mettent plein les poches. Les Gueules Noires ont l'espérance de l'avènement du Front Populaire, discutent sur le viol de la Voie par les autorails, les Étrangers ( étrangers au chemin de fer : passagers, et tous les « civils » ) ; les Gueules Noires sont aussi les socialistes de la vapeur contre les capitalistes de la route qui leur volent leur fret, et enfin, ils s'insurgent contre l'avènement impensable de l'électrique !

Toute cette imprégnation culturelle d'Henri Vincenot, et de son copain Marcel dont le père est mort écrasé entre deux tampons pendant qu'il attelait deux wagons, est racontée avec truculence, et me rappelle les moments où mon Grand-Père m'emmenait voir Mon'Onc Jules et ses 16 enfants, ou Ma Tante Juliette, dont l'étable à cochons chauffait la chambre à coucher mitoyenne ; c'était une culture paysanne parallèle à la culture cheminote, où l'on jouait à la coinchée, à la belote avec le dix de der, ou les dominos, avec « la cat blanche est bonne à souris », avec « un coup d'cid' », ( c'est la Normandie, tandis qu'Henri Vincenot était à Dijon ), sans compter les vacances passées chez Eul Pé C. ou Eul Pé P., où je me régalais de traire la vac' manuellement, enfourcher les bottes de paille sur la charrette, ou tourner la baratte à beurre...

Parallèlement à ça, Henri raconte sa propre histoire, ses amours, véridiques ou romancés, histoire influencée, bien sûr, par la pression familiale, dont il partage la passion... Et à 55 ans, il trouve enfin, avec la retraite, la merveilleuse sensation d'être le propre chef de sa vie, et découvrir les « civils » que sa condition de cheminot lui avait cachés !

Notre fils nous avait signalé qu'une de ses voisines mettait des livres à la poubelle ; j'en ai récupéré quelques uns, dont celui de Vincenot, et bien que mon circuit de trains Jouef occupait toute la grande table de mon Grand Père, je n'y connaissais rien au monde des cheminots... mais je me rappelais ce que je considère comme son chef d'oeuvre : « La billebaude », auquel je me réfère souvent comme un modèle écologique :)
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Littérature ferroviaire.

Vincenot nous délivre le récit de ses souvenirs d'enfant et d'homme. Enfant grandissant au sein de l'univers ferroviaire et se construisant en tant qu'homme au sein de cette confrérie. Son grand-père, son père, ses oncles sont tous de loyaux cheminots. Ils sont de cette coterie, de cette matrice au sein des motrices qui forge les hommes et leurs vies et où la fraternité n'est pas un vain mot. Il y a des divergences, des spécialisations dont Vincenot fait le récit avec acuité et délice. ll y a l'avènement de l'électricité à une époque où les trains sont à vapeur. Tout le chamboulement que cela implique, la réorganisation du travail, la transformation de la ville et la désertification des campagnes. Il y a les amours de Vincenot, son entrée à la société PLM qui deviendra la SNCF. Il y a les oppositions syndicales, les impérities des huiles. On se dit que rien n'a vraiment changé, du moins pas en profondeur. Vincenot n'est pas ici le chantre de la Bourgogne comme dans ses autres ouvrages. Il nous donne une tranche de vie, de sa vie à une époque où l'honneur, l'amour du travail bien fait, la parole donnée étaient les valeurs quotidiennes de l'honnête homme. Je ne conseillerai pas ce livre pour appréhender et apprécier l'oeuvre du maître. Mémoires d'un enfant du rail est plus personnel que ses ouvrages plus connus. Il n'en constitue pas moins pour le passionné un élément de l'univers de Vincenot dont j'ai toujours un grand plaisir à découvrir des éléments.
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Un livre indispensable à qui veut comprendre l'âme des hommes du Rail.... A qui s'intéresse au Chemin de Fer qui a tant contribué à la prospérité de notre pays.
L'avènement du chemin de fer a façonné les villes et donné naissances à une catégorie de travailleurs bien attachants: les cheminots.
Vincenot était l'un d'eux, et ses talents de conteur nous font vivre le rail et les cheminots comme peu de gens savent le faire.
Un livre que je garde a portée de main, au sein de ma bibliothèque ferroviaire.
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Enfance, corporatisme, découvertes et syndicalisme se confrontent, se chevauchent.

Bouleversements sociaux, affrontements des rouges contre les jaunes, les roulants et les bureaucrates.

Fierté et passions se mêlent à l'enfance et s'aiguisent aux regards de cette jeunesse en découverte d'un inconnu plein d'incertitudes et de féerie, la vapeur et l'électrisation.

Chapitres à découvrir derrière ce Rempart de la Miséricorde où tant de passions grandirent et se réalisèrent.
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D'abord, c'est Henri Vincenot, un Bourguignon bien de chez moi, et qui traduit si bien mes racines profondes (Même si j'ai quitté la région de puis bien des années).
Donc je suis un inconditionnel, on l'aura compris.
Et ici encore, sans être dans le terroir pur et dur, on visite une époque, une évolution majeure des générations qui nous ont précédé, donc de notre civilisation occidentale.
C'est écrit avec le même sourire un peu espiègle que Vincenot savait afficher sur les plateaux de télévision, et avec le sérieux et la culture, la mémoire du monde qui le caractérisait.
Après tout cela, que dirait-on si je ne le recommandais pas ? Donc allez-y, vous y apprendrez nécessairement quelque chose, en plus de passer un bon moment.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je n'aimais pas Zola, dont j'avais lu des morceaux choisis à la bibliothèque de l'école. Et je ne l'aimais pas parce qu'il se complaisait à ne voir, dans la vie des hommes, que des choses sales, répugnantes, affligeantes, et je pensais qu'il exagérait, qu'il poussait au noir, maladivement, par une sorte de délectation morbide de grand bourgeois dégénéré ; mais franchement, devant ce spectacle, je trouvais qu'il était bien au dessous de la réalité. D'ailleurs, dans "La bête humaine", il ne parle même pas des gratte-tubes ( 1 ). Et c'est bien mieux ainsi, pensai-je, car il n'y a pas de quoi être fier ! Ah, si Marcel Dulot était là, il penserait tout de suite à inventer le ramonage automatique.

NDL ( 1 ) : Les gratte-tubes sont des employés des Chemins de Fer qui ramonent tous les tuyaux des locomotives à vapeur, ils sont "noirs comme des corbeaux, ficelés, saucissonnés, cuirassés de vêtements superposés, masqués comme des Touaregs et chaussés de galoches ; ils sont juchés sur les tabliers des machines et enfilent, entre les fameux tubes, de longs ringards pour détacher les scories.
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Certes, il y avait des nôtres qui approuvaient l'autorail, ils étaient très rares mais ils admettaient qu'il fallait vivre avec son temps, que le trafic des voyageurs de certaines petites lignes ne justifiait pas la mise en marche d'un convoi noble remorqué par une locomotive, qu'il était même révoltant de mobiliser pour si peu de chose la Sainte Trinité composée du seigneur, de son compagnon-chauffeur, et de Sa Majesté le Chaudron.

NDL : on est dans les années 30. La Sainte Trinité était le seigneur, le conducteur-mécanicien, "gueule noire" toujours de mauvais poil ( pensons à Jean Gabin dans La Bête Humaine ),
2 - le chauffeur qui enfourne le charbon et surveille l'eau, toujours d'accord avec son seigneur, il y a intérêt ;
3- Sa Majesté le Chaudron : la bouzine, la locomotive A VAPEUR uniquement, s'il vous plaît, une Crampton en 1850, une Pacific après, puis la révolution, la lourde et puissante Mountain que toutes les gueules noires veulent conduire, sur la voie royale, le P-L-M !
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- Non, ce n'est pas une crise de sous-consommation, mais une crise de surproduction. Le capitalisme généralise l'emploi de la machine qui chasse l'homme et surproduit. Il faut juguler la mécanisation excessive qui nous vient d'Amérique, redonner à l'homme sa place dans la production et de ce fait ralentir cette production pour la proportionner aux besoins naturels de l'homme, ensuite stimuler et sophistiquer les besoins de l'homme par des moyens pervers et néfastes comme cette odieuse " publicité " (qu'on appelait alors " la réclame " ).
Les premiers renchérissaient : - Ne refusons pas l'abondance, fille du progrès, mais distribuons-la mieux. Les grands moyens de production sont entre les mains et au service du capital, voilà pourquoi ils ne profitent pas au peuple. Que le peuple prenne en main ces grand moyens de production, et qu'il les gère au bénéfice de tous, alors qu'aujourd'hui ils ne profitent qu'à certains !
.../... - ... Ils n'arriveront à rien. Il faut s'unir, tous, et dans la dignité professionnelle, mais il y a là-dedans une bande de gueulards arrivistes, des grenouillards, des politicards....
Et il revenait à son idée :
- Pourtant c'est dans le syndicalisme qu'est la vérité, on ne m'ôtera pas ça de la tête.
Mais l'analyse que faisait mon grand-père était singulière ; comme beaucoup de gueules noires, il était d'origine compagnonnique, et lorsqu'il prononçait le mot " syndicalisme " il voulait parler de la défense du métier, de l'amélioration collective de l'outil, de la recherche unanime de la perfection technique, de l'amélioration de l'homme par la rigueur, la discipline, la conscience professionnelle et la fraternité, et non de la lutte entre les classes sociales pour le confort matériel et l'augmentation des salaires. ...:... Il jugeait un homme sur la qualité de son oeuvre, et non sur les avantages qu'il avait pu en tirer. ...:...
" La révolution, disait mon grand-père, c'est faire tout de suite avec coups, plaies, bosses et sang, ce qui de toute façon serait arrivé tout seul par la force des choses. " Et M. Paulin, le socialiste idéaliste de la grande époque, ce cher ingénieur, paraphrasant Shaw, disait : " Les gens Intelligents s'adaptent à la conjoncture, les imbéciles veulent adapter à eux cette conjoncture, c'est pourquoi les révolutions ont toujours été faites par les imbéciles. "
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Le Louis, ainsi que ma grand-mère appelait son homme, était à sa trente-sixième " annuité ", comme on disait, c'est à dire que depuis trente-six ans il cotisait à cette unique et fameuse Caisse autonome des Retraites des Employés de Chemins de Fer qui, depuis 1850, fonctionnait comme une horloge jurassienne, et depuis tantôt un siècle rendait jaloux à crever tous les autres salariés de France et de Navarre.
Dans quatre ans, à cinquante-cinq ans pile, il allait pouvoir partir en retraite, sorte de merveilleuse récompense honnêtement attendue mais qui allait, toutefois, l'obliger à quitter cette maisonnette où, par un beau jour d'octobre 1887, il avait amené sa Marie, toute jeune mariée, et où leur trois enfants étaient nés, mes deux oncles et ma mère.
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- Mille nuits et deux échelles! ajouta-t-il. Il voulait dire par là qu'il n'avait eu dans ces douze ans qu'un seul avancement, qui l'avait fait passer de l'échelle 3 à l'échelle 5.
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Videos de Henri Vincenot (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Henri Vincenot
23 juin 1989 1125 vues 01h 22min 21s
Pour cette 676 ème émission, Bernard Pivot a choisi sept invités pour nous inciter à lire quelques romans français et étrangers pendant la période des grandes vacances: - romans anglais, avec Frédéric FERNEY (journaliste, proposant "Le négociateur" de Frédéric Forsythe), et Auberon WAUGH (fils du romancier britannique Evelyn Waugh et romancier lui même, pour "La fin d'une époque" d'Evelyn Waugh et "Bagages enregistrés" d'Aauberon Waugh) - un roman espagnol, avec Olivier ROLIN (pour "La joyeuse bande d'Afzavara" de Manuel Vasquez Montalban) - romans des Etats Unis, avec Philippe LABRO (qui présentent "Dalva" de Jim Morrison et "Privilège" d'Eduard Stenard) et Michaël Korda (pour son roman "La succession Bannerman") - -et des romans français, avec Félicien MARCEAU (pour son dernier titre "Un oiseau dans le ciel") et Claudine VINCENOT-GUIHENEUF (fille d'Henri Vincenot qui a préfacé un ouvrage inédit de son père "Le livre de raison de Claude Bourguignon" et qui conseille la biographie de Jean Louis Pierre intitulée "Vincenot") - Claudine Vincenot-Guiheneuf parle longuement de son père (avec un extrait d' Apostrophes de 1978, où Henri Vincenot parle de son roman "La billebaude"), Philippe LABRO évoque la biographie de Jackie Kennedy Onassis, Michaël Korda (auteur et éditeur) que Bernard Pivot présente comme l'observateur privilégié de la jet society new yorkaise, raconte le sujet de son livre (la vie et la mort d'un milliardaire américain) et exprime son plaisir d'écrire, lui qui est éditeur depuis plus de trente ans; Frédéric Forney présente Frederic FORSYTHE, auteur de best sellers qui adore "fabriquer des histoires" ("Le négociateur" se passe dans un futur proche au cours d'une crise pétrolière menaçant les grandes puissances), tandis que Philippe Labro vante deux écrivains américains mal connus en Europe. Puis Bernard Pivot laisse la parole à Auberon WAUGH en lui confiant: "Après Shakespeare, c'est votre père que j'aurais aimé interviewé" (l'écrivain britannique en profite pour raconter de nombreuses anecdotes sur son père qu'il admirait et redoutait) , puis c'est au tour de Félicien MARCEAU d' expliquer le sujet de son dernier livre, et enfin à Olivier Rolin de disserter sur le roman de Montalban.
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